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09/06/2021 | FRANCE | N°19PA03780

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 09 juin 2021, 19PA03780


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1802753/2-2 du 30 septembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a constaté un non-lieu à statuer à hauteur des sommes dégrevées en cours d'instance et rejeté le surplus de cette demande.

Procédure deva

nt la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 26 novembre 2019, 2 avril 202...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des contributions sociales auxquelles il a été assujetti au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Par un jugement n° 1802753/2-2 du 30 septembre 2019, le Tribunal administratif de Paris a constaté un non-lieu à statuer à hauteur des sommes dégrevées en cours d'instance et rejeté le surplus de cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 26 novembre 2019, 2 avril 2020, 8 décembre 2020 et 19 mai 2021, M. C..., représenté par Me A... B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 30 septembre 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige et en tout état de cause des pénalités pour manquement délibéré ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'administration conserve la charge de la preuve de l'existence et du montant des excédents de distribution ;

- elle n'apporte pas cette preuve ;

- l'article L. 48 du livre des procédures fiscales a été méconnu ;

- les dépenses doivent être taxées au titre de l'année où il a bénéficié de l'avantage correspondant ;

- les propositions de rectification des 18 décembre 2015 et 2 février 2016 sont insuffisamment motivées ;

- le manquement délibéré n'est pas établi ;

- le jugement attaqué n'est pas motivé à cet égard.

Par des mémoires en défense enregistrés les 25 mars 2020 et 12 mai 2021, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. E...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. La société AA Fineval qui exerce une activité de conseil pour les affaires et autres conseils de gestion et dont M. C... est le gérant majoritaire détenant 99,86 % des parts, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er avril 2011 au 31 mars 2015. A l'issue de ce contrôle, des revenus réputés distribués par la société ont été attribués à M. C... en sa qualité de dirigeant majoritaire et de maître de l'affaire conformément aux prescriptions du 1° de l'article 109-1 du code général des impôts. M. C... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et des cotisations sociales auxquelles il a été en conséquence assujetti au titre des années 2012, 2013 et 2014.

Sur la régularité du jugement :

2. Les premiers juges, qui n'étaient pas tenus de répondre à tous les arguments soulevés par le requérant à l'appui de ses moyens, ont statué sur les moyens qui leur ont été soumis, et notamment celui tiré de ce que le manquement délibéré n'était pas démontré. La circonstance, à la supposer établie, que les motifs retenus à cet égard par les premiers juges seraient insuffisants pour caractériser ledit manquement est sans influence sur la régularité du jugement.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. Aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dans sa rédaction applicable à la présente procédure : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ".

4. Il résulte de l'instruction que si les propositions de rectification adressées à M. C... le 18 décembre 2015, en ce qui concerne l'année 2012, et le 2 février 2016, en ce qui concerne les années 2013 et 2014, ne détaillaient pas les modalités de rehaussements des résultats sociaux à l'origine des revenus distribués attribués à M. C..., ces documents faisaient référence pour ce faire aux propositions de rectification qui avaient été adressées à la société AA Fineval, lesquelles avaient été adressées, le 18 décembre 2015 en ce qui concerne l'année 2012 et le 2 février 2016 en ce qui concerne les années 2013 et 2014, à ladite société, en la personne de son gérant M. C... lui-même, à l'adresse qui était également l'adresse personnelle de ce dernier. Il est constant que ces dernières propositions de rectification ont été reçues, des observations ayant été présentées en réponse aux rehaussements notifiés. M. C... doit en conséquence être regardé comme ayant été pleinement informé des motifs pour lesquels l'administration estimait devoir procéder au rehaussement des résultats de la société. Il a ainsi disposé de l'ensemble des informations lui permettant de contester utilement les impositions auxquelles il a été personnellement assujetti et n'a ainsi été privé d'aucune garantie.

5. Aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. Lorsqu'à un stade ultérieur de la procédure de rectification contradictoire l'administration modifie les rehaussements, pour tenir compte des observations et avis recueillis au cours de cette procédure, cette modification est portée par écrit à la connaissance du contribuable avant la mise en recouvrement, qui peut alors intervenir sans délai ".

6. M. C..., qui n'a pas fait à titre personnel l'objet d'un examen contradictoire de sa situation fiscale personnelle ou d'une vérification de comptabilité, ne saurait se prévaloir de la méconnaissance des dispositions précitées. Au surplus, et en tout état de cause, la circonstance que le montant mis en recouvrement ait été inférieur aux conséquences financières indiquées par le chef de brigade dans sa lettre du 3 octobre 2016 faisant suite au recours hiérarchique n'a privé le contribuable d'aucune garantie susceptible d'exercer une influence sur la décision d'imposition.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

7. Aux termes de l'article 109 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme revenus distribués : 1° Tous les bénéfices ou produits qui ne sont pas mis en réserve ou incorporés au capital (...) ".

8. Il est constant qu'une partie des frais d'avocats pris à sa charge par la société AA Fineval concerne la procédure pénale consécutive à la sanction de l'Autorité des marchés financiers prononcée le 20 décembre 2007 à l'encontre de son dirigeant, M. C..., pour des opérations de manipulation du cours d'une action. Aucun élément du dossier ne permet à la Cour d'identifier un lien quelconque entre ce qui était reproché à M. C... et l'activité de la société AA Fineval. Les frais correspondants doivent par suite être regardés comme ayant été engagés dans l'intérêt de M. C.... Il en est de même en ce qui concerne les frais d'avocats qui auraient été engagés pour effectuer des diligences en vue de l'anonymisation des condamnations personnelles de M. C..., de simples considérations abstraites sur la nécessité de défendre la réputation du dirigeant de la société ne permettant pas à la Cour d'apprécier la contrepartie concrète pour celle-ci des dépenses exposées. Par suite, c'est à bon droit que l'administration a réintégré dans le résultat de la société les charges ainsi indûment déduites.

9. Il résulte de l'instruction que l'administration a réintégré dans les résultats de la société AA Fineval des dépenses afférentes à divers voyages et déplacements qui, en l'absence de tout élément permettant d'en identifier la nature professionnelle, ont été regardées comme des dépenses personnelles de M. C.... Le requérant, qui a lui-même effectué ces voyages et déplacements, et qui est seul en mesure de le faire, ne produit aucun élément permettant d'identifier le caractère professionnel des voyages en cause, dont une grande partie ont eu lieu pendant les périodes de congés. De même aucun élément ne permet de rattacher les dépenses de cadeaux, qui en raison de leur nature peuvent avoir un caractère de dépense personnelle, à l'activité professionnelle de la société. Par suite, c'est également à bon droit que l'administration a réintégré dans les résultats de la société les charges ainsi indûment déduites.

10. M. C..., dirigeant majoritaire détenant 99,86 % des droits de la SARL AA Fineval et disposant de la signature sur les comptes bancaires détenus par la société doit être regardé comme étant le seul maître de l'affaire au titre de la période en litige. Il a pu ainsi être présumé comme ayant appréhendé les bénéfices distribués, et taxé de ce chef sur le fondement des dispositions précitées de l'article 109, 1-1° du code général des impôts.

11. Les revenus présumés distribués en application de l'article 109, 1-1° du code général des impôts sont réputés distribués à la date de la clôture de l'exercice au terme duquel leur existence a été constatée, sauf si le contribuable ou l'administration apportent des éléments de nature à établir que la distribution a été, en fait, soit postérieure, soit antérieure à cette date. À cet égard, la seule circonstance que le contribuable soit le maître de l'affaire n'est pas de nature à apporter une telle preuve.

12. En se bornant à faire valoir que certaines factures établies antérieurement au 31 décembre 2012 ou au 31 décembre 2013 ont été comptabilisées par la société AA Fineval avant ces dates, et en l'absence de tout élément permettant de constater la date de paiement effectif de ces factures par la société AA Fineval, M. C... n'établit pas que les distributions dont il a été le bénéficiaire ont été constatées à tort par le service à la date de la clôture des exercices concernés, soit respectivement le 31 mars 2013 et le 31 mars 2014. Il suit de là qu'il n'est pas fondé à soutenir que lesdites distributions ont été imposées à tort au titre, respectivement, des années 2013 et 2014 et qu'elles auraient dû être imposées au titre des années antérieures, le cas échéant prescrites.

Sur les pénalités :

13. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré ; (...). ".

14. Il résulte de tout ce qui a été dit précédemment que les dépenses dont l'administration a refusé la prise en compte n'avaient pas été engagées pour les besoins de l'exploitation de la société AA Fineval mais revêtaient un caractère personnel. M. C..., qui a personnellement bénéficié de ces dépenses représentant 57 % du chiffre d'affaires total en 2012, 61 % en 2013 et 69 % en 2014, et qui était dirigeant de la société AA Fineval ne pouvait ignorer le caractère non déductible des dépenses en cause. Il n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que c'est à tort que la majoration de 40 % pour manquement délibéré lui a été infligée.

15. Il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que le requérant demande au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. E..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2021.

Le rapporteur,

F. E...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19PA03780


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03780
Date de la décision : 09/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : GELIX BRUNO CONSEIL

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-09;19pa03780 ?
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