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26/04/2021 | FRANCE | N°19PA04005

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 26 avril 2021, 19PA04005


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 août 2019 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1921489 du 22 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistré

e le 10 décembre 2019 et une pièce enregistrée le 24 mars 2021, M. C... A..., représenté par Me E....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 août 2019 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office.

Par un jugement n° 1921489 du 22 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 décembre 2019 et une pièce enregistrée le 24 mars 2021, M. C... A..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1921489 du 22 novembre 2019 du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 21 août 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour temporaire d'un an portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai de quinze jours à compter de la notification du présent arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt à intervenir et de lui délivrer, dans cette attente, une autorisation provisoire de séjour, dans le délai de deux jours à compter de la notification du présent arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 3 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

M. C... A... soutient que :

- les premiers juges ont commis des erreurs d'appréciation ;

- le préfet de police ne l'a pas mis à même de présenter ses observations s'agissant des risques encourus en cas de renvoi en Somalie ;

- l'arrêté contesté a été pris en méconnaissance des stipulations des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il méconnaît les articles 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par une décision du 26 novembre 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. C... A....

Par un mémoire en défense enregistré le 15 septembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par M. C... A... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;

- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., ressortissant somalien né le 21 mars 1995, déclare être entré irrégulièrement sur le territoire français le 22 juillet 2018. Il a déposé une demande d'asile le 25 juillet suivant sur le fondement des dispositions des articles L. 741-1 et L. 741-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Sa demande a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 16 mai 2019. Par un arrêté du 21 août 2019, le préfet de police a fait obligation à M. C... A... de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. L'intéressé fait appel du jugement du 22 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. A supposer même que le premier juge ait, comme soutenu par M. C... A..., commis une erreur dans l'appréciation du moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que dans l'appréciation des modalités de notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de leurs conséquences sur sa situation personnelle, de telles erreurs ne sont pas de nature à affecter la régularité du jugement attaqué, mais seulement, le cas échéant, son bien-fondé, dont il appartient au juge d'appel de connaître dans le cadre de l'effet dévolutif.

Sur le bien-fondé du jugement :

Sur les conclusions à fin d'annulation :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un État membre de l'Union européenne (...) lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger (...) ".

4. Dans le cas prévu au 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où la décision faisant obligation de quitter le territoire français est prise après que la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire ont été définitivement refusés à l'étranger, l'obligation de quitter le territoire français découle nécessairement du défaut de reconnaissance de cette qualité ou de ce bénéfice. L'étranger qui présente une demande d'asile ne saurait ignorer qu'en cas de rejet de sa demande, il pourra, si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire lui ont été définitivement refusés, faire l'objet d'une mesure d'éloignement du territoire français. Il lui appartient, tant lors du dépôt de sa demande d'asile, lequel doit en principe faire l'objet d'une présentation personnelle du demandeur à la préfecture, que postérieurement en cas d'évolution de sa situation, d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles, et notamment celles de nature à permettre à l'administration d'apprécier son droit au séjour au regard d'autres fondements que celui de l'asile. Il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux. Le droit de l'intéressé d'être entendu, ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de la reconnaissance de la qualité de réfugié, n'impose pas à l'autorité administrative de le mettre à même de réitérer ses observations ou de présenter de nouvelles observations, de façon spécifique, sur l'obligation de quitter le territoire français qui est prise en conséquence du refus définitif de la reconnaissance de la qualité de réfugié.

5. M. C... A... entre dans le champ des dispositions du 6° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il a donc été mis à même de présenter ses observations lors de la procédure d'asile le concernant et pouvait faire valoir à tout moment auprès de la préfecture de police les éléments pertinents relatifs à sa situation personnelle et aux risques encourus en Somalie. Au surplus, l'intéressé n'établit ni même n'allègue qu'il aurait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux ou qu'il aurait été empêché de présenter ses observations avant que ne soit prise la mesure d'éloignement contestée. Par suite, le préfet de police, qui n'était pas tenu d'inviter M. C... A... à formuler des observations avant l'édiction de cette mesure, ne l'a pas privé de son droit à être entendu.

6. En deuxième lieu, M. C... A... soutient que l'absence de notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 16 mai 2019 l'a privé de la possibilité de bénéficier d'un recours effectif garanti par les stipulations de l'article 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Toutefois, le moyen ainsi soulevé, qui concerne la procédure de reconnaissance de la qualité de réfugié, ne peut être utilement invoqué à l'appui d'un recours mettant en cause la légalité de la décision par laquelle le préfet de police a fait obligation à l'intéressé de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office, intervenue à l'issue de cette procédure. En tout état de cause, M. C... A... n'est pas fondé à soutenir qu'il a été empêché de saisir la Cour nationale du droit d'asile en raison du défaut de notification de la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a introduit une demande d'aide juridictionnelle devant cette cour le 30 septembre 2019, qui lui a été accordée par une décision du 22 octobre suivant.

7. En troisième lieu, si M. C... A... soutient que la décision contestée a été prise en méconnaissance des stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, il ne peut utilement s'en prévaloir, car ces stipulations sont inapplicables aux arrêtés portant obligation de quitter le territoire français et fixation du pays de renvoi, lesquelles constituent une mesure de police administrative. Il suit de là que ce moyen ne peut qu'être écarté comme inopérant.

8. En quatrième et dernier lieu, aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes du dernier alinéa de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".

9. M. C... A... soutient qu'en cas de retour en Somalie, il serait menacé de mort par la milice islamiste Al-Shabab en raison de son appartenance à une minorité ethnique du pays. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que les éléments dont l'intéressé se prévaut sont identiques à ceux qu'il a exposés devant l'Office français de protection des réfugiés et apatrides, qui a rejeté sa demande d'asile. Par ailleurs, le requérant ne produit devant la Cour aucun élément au soutien de ses allégations, ne permettant ainsi pas d'établir la réalité des risques dont il se prévaut, ni de la menace dont il serait personnellement l'objet en cas de retour dans son pays d'origine. Il suit de là que le moyen tiré de ce que l'arrêté contesté aurait été pris en méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que des dispositions de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 21 août 2019 du préfet de police.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

11. Le présent arrêt n'impliquant aucune mesure d'exécution, les conclusions à fin d'injonction sous astreinte présentées par M. C... A... doivent être rejetées.

Sur les conclusions relatives aux frais de l'instance :

12. L'État n'étant pas la partie perdante, les conclusions de M. C... A... présentées sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 1er avril 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- M. Platillero, président-assesseur,

- M. D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 26 avril 2021.

Le rapporteur,

B. D...Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19PA04005


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA04005
Date de la décision : 26/04/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Bruno SIBILLI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : GALINDO SOTO

Origine de la décision
Date de l'import : 04/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-04-26;19pa04005 ?
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