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30/04/2021 | FRANCE | N°20PA02317

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 30 avril 2021, 20PA02317


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Par un jugement n° 1902138 du 31 juillet 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 17 août 2020, M. A..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le juge

ment n° 1902138 du 31 juillet 2020 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision impl...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... E... A... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

Par un jugement n° 1902138 du 31 juillet 2020, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 17 août 2020, M. A..., représenté par Me D..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1902138 du 31 juillet 2020 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision implicite par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ", révélée par la délivrance le 11 décembre 2018 d'un récépissé de demande de titre de séjour portant la mention " salarié " ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 800 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision contestée est insuffisamment motivée, le préfet du Val-de-Marne n'ayant pas répondu à la demande de communication des motifs qui lui a été adressée ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il a fixé l'ensemble de ses attaches en France où il vit depuis 2005, qu'il est parfaitement intégré à la société française et qu'elle le prive de la possibilité de créer sa propre société ;

- le préfet du Val-de-Marne a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été rendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les observations de Me D..., avocat de M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant égyptien, né le 3 décembre 1980, entré en France le 18 mai 2005 selon ses déclarations, relève appel du jugement du 31 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision implicite du préfet du Val-de-Marne refusant de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ".

2. Aux termes de l'article L. 211-1 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : / 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police " et aux termes de l'article L. 232-4 du même code : " Une décision implicite intervenue dans les cas où la décision explicite aurait dû être motivée n'est pas illégale du seul fait qu'elle n'est pas assortie de cette motivation. / Toutefois, à la demande de l'intéressé, formulée dans les délais du recours contentieux, les motifs de toute décision implicite de rejet devront lui être communiqués dans le mois suivant cette demande (...) ".

3. Aux termes de l'article R. 311-12 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le silence gardé par l'administration sur les demandes de titres de séjour vaut décision implicite de rejet. ". Aux termes de l'article R. 311-12-1 du même code : " La décision implicite mentionnée à l'article R. 311-12 naît au terme d'un délai de quatre mois. ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... a sollicité du préfet de police son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en se prévalant de sa vie privée et familiale sur le territoire français. Par un arrêté du 22 septembre 2017, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination de la mesure d'éloignement. Par un jugement du 22 février 2018, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté au motif que le préfet de police aurait dû soumettre pour avis la demande d'admission exceptionnelle au séjour de l'intéressé à la commission du titre de séjour et a enjoint au préfet de police, après saisine de la commission du titre de séjour, de réexaminer la situation de M. A... dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement.

5. Le 12 mars 2018, M. A... s'est rendu à la préfecture du Val-de-Marne, territorialement compétente depuis son changement de domicile, pour procéder au réexamen de son dossier, et s'est vu remettre une autorisation provisoire de séjour. En exécution du jugement du 22 février 2018 du tribunal administratif de Paris, le préfet du Val-de-Marne a convoqué la commission du titre de séjour qui a rendu un avis favorable à la demande de titre de séjour de M. A... le 18 octobre 2018. Le 11 décembre 2018, M. A... a été mis en possession d'un récépissé de demande de carte de séjour qui mentionnait que le titre de séjour sollicité était un titre de séjour portant la mention " salarié ". Contrairement à ce que soutient le requérant, la délivrance de ce récépissé ne révèle pas une décision implicite de rejet de sa demande de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " mais atteste seulement que cette demande est toujours en cours d'instruction. Comme il a été dit, le dossier de l'intéressé ayant été transféré à la préfecture du Val-de-Marne et la commission du titre de séjour, saisie en exécution du jugement du 22 février 2018, ayant rendu son avis le 18 octobre 2018, il y a lieu de considérer qu'une décision implicite du préfet du Val-de-Marne refusant le titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sollicité par M. A... est née à l'expiration d'un délai de quatre mois en application de l'article R. 311-12-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, soit le 18 février 2019. Or, par un courrier en date du 9 janvier 2019, reçu le 14 janvier suivant, M. A... a sollicité du préfet du Val-de-Marne la communication des motifs de la décision implicite lui refusant la délivrance de ce titre de séjour. Le préfet du Val-de-Marne n'a pas répondu à cette demande. Le 6 mars 2019, M. A... a saisi le tribunal administratif de Melun d'une demande tendant à l'annulation de la décision implicite de refus de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale ". Postérieurement à l'introduction de ce recours contentieux, le préfet du Val-de-Marne a, le 28 janvier 2020, remis à l'intéressé une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " valable du 20 décembre 2019 au 19 décembre 2020. La remise de ce titre de séjour révèle une décision implicite de refus de délivrance du titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " confirmative de la décision implicite née le 18 février 2019 et qui ne saurait se substituer à cette première décision.

6. Saisi le 14 janvier 2019 de la demande de M. A... tendant à la communication des motifs du refus de titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " comme il a déjà été dit, le préfet du Val-de-Marne n'a pas répondu à cette demande. Dans ces conditions, la décision implicite née le 18 février 2019, qui n'est pas motivée, doit être annulée pour ce motif, aucun des autres moyens invoqués n'étant en l'espèce de nature à fonder cette annulation.

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Sur les conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte :

8. Eu égard au motif d'annulation de la décision litigieuse, l'exécution du présent arrêt implique seulement que le préfet du Val-de-Marne procède à un nouvel examen de la demande de M. A... tendant à la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de trois mois à compter de sa notification et de lui délivrer pendant ce réexamen une autorisation provisoire de séjour s'il ne dispose à cette date d'aucun titre de séjour. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les frais liés au litige :

9. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à M. A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1902138 du 31 juillet 2020 du tribunal administratif de Melun et la décision implicite du préfet du Val-de-Marne née le 18 février 2019 refusant de délivrer à M. A... un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de lui délivrer dans l'attente de sa décision une autorisation provisoire de séjour s'il ne dispose à cette date d'aucun titre de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... E... A..., au ministre de l'intérieur et au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 12 avril 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Luben, président de la formation de jugement,

- Mme Collet, premier conseiller,

- Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 avril 2021.

Le président de la formation de jugement,

I. LUBEN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

N° 20PA02317


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02317
Date de la décision : 30/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : LOUAFI RYNDINA

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-04-30;20pa02317 ?
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