La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/06/2021 | FRANCE | N°20PA01729

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 09 juin 2021, 20PA01729


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 22 octobre 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.

Par un jugemen

t n° 1925182/2-1 du 16 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa de...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 22 octobre 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, et d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 150 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1925182/2-1 du 16 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés le 15 juillet 2020 et le 28 avril 2021, Mme B..., représentée par Me A... D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1925182/2-1 du 16 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté contesté devant le tribunal ;

3°) d'enjoindre à l'administration de procéder au réexamen de sa situation, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans le mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'arrêté en litige est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'erreur de droit en ce qu'il méconnaît les dispositions du 2° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle entre dans le champ d'application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de la circulaire du 28 novembre 2012 ; elle est titulaire d'un contrat à durée indéterminée depuis le mois de juillet 2016 ;

- l'arrêté critiqué porte une atteinte disproportionnée à son droit à mener une vie privée familiale normale et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; si sa fille réside en Serbie, elle est majeure et indépendante et n'est pas dans un état de nécessité ; sa mère et son frère résident régulièrement en France ; l'état de santé de sa mère nécessite sa présence auprès d'elle ; dans ce cadre, elle devrait être admise de plein droit au séjour en application des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- cet arrêté est entaché d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense enregistré le 19 avril 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête et soutient que les moyens invoqués par Mme B... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 19 avril 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 5 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme E...,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,

- et les observations de Me D..., avocat de Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., née le 23 mai 1978, ressortissante serbe, est entrée en France en le 30 mars 2002, selon ses déclarations. Elle a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en application de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 22 octobre 2019, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Elle relève appel du jugement n° 1925182/2-1 du 16 juin 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté et à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Il ressort des pièces du dossier que Mme B... est née en France et y a résidé continument jusqu'en 1994, soit jusqu'à l'âge de seize ans, avant de quitter le territoire français pour résider, jusqu'en 2002, en Serbie, où est née sa fille en 1997. Il ressort également du dossier et notamment des pièces produites dans le cadre de la présente instance telles que des factures d'électricité, des factures téléphoniques, des relevés bancaires avec des mouvements, des documents afférents à la scolarité que sa fille a poursuivie en France, des documents de nature médicale et des bulletins de paie, que Mme B... justifie, à la date de l'arrêté critiqué, résider de manière habituelle en France depuis son retour le 30 mars 2002, soit à l'âge de vingt-quatre ans. Par ailleurs, l'intéressée, qui produit un contrat de travail à durée indéterminée, signé le 11 juillet 2016, en qualité d'employée de commerce sur un emploi de serveuse, ainsi que les bulletins de paie y afférents, démontre être insérée professionnellement en France. Elle n'est, en outre, pas dépourvue d'attaches familiales en France où résident régulièrement sa mère, son père étant à la date de l'arrêté contesté décédé, ainsi que son frère. Dans ces circonstances, et nonobstant la présence de sa fille dorénavant majeure et autonome, en Serbie, le préfet de police n'a pu, sans commettre d'erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'arrêté critiqué sur la situation personnelle de Mme B..., rejeter sa demande d'admission au séjour. Il suit de là que Mme B... est fondée à demander l'annulation de cet arrêté.

3. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. L'annulation, pour le motif sus-indiqué, de l'arrêté du 22 octobre 2019 implique nécessairement que soit délivré à Mme B... un titre de séjour. Il y a lieu, dès lors, en application du second alinéa de l'article L. 911-1 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer ce titre de séjour dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. En revanche, il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat, partie perdante, le versement à Mme B... de la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1925182/2-1 du 16 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris ainsi que l'arrêté du 22 octobre 2019 du préfet de police sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme B... un titre de séjour dans le délai trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de Mme B... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié Mme C... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme E..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2021.

Le rapporteur,

S. E...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 20PA01729


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01729
Date de la décision : 09/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : BERNAILLE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-09;20pa01729 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award