Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. F... D... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 18 mai 2020 en tant que, par cette décision, le préfet de police a refusé le renouvellement de la carte de résident valable du 12 janvier 2010 au 11 janvier 2020 dont il était titulaire, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de résident sur le fondement des dispositions de l'article L. 314-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de mettre à la charge de l'État une somme de 2 000 euros au titre des dispositions des articles L.761-1 du code de justice administrative.
Par un jugement n° 2010602/2-2 du 22 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police du 18 mai 2020, en tant qu'il refuse le renouvellement de la carte de résident, valable du 12 janvier 2010 au 11 janvier 2020, dont M. D... C... était titulaire, a enjoint au préfet de police de procéder dans un délai de deux mois au réexamen de la demande de renouvellement de la carte de résident sollicitée par M. D... C..., et a mis à la charge de l'État une somme de 1 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Procédure devant la cour :
Par une requête enregistrée le 21 janvier 2021, le préfet de police demande à la cour :
1°) d'annuler le jugement n° 2010602/2-2 du tribunal administratif de Paris du
22 décembre 2020 ;
2°) de rejeter la demande présentée par M. D... C....
Il soutient que :
- c'est à tort que les premiers juges ont estimé que les faits pour lesquels M. D... C... avait été condamné par le tribunal judiciaire de Paris le 17 janvier 2020 n'entraient pas dans le champ des dispositions de l'article 433-6 du code pénal pouvant donner lieu au retrait de la carte de résidence conformément aux dispositions de l'article R. 311-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- les autres moyens soulevés par M. D... C... devant les premiers juges ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 22 mars 2021, M. D... C..., représenté par Me E... A..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 000 euros soit mise à la charge de l'Etat sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il fait valoir que les moyens de la requête ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code pénal ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer les conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme B... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. D... C..., de nationalité colombienne, né le 22 juin 1966, est entré en France le 4 septembre 1994. Le 17 octobre 2019, il a demandé le renouvellement de la carte de résidence de dix ans, valable jusqu'au 11 janvier 2020, dont il était titulaire. Par un arrêté du
18 mai 2020, le préfet de police a prononcé le retrait du titre délivré le 12 janvier 2010 et lui a délivré un titre de séjour " vie privée et familiale ", valable un an et renouvelable. Le préfet de police relève appel du jugement du 22 décembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 18 mai 2020 en tant que, par cette décision, il a refusé de renouveler la carte de résident de M. D... C....
Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal administratif de Paris :
2. Aux termes de l'article R. 311-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile encore en vigueur à la date de la décision attaquée : " (...) II.- La carte de résident peut être retirée et remplacée de plein droit par une carte de séjour temporaire : / 1° Si l'étranger, titulaire d'une carte de résident, ne peut faire l'objet d'une mesure d'expulsion en application des articles L. 521-2 ou L. 521-3 du présent code et a été condamné de manière définitive sur le fondement des articles 433-3, 433-4, des deuxième à quatrième alinéas de l'article 433-5, du deuxième alinéa de l'article 433-5-1 ou de l'article 433-6 du code pénal (...) ". Aux termes de l'article 433-6 du code pénal : " Constitue une rébellion le fait d'opposer une résistance violente à une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public agissant, dans l'exercice de ses fonctions, pour l'exécution des lois, des ordres de l'autorité publique, des décisions ou mandats de justice ". Il résulte de ces dispositions que la carte de résident peut être retirée à un étranger qui a notamment commis l'infraction de rébellion à l'encontre d'une personne dépositaire de l'autorité publique ou chargée d'une mission de service public.
3. Il ressort des pièces du dossier qu'avant son échéance M. D... C... avait demandé le renouvellement de la carte de résident d'une durée de dix ans qui arrivait à expiration le 10 janvier 2020. La carte de résident étant renouvelable de plein droit conformément aux dispositions de l'article L. 314-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en dehors des hypothèses prévues par les dispositions des articles L. 314-5 ou L. 314-7 du même code, la décision du préfet du 18 mai 2020, qui n'a pas opposé de telles exceptions, doit être regardée comme valant retrait de la carte de résident renouvelée pour une durée de dix ans dont bénéficiait de plein droit M. D... C... à compter du 12 janvier 2020, alors même que le support matériel de ce titre n'avait pas été encore remis en mains propres à l'intéressé. Par suite, l'arrêté attaqué présente le caractère d'un retrait de la carte de résident qui avait été renouvelée de plein droit à l'expiration de celle qui l'avait précédée, remplacée par une carte de séjour temporaire conformément aux dispositions citées au point 2 du présent arrêt.
4. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du procès-verbal de placement de M. D... C... sous contrôle judiciaire par le juge des libertés et de la détention ainsi que de la réponse du substitut du procureur de la République près le tribunal judicaire de Paris aux services de la préfecture, que l'intéressé a été condamné le 14 janvier 2020 par le tribunal correctionnel de Paris à la peine de six mois d'emprisonnement assortie d'un sursis total avec mise à l'épreuve pendant deux ans, pour des faits commis le 17 juillet 2019, qualifiés par le juge pénal de menaces de mort prévus par l'article 222-17 alinéa 1 et 2 du code pénal, de violences suivies d'incapacité supérieure à huit jours par une personne étant ou ayant été conjoint, concubin ou partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité prévus par l'article 222-13 alinéa 14 du même code, et de violences sur personne dépositaire de l'autorité publique suivie d'incapacité n'excédant pas huit jours prévus par les articles 222-13 alinéa 16 et 132-80 du code pénal. La qualification juridique des faits ayant donné lieu à condamnation pénale relevant de la seule compétence du juge judiciaire dont le jugement était en l'espèce devenu définitif, le préfet ne pouvait requalifier les faits de violences sur personne dépositaire de l'autorité publique suivie d'incapacité inférieure ou égale à huit jours n'excédant pas huit jours pour lesquels M. D... C... avait été condamné, en faits de rébellion, incrimination différente prévue par l'article 433-6 du code pénal. Les faits pour lesquels M. D... C... a été condamné n'entrant pas dans le champ de ceux visés par l'article R. 311-15 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ils ne pouvaient légalement fonder le retrait de la carte de résident.
5. Il résulte de ce qui précède que c'est à bon droit que, pour annuler la décision contestée, les premiers juges ont considéré que M. D... C... n'avait pas été condamné par le tribunal correctionnel de Paris pour des faits prévus par l'article 433-6 du code pénal. Par suite, le préfet de police n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 18 mai 2020.
Sur les frais liés à l'instance :
6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. D... C... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête du préfet de police est rejetée.
Article 2 : L'Etat versera à M. D... C... une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. F... D... C....
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience publique du 18 mai 2021 à laquelle siégeaient :
- M. Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme B..., premier conseiller,
- Mme Mornet, premier conseiller,
Rendu public par mise à disposition au greffe le 15 juin 2021.
Le rapporteur,
M-D. B...Le président de la formation de jugement,
Ch. BERNIER
Le greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
1
N° 08PA04258
2
N° 21PA00370