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20/05/2021 | FRANCE | N°20PA01724

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 20 mai 2021, 20PA01724


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... C..., M. B... E... et M. F... H... ont demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'arrêté n° 2019/801 du 1er octobre 2019 du maire de Nouméa portant délivrance d'un permis de construire à la SARL Patrimonium immobilier d'un bâtiment à usage de logements sis14 rue de l'observatoire, à Nouméa.

Par un jugement n° 1900509 du 16 avril 2020, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une req

uête enregistrée le 15 juillet 2020 et un mémoire récapitulatif enregistré le 16 février 2021, M...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme G... C..., M. B... E... et M. F... H... ont demandé au tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler l'arrêté n° 2019/801 du 1er octobre 2019 du maire de Nouméa portant délivrance d'un permis de construire à la SARL Patrimonium immobilier d'un bâtiment à usage de logements sis14 rue de l'observatoire, à Nouméa.

Par un jugement n° 1900509 du 16 avril 2020, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 15 juillet 2020 et un mémoire récapitulatif enregistré le 16 février 2021, Mme G... C..., M. B... E... et M. F... H..., représentés par Me I..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie n° 1900509 en date du 16 avril 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er octobre 2019 par lequel le maire de Nouméa a accordé un permis de construire à la SARL Patrimonium immobilier ;

3°) d'annuler l'arrêté n° 2019/843 du 22 octobre 2019 portant transfert dudit permis de construire à la société South Cross Promotion ;

4°) de mettre à la charge de la ville de Nouméa une somme de 300 000 francs CFP sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- ils ont intérêt à agir ;

- les conclusions déposées conjointement par les sociétés Patrimonium Immobilier et South Cross Promotion sont irrecevables ; les premiers juges ont commis une irrégularité en ne relevant d'office l'irrecevabilité de l'intervention de la société South Cross Promotion, qui n'a pas été présentée par un mémoire distinct ;

- les recours de première instance et d'appel ont été notifiés conformément aux dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ;

- les consultations imposées par l'article PS 221-40 du code de l'urbanisme de Nouvelle-Calédonie n'ont pas été réalisées ; en particulier, les services d'incendie et de secours de la commune n'ont pas été consultés ;

- le dossier de demande de permis était incomplet s'agissant des études des réseaux et des aménagements nécessaires dans la rue de l'Observatoire, l'étude sur les conditions de circulation n'étant pas produite dans le cadre de l'instruction de la demande de permis de construire ; les aménagements préconisés sont à la charge de la commune et, en tout état de cause, ils sont insuffisants ;

- eu égard à la dimension du projet et des conditions de desserte du terrain, la commune a commis une erreur d'appréciation au regard des dispositions des articles Lp 121-17 et Lp 121-18 du code de l'urbanisme de Nouvelle-Calédonie et de l'article 8 du plan d'urbanisme directeur de la ville de Nouméa ;

- le permis méconnaît les articles PS 221-50 et 221-52 du code de l'urbanisme de Nouvelle-Calédonie, le point 1.1 de l'article 13 des règles communes du plan d'urbanisme directeur de la ville de Nouméa, les articles UB1 6, 10, 11 et 13 dudit plan et l'article 431-1 du code de l'environnement de la Nouvelle-Calédonie.

Par des mémoires enregistrés les 25 septembre 2020 et 16 février 2021, les sociétés Patrimonium Immobilier et South Cross Promotion, représentées par Me D..., concluent au rejet de la requête et demandent à la Cour de mettre à la charge des requérants une somme de 10 000 euros chacune au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles font valoir que :

- les écritures de la société South Cross Promotion sont régulières dès lors que, compte tenu du transfert intervenu, elle est bénéficiaire du permis de construire contesté ;

- l'action de M. H... est irrecevable, faute pour lui de justifier d'un titre de propriété lui donnant qualité pour agir ;

- les appelants ne justifient pas d'un intérêt à agir ;

- ils n'ont pas justifié pas de la notification de leur requête de première instance, en méconnaissance des dispositions de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme ; ce vice ne peut pas être régularisé en appel ;

- les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté de transfert du 22 octobre 2019 sont nouvelles en appel et sont, dès lors, irrecevables ; le délai de recours contentieux contre cet arrêté est dépassé ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 février 2021, la ville de Nouméa, représentée par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 4 000 euros soit mise à la charge des requérants sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

- le code de l'urbanisme de la Nouvelle-Calédonie ;

- la loi du pays n° 2015-1 du 13 février 2015 relative à la partie législative du code de l'urbanisme de la Nouvelle-Calédonie ;

- le code de l'environnement de la Province Sud ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,

- et les observations de Me J..., représentant la commune de Nouméa.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 1er octobre 2019, le maire de Nouméa a délivré un permis de construire à la SARL Patrimonium Immobilier pour la construction d'un immeuble à usage d'habitation situé 14 rue de l'observatoire à Nouméa. Par un arrêté du 22 octobre 2019, le maire de Nouméa a donné son accord au transfert de ce permis de construire à la SARL South Cross Promotion. Mme C..., M. E... et M. H... relèvent appel du jugement du 16 avril 2020 par lequel le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 1er octobre 2019. Ils demandent en outre l'annulation de l'arrêté du 22 octobre 2019.

Sur les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté du 22 octobre 2019 :

2. Les conclusions dirigées contre l'arrêté du 22 octobre 2019 par lequel le maire de Nouméa a donné son accord au transfert du permis de construire en litige à la SARL South Cross Promotion ont été présentées pour la première fois dans un mémoire enregistré devant le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie le 2 mars 2020, soit postérieurement à la clôture de l'instruction. Elles ont donc le caractère de conclusions nouvelles en cause d'appel. Par suite, ainsi que le font valoir à bon droit les sociétés South Cross Promotion et Patrimonium Immobilier, elles sont irrecevables.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Il ressort toutefois des pièces du dossier que la société South Cross Promotion était, compte tenu de l'arrêté de transfert du 22 octobre 2019 dont elle était bénéficiaire, le titulaire du permis de construire délivré par l'arrêté du 1er octobre 2019. Il s'ensuit que les requérants ne sont pas fondés à soutenir que les premiers juges ont commis une irrégularité en ne relevant pas d'office l'irrecevabilité de l'intervention de la société South Cross Promotion comme non présentée par un mémoire distinct.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. D'une part, la loi organique du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie dispose en son article 21 que : " I. - L'État est compétent dans les matières suivantes : / (...) 2° (...) procédure administrative contentieuse (...) ". La loi organique du 3 août 2009 a inséré dans cette même loi organique un article 6-2 aux termes duquel : " (...) sont applicables de plein droit en Nouvelle-Calédonie, sans préjudice des dispositions les adaptant à son organisation particulière, les dispositions législatives et réglementaires qui sont relatives : / (...) / 6° À la procédure administrative contentieuse (...) ".

5. D'autre part, aux termes de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme : " En cas (...) de recours contentieux à l'encontre (...) d'une décision relative à l'occupation ou l'utilisation du sol régie par le présent code, (...) l'auteur du recours est tenu, à peine d'irrecevabilité, de notifier son recours à l'auteur de la décision et au titulaire de l'autorisation. (...) / La notification prévue au précédent alinéa doit intervenir par lettre recommandée avec accusé de réception, dans un délai de quinze jours francs à compter du dépôt du déféré ou du recours ". Lorsque l'auteur d'un recours entrant dans le champ d'application de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme n'a pas justifié en première instance de l'accomplissement des formalités de notification requises alors qu'il a été mis à même de le faire, soit par une fin de non-recevoir opposée par le défendeur, soit par une invitation à régulariser adressée par le tribunal administratif, il n'est pas recevable à produire ces justifications pour la première fois en appel.

6. Enfin, aux termes du premier alinéa de l'article R. 613-2 du code de justice administrative : " Si le président de la formation de jugement n'a pas pris une ordonnance de clôture, l'instruction est close trois jours francs avant la date de l'audience indiquée dans l'avis d'audience prévu à l'article R. 711-2. Cet avis le mentionne ". Il résulte de ces dispositions que l'instruction est normalement close, à défaut d'ordonnance de clôture, trois jours francs avant la date de l'audience. Toutefois, lorsque, postérieurement à cette clôture, le juge est saisi d'un mémoire émanant d'une partie, il lui appartient de faire application dans ce cas particulier des règles générales relatives à toutes les productions postérieures à la clôture de l'instruction. A ce titre, et conformément au principe selon lequel, devant les juridictions administratives, le juge dirige l'instruction, il lui appartient, dans tous les cas, de prendre connaissance de ce mémoire avant de rendre sa décision, ainsi, au demeurant, que de le viser sans l'analyser. S'il a toujours la faculté, dans l'intérêt d'une bonne justice, d'en tenir compte, après l'avoir visé, et, cette fois, analysé, il n'est tenu de le faire, à peine d'irrégularité de sa décision, que si ce mémoire contient soit l'exposé d'une circonstance de fait dont la partie qui l'invoque n'était pas en mesure de faire état avant la clôture de l'instruction et que le juge ne pourrait ignorer sans fonder sa décision sur des faits matériellement inexacts, soit d'une circonstance de droit nouvelle ou que le juge devrait relever d'office au vu du dossier tel qu'il existait à la date de clôture de l'instruction.

7. En l'espèce, les sociétés Patrimonium Immobilier et South Cross Promotion ont opposé en première instance une fin de non-recevoir de la demande de première instance en se fondant sur la circonstance qu'elle n'avait pas été régulièrement notifiée, en méconnaissance de l'article R. 600-1 du code de l'urbanisme. Les requérants ont ainsi été mis à même, devant les premiers juges, de justifier de la notification régulière de leur demande enregistrée au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie le 2 décembre 2019. S'ils ont produit devant cette juridiction des courriers, en date du 16 décembre 2019, adressés en recommandé avec accusé de réception à la commune de Nouméa et à la société Patrimonium, ce mémoire n'a été enregistré au greffe du tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie que le 2 mars 2020. Or, il ressort des pièces du dossier que la clôture de l'instruction était intervenue, conformément aux dispositions précitées de l'article R. 613-2 du code de justice administrative, et ainsi qu'en avaient d'ailleurs été informées les parties par l'avis d'audience qui leur a été adressé le 20 février 2020, trois jours francs avant l'audience fixée au jeudi 5 mars 2020, soit le dimanche 1er mars 2020 à minuit. Alors que les requérants étaient en mesure, avant cette clôture, de le régularisation de leur requête, le tribunal n'était pas tenu de rouvrir l'instruction et de soumettre au débat contradictoire les pièces produites dans ces conditions. Par suite, sans que la production en appel des courriers du 16 décembre 2019 ne soit de nature à la régulariser, la demande de première instance des requérants doit être regardée comme irrecevable.

8. Il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les moyens de la requête d'appel et les autres fins de non-recevoir opposées en défense, que Mme C..., M. E... et M. H... ne sont pas fondés à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté leur demande.

Sur les frais liés au litige :

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la commune de Nouméa, qui n'est pas la partie perdante du présent procès, la somme demandée par les requérants au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire application de faire droit aux conclusions présentées sur le même fondement par la commune de Nouméa et par les sociétés Patrimonium Immobilier et South Cross Promotion.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme G... C... épouse E..., de M. B... E... et de M. F... H... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, par la commune de Nouméa et par les sociétés Patrimonium Immobilier et South Cross Promotion sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme G... C... épouse E..., à M. B... E... et à M. F... H..., à la société Patrimonium Immobilier, à la société South Cross Promotion et la commune de Nouméa.

Copie en sera adressée, pour information, au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 22 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- M. Gobeill, premier conseiller,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 20 mai 2021.

Le président,

S. DIÉMERT

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

No 20PA01724


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01724
Date de la décision : 20/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-06-01-04 Urbanisme et aménagement du territoire. Règles de procédure contentieuse spéciales. Introduction de l'instance. Obligation de notification du recours.


Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : ELMOSNINO

Origine de la décision
Date de l'import : 27/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-05-20;20pa01724 ?
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