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30/04/2021 | FRANCE | N°20PA01219

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 30 avril 2021, 20PA01219


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... K... C..., veuve F..., intervenant en son nom personnel et en qualité de représentante légale de sa fille mineure, Mlle G... F..., et Mlle B... F... ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à leur verser la somme totale de 2 079 695,98 euros, en réparation des préjudices qu'elles ont subis du fait du décès de leur père et époux, M. I... F..., le 29 janvier 2014, assortie des intérêts au taux légal à compter de leur demande indemni

taire et de leur capitalisation.

Par jugement n° 1715955/6-2 du 18 février 20...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... K... C..., veuve F..., intervenant en son nom personnel et en qualité de représentante légale de sa fille mineure, Mlle G... F..., et Mlle B... F... ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à leur verser la somme totale de 2 079 695,98 euros, en réparation des préjudices qu'elles ont subis du fait du décès de leur père et époux, M. I... F..., le 29 janvier 2014, assortie des intérêts au taux légal à compter de leur demande indemnitaire et de leur capitalisation.

Par jugement n° 1715955/6-2 du 18 février 2020, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Parisà verser à la succession de M. F... la somme de 14 040 euros, à verser à Mme A... K... C..., veuve F..., la somme de 149 246,50 euros, à verser à Mme A... K... C..., veuve F..., en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure, Mlle G... F..., la somme de 121 278,19 euros, à verser à Mlle B... F..., la somme de 57 822,21 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine la somme de 231 873,49 euros au titre des débours qu'elle a exposés et la somme de 1 091 euros au titre des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des pièces enregistrées les 17 avril et 10 juillet 2020, Mme A... K... C..., veuve F..., intervenant en son nom personnel et en qualité de représentante légale de sa fille mineure, Mlle G... F..., et Mlle B... F..., représentées par Me J..., demandent à la Cour :

1°) de confirmer le jugement n° 1715955/6-2 du 18 février 2020 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a retenu la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris dans le décès de M. I... F... et ordonné la réparation intégrale des préjudices subis par les requérantes ;

2°) de réformer le jugement n° 1715955/6-2 du 18 février 2020 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il ne leur a pas été alloué l'intégralité des sommes demandées pour un montant total de 2 169 294,70 euros sauf sursis à statuer et à parfaire s'agissant de l'indemnisation des pertes de gains professionnels à verser à la succession de M. F..., sommes assorties des intérêts au taux légal à compter de leur demande indemnitaire et de leur capitalisation ;

3°) de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à leur verser les entiers dépens ;

4°) de mettre à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris la somme de 13 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elles soutiennent que :

- l'Assistance publique - hôpitaux de Paris a commis plusieurs fautes de nature à engager sa responsabilité : le bilan préopératoire de M. F... a été incomplet, en particulier au niveau coronarien puisqu'aucune exploration spécifique n'a été effectuée ; le traitement anticoagulant péri opératoire a été erratique et n'est pas conforme aux recommandations des sociétés savantes ; la prise en charge péri opératoire de l'hémorragie qu'il a subie a été tardive ; la prise en charge de l'infarctus du myocarde a été tardive ;

- le décès de M. F... est directement lié à la prise en charge tardive de l'infarctus du myocarde qu'il a présenté dans les suites de son intervention chirurgicale ;

- la réparation intégrale de leurs préjudices doit être confirmée dès lors que les fautes commises par l'Assistance publique - hôpitaux de Paris liées à la prise en charge tardive, inadaptée et contraire à la bonne pratique de la pathologie coronarienne de M. F... sont à l'origine directe de son décès et que son état de santé antérieur n'a pas participé à la survenue de son décès ;

- le jugement attaqué doit être confirmé s'agissant de la somme de 230 984,98 euros allouée à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine au titre des dépenses de santé actuelles ;

- elles peuvent prétendre, en leur qualité d'ayants droit successoraux, à l'indemnisation des préjudices subis par M. F... ; s'agissant des pertes de gains professionnels, il conviendra de surseoir à statuer en ce qui les concerne et d'allouer à la caisse primaire d'assurance-maladie des Hauts-de-Seine la somme de 888,51 euros en remboursement des indemnités journalières qui lui ont été versées par celle-ci à compter du 9 janvier 2014 et jusqu'à son décès survenu le 29 janvier 2014 ; s'agissant du déficit fonctionnel temporaire total, une somme de 2 340 euros doit leur être allouée, sur la base de 30 euros par jour et non de 20 euros retenue par les premiers juges pendant une période allant du 13 novembre 2013 au 29 janvier 2014, soit 78 jours ; s'agissant des souffrances endurées, une somme de 35 000 euros doit être allouée, en ce incluse l'indemnisation de l'angoisse de mort imminente et, s'agissant du titre du préjudice esthétique temporaire, une somme de 5 000 euros doit leur être allouée ;

- ses ayants droit peuvent également prétendre à la réparation des différents préjudices occasionnés par le décès de M. F..., à savoir, en ce qui concerne Mme F..., aux sommes de 243 500 euros au titre de l'appel à caution, de 890 544 euros au titre de ses pertes de revenus, de 51 194 euros au titre du surcoût de financement " correspondant à la différence entre un emprunt à taux normal et le taux de l'emprunt souscrit " pour la SCI Foncière Gay Lussac, de 100 000 euros au titre de la perte de chance de réaliser un bénéfice sur l'opération immobilière en cours de réalisation, de 301 356,23 euros au titre de la perte des revenus de M. F..., de 5 400 euros au titre des frais divers, de 20 000 euros au titre du préjudice d'accompagnement, de 50 000 euros au titre du préjudice moral, en ce qui concerne Mlle B... F..., premier enfant du défunt, aux sommes de 121 750 euros au titre de l'appel à caution, de 29 564,55 euros au titre de la perte des revenus de M. F..., de 20 000 euros au titre du préjudice d'accompagnement, de 50 000 euros au titre du préjudice moral, en ce qui concerne Mlle G... F..., second enfant du défunt, aux sommes de 121 750 euros au titre de l'appel à caution, de 51 895,92 euros au titre de la perte des revenus de M. F..., de 20 000 euros au titre du préjudice d'accompagnement et de 50 000 euros au titre du préjudice moral.

Par un mémoire en appel incident, enregistré le 13 novembre 2020, l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, représentée par Me H..., demande à la Cour :

1°) d'ordonner une expertise qui serait confiée à un urologue, un anesthésiste réanimateur et à un cardiologue ;

2°) de rejeter la requête d'appel des consorts F... ;

3°) à titre subsidiaire, de ramener à de plus justes proportions l'indemnisation allouée par les premiers juges en tenant compte de l'état de santé antérieur de M. F... entraînant une réfaction à hauteur de 50 % des sommes allouées.

Elle soutient que :

- elle n'a pas commis de fautes de nature à engager sa responsabilité ;

- la réparation des préjudices subis par les ayants droit ne peut être intégrale compte tenu de l'état de santé dégradé de M. F... et la perte de chance de se soustraire à son décès doit être fixée à 50 % ;

- les sommes qui ont été allouées par les premiers juges aux ayants droits doivent subir une réfaction de 50 % pour tenir compte du risque de vie abrégée qui était déjà celui de la victime avant même l'intervention chirurgicale ou à défaut elles doivent être maintenues.

Par un mémoire en appel incident, enregistré le 15 décembre 2020, la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) de confirmer le jugement n° 1715955/6-2 du 18 février 2020 du tribunal administratif de Paris lui ayant alloué la somme de 231 873,49 euros assortie des intérêts au taux légal à compter du 17 octobre 2017 au titre des débours qu'elle a exposés et la somme de 1 091 euros au titre des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale ;

2°) de réformer ce jugement en portant à la somme actualisée de 238 478,72 euros, avec intérêts de droit à compter du 17 octobre 2017 et capitalisation des intérêts, la somme de 231 873,49 euros au titre des débours qu'elle a engagés que l'Assistance publique - hôpitaux de Paris a été condamnée à lui rembourser ;

3°) de mettre à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ainsi que les dépens.

Elle fait valoir que le montant des débours qu'elle a versés en rapport avec l'accident de M. F... s'élève désormais à la somme actualisée de 238 478,72 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- le code de la sécurité sociale ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me J..., avocat des consorts F....

Considérant ce qui suit :

1. M. I... F..., né le 16 septembre 1957 et alors âgé de 56 ans, qui souffrait de troubles urinaires, a été hospitalisé le 7 novembre 2013 à l'hôpital européen Georges Pompidou en vue d'une résection trans-urétrale de la prostate. Toutefois, le 8 novembre 2013, souffrant de tachycardie et d'hypotension, trois culots globulaires de transfusion lui ont été administrés et après stabilisation de son état, il a été réopéré puis a été transféré en réanimation chirurgicale pour choc hémorragique sur hématurie post opératoire à 23 h 39. Le 9 novembre 2013 à 4 h 15, le dosage de troponinémie a montré une nécrose myocardique sans que M. F... ne présente cliniquement de troubles du rythme. À 4 h 30, M. F... s'est plaint d'une oppression thoracique. À 17 h 30 il a été décidé une revascularisation coronarienne en urgence. Une angioplastie avec pose de stent sur l'artère interventriculaire antérieure a été réalisée, ainsi qu'une contrepulsion intra aortique associée à un support inotrope. M. F... est resté hospitalisé en service de réanimation chirurgicale jusqu'au 6 janvier 2014 puis il a été transféré à l'hôpital de la Pitié Salpêtrière. Le 15 janvier 2014, il a été décidé de lui implanter un coeur artificiel total sous circulation extracorporelle. Lors de son démarrage est toutefois survenu un oedème pulmonaire majeur qui a nécessité la mise en place d'une oxygénation par membrane extra-corporelle (ECMO) veineuse fémoro-fémorale. La fermeture sternale a eu lieu le 20 janvier 2014. Souffrant d'un hémothorax comprimant les cavités cardiaques, il a dû subir une nouvelle intervention le 24 janvier 2014 qui a été suivie par une défaillance multiviscérale compliquée d'un phénomène septique avec des hémocultures positives et une colite ischémique. Devant l'absence d'amélioration clinique malgré les traitements thérapeutiques et face à la défaillance multiviscérale, il a été décidé un arrêt de soins qui a conduit à son décès le 29 janvier 2014. Les ayants droit de M. F... ont saisi la commission régionale de conciliation et d'indemnisation des accidents médicaux, des infections iatrogènes et des infections nosocomiales (CCI) d'Ile-de-France le 12 avril 2016 d'une demande d'indemnisation et une expertise a été diligentée le 2 août 2016. Les experts ont remis leur rapport le 24 octobre 2016 et ont conclu que l'absence de prise en charge précoce de l'infarctus du myocarde présenté par M. F... dans la nuit du 9 novembre 2013 avait été directement responsable de l'altération de sa fonction ventriculaire conduisant à son décès après implantation d'un coeur artificiel. Dans son avis du 6 avril 2017, la commission de conciliation et d'indemnisation a suivi les conclusions des experts, a proposé une indemnisation des préjudices subis par M. F... et ses ayants droit à hauteur de 80 % de leur montant pour tenir compte de l'état de santé antérieur de M. F... et a invité l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à formuler une offre d'indemnisation, qui a été adressée le 16 août 2017 mais que les ayants droit de M. F... ont refusée. Mme A... F..., agissant en son nom personnel et en qualité de représentante légale de sa fille mineure, Mlle G... F..., ainsi que Mlle B... F..., fille aînée de la victime, ont demandé au tribunal administratif de Paris de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à leur verser la somme totale de 2 079 695,98 euros assortie des intérêts au taux légal et de la capitalisation des intérêts en réparation des préjudices qu'elles ont subis en raison du décès de leur époux et père au cours de sa prise en charge par l'hôpital européen Georges Pompidou. La caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine a demandé pour sa part la condamnation de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à lui verser la somme de 231 873,49 euros au titre de ses débours définitifs ainsi que la somme due au titre de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, assortie des intérêts de droit. Par le jugement n° 1715955/6-2 du 18 février 2020 dont la réformation est demandée, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à la succession de M. F... la somme de 14 040 euros, à Mme A... K... C..., veuve F..., la somme de 149 246,50 euros, à Mme A... K... C..., veuve F..., en sa qualité de représentante légale de sa fille mineure, Mlle G... F..., la somme de 121 278,19 euros, à verser à Mlle B... F... la somme de 57 822,21 euros et à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine la somme de 231 873,49 euros au titre des débours qu'elle a exposés et la somme de 1 091 euros au titre des dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

2. Aux termes de l'article R. 621-1 du code de justice administrative : " La juridiction peut, soit d'office, soit sur la demande des parties ou de l'une d'elles, ordonner, avant dire droit, qu'il soit procédé à une expertise sur les points déterminés par sa décision. (...) ".

3. Il résulte de l'instruction que si les experts nommés par la CCI d'Ile-de-France ont considéré dans leur rapport remis le 24 octobre 2016 qu'il y avait eu un retard à la prise en charge de l'hémorragie survenue après l'opération de résection trans-urétrale de prostate subie par M. F..., ces conclusions, de même que les autres éléments médicaux produits au dossier, ne permettent pas de déterminer si le retard de transfusion, à la suite de cette hémorragie, a présenté un caractère fautif, et si tel était le cas, quelle aurait été la part de responsabilité de ce retard dans la survenance de l'infarctus du myocarde dont M. F... a été victime. Par ailleurs, n'ont pas non plus été évalués par les experts la durée d'hospitalisation inhérente au traitement d'un infarctus du myocarde traité avec succès, ni le taux de perte de chance de guérison due au retard dans la prise en charge de l'infarctus dont M. F... a été victime compte tenu de l'état de santé de l'intéressé et des différentes pathologies dont il souffrait, ni l'espérance de vie estimée de M. F... eu égard à son état de santé antérieur à l'intervention chirurgicale du 7 novembre 2013. Par ailleurs, il résulte de l'instruction que pour l'évaluation de la perte des revenus du foyer de M. F..., les consorts F... n'ont produit des justificatifs de revenus qu'au titre de l'année 2013, année du décès de M. F..., et pour les années postérieures. Enfin, s'agissant des prétentions de la caisse primaire d'assurance maladie, cette dernière ne produit pas un relevé suffisamment détaillé de ses débours dès lors que si elle demande le remboursement des frais hospitaliers engagés à compter du 9 novembre 2013, date à laquelle des examens cardiaques, puis l'angioplastie ont été réalisés, le remboursement des débours occasionnés par l'intervention du 9 novembre 2013 ne peut être accordé que dans le cas où il serait établi que l'infarctus aurait été causé, au moins partiellement, par une faute de l'hôpital ; il en est de même du remboursement du coût de l'hospitalisation inhérent au traitement d'un infarctus, s'il avait été soigné avec succès.

4. Il résulte de ce qui précède qu'il y a lieu, avant de statuer sur la requête et les appels incidents, d'ordonner un complément d'expertise aux fins de déterminer si le retard de transfusion à la suite de l'hémorragie survenue après l'opération de résection trans-urétrale de prostate subie par M. F... a présenté un caractère fautif et, si tel était le cas, quelle a été la part de responsabilité de ce retard dans la survenance de l'infarctus du myocarde dont M. F... a été victime, d'évaluer la durée d'hospitalisation inhérente au traitement d'un infarctus du myocarde traité avec succès, d'évaluer le taux de perte de chance de guérison due au retard dans la prise en charge de l'infarctus dont M. F... a été victime compte tenu de l'état de santé de l'intéressé et des différentes pathologies dont il souffrait, d'évaluer l'espérance de vie de M. F... eu égard à son état de santé antérieur à l'intervention chirurgicale du 7 novembre 2013. Il y a également lieu, avant de statuer sur la requête et les appels incidents, d'ordonner aux consorts F... de produire les justificatifs de revenus du foyer sur les trois années précédant le décès de M. F..., à savoir pour les années 2010, 2011 et 2012. Enfin, il y a également lieu, avant de statuer sur la requête et les appels incidents, d'ordonner à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine de produire un justificatif détaillé de ses débours afférents aux examens et à l'intervention chirurgicale d'angioplastie du 9 novembre 2013, et d'évaluer le coût de l'hospitalisation inhérente au traitement de l'infarctus du myocarde si celui-ci avait été soigné avec succès, en fonction de l'estimation que l'expert fera de cette durée d'hospitalisation.

DÉCIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête des consorts F... et les conclusions d'appel incident de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris et de la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine, procédé à un complément d'expertise par un collège de médecins composé d'un anesthésiste réanimateur et d'un cardiologue, désignés par le président de la Cour, avec mission pour lesdits experts :

1°) de prendre connaissance des pièces du dossier ainsi que du dossier médical de M. F..., de l'ensemble des examens médicaux réalisés, du rapport de l'expertise déjà ordonnée et des écritures produites par les parties ; de convoquer et entendre les parties et tous sachants ;

2°) de déterminer si le retard de transfusion à la suite de l'hémorragie survenue après l'opération de résection trans-urétrale de prostate de M. F... a présenté un caractère fautif et si tel était le cas, de déterminer la part de responsabilité de ce retard dans la survenance de l'infarctus du myocarde dont M. F... a été victime ;

3°) d'évaluer la durée d'hospitalisation inhérente au traitement d'un infarctus du myocarde traité avec succès ;

4°) d'évaluer le taux de perte de chance de guérison due au retard dans la prise en charge de l'infarctus de M. F... compte tenu de l'état de santé de l'intéressé et des différentes pathologies dont il souffrait ;

5°) d'évaluer l'espérance de vie de M. F... à la date du 7 novembre 2013 eu égard à son état de santé antérieur à l'intervention chirurgicale réalisée à cette date ;

6°) de déposer un pré-rapport afin de permettre aux parties de faire valoir contradictoirement leurs observations préalablement au dépôt du rapport définitif.

Article 2 : Les opérations d'expertise auront lieu contradictoirement entre les consorts F..., l'Assistance publique - hôpitaux de Paris et la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine.

Article 3 : Les experts accompliront leur mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Ils pourront recourir à un sapiteur s'ils l'estiment nécessaire. Les experts déposeront leur rapport au greffe de la Cour et en notifieront copie aux parties dans le délai fixé par le président de la Cour dans sa décision les désignant.

Article 4 : Les frais et honoraires d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 5 : Il est ordonné, avant dire-droit, aux consorts F..., de produire les justificatifs de revenus du foyer fiscal de M. F... pour les trois années précédant son décès, à savoir les années 2010, 2011 et 2012.

Article 6 : Il est ordonné, avant dire-droit, à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine de produire un justificatif détaillé de ses débours afférents aux examens et à l'intervention chirurgicale d'angioplastie du 9 novembre 2013, et d'évaluer le coût de l'hospitalisation inhérente au traitement d'un infarctus du myocarde si celui-ci avait été soigné avec succès (en fonction de l'évaluation par l'expert de cette durée).

Article 7 : Tous droits, moyens et conclusions des parties sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt sont réservés jusqu'en fin d'instance.

Article 8 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... K... C..., veuve F..., à Mlle B... F..., à la caisse primaire d'assurance maladie des Hauts-de-Seine et à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris.

Délibéré après l'audience du 12 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Luben, président de la formation de jugement,

- Mme D..., premier conseiller,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 30 avril 2021.

Le président de la formation de jugement,

I. LUBEN

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

8

N° 20PA01219


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01219
Date de la décision : 30/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-01-02-02 Responsabilité de la puissance publique. Faits susceptibles ou non d'ouvrir une action en responsabilité. Fondement de la responsabilité. Responsabilité pour faute.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : TSOUDEROS

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-04-30;20pa01219 ?
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