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24/06/2021 | FRANCE | N°20PA00734

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 24 juin 2021, 20PA00734


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au Tribunal administratif de Melun la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que les pénalités pour exercice d'une activité occulte et d'amendes pour détention de comptes à l'étranger non déclarés, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010, 2011 et 2012, qui procèdent d'une activité de vol en bande organisée réalisée à l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle par M. A... C..., alors qu'il

y exerçait des fonctions de contrôle en qualité d'agent principal des douanes.

Par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au Tribunal administratif de Melun la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que les pénalités pour exercice d'une activité occulte et d'amendes pour détention de comptes à l'étranger non déclarés, auxquels ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010, 2011 et 2012, qui procèdent d'une activité de vol en bande organisée réalisée à l'aéroport de Roissy-Charles de Gaulle par M. A... C..., alors qu'il y exerçait des fonctions de contrôle en qualité d'agent principal des douanes.

Par un jugement n° 1705672 du 9 janvier 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 26 février 2020 et le 8 janvier 2021, M. et Mme C... représentés par Me B..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1705672 du 9 janvier 2020 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de faire droit à sa demande ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. et Mme C... soutiennent que :

- le vol d'argent en liquide n'est pas une activité professionnelle et ne peut en conséquence faire l'objet d'une évaluation d'office ; en effet, le vol est un acte illicite mais n'est pas une activité illicite car il s'agit d'un acte ponctuel et isolé qui ne génère pas directement des revenus par lui-même ou par présomption légalement établie ; l'existence d'une activité suppose une volonté de tirer des revenus périodiques ;

- L'article 1649 quater-0 bis du code général des impôts créé un présomption d'activité uniquement pour les crimes et délits liés au trafic de stupéfiants, la législation sur les armes, les seuls crimes en matière de fausse monnaie et les seuls délits contre la réglementation sur les alcools et le tabac et la contrefaçon ; le vol d'argent en liquide n'entre pas dans le champ d'application de cet article et il n'y a par conséquent pas de présomption de revenu ;

- ainsi, l'irrégularité de la procédure de taxation d'office doit entraîner la décharge de l'ensemble des impositions ;

- à titre subsidiaire, M. C... a reconnu ne pas tenir de comptabilité uniquement pour l'année 2010, ce qui ne dispensait pas l'administration d'engager une procédure de vérification ; en tout état de cause, l'administration aurait dû mettre en oeuvre une procédure de vérification de sa comptabilité au moins en ce qui concerne l'année 2009 ;

- l'administration aurait dû diligenter une procédure d' examen de sa situation fiscale personnelle ;

- la proposition de rectification souffre d'un défaut patent de motivation ;

- l'administration n'a accompli aucune diligence pour déterminer le montant qu'il a reconnu avoir soustrait des valises en 2010 et avoir partagé avec ses complices douaniers ce qui était d'autant plus nécessaire qu'il avait avoué un vol d'environ 25 000 euros et non précisément de 25 000 euros ;

- s'agissant des amendes, l'administration ne l'a pas informé de l'origine de ses comptes en Andorre et a insuffisamment motivé le fondement de droit et de fait justifiant l'application des amendes ;

- l'amende pour détention de quatre comptes à l'étranger a été appliquée de manière discrétionnaire sans aucune justification et sans que les faits ne soient nullement établis par simple référence aux éléments contenus, notamment dans des procès-verbaux des 21 juin 2012 et 13 juillet 2012, dans la procédure judiciaire ; La détention de compte pendant cette période n'est pas une preuve, par simple analogie, de détention pour les années antérieures ;

- le vol n'étant pas une activité illicite, la majoration de 25 % prévue par les dispositions de l'article 158-7° du code général des impôts ne lui est pas applicable.

Par un mémoire en défense enregistré le 20 novembre 2020 et un mémoire enregistré le 18 février 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient qu'aucun des moyens présentés par M. et Mme C... n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., alors agent de constatation principal des douanes affecté à la surveillance du trafic de l'aéroport de Roissy, a reconnu, dans le cadre d'une procédure pénale instruite auprès du Tribunal de grande instance de Bobigny, avoir soustrait frauduleusement, et en bande organisée, des sommes d'argent en liquide cachées dans des valises appartenant à des voyageurs ciblés comme étant des trafiquants de drogue. Après avoir consulté les pièces de cette procédure, dans le cadre d'un droit de communication exercé le 14 novembre 2013 auprès du Tribunal de grande instance de Bobigny, l'administration fiscale a engagé une vérification de comptabilité de l'activité illicite exercée par M. C... au titre de l'année 2010 et a qualifié les sommes tirées de cette activité de bénéfices non commerciaux, dans une proposition de rectification du 10 décembre 2013. Par une seconde proposition de rectification du même jour, l'administration fiscale a engagé un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle de M. et Mme C..., dont les revenus imposables au titre de l'année 2010 ont été rehaussés du montant des bénéfices non commerciaux tirés de l'activité illicite du requérant, et une cotisation supplémentaire d'impôt sur le revenu et de contributions sociales a été mise à leur charge pour un montant de 15 462 euros au titre de l'année 2010. M. C... ayant reconnu en 2012 disposer de comptes non déclarés en Andorre, où l'argent frauduleux était déposé, des amendes pour omission de déclaration de comptes bancaires à l'étranger ont été mises à sa charge au titre des années 2010 à 2012, par une proposition de rectification du 23 septembre 2014. M. et Mme C... relèvent appel du jugement du 9 janvier 2020 du Tribunal administratif de Melun ayant rejeté leur demande de décharge totale de ces impositions.

Sur le bien-fondé du jugement :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

S'agissant de la régularité de la procédure de vérification et de la motivation des propositions de rectification :

2. Il y a lieu d'écarter par adoption des motifs retenus à juste titre par les premiers juges, les moyens tirés, en premier lieu de l'irrégularité de la procédure de vérification de comptabilité relative à l'année 2009 figurant aux points 2, 3 et 4, et en second lieu au moyen tiré de l'insuffisance de motivation des propositions de rectification du 10 décembre 2013 et du 16 avril 2014 présentés aux points 5, 6 et 7 du jugement.

S'agissant de la nature d'activité des actes de vol d'argent incriminés :

3. Aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus (...) ". Aux termes de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable : " Peuvent être évalués d'office : / (...) 2° Le bénéfice imposable des contribuables qui perçoivent des revenus non commerciaux ou des revenus assimilés lorsque la déclaration annuelle prévue à l'article 97 du code général des impôts n'a pas été déposée dans le délai légal ; / (...) Les dispositions de l'article L. 68 sont applicables dans les cas d'évaluation d'office prévus aux 1° et 2° ". Aux termes de l'article L. 68 du même livre, dans sa rédaction alors applicable : " La procédure de taxation d'office prévue aux 2° et 5° de l'article L. 66 n'est applicable que si le contribuable n'a pas régularisé sa situation dans les trente jours de la notification d'une mise en demeure. / Toutefois, il n'y a pas lieu de procéder à cette mise en demeure : / (...) 3° Si le contribuable ne s'est pas fait connaître d'un centre de formalités des entreprises ou du greffe du Tribunal de commerce ou s'il s'est livré à une activité illicite ".

4. M. C... fait valoir que, s'il a reconnu avoir soustrait à deux reprises des sommes d'argent en espèces contenues dans des valises transitant à l'aéroport de Roissy qu'il a partagées avec des collègues, ces opérations constituaient deux actes illicites, mais n'avaient pas la nature d'une activité. En effet, d'une part, ces actes sont restés ponctuels et isolés. Et, d'autre part, ils ne sont pas productifs de revenus par eux-mêmes et ne sont pas davantage justiciables des dispositions de l'article 1649 quater - 0 bis du code général des impôts qui créent une présomption de perception d'un revenu équivalent à la valeur des biens incriminés uniquement dans les matières qu'elles énumèrent à savoir les trafics de stupéfiants, de fausse monnaie, d'armes, d'alcools, de tabac et de contrefaçon limitativement.

5. Cependant, s'agissant de la soustraction d'espèces, la présomption de perception d'un revenu équivalent aux sommes appréhendées procède, contrairement aux trafics, du fait par

lui-même, à l'instar du vol, du détournement de fonds ou de l'escroquerie. L'administration n'a fait que prendre en compte la perception du revenu équivalente aux sommes soustraites. De plus, toute source de profit, autre que celle due essentiellement au hasard, fût-elle ponctuelle et isolée, est, sur le fondement de l'article 92 du code général des impôts, assimilée à un revenu tiré d'une activité. Le moyen tiré de ce qu'ayant réalisé des actes illicites, mais non constitutifs selon lui d'une activité illicite, les dispositions précitées du 3° de l'article L. 68 du livre des procédures fiscales ne lui auraient pas été applicables, viciant ainsi la procédure d'imposition, ne peut qu'être écarté.

S'agissant du caractère illicite de l'activité :

6. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. / Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la sixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due, lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce (...) ". Aux termes de l'article L. 176 du même livre : " Pour les taxes sur le chiffre d'affaires, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année suivant celle au cours de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts. / Par exception aux dispositions du premier alinéa, le droit de reprise de l'administration s'exerce jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle la taxe est devenue exigible conformément aux dispositions du 2 de l'article 269 du code général des impôts (...) lorsque le contribuable exerce une activité occulte. L'activité occulte est réputée exercée lorsque le contribuable n'a pas déposé dans le délai légal les déclarations qu'il était tenu de souscrire et soit n'a pas fait connaître son activité à un centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce, soit s'est livré à une activité illicite ".

7. Il résulte de l'instruction et de ce qui a été dit aux points 2, 3 et 4 qui précèdent, que M. C... a exercé en 2010 une activité illicite de vol en bande organisée et de dissimulation de capitaux à l'étranger, pour laquelle il ne s'est pas acquitté de ses obligations déclaratives, l'administration était, dès lors, fondée à évaluer d'office ses revenus.

S'agissant de l'absence de vérification de comptabilité de l'année 2009 :

8. Aucune disposition légale ou réglementaire n'imposait à l'administration d'étendre la procédure de vérification de comptabilité de l'activité de M. C... en 2010, qui aurait pu

elle-même être omise, à l'année 2009. S'il résulte de l'instruction que l'administration a diligenté une procédure d'examen de la situation fiscale personnelle de M. et Mme C... pour les années 2010 à 2012, ces derniers ne sont pas fondés à se plaindre de n'avoir fait l'objet, s'agissant de l'année 2009, que d'une simple procédure de contrôle sur pièces de leur déclaration de revenu.

9. Il résulte également de l'instruction que les garanties propres à chacune des procédures diligentées ont été respectées.

En ce qui concerne le bien-fondé des impositions :

S'agissant de la catégorie d'impositions :

10. Aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus (...) ". Il résulte de ce qui précède que les revenus des activités illicites, qui ne se rattachent à aucune catégorie de bénéfices ou de revenus identifiée, sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

11. Il résulte des dispositions précitées de l'article 92 du code général des impôts que les revenus provenant de l'activité illicite de M. C..., évoquée aux points 2 à 7, sont imposables dans la catégorie des bénéfices non commerciaux.

S'agissant de la charge de la preuve :

12. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ".

13. Les impositions litigieuses ayant été régulièrement établies selon la procédure d'évaluation d'office résultant de l'application combinée des dispositions, précitées au point 2, du 2° de l'article L. 73 du livre des procédures fiscales et du 3° de l'article L. 68 du même livre, M. et Mme C... ont la charge d'établir le caractère exagéré des impositions auxquelles ils ont été assujettis.

S'agissant de la base de l'assiette :

14. Il résulte des déclarations de M. C... lors des auditions judiciaires que les sommes qu'il a subtilisées sont, en 2009, 480 000 euros en liquide partagés à parts égales entre quatre collègues agents des douanes, soustraites à un voyageur se rendant d'Amsterdam à Mexico avec un transit à Roissy, et en 2010 un tiers de 75 000 euros, également prélevées en liquide, partagées avec deux collègues, contenues dans les bagages d'un voyageur transitant par l'aéroport de Roissy avec pour destination Punta Cana, en République dominicaine. L'administration, alors qu'elle aurait pu procéder à une évaluation extracomptable de ses recettes dans la mesure où les complices prétendaient avoir développé une aptitude à repérer les valises comportant un double-fond susceptibles de contenir les espèces convoitées, s'est bornée à inclure dans la base rehaussée uniquement le montant des sommes qu'il avait lui-même déclaré avoir volées soit 155 000 euros. Les requérants ne sont dès lors pas fondés à se plaindre, alors que l'administration aurait pu extrapoler le montant des recettes de l'activité illicite de M. C... qui ne se limitaient sans doute pas aux seuls deux vols incriminés s'agissant de l'année 2010 ayant fait l'objet d'une vérification de comptabilité, qu'elle aurait négligé de prendre en compte dans ses aveux à la police nationale sur le montant des sommes en cause, la préposition adverbiale " environ ", laquelle n'était pas nécessairement diminutive du produit de ces vols, et alors que les requérants supportent, en raison de la procédure en cause, la charge de la preuve du caractère exagéré des rehaussements proposés.

S'agissant du coefficient multiplicateur appliqué à l'assiette des contributions sociales :

15. Aux termes de l'article 158 du code général des impôts, dans sa version applicable au présent litige : " (...) 7. Le montant des revenus et charges énumérés ci-après, retenu pour le calcul de l'impôt selon les modalités prévues à l'article 197, est multiplié par 1,25. Ces dispositions s'appliquent : 1° Aux titulaires de revenus passibles de l'impôt sur le revenu, dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux ou des bénéfices non commerciaux ou des bénéfices agricoles, réalisés par des contribuables soumis à un régime réel d'imposition : a) Qui ne sont pas adhérents d'un centre de gestion ou association agréés définis aux articles 1649 quater C à 1649 quater H, à l'exclusion des membres d'un groupement ou d'une société mentionnés aux articles 8 à 8 quinquies et des conjoints exploitants agricoles de fonds séparés ou associés d'une même société ou groupement adhérant à l'un de ces organismes ; b) Ou qui ne font pas appel aux services d'un expert-comptable, d'une société membre de l'ordre ou d'une association de gestion et de comptabilité, autorisé à ce titre par l'administration fiscale et ayant conclu avec cette dernière une convention en application des articles 1649 quater L et 1649 quater M (...) ; 2° Aux revenus distribués mentionnés aux c à e de l'article 111, aux bénéfices ou revenus mentionnés à l'article 123 bis et aux revenus distribués mentionnés à l'article 109 résultant d'une rectification des résultats de la société distributrice ".

16. M. et Mme C... soutiennent que l'administration aurait appliqué à tort à l'assiette des contributions le coefficient multiplicateur de 1,25 prévu à l'article 158 du code général des impôts en méconnaissant les décisions n° 2016-610 QPC du 10 février 2017 et n° 2017-643/650 du 7 juillet 2017 par lesquelles le Conseil constitutionnel, tout en déclarant conforme à la Constitution les dispositions du 7° de l'article 158 du code général des impôts, a formulé une réserve d'interprétation au regard du principe d'égalité devant les charges publiques protégé par l'article 13 de la déclaration des droits de l'homme et du citoyen. Or, comme le lui ont opposé les premiers juges, cette réserve ne concerne pas la majoration visée au 1° de cet article que l'administration a, dès lors, appliquée à bon droit.

En ce qui concerne les amendes fiscales appliquées au titre des années 2009 à 2012 :

S'agissant de la procédure d'établissement des pénalités :

17. Aux termes, d'une part, de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. Les sanctions fiscales ne peuvent être prononcées avant l'expiration d'un délai de trente jours à compter de la notification du document par lequel l'administration a fait connaître au contribuable ou redevable concerné la sanction qu'elle se propose d'appliquer, les motifs de celle-ci et la possibilité dont dispose l'intéressé de présenter dans ce délai ses observations ".

18. Et d'autre part, aux termes des deuxièmes et troisièmes alinéas de l'article 1649 A du code général des impôts : " Les personnes physiques (...) sont tenues de déclarer, en même temps que leur déclaration de revenus ou de résultats, les références des comptes ouverts, utilisés ou clos à l'étranger. Les modalités d'application du présent alinéa sont fixées par décret. / Les sommes, titres ou valeurs transférés à l'étranger ou en provenance de l'étranger par l'intermédiaire de comptes non déclarés dans les conditions prévues au deuxième alinéa constituent, sauf preuve contraire, des revenus imposables. " et aux termes de l'article 1736 du code général des impôts dans sa rédaction applicable au litige : " (...) IV. - Les infractions aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 A et de l'article 1649 A bis sont passibles d'une amende de 1 500 euros par compte ou avance non déclaré. Toutefois, pour l'infraction aux dispositions du deuxième alinéa de l'article 1649 A, ce montant est porté à 10 000 euros par compte non déclaré lorsque l'obligation déclarative concerne un Etat ou un territoire qui n'a pas conclu avec la France une convention d'assistance administrative en vue de lutter contre la fraude et l'évasion fiscales permettant l'accès aux renseignements bancaires ".

19. Il résulte des propositions de rectification du 10 décembre 2013, du 16 avril et du 23 septembre 2014 par lesquelles le service a notifié les pénalités litigieuses au titre des années 2009 à 2012 qu'elles visent les dispositions applicables, mentionnées ci-dessus, et les numéros de pièces de la procédure judiciaire correspondant aux auditions pertinentes de M. C..., dont les propos sont repris dans la proposition de rectification du 23 septembre 2014, et précise que pour ne pas avoir déclaré quatre comptes détenus par M. et Mme C... en Andorre, deux comptes ouverts à la Andbank sous les références PC 834 et P 32052 et deux comptes ouverts dans les livres du Crédit Andorran aux numéros 24296 et 86556, les requérants étaient redevables d'une pénalité forfaitaire, par compte non déclaré, de 10 000 pour l'année 2009, soit 40 000 euros, et de 1 500 euros les années 2010, 2011 et 2012, soit 6 000 pour chacune de ces trois années, puisque l'État d'Andorre n'a conclu avec la France d'accord relatif à l'échange de renseignements en matière fiscale que le 22 septembre 2009 entré en vigueur le 22 décembre 2010. Cette motivation, dont la régularité ne dépend pas du bien-fondé des motifs, était suffisante pour permettre aux requérants de présenter utilement leurs observations sur le bien-fondé de ces amendes.

S'agissant du bien-fondé de l'établissement des pénalités :

20. Pour contester le bien-fondé des amendes mises à leur charge, M. et Mme C... soutiennent en vain que l'administration fiscale n'apporte aucun élément démontrant l'existence des quatre comptes, mentionnés au point 12, en 2011 et en 2012, alors que M. C... a reconnu en 2010 détenir ces comptes et qu'il ressort des informations communiquées par les autorités fiscales andorranes par deux lettres du 24 novembre 2015 et du 31 août 2016 que le premier compte au sein du Crédit Andorran a été ouvert le 26 mai 1998 et que l'ouverture des trois autres comptes date du 12 mai 2003. En outre, il résulte de l'instruction que, selon ces mêmes lettres, des mouvements de fonds ont démontré l'utilisation de ces quatre comptes sur chacune des années en litige, ce que M. C... a d'ailleurs confirmé lors de son audition du 21 juin 2012 à la direction générale de la police nationale en précisant que " le montant de ces comptes fluctue car j'ai des actions en bourse ". Dans de telles conditions, de tels mouvements doivent s'analyser comme des opérations de crédit ou de débit, et les quatre comptes bancaires détenus en Andorre par M. et Mme C... doivent être considérés comme ayant été utilisés au cours de chacune des années de la période litigieuse. Il s'ensuit que l'administration fiscale a pu à bon droit mettre à leur charge la somme de 6 000 euros au titre de chacune des années 2009 à 2012, en application des dispositions précitées du IV de l'article 1736 du code général des impôts.

21. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande. Leur requête, y compris les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, l'État n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, doit ainsi être rejetée.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur national des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- M. Platillero, président-assesseur,

- M. D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition du greffe le 24 juin 2021.

Le rapporteur,

B. D...Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

9

N° 20PA00734


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00734
Date de la décision : 24/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-08-01 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Plus-values des particuliers. Plus-values mobilières.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Bruno SIBILLI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : SELARL GOZLAN ET PARLANTI

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-24;20pa00734 ?
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