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30/06/2021 | FRANCE | N°20PA00810

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 30 juin 2021, 20PA00810


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme E... F... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 et de condamner l'Etat au paiement des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1801622/1-1 du 8 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme E... F... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu à laquelle ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 et de condamner l'Etat au paiement des intérêts moratoires prévus à l'article L. 208 du livre des procédures fiscales.

Par un jugement n° 1801622/1-1 du 8 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 3 mars et 10 septembre 2020, M. et Mme F..., représentés par Me A... D..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 8 janvier 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 12 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le bénéfice de la promesse de cession de titres n'était pas lié à la qualité de dirigeant de M. F... ni à un engagement de sa part à ce titre, mais à sa qualité d'investisseur et au risque pris à ce titre ;

- il convient également de tenir compte de l'indemnité d'immobilisation ;

- aucune convention de partage de plus-value n'est intervenue ;

- la valorisation des actions promises était conditionnelle et aléatoire ;

- le gain réalisé dépendait en tout ou partie des performances économiques de l'entreprise ;

- le taux de rendement interne ne dépend pas des fonctions de dirigeant ;

- les conditions restrictives de conversion des obligations n'assuraient pas d'avantages aux managers ;

- subsidiairement, seule une partie du gain ne pourrait être regardée comme se rattachant à l'influence qu'a pu avoir le dirigeant sur le taux de rendement interne, l'autre partie n'étant rattachable qu'à sa qualité d'investisseur.

Par un mémoire en défense enregistré le 5 août 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. et Mme F... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,

- et les observations de Me B..., substituant Me D..., représentant M. et

Mme F....

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre d'une opération d'acquisition avec effet de levier du groupe Brunet, initiée en 2006 via la société Vitéole, M. E... F..., salarié dirigeant du groupe, a réalisé une plus-value de cession des titres qu'il détenait de la société Vitéole, d'un montant de

5 123 430 euros. Estimant que le gain réalisé à l'occasion de la cession de celles de ces actions qui lui avaient été attribuées par l'exercice d'une option d'achat accordée le 26 juin 2007 relevait du régime des traitements et salaires, l'administration a, par proposition de rectification du 19 décembre 2014, rectifié les bases d'imposition des requérants à raison de cette requalification. M. et Mme F... relèvent appel du jugement du 8 janvier 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande en décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre de l'année 2011 à l'issue de cette procédure.

2. Aux termes de l'article 79 du code général des impôts : " Les traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères concourent à la formation du revenu global servant de base à l'impôt sur le revenu " et aux termes de l'article 82 du même code : " Pour la détermination des bases d'imposition, il est tenu compte du montant net des traitements, indemnités et émoluments, salaires, pensions et rentes viagères, ainsi que de tous les avantages en argent ou en nature accordés aux intéressés en sus des traitements, indemnités, émoluments, salaires, pensions et rentes viagères proprement dits ". Aux termes, enfin, de l'article 150-0 A de ce code : " Sous réserve des dispositions propres aux bénéfices industriels et commerciaux, aux bénéfices non commerciaux et aux bénéfices agricoles ainsi que des articles 150 UB et 150 UC, les gains nets retirés des cessions à titre onéreux, effectuées directement, par personne interposée ou par l'intermédiaire d'une fiducie, de valeurs mobilières, de droits sociaux, de titres mentionnés au 1° de l'article 118 et aux 6° et 7° de l'article 120, de droits portant sur ces valeurs, droits ou titres ou de titres représentatifs des mêmes valeurs, droits ou titres, sont soumis à l'impôt sur le revenu ".

3. Lorsque les associés d'une société conviennent que la plus-value qu'ils sont susceptibles de réaliser lors de la cession concomitante de leurs actions avec celles d'un autre associé sera partagée avec celui-ci, la fraction de cette plus-value qui revient à ce dernier ne constitue pas pour lui un gain net retiré de la cession à titre onéreux de ses valeurs mobilières, au sens du 1 du I de l'article 150-0 A du code général des impôts. Lorsque les sommes en cause trouvent essentiellement leur source dans l'exercice par l'intéressé de fonctions de dirigeant ou de salarié, elles constituent un avantage en argent, au sens de l'article 82 du même code.

4. Il résulte de l'instruction que, par une promesse unilatérale de vente d'actions conclue le 26 juin 2007, les sociétés Middle Market Fund II et BNP Paribas développement ont pris l'engagement de vendre à M. F..., ainsi qu'aux autres actionnaires de la société Vitéole signataires d'un pacte d'actionnaires en date du 9 novembre 2006, un certain nombre d'actions de la société Vitéole, réparties au prorata de leurs participations respectives au capital de la société, au prix de 1 euro par action, en contrepartie d'une indemnité d'immobilisation d'une somme totale de 29 500 euros répartie entre chacun des bénéficiaires, soit 5 000 euros pour le requérant. Il ressort des stipulations de cet acte, ainsi que de celles du pacte d'actionnaire, que le nombre d'actions transféré était déterminé par la plus-value réalisée par l'investisseur financier à la date de sa sortie totale, en fonction du taux de rendement interne constaté à la date de cet événement, selon un mécanisme de répartition préférentielle de la " super plus-value " le cas échéant réalisée. Un engagement de non concurrence de la part des intéressés était également prévu. Les dirigeants de l'entreprise étaient par ailleurs tenus à de nombreux engagements à l'égard des investisseurs financiers et ces accords prévoyaient, en cas de départ d'un dirigeant, une promesse unilatérale de vente à l'égard des autres actionnaires. La fraction de plus-value de cession que le requérant s'est vu attribuer en conséquence de la mise en oeuvre de cette promesse avait ainsi essentiellement la nature, et cela alors même que son montant dépendait des performances économiques de l'entreprise, non de la compensation d'un risque que celui-ci aurait couru en sa qualité d'investisseur, mais celle d'un versement, à caractère incitatif, destiné à rétribuer l'exercice effectif de ses fonctions de manager ainsi que les résultats et performances ayant résulté de cet engagement professionnel. La circonstance qu'aucun accord formel de répartition de la plus-value n'ait été conclu n'est pas de nature à priver le mécanisme mis en place de son caractère de partage de la plus-value au bénéfice des cadres dirigeants. Contrairement à ce que soutiennent les requérants, les circonstances qu'ils ont réalisé antérieurement un investissement personnel de 720 001 euros portant sur d'autres actions de la société Vitéole que celles objet de la promesse de vente du 26 juin 2007, investissement financé par un emprunt personnel et représentant plus de 80 % de leur patrimoine, que le taux de rendement interne ne dépendait pas exclusivement des performances des dirigeants du groupe, que la promesse était susceptible de bénéficier à leurs ayant droits et que le montant final du gain réalisé dépendait de la valeur des titres, ne permettent pas de regarder la plus-value réalisée sur les actions objet de la promesse comme ne résultant pas d'un avantage qui leur a été consenti en leur qualité de dirigeant. Il suit de là que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le gain consécutif à l'exercice de la promesse de vente, imposé dans la catégorie des traitements et salaires, constituait en tout ou partie un gain en capital.

5. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme E... F... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 9 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. C..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2021.

Le rapporteur,

F. C...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20PA00810


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00810
Date de la décision : 30/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : CABINET D'AVOCATS TEN FRANCE

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-30;20pa00810 ?
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