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09/06/2021 | FRANCE | N°19PA02723

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 09 juin 2021, 19PA02723


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de prononcer la décharge de la pénalité de 40 % mise à sa charge en raison du dépôt tardif de sa déclaration d'imposition à l'impôt sur le revenu de l'année 2014.

Par un jugement n° 1900172 du 11 juin 2019, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 août 2019, M. E..., représenté par Me A... C..., demande à la C

our :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 11 juin 2019 ;

2°...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... E... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie de prononcer la décharge de la pénalité de 40 % mise à sa charge en raison du dépôt tardif de sa déclaration d'imposition à l'impôt sur le revenu de l'année 2014.

Par un jugement n° 1900172 du 11 juin 2019, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 août 2019, M. E..., représenté par Me A... C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 11 juin 2019 ;

2°) de prononcer la décharge de la pénalité litigieuse.

Il soutient que :

- la mission exécutée en Nouvelle-Calédonie était ponctuelle et l'administration fiscale ne pouvait ignorer, à la date à laquelle elle lui a envoyé une mise en demeure de déposer une déclaration, qu'il ne résidait plus sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie ;

- il a toujours eu sa résidence fiscale en France où il a déposé ses déclarations de revenus des années en litige ;

- les stipulations de l'article 14-4 de la convention fiscale conclue entre la France et la Nouvelle-Calédonie prévoient que les rémunérations en cause ne sont taxables que dans le territoire dont le bénéficiaire est résident ; elle n'étaient par suite pas taxables en Nouvelle-Calédonie.

Par un mémoire en défense enregistré le 3 juin 2020, le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, représenté par la SCP Briard, conclut au rejet de la requête et à ce que soit mis à la charge de M. E... le versement de la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 16 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au

17 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

- la convention entre le Gouvernement de la République française et le Conseil de Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et Dépendances en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale, approuvée et publiée par la loi n° 83-676 du 26 juillet 1983 ;

- le code des impôts de Nouvelle-Calédonie ;

- le code de justice administrative dans sa version applicable en Nouvelle-Calédonie.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Dans le cadre d'un contrat de travail, M. E... a été recruté comme médecin et rémunéré par la Province Nord de Nouvelle-Calédonie pour la période qui a couru du 2 décembre 2013 au 30 juin 2014. A l'issue de cette période d'activité, il a quitté définitivement la Nouvelle-Calédonie. M. E... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande en décharge de la pénalité de 40 % qui a été mise à sa charge au titre de son imposition à l'impôt sur le revenu de l'année 2014 en Nouvelle-Calédonie.

Sur la qualité de résident fiscal :

2. Aux termes de l'article 47 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie : " Les personnes qui ont en Nouvelle-Calédonie leur domicile fiscal sont passibles de l'impôt sur le revenu en raison de l'ensemble de leurs revenus, sauf dispositions contraires des conventions ou accords relatifs aux doubles impositions. Celles dont le domicile fiscal est situé hors de la Nouvelle-Calédonie sont passibles de cet impôt en raison de leurs seuls revenus de source territoriale ". Aux termes de l'article 48 du même code : " Sont considérées comme ayant leur domicile fiscal en Nouvelle-Calédonie : / a) les personnes qui ont en Nouvelle-Calédonie leur foyer ou le lieu de leur séjour principal ; / b) celles qui exercent en Nouvelle-Calédonie une activité professionnelle salariée ou non, à moins qu'elles ne justifient que cette activité y est exercée à titre accessoire ; / c) celles qui ont en Nouvelle-Calédonie le centre de leurs intérêts économiques. (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que M. E... a exercé entre le 1er janvier et 30 juin 2014 en Nouvelle-Calédonie une activité professionnelle salariée qui ne présentait pas un caractère accessoire. Il s'ensuit que, en application des dispositions précitées des articles 47 et 48 du code des impôts de Nouvelle-Calédonie, il était en principe, pour l'année 2014, passible de l'impôt sur le revenu en Nouvelle-Calédonie à raison de l'ensemble de ses revenus, sauf disposition contraire de la convention susvisée entre le Gouvernement de la République Française et le Conseil de Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie et Dépendances en vue d'éviter les doubles impositions et de prévenir l'évasion fiscale.

4. Aux termes de l'article 4 de cette convention : " 1. Au sens de la présente convention, l'expression " résident d'un territoire " désigne toute personne qui, en vertu de la législation de ce territoire, est assujettie à l'impôt dans ce territoire, en raison de son domicile, de sa résidence, de son siège de direction ou de tout autre critère de nature analogue. Toutefois, cette expression ne comprend pas les personnes qui ne sont assujetties à l'impôt dans ce territoire que pour les revenus de sources situées dans ce territoire. /2. Lorsque, selon les dispositions du paragraphe 1, une personne physique est un résident de deux territoires, sa situation est réglée de la manière suivante : a) Cette personne est considérée comme un résident du territoire où elle dispose d'un foyer d'habitation permanent ; si elle dispose d'un foyer d'habitation permanent dans les deux territoires, elle est considérée comme un résident du territoire avec lequel ses liens personnels et économiques sont les plus étroits (centre des intérêts vitaux) ; b) Si le territoire où cette personne a le centre de ses intérêts vitaux ne peut pas être déterminé, ou si elle ne dispose d'un foyer d'habitation permanent dans aucun des territoires, elle est considérée comme un résident du territoire où elle séjourne de façon habituelle ; c) Si cette personne séjourne de façon habituelle dans les deux territoires ou si elle ne séjourne de façon habituelle dans aucun d'eux, les autorités compétentes des territoires tranchent la question d'un commun accord ". Aux termes de l'article 14 de ladite convention : " 4. (...) Les rémunérations, autres que les pensions, payées par l'Etat, une collectivité territoriale ou une personne morale de droit public à une personne physique ne sont imposables que dans le territoire dont le bénéficiaire est un résident (...) ".

5. Il résulte de l'instruction et notamment de l'avis d'imposition produit au dossier que M. E... a été assujetti à l'impôt sur le revenu au titre de l'année 2014 en métropole. A supposer qu'il puisse être regardé, de ce fait, comme résident des deux territoires au sens du paragraphe 1. de l'article 4 de la convention susvisée pour la période courant du 1er janvier au 30 juin 2014, et s'il est constant qu'il disposait en Nouvelle-Calédonie jusqu'au 30 juin 2014 d'un foyer d'habitation permanent, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment pas des seuls avis d'imposition 2013 et 2014 établis en métropole, qu'il y disposait au cours de ladite période d'un tel foyer. Aucune information n'étant fournie sur les liens personnels et économiques qu'il entretenait avec la métropole, il doit en outre être regardé comme ayant eu avec la Nouvelle-Calédonie, au cours de la période en cause, les liens personnels et économiques les plus étroits. Il doit par suite être regardé comme résident de la Nouvelle-Calédonie pendant cette période. Les rémunérations litigieuses, qui lui ont été versées par la Province Nord de la Nouvelle-Calédonie, étaient en conséquence imposables en Nouvelle-Calédonie.

Sur la pénalité de 40 % :

6. Aux termes des dispositions de l'article Lp 1053 du code des impôts : " Lorsqu'une personne physique ou morale ou une association tenue de souscrire une déclaration ou de présenter un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'un des impôts, droits, taxes, redevances ou sommes visés à l'article Lp 1052, s'abstient de souscrire cette déclaration ou de présenter cet acte dans les délais, le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement est assorti (...) d'une majoration de (...) 40 % lorsque le document n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure notifiée par pli recommandé d'avoir à le produire dans ce délai.(...) ".

7. Il résulte de l'instruction que le pli contenant la mise en demeure de déposer une déclaration de revenus au titre des revenus salariaux perçus en Nouvelle-Calédonie en 2014 a été envoyé à la seule adresse de M. E... connue des services fiscaux de Nouvelle-Calédonie, qui était l'adresse de l'employeur de l'intéressé. M. E... n'établit pas avoir communiqué aux services fiscaux de Nouvelle-Calédonie une autre adresse de correspondance personnelle que celle de son employeur. Il n'établit pas plus avoir, à la fin de sa mission, communiqué son changement d'adresse aux services fiscaux de Nouvelle-Calédonie. Il suit de là que la direction des services fiscaux de Nouvelle-Calédonie a pu régulièrement notifier à M. E... le 24 janvier 2017, date de vaine présentation du pli, la mise en demeure de déposer une déclaration au titre de ses revenus de l'année 2014 au lieu d'exercice de sa profession. Le moyen tiré de ce que, sa mission étant ponctuelle, l'administration fiscale ne pouvait ignorer, à la date à laquelle elle lui a envoyé une mise en demeure de déposer une déclaration, qu'il ne résidait plus sur le territoire de la Nouvelle-Calédonie, ne peut en conséquence qu'être écarté. Il en est de même, pour les motifs indiqués aux points 2. à 5., du moyen tiré de ce que la mise en demeure ne pouvait lui être adressée en Nouvelle-Calédonie dès lors qu'il avait en France sa résidence fiscale.

8. Il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge du requérant le versement de la somme que demande le gouvernement de la Nouvelle-Calédonie au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... E... et au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

Copie en sera adressée au Haut-commissaire de la république en Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. D..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 9 juin 2021.

Le rapporteur,

F. D...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la république en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19PA02723


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02723
Date de la décision : 09/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : GRANIER

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-09;19pa02723 ?
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