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29/04/2021 | FRANCE | N°20PA02559

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 29 avril 2021, 20PA02559


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision en date du 14 octobre 2019 par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son épouse, Mme A... F....

Par un jugement n° 1911164 du 31 juillet 2020, le tribunal administratif de Melun rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 septembre 2020, M. E..., représenté par Me C... demande à la

Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1911164 du 31 juillet 2020 du tribunal administratif de Mel...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision en date du 14 octobre 2019 par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé de faire droit à sa demande de regroupement familial présentée au bénéfice de son épouse, Mme A... F....

Par un jugement n° 1911164 du 31 juillet 2020, le tribunal administratif de Melun rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 septembre 2020, M. E..., représenté par Me C... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1911164 du 31 juillet 2020 du tribunal administratif de Melun dans toutes ses dispositions ;

2°) d'annuler la décision du 14 octobre 2019.

Il soutient que :

- les premiers juges n'ont pas répondu de manière motivée au moyen tiré du défaut de motivation de la décision contestée ;

- la décision contestée méconnaît les dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il justifie des ressources nécessaires et d'une surface habitable suffisante ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas produit de mémoire en défense.

Par une ordonnance du 2 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au

5 janvier 2021 à midi.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le décret n° 2017-1719 du 20 décembre 2017 ;

- le décret n° 2018-1173 du 19 décembre 2018 ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été rendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les observations de M. E....

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant tunisien né le 23 octobre 1978, a sollicité le 3 mai 2019 le bénéfice du regroupement familial pour son épouse, Mme A... F.... Par une décision du 14 octobre 2019, le préfet du Val-de-Marne a refusé de faire droit à cette demande au motif que M. E... ne disposait pas de ressources financières suffisantes. M. E... relève appel du jugement du 31 juillet 2020 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " les jugements sont motivés ".

3. M. E... soutient que les premiers juges auraient insuffisamment répondu au moyen tiré du défaut de motivation de la décision contestée et qu'ils n'auraient pas procédé à une analyse indépendante de celle du préfet sur ce moyen. Toutefois, il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges, qui ont relevé que la décision en litige, qui mentionne les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur lesquelles elle est fondée, précise celle des conditions du regroupement familial dont le préfet a estimé qu'elle n'était pas remplie, à savoir la condition tenant à l'existence de ressources suffisantes, le montant des revenus du requérant pris en considération et mentionne ainsi les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle est fondée, ont suffisamment répondu au moyen tiré du défaut de motivation de la décision contestée. En outre, le bien-fondé de la réponse qu'ils ont apporté à ce moyen est sans incidence sur la régularité du jugement. Par suite, le moyen tiré de ce que le jugement serait insuffisamment motivé doit être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

4. En premier lieu, aux termes de l'article L. 411-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le ressortissant étranger qui séjourne régulièrement en France depuis au moins dix-huit mois, sous couvert d'un des titres d'une durée de validité d'au moins un an prévus par le présent code ou par des conventions internationales, peut demander à bénéficier de son droit à être rejoint, au titre du regroupement familial, par son conjoint, si ce dernier est âgé d'au moins dix-huit ans, et les enfants du couple mineurs de dix-huit ans ". Aux termes de l'article L. 411-5 de ce code : " Le regroupement familial ne peut être refusé que pour l'un des motifs suivants : / 1° Le demandeur ne justifie pas de ressources stables et suffisantes pour subvenir aux besoins de sa famille. Sont prises en compte toutes les ressources du demandeur et de son conjoint indépendamment des prestations familiales, de l'allocation équivalent retraite et des allocations prévues à l'article L. 262-1 du code de l'action sociale et des familles, à l'article L. 815-1 du code de la sécurité sociale et aux articles L. 5423-1 et L. 5423-2 du code du travail. Les ressources doivent atteindre un montant qui tient compte de la taille de la famille du demandeur. Le décret en Conseil d'Etat prévu à l'article L. 441-1 fixe ce montant qui doit être au moins égal au salaire minimum de croissance mensuel et au plus égal à ce salaire majoré d'un cinquième. (...) ". Aux termes de l'article R. 411-4 du même code : " Pour l'application du 1° de l'article L. 411-5, les ressources du demandeur et de son conjoint qui alimenteront de façon stable le budget de la famille sont appréciées sur une période de douze mois par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum de croissance au cours de cette période. Ces ressources sont considérées comme suffisantes lorsqu'elles atteignent un montant équivalent à : / - cette moyenne pour une famille de deux ou trois personnes ".

5. Il résulte de la combinaison de ces dispositions que le caractère suffisant du niveau de ressources du demandeur est apprécié sur la période de douze mois précédant le dépôt de la demande de regroupement familial, par référence à la moyenne mensuelle du salaire minimum interprofessionnel de croissance au cours de cette même période, même si, lorsque ce seuil n'est pas atteint au cours de la période considérée, il est toujours possible, pour le préfet, de prendre une décision favorable en tenant compte de l'évolution des ressources du demandeur, y compris après le dépôt de la demande. En outre, en application du décret du 20 décembre 2017 portant relèvement du salaire minimum de croissance, le montant mensuel brut du salaire minimum interprofessionnel de croissance était de 1 498,47 euros pour l'année 2018. Ce montant a été porté à 1 521,22 euros pour l'année 2019 par le décret du 19 décembre 2018 portant relèvement du salaire minimum de croissance.

6. Il ressort des termes de la décision contestée que, pour rejeter la demande de regroupement familial présentée par M. E..., le préfet du Val-de-Marne s'est fondé sur la circonstance que le revenu brut mensuel moyen de l'intéressé, calculé sur les douze mois précédant le dépôt de la demande s'élevait à 833 euros et était ainsi inférieur au salaire minimum de croissance. M. E... soutient que la décision contestée méconnaît les dispositions précitées dès lors que, en tant que gérant locataire de taxi, il perçoit une rémunération mensuelle de 1 723 euros, conforme aux exigences prévues à l'article R. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Au soutien de ce moyen, le requérant produit deux attestations établies par un cabinet d'expertise comptable et mentionnant un résultat net comptable de 9 991 euros pour la période du 7 février 2018 au 31 décembre 2018, soit une moyenne mensuelle de 908,27 euros et un résultat net comptable de 15 507 euros pour la période du 1er janvier 2019 au 30 septembre 2019, soit une moyenne mensuelle de 1 723 euros.

7. Cependant, d'une part, ces pièces ne peuvent être regardées comme justifiant, de façon suffisamment fiable, les montants mensuels des salaires perçus par l'intéressé sur la période de référence de douze mois prévue à l'article R. 411-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors notamment qu'elles ne sont accompagnées d'aucun bulletin de salaire, et ne permettent pas, en tout état de cause, d'établir que M. E... justifierait de ressources supérieures au salaire minimum de croissance, le salaire brut moyen de l'intéressé pour la période de référence s'élevant, sur la base de ces documents, à 1 179,85 euros. D'autre part, M. E... ne saurait se prévaloir de ce que son salaire mensuel, depuis le 1er janvier 2019, s'élèverait à 1 723 euros dès lors que le résultat de l'exercice 2019 arrêté au 30 septembre de l'année ne permet pas de justifier de la stabilité des ressources de l'intéressé, le résultat de l'exercice de 2018 arrêté à la même date s'élevant à 13 455 euros et se clôturant à 9 991 euros. Dans ces conditions, M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet du Val-de-Marne lui a refusé le bénéfice du regroupement familial au motif que ses ressources étaient insuffisantes. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 411-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sera écarté.

7. En second lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance (...) ".

8. M. E... soutient qu'il est parfaitement intégré à la société française, notamment économiquement, et qu'il souhaite pouvoir vivre avec son épouse en France. Cependant, il ne justifie de l'exercice d'une activité professionnelle que depuis février 2018, et n'apporte aucun élément tendant à établir qu'il serait particulièrement intégré à la société française ni aucune précision sur les conditions de sa vie privée et familiale. Dans ces conditions, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. D... E....

Copie sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 15 avril 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 29 avril 2021.

La présidente de la 8ème chambre,

H. VINOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 20PA02559


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02559
Date de la décision : 29/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : TRAORE

Origine de la décision
Date de l'import : 11/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-04-29;20pa02559 ?
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