La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/05/2021 | FRANCE | N°20PA04209

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 20 mai 2021, 20PA04209


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 27 octobre 2020 par lequel le préfet de police a décidé qu'il serait transféré aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 2018429/8 du 25 novembre 2020 rectifié par une ordonnance du 26 novembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2020, M. F..., représe

nté par Me A... B..., demande à la Cour :

1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide ju...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... F... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté en date du 27 octobre 2020 par lequel le préfet de police a décidé qu'il serait transféré aux autorités italiennes.

Par un jugement n° 2018429/8 du 25 novembre 2020 rectifié par une ordonnance du 26 novembre 2020, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 décembre 2020, M. F..., représenté par Me A... B..., demande à la Cour :

1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler le jugement n° 2018429/8 du 25 novembre 2020 rectifié par une ordonnance du 26 novembre 2020 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat, en cas d'admission définitive à l'aide juridictionnelle, la somme de 2 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ou, en cas de rejet définitif de sa demande d'aide juridictionnelle, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que le tribunal a omis de répondre aux moyens nouveaux qui ont été soulevés à l'audience, qui n'ont pas été visés ni analysés alors qu'ils avaient été repris dans la note en délibéré produite le 25 novembre 2020 ;

- le tribunal n'a pas visé la note en délibéré présentée le 25 novembre 2020 ;

- le jugement ne mentionne pas le nom de son avocat qui a présenté des observations orales à l'audience.

La requête a été communiquée au préfet de police, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. F... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 22 décembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le décret n° 2020-1717 du 28 décembre 2020 ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... F..., ressortissant somalien, a présenté le 7 septembre 2020 une demande de protection internationale au guichet unique des demandeurs d'asile de Paris. La consultation du système " Eurodac " ayant fait apparaître que ses empreintes avaient été relevées par les autorités italiennes les 1er avril et 11 mai 2011, par les autorités suisses le 22 août 2011, et par les autorités suédoises les 8 mai 2012 et 4 février 2014, le préfet de police a saisi le 14 septembre 2020 les autorités italiennes d'une demande de reprise en charge à laquelle elles ont répondu favorablement par une décision implicite du 29 septembre 2020. Par un arrêté du 27 octobre 2020, le préfet de police a décidé du transfert de M. F... aux autorités italiennes. M. F... relève appel du jugement du 25 novembre 2020, rectifié par une ordonnance du 26 novembre 2020, par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Par une décision du 22 décembre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a admis M. F... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, il n'y a pas lieu d'admettre à titre provisoire M. F... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Aux termes de l'article R. 776-26 du même code, applicable en vertu de l'article R. 777-3-6 du même code au contentieux des décisions de transfert visées à l'article L. 742-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont les dispositions sont désormais codifiées à l'article L. 572-1 de ce code : " L'instruction est close soit après que les parties ont formulé leurs observations orales, soit, si ces parties sont absentes ou ne sont pas représentées, après appel de leur affaire à l'audience ". Aux termes de l'article R. 776-27 du code de justice administrative, dont les trois premiers alinéas sont également applicables : " (...) / A moins qu'un procès-verbal d'audience signé par le juge et par l'agent chargé du greffe de l'audience ait été établi, le jugement mentionne les moyens nouveaux soulevés par les parties lors de l'audience (...) ".

4. Il ressort de la lecture du jugement attaqué que celui-ci comporte la seule mention " ont été entendus, au cours de l'audience publique du 21 novembre 2020 (..) les observations de Me, représentant M. F... ". Ainsi, le tribunal a omis d'indiquer le nom de l'avocate ayant représenté le requérant à l'audience, de sorte qu'en l'absence également de tout élément concernant les observations apportées à l'audience le jugement ne permet pas en lui-même de vérifier la nature de ces observations. Le jugement attaqué est de plus entaché d'une erreur matérielle concernant les noms et prénoms du requérant mentionnés dans les articles 1 à 3 du dispositif du jugement qui a été rectifiée par une ordonnance du 26 novembre 2020.

5. Or M. F... soutient que son conseil a soulevé oralement, lors de l'audience du 21 novembre 2020, de nouveaux moyens tirés, d'une part, de la suspicion de faux produit par le préfet de police, la copie de l'arrêté en litige présentée par ce dernier au tribunal n'étant pas la même que celle qui lui a été remise, d'autre part, du défaut de motivation de cet arrêté et enfin de la méconnaissance des dispositions de l'article 26 du règlement UE n° 603/2013 du fait de l'absence de mention de la date de saisine des autorités italiennes. Or, ces moyens ne sont pas visés ni analysés par le tribunal qui a omis d'y répondre.

6. Il résulte des dispositions précitées de l'article R. 776-27 du code de justice administrative qu'en l'absence d'établissement d'un procès-verbal d'audience, il appartient à la partie qui a soulevé de nouveaux moyens oralement à l'audience en vertu de l'article R. 776-26 du code de justice administrative de l'établir. Il ressort des pièces du dossier qu'aucun procès-verbal de l'audience du 21 novembre 2020 n'a été établi. Il ressort de la lecture de la note en délibéré présentée pour M. F... le 25 novembre 2020 que, d'une part, celle-ci mentionne la réponse apportée par le conseil du préfet de police lors de l'audience au moyen tiré de ce que la copie de l'arrêté contesté produite devant le tribunal et celle remise à l'intéressé ne sont pas identiques et, d'autre part, que le conseil de M. F... a déduit de l'insuffisante motivation de l'arrêté litigieux quant à la date de saisine des autorités italiennes la méconnaissance notamment des dispositions de l'article 26 du règlement UE n° 603/2013.

7. Ainsi, dans les circonstances particulières de l'espèce rappelées en particulier au point 4 du présent arrêt, M. F... doit être regardé comme établissant de façon suffisamment probante que les moyens nouveaux analysés au point 5 ont été soulevés par son conseil lors de l'audience. Or, comme il a été dit, le tribunal a omis de répondre au moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté du 27 octobre 2020 qui n'était pas inopérant et n'a pas visé, ni analysé le moyen inopérant tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 26 du règlement UE n°603/2013. Dès lors, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, M. F... est fondé à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularités et à demander pour ce motif son annulation.

8. Aucune des parties n'ayant conclu au fond, l'affaire doit être renvoyée devant le tribunal administratif de Paris pour qu'il soit statué sur la demande de M. F....

Sur les conclusions présentées au titre des frais liés à l'instance :

9. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme demandée au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions présentées par M. F... tendant au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le jugement n° 2018429/8 du 25 novembre 2020 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 3 : L'affaire est renvoyée au tribunal administratif de Paris.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. F... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... F..., au ministre de l'intérieur, au préfet de police et au président du tribunal administratif de Paris.

Délibéré après l'audience du 17 mai 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente,

- Mme C..., première conseillère,

- Mme E..., première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 20 mai 2021.

La présidente de la 8ème chambre,

H. VINOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA04209


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA04209
Date de la décision : 20/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : EL BOREI

Origine de la décision
Date de l'import : 25/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-05-20;20pa04209 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award