Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. G... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 décembre 2019 par lequel le préfet de police lui a interdit de circuler sur le territoire français pour une durée de trente-six mois.
Par un jugement n° 1926488 du 24 septembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la cour :
Par une requête et un mémoire enregistrés les 24 novembre 2020 et 1er avril 2021, M. A..., représenté par Me E... F..., demande à la cour :
1°) d'annuler ce jugement ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 7 décembre 2019 ;
3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Il soutient que :
- en se prononçant sur la matérialité des faits qui lui sont reprochés, les premiers juges ont méconnu leur compétence ainsi que le principe selon lequel le juge administratif est tenu par les constatations de fait retenues par le juge pénal ;
- l'arrêté contesté est entaché d'incompétence ;
- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;
- l'arrêté contesté méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- l'arrêté contesté méconnaît les dispositions de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Par un mémoire en défense enregistré le 10 mars 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de Mme D...,
- et les observations de Me E... F..., représentant M. A....
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., de nationalité allemande, a été interpellé et placé en garde à vue le
5 décembre 2019 pour participation à groupement formé en vue de la préparation de violences contre les personnes ou destructions de biens et port d'armes de catégorie D. Par deux arrêtés du 7 décembre 2019, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français sans délai et lui a interdit de circuler sur le territoire français pour une durée de trente-six mois. M. A... relève appel du jugement du 24 septembre 2020 par lequel tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 décembre 2019 portant interdiction de circuler sur le territoire français pour une durée de trente-six mois.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Si M. A... soutient que les premiers juges ont méconnu leur compétence en se prononçant sur la matérialité des faits qui lui sont reprochés, aucun texte ni aucun principe n'impose au juge administratif, auquel il appartient de contrôler la légalité des décisions prises sur le fondement de l'article L. 311-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile indépendamment de toute procédure en cours devant les juridictions pénales, de sursoir à statuer dans l'attente que celles-ci se prononcent. Par suite, le moyen tiré de l'irrégularité du jugement doit être écarté.
Sur le bien-fondé du jugement attaqué :
3. En premier lieu, par un arrêté n° 2019-00832 du 18 octobre 2019 régulièrement publié au bulletin officiel de la Ville de Paris du 25 octobre 2019, le préfet de police a donné délégation à Mme C... B... à l'effet de signer les décisions en litige. Si M. A... allègue que le préfet de police n'apporte pas la preuve de son empêchement, il appartient à la partie contestant la qualité du délégataire pour signer l'arrêté contesté d'établir que le préfet n'était ni absent ni empêché. Or l'intéressé n'apporte aucun élément à l'appui de ses allégations et cette circonstance ne ressort pas non plus des pièces du dossier. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée ne peut qu'être écarté.
4. En deuxième lieu, la décision contestée vise les articles 3 et 8 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la directive 2004/38/CE du Parlement européen du 29 avril 2004 ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droits d'asile. Elle précise l'identité, la date et le lieu de naissance de M. A... et indique les raisons pour lesquelles l'intéressé a fait l'objet d'une interdiction de circulation sur le territoire français. Elle relève également que, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale. Ainsi, la décision portant interdiction de circulation sur le territoire français comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et, quand bien même ses motifs ne reprennent pas l'ensemble des éléments caractérisant la situation de l'intéressé, est suffisamment motivée en droit et en fait.
5. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-3-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut, par décision motivée, assortir l'obligation de quitter le territoire français prononcée en application des 2° et 3° de l'article L. 511-3-1 d'une interdiction de circulation sur le territoire français d'une durée maximale de trois ans. (...) Les quatre derniers alinéas de l'article L. 511-3-1 sont applicables ". Aux termes de l'article L. 511-3-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative compétente peut, par décision motivée, obliger un ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse, ou un membre de sa famille à quitter le territoire français lorsqu'elle constate : / (...) / 3° Ou que son comportement personnel constitue, du point de vue de l'ordre public ou de la sécurité publique, une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société. / L'autorité administrative compétente tient compte de l'ensemble des circonstances relatives à sa situation, notamment la durée du séjour de l'intéressé en France, son âge, son état de santé, sa situation familiale et économique, son intégration sociale et culturelle en France, et de l'intensité de ses liens avec son pays d'origine. / L'étranger dispose, pour satisfaire à l'obligation qui lui a été faite de quitter le territoire français, d'un délai qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à trente jours à compter de sa notification. (...) ".
6. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a été interpellé le 5 décembre 2019 à 13 heures dans le 10ème arrondissement de Paris en marge d'un mouvement social, et qu'il a été placé en garde à vue pour des faits de participation à un groupement en vue de commettre des violences contre les personnes ou de destructions ou dégradations de biens et port d'arme prohibé de catégorie D. Si l'intéressé conteste la matérialité des faits, il ressort du procès-verbal d'audition qu'il a été trouvé en possession de divers accessoires tels qu'une paire de lunettes de piscine, un gilet jaune, des gants en cuir, un marteau de couleur rouge et noir, un masque de protection avec deux cartouches de filtration, un cache-cou, un k-way, une paire de chaussettes et une casquette noire. En outre, M. A..., qui a tenu à garder le silence sur les faits pour lesquels il a été interpellé lors de son audition par les services de police n'apporte, dans le cadre de la présente instance, aucune explication concernant la possession de tels objets. Il est par ailleurs constant que l'intéressé ne réside pas en France et n'y dispose d'aucune attache. Dès lors, en considérant que le comportement de M. A... constitue une menace réelle, actuelle et suffisamment grave à l'encontre d'un intérêt fondamental de la société, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation.
7. En dernier lieu, M. A... reprend en appel le moyen développé en première instance tiré de ce que la décision litigieuse méconnaîtrait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. En l'absence de tout élément nouveau, il y a lieu d'écarter ce moyen par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.
D E C I D E :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera transmise au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 20 avril 2021 à laquelle siégeaient :
- M. Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,
- Mme Jayer, premier conseiller,
- Mme D..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 mai 2021.
Le rapporteur,
G. D...Le président de la formation de jugement
Ch. BERNIERLe greffier,
E. MOULIN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur, en ce qui le concerne, et à tous huissiers de justice à ce requis, en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 20PA03564 2