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18/03/2021 | FRANCE | N°20PA00241

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 18 mars 2021, 20PA00241


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Orange a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 25 avril 2017 par lequel le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, a modifié l'arrêté du 24 janvier 2014 fixant la liste des exploitants auxquels sont affectés des quotas d'émission de gaz à effet de serre et le montant des quotas affectés à titre gratuit pour la période 2013-2020, en tant qu'il ajoute à l'annexe I, relative aux inst

allations produisant exclusivement de l'électricité et ne recevant aucun quota ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Orange a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 25 avril 2017 par lequel le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat, a modifié l'arrêté du 24 janvier 2014 fixant la liste des exploitants auxquels sont affectés des quotas d'émission de gaz à effet de serre et le montant des quotas affectés à titre gratuit pour la période 2013-2020, en tant qu'il ajoute à l'annexe I, relative aux installations produisant exclusivement de l'électricité et ne recevant aucun quota gratuit, le data center Val-de-Reuil (FR-new-05804966) et le data center d'Aubervilliers (FR-new·07403939), ensemble la décision du 25 juillet 2017 portant rejet de son recours gracieux à l'encontre de cet arrêté et, d'autre part, d'enjoindre au ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire de modifier les annexes à l'arrêté afin de faire figurer les installations de la société Orange à l'annexe II à l'arrêté du 24 janvier 2014.

Par un jugement n° 1714991 du 21 novembre 2019, le tribunal administratif de Paris a, d'une part, annulé l'arrêté attaqué en tant qu'il ajoute à l'annexe I relative aux installations produisant exclusivement de l'électricité et ne recevant aucun quota gratuit le data center

Val-de-Reuil (FR-new-05804966) et le data center d'Aubervilliers (FR-new·07403939), ainsi que la décision portant rejet du recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté et, d'autre part, enjoint au ministre de la transition écologique et solidaire d'inscrire les deux data centers de la société Orange à l'annexe II de son arrêté du 24 janvier 2014 dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent jugement.

Procédure devant la Cour :

Par un recours enregistré le 23 janvier 2020 et un mémoire complémentaire enregistré le 20 février 2020, le ministre de la transition écologique et solidaire demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1714991 du 21 novembre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Orange devant le tribunal administratif de Paris ;

Il soutient que :

- le jugement est insuffisamment motivé ;

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en se fondant sur des dispositions du 1 de l'article 10 bis de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 qui n'étaient pas en vigueur à la date de l'arrêté litigieux ;

- le 1 de l'article 10 bis de cette directive, qui a été transposé en droit interne, posant la règle de l'interdiction de la délivrance de quotas gratuits aux producteurs d'électricité, les premiers juges ont commis une erreur de droit en considérant que de tels quotas pouvaient être délivrés aux installations de l'intimée, regardée seulement comme n'entrant pas dans la définition des producteurs d'électricité tels que définis au u) de l'article 3 de la directive ;

- l'article 18 de l'ordonnance n° 2019-1034 du 9 octobre 2019 ayant, dans l'article L. 229-15 du code de l'environnement, posé la règle selon laquelle aucun quota n'est délivré gratuitement pour la production d'électricité, les premiers juges ne pouvaient, à la date de leur décision, lui enjoindre d'inscrire les deux data centers de l'intimée à l'annexe II de son arrêté du 24 janvier 2014.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 avril 2020, la société Orange, représenté par Me C... (D...) conclut au rejet du recours et à ce qu'il soit mis la somme de 5 000 euros à la charge de l'État en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle fait valoir qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Le 5 février 2021, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que la décision de la Cour était susceptible d'être fondée sur le moyen d'ordre public, relatif au champ d'application de la loi, et relevé d'office, tiré de ce que les dispositions combinées du III de l'article 32 de l'ordonnance n° 2019-1034 du 9 octobre 2019, non ratifiée, et de l'article L. 229-15 du code de l'environnement issu de ladite ordonnance, sont illégales en tant que, s'appliquant à des situations passées, elles méconnaissent ainsi le principe général du droit de non-rétroactivité des actes réglementaires.

Le 11 février 2021, la société Orange a présenté des observations en réponse à cette communication.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution, notamment ses articles 38, 55 et 88-1 ;

- le Traité sur l'Union européenne et le Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- la directive 2003/87/CE de Parlement Européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil, modifiée notamment par la directive 2009/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 modifiant la directive 2003/87/CE afin d'améliorer et d'étendre le système communautaire d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre ;

- le code de l'environnement ;

- la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 ;

- l'ordonnance n° 2012-827 du 28 juin 2012 ;

- l'ordonnance n° 2019-1034 du 9 octobre 2019 ;

- l'arrêté du ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargé des relations internationales sur le climat du 25 avril 2017 modifiant l'arrêté du 24 janvier 2014 modifié fixant la liste des exploitants auxquels sont affectés des quotas d'émission de gaz à effet de serre et le montant des quotas affectés à titre gratuit pour la période 2013-2020 ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 et le décret n° 2020-1406 du même jour portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,

- et les observations de Mme A... pour le ministre de la transition écologique et de Me Vermesch, avocat, de la société Orange.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 25 avril 2017, le ministre de l'environnement, de l'énergie et de la mer, chargée des relations internationales sur le climat a ajouté les deux centres de données, data center Val-de-Reuil (FR-new-05804966) et data center d'Aubervilliers

(FR-new·07403939) appartenant à la société Orange, à l'annexe I (" installations produisant exclusivement de l'électricité et ne recevant aucun quota gratuit ") à l'arrêté du 24 janvier 2014 fixant la liste des exploitants auxquels sont affectés des quotas d'émission de gaz à effet de serre et le montant des quotas affectés à titre gratuit pour la période 2013-2020. La société Orange a formé devant le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire un recours gracieux à l'encontre de cet arrêté en tant qu'il concerne ces deux installations, lequel recours a été rejeté par une décision du 25 juillet 2017, puis a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler cet arrêté, dans cette limite, ainsi que cette décision.

2. Par un jugement du 21 novembre 2019, le tribunal administratif de Paris a fait droit aux conclusions à fin d'annulation de la société Orange et a enjoint au ministre de la transition écologique et solidaire d'inscrire les deux data centers de la société Orange à l'annexe II de son arrêté du 24 janvier 2014 dans un délai de deux mois à compter de la notification du jugement. Le ministre de la transition écologique et solidaire relève appel de ce jugement devant la Cour.

Sur la régularité du jugement attaqué :

3. Le ministre de la transition écologique et solidaire soutient que le point 7 du jugement attaqué est insuffisamment motivé.

4. D'une part, après avoir évoqué le moyen de défense du ministre, et après rappelé les textes applicables, lesquels ne prévoient pas d'autre exclusion de l'allocation de quotas gratuits d'émission de gaz à effet de serre, que celle visant les producteurs d'électricité tels que définis au u) de l'article 3 de la directive, les premiers juges ont écarté la disposition du 1 de l'article 10 bis de la directive 2003/87/CE en jugeant explicitement qu'elle n'a pas été transposée en droit interne.

5. D'autre part, les premiers juges ont clairement réfuté le moyen du ministre fondé sur la transposition intégrale de la directive en droit interne, relativement à l'objectif de cette dernière, invoqué par lui, de l'inapplicabilité de la délivrance de quotas gratuits pour toute installation de production d'électricité.

6. Dès lors, les premiers juges ont suffisamment motivé leur décision afin de permettre à tout esprit normalement éclairé d'en saisir le sens à sa simple lecture. Le ministre de la transition écologique et solidaire ne peut donc sérieusement soutenir que le jugement attaqué serait insuffisamment motivé.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne le cadre juridique du litige :

7. Le système d'échanges de quotas d'émission de gaz à effet de serre de l'Union européenne est organisé par la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du

13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil, modifiée par l'ordonnance 2009/29/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009. Ces directives ont été transposées, en droit interne, par l'ordonnance n° 2004-330 du 15 avril 2004, le décret n° 2004-1412 du 23 décembre 2004, le décret n° 2005-189 du 25 février 2005, le décret n° 2005-190 du 25 février 2005, puis par le décret n° 2010-300 du 22 mars 2010, la loi

n° 2011-12 du 5 janvier 2011, l'ordonnance n° 2012-827 du 28 juin 2012, et le décret

n° 2012-1343 du 3 décembre 2012. Ces mesures de transposition ont été insérées dans le code de l'environnement, à la sous-section 1 (" Dispositions communes ") de la section 2 (" Quotas d'émission de gaz à effet de serre ") du chapitre IX (" Effet de serre ") du titre II (" Air et atmosphère ") du livre II (" Milieux physiques ") de sa Partie législative. L'article L. 229-15 de ce code, dans sa rédaction applicable à la date de l'arrêté et de la décision attaqués, dispose que : " I. - Les quotas d'émission de gaz à effet de serre délivrés aux exploitants d'installations autorisées à émettre ces gaz ou aux exploitants d'aéronef sont des biens meubles exclusivement matérialisés par une inscription au compte de leur détenteur dans le registre national mentionné à l'article L. 229-16. Ils sont négociables, transmissibles par virement de compte à compte et confèrent des droits identiques à leurs détenteurs. Ils peuvent être cédés dès leur délivrance sous réserve des dispositions de l'article L. 229-18./ II. - Les quotas d'émission peuvent être acquis, détenus et cédés par tout exploitant d'une installation au titre de laquelle a été délivrée par un État membre de la Communauté européenne une autorisation d'émettre des gaz à effet de serre, (...), par toute personne physique et par toute personne morale, conformément aux dispositions du règlement pris en application de l'article 19 de la directive du 13 octobre 2003 régissant l'ouverture de comptes dans le registre de l'Union. / III. - Les mêmes effets juridiques s'attachent sur le territoire national aux quotas d'émission délivrés par les autorités françaises et à ceux délivrés par l'autorité compétente de tout État membre de la Communauté. ".

En ce qui concerne l'application du système d'échanges de quotas d'émission de gaz à effet de serre aux deux data centers de la société Orange :

8. Aux termes de l'article L. 229-5 du code de l'environnement : " Les dispositions de la présente section s'appliquent aux installations classées (...) qui rejettent un gaz à effet de serre dans l'atmosphère et exercent une des activités dont la liste est fixée par décret en Conseil d'État. Pour l'établissement de cette liste, il est tenu compte de la capacité de production ou du rendement de l'installation ou de l'équipement. / (...) / ". L'article L. 229-6 du même code dispose que : " Les installations qui entrent dans le champ d'application de la présente section sont soumises à autorisation pour l'émission de gaz à effet de serre. " Aux termes de l'article R. 229-5 dudit code, inséré dans la sous-section 1 de la section 2 du chapitre IX du titre II de son livre II : " Système d'échanges de quotas d'émission de gaz à effet de serre appliqué aux installations classées pour la protection de l'environnement et aux équipements et installations mentionnés au premier alinéa de l'article L. 593-33 ", et pris pour l'application de l'article L. 229-5 précité : " La présente sous-section s'applique (...) aux installations classées pour la protection de l'environnement (...) produisant de l'énergie (...) et répondant aux critères fixés au tableau annexé au présent article, au titre de leurs rejets de dioxyde de carbone (...) / II. - Pour calculer la puissance calorifique totale de combustion d'une installation afin de décider de son inclusion dans le système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre, il est procédé par addition des puissances calorifiques de combustion de toutes les unités techniques qui la composent, dans lesquelles des combustibles sont brûlés au sein de l'installation. Parmi ces unités peuvent notamment figurer (...) les groupes électrogènes de secours. Les unités dont la puissance calorifique de combustion est inférieure à 3 MW et les unités qui utilisent exclusivement de la biomasse ne sont pas prises en considération dans ce calcul. (...) / En cas d'unités techniques de secours ne pouvant fonctionner simultanément avec des unités principales, soit par impossibilité matérielle, soit par l'effet d'une disposition de l'arrêté préfectoral d'autorisation d'exploiter, la puissance calorifique prise en compte dans le calcul visé ci-dessus est celle de la plus puissante des deux unités techniques, l'unité de secours ou l'unité remplacée. (...) ". Enfin, figure au tableau annexé à l'article R. 229-5 du code de l'environnement l'activité de " combustion de combustibles dans des installations dont la puissance calorifique totale de combustion est supérieure à 20 MW (à l'exception des installations d'incinération de déchets dangereux ou municipaux) " dès lors que cette activité produit du dioxyde de carbone. Aux termes du q) de l'article R. 229-5-1 du même code, l'on entend par " Combustion : toute oxydation de combustibles quelle que soit l'utilisation faite de la chaleur, de l'énergie électrique ou mécanique produites par ce processus et toutes autres activités s'y rapportant, y compris la destruction des effluents gazeux ".

9. Les deux data centers de Val-de-Reuil et d'Aubervilliers appartenant à la société Orange sont des installations classées pour la protection de l'environnement autorisées par arrêtés préfectoraux du 17 juillet 2007 et 24 février 2011. Dans le cadre de l'exploitation de ses data centers, la société Orange utilise des groupes électrogènes de secours soumis à autorisation au titre de la rubrique n° 2910 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement relative aux installations de combustion. Ces groupes électrogènes, d'une puissance supérieure à 20 MW, visent à permettre la continuité de l'approvisionnement en électricité des data centers dans l'hypothèse d'une coupure de courant. Il résulte des dispositions reproduites au point 7 que ces installations relèvent bien du système d'échanges de quotas d'émission de gaz à effet de serre.

En ce qui concerne la délivrance de quotas gratuits revendiquée par la société Orange au titre de ses deux data centers :

10. Le code de l'environnement dispose, en son article L. 229-7, tel qu'applicable au litige, que : " Un quota d'émission de gaz à effet de serre au sens de la présente section est une unité de compte représentative de l'émission de l'équivalent d'une tonne de dioxyde de carbone. / Pour chaque installation bénéficiant de l'autorisation d'émettre des gaz à effet de serre, (...) l'État affecte à l'exploitant, pour une période déterminée, des quotas d'émission et lui délivre chaque année, au cours de cette période, une part des quotas qui lui ont été ainsi affectés. / La quantité de gaz à effet de serre émise au cours d'une année civile est calculée ou mesurée et exprimée en tonnes de dioxyde de carbone. / À l'issue de chacune des années civiles de la période d'affectation, l'exploitant restitue à l'État sous peine des sanctions prévues à l'article L. 229-18 un nombre de quotas égal au total des émissions de gaz à effet de serre de ses installations (...). " Aux termes de l'article L. 229-8 du même code, dans sa rédaction alors en vigueur : " I. - Les quotas qui ne sont pas délivrés gratuitement sont mis aux enchères. / II. - La quantité de quotas délivrés gratuitement pour chaque installation mentionnée au premier alinéa de l'article L. 229-5 conformément aux paragraphes 4 à 7 de l'article 10 bis de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 correspond à 80 % de la quantité fixée conformément aux mesures visées au paragraphe 1 de cet article de la directive et diminue ensuite chaque année en quantités égales pour atteindre 30 % à compter de 2020, en vue de parvenir à la suppression des quotas gratuits en 2027.(...) Aucun quota n'est délivré gratuitement aux producteurs d'électricité définis au u) de l'article 3 de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003, (...) sous réserve des paragraphes 4 et 8 de l'article 10 bis et sans préjudice de l'article 10 quater de cette directive. ".

11. Aux termes de l'article 3 de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 : " Aux fins de la présente directive, on entend par : / (...) / u) " producteur d'électricité ", une installation qui, à la date du 1er janvier 2005 ou ultérieurement, a produit de l'électricité destinée à la vente à des tiers et dans laquelle n'a lieu aucune activité énumérée dans l'annexe I, autre que la " combustion de combustibles ". Les activités énumérées à l'annexe I de cette directive, hors la " Combustion de combustibles dans des installations dont la puissance calorifique totale de combustion est supérieure à 20 MW (à l'exception des installations d'incinération de déchets dangereux ou municipaux) (...) " ne mentionnent pas les groupes électrogènes de secours soumis à autorisation au titre de la rubrique n° 2910 de la nomenclature des installations classées pour la protection de l'environnement relative aux installations de combustion. Par ailleurs, les renvois opérés par le II de l'article L. 229-8 du code de l'environnement aux 4 à 7 et 8 de l'article 10 bis et à l'article 10 quater de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 sont sans lien avec les questions soulevées dans le cadre du présent litige.

12. Le ministre de la transition écologique et solidaire soutient que, dès lors que le

1 de l'article 10 bis de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003, transposé en droit interne, pose la règle de l'interdiction de la délivrance de quotas gratuits aux producteurs d'électricité, les premiers juges ont commis une erreur de droit en considérant que de tels quotas pouvaient être délivrés aux installations de l'intimée, regardée seulement comme n'entrant pas dans la définition des producteurs d'électricité tels que définis au u) de l'article 3 de la directive, et qu'ils se sont d'ailleurs fondés sur une version de ces dispositions qui n'étaient pas en vigueur à la date de l'arrêté litigieux.

13. Aux termes du 1 de l'article 10 bis de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 : " 1. Le 31 décembre 2010 au plus tard, la Commission arrête des mesures d'exécution pleinement harmonisées à l'échelle communautaire relatives à l'allocation harmonisée des quotas visés aux paragraphes 4, 5, 7 et 12, y compris toute disposition nécessaire pour l'application harmonisée du paragraphe 19. / Ces mesures, qui visent à modifier des éléments non essentiels de la présente directive en la complétant, sont arrêtées en conformité avec la procédure de réglementation avec contrôle visée à l'article 23, paragraphe 3. / Les mesures visées au premier alinéa déterminent, dans la mesure du possible, des référentiels ex-ante pour la Communauté, de façon à garantir que les modalités d'allocation des quotas encouragent l'utilisation de techniques efficaces pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et améliorer le rendement énergétique, en recourant aux techniques les plus efficaces, aux solutions et aux procédés de production de remplacement, à la cogénération à haut rendement, à la récupération efficace d'énergie à partir des gaz résiduaires, à l'utilisation de la biomasse, ainsi qu'au captage et au stockage du CO2, lorsque ces moyens sont disponibles, et n'encouragent pas l'accroissement des émissions. Aucun quota n'est délivré à titre gratuit pour la production d'électricité, à l'exception des cas relevant de l'article 10 quater et de l'électricité produite à partir de gaz résiduaires. /Pour chaque secteur et sous-secteur, en principe, le référentiel est calculé pour les produits et non pour les intrants, de manière à maximiser la réduction des émissions de gaz à effet de serre et les gains d'efficacité énergétique tout au long du processus de production du secteur ou du sous-secteur concerné. / Pour la définition des principes à appliquer afin de déterminer les référentiels ex-ante à utiliser dans les différents secteurs et sous-secteurs, la Commission consulte les parties intéressées, y compris les secteurs et sous-secteurs concernés. / Une fois approuvé par la Communauté un accord international sur le changement climatique menant à des réductions contraignantes des émissions de gaz à effet de serre comparables à celles en vigueur dans la Communauté, la Commission réexamine ces mesures pour faire en sorte que l'allocation de quotas à titre gratuit n'ait lieu que dans les cas où elle se justifie pleinement à la lumière dudit accord. ".

14. En premier lieu, si le tribunal administratif a effectivement, au point 5 du jugement attaqué, cité le 1 de l'article 10 bis de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003 dans une rédaction en vigueur postérieurement à l'arrêté et à la décision contestés, le texte ainsi reproduit ne différait dans ses deux premières phrases de celui réellement applicable qu'en ce qui concerne la durée de l'habilitation conférée à la Commission européenne aux fins de prendre des actes délégués, et comportait en revanche l'énoncé des mêmes règles substantielles, et notamment celle, précisément invoquée par le ministre, relative à l'interdiction de délivrance de quotas à titre gratuit à la production d'électricité. Par suite, en se fondant sur une version de la directive légèrement différente de celle alors en vigueur, mais sans que cette différence emporte une quelconque incidence sur les seules dispositions utiles au litige qu'il leur appartenait de trancher, les premiers juges n'ont entaché leur décision d'aucune erreur de droit.

15. En second lieu, d'une part, il ressort des termes mêmes des dispositions du troisième alinéa du 1 de l'article 10 bis de la directive précitée, en vertu desquelles aucun quota n'est délivré à titre gratuit pour la production d'électricité, ainsi que de leur insertion dans l'économie générale dudit article, qu'elles n'ont pour seul objet que d'instituer une règle destinée, non pas à être directement transposée dans leur droit interne par les États membres, mais à encadrer l'habilitation conférée à la Commission européenne aux fins de prendre des actes délégués portant sur " des mesures d'exécution pleinement harmonisées à l'échelle communautaire relatives à l'allocation harmonisée des quotas " délivrés conformément aux autres points de l'article 10 bis et, d'autre part, comme l'ont relevé à bon droit les premiers juges, cette disposition n'a fait l'objet d'aucune transposition en droit interne, du moins jusqu'à l'intervention de l'ordonnance n° 2019-1034 du 9 octobre 2019 qui sera mentionnée au point 21.

16. D'autre part, et comme il résulte de la jurisprudence constante de la Cour de justice de l'Union européenne, une directive ne peut pas, par elle-même, créer d'obligations pour un particulier et ne peut donc être invoquée en tant que telle à son encontre, dès lors qu'étendre l'invocabilité d'une disposition d'une directive non transposée, ou incorrectement transposée, au domaine des rapports entre les particuliers reviendrait à reconnaître à l'Union européenne le pouvoir d'édicter avec effet immédiat des obligations à la charge des particuliers, alors qu'elle ne détient cette compétence que là où lui est attribué le pouvoir d'adopter des règlements. En outre, les juridictions nationales ne sont tenues d'écarter une disposition nationale contraire à une directive que lorsque celle-ci est invoquée à l'encontre d'un État membre, des organes de son administration, y compris des autorités décentralisées, ou des organismes et entités qui sont soumis à l'autorité ou au contrôle de l'État ou qui se sont vu confier par un État membre l'accomplissement d'une mission d'intérêt public et qui, à cette fin, détiennent des pouvoirs exorbitants par rapport à ceux qui résultent des règles applicables dans les relations entre particuliers. Il s'en infère qu'un État membre ne peut utilement invoquer une directive non transposée dans le cadre d'un litige l'opposant à un particulier.

17. Il résulte de ce qui précède que le ministre de la transition écologique et solidaire ne peut utilement ni n'est fondé à invoquer les dispositions du troisième alinéa du 1 de l'article 10 bis de la directive 2003/87/CE du 13 octobre 2003, qui n'ont pas été transposées en droit interne et auxquelles ne renvoie expressément aucune disposition législative ou réglementaire en vigueur, pour étendre à la " production d'électricité " l'interdiction de délivrer des quotas à titre gratuit, prévue par le II de l'article L. 229-8 du code de l'environnement pour les seuls " producteurs d'électricité définis au u) de l'article 3 de la directive 2003/87/CE du

13 octobre 2003 ".

18. Il s'ensuit que le ministre de la transition écologique et solidaire n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté ministériel contesté en tant qu'il ajoute à l'annexe I de l'arrêté du l'arrêté du 24 janvier 2014, relative aux installations produisant exclusivement de l'électricité et ne recevant aucun quota gratuit, le data center Val-de-Reuil (FR-new-05804966) et le data center d'Aubervilliers (FR-new·07403939), ensemble la décision portant rejet du recours gracieux formé à l'encontre de cet arrêté. Les conclusions de son recours tendant à l'annulation du jugement attaqué doivent être rejetées sur ce point.

En ce qui concerne l'injonction prononcée par les premiers juges :

19. Le juge administratif doit statuer sur les conclusions à fin d'injonction présentées sur le fondement de l'article L. 911-1 du code de justice administrative en tenant compte de la situation de droit et de fait existant à la date de sa décision.

20. Le ministre de la transition écologique et solidaire soutient que, à la date du jugement attaqué, par l'article 2 duquel le tribunal administratif lui a enjoint d'inscrire, dans un délai de deux mois, les deux data centers de la société Orange à l'annexe II de son arrêté du 24 janvier 2014, l'ordonnance n° 2019-1034 du 9 octobre 2019 relative au système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre avait modifié l'état du droit pour interdire désormais la délivrance de quotas gratuits pour la production d'électricité.

21. Aux termes de l'article L. 229-15 du code de l'environnement, dans sa rédaction issue de l'ordonnance n° 2019-1034 du 9 octobre 2019 : " I. - Des quotas d'émission de gaz à effet de serre sont délivrés gratuitement, sur demande, par l'autorité administrative aux exploitants des installations bénéficiant de l'autorisation mentionnée au premier alinéa de l'article L. 229-6, (...). Ces quotas sont affectés au titre d'une période déterminée et délivrés annuellement. (...) / " II. - (...) Aucun quota n'est délivré gratuitement pour la production d'électricité, à l'exception de l'électricité produite à partir de gaz résiduaire. / Aucun quota n'est délivré gratuitement aux producteurs d'électricité au sens du point u) de l'article 3 de la directive 2003/87/ CE du 13 octobre 2003, (...). " En l'absence de dispositions transitoires reportant leur entrée en vigueur, ces dispositions sont entrées en vigueur dans les conditions prévues à l'article 1er du code civil, soit le lendemain de leur publication au Journal officiel de la République française. Or, il résulte tant du III de l'article 32 de la même ordonnance que des écritures du ministre devant la Cour, que la délivrance gratuite de quotas d'émission de gaz à effet de serre " au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2020 " est désormais régie par les dispositions de la sous-section 1 de la section 2 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement (partie Législative) telles qu'issues de ladite ordonnance. Il s'ensuit que les auteurs de l'ordonnance ont entendu modifier des dispositions ayant produit des effets dans le passé.

22. D'une part, dès lors que, conformément à l'article 2 du code civil : " La loi ne dispose que pour l'avenir ; elle n'a point d'effet rétroactif ", le principe selon lequel les actes réglementaires ne peuvent avoir une portée rétroactive constitue un principe général du droit, dont la méconnaissance, qui relève du champ d'application de la loi, est d'ordre public. Il appartient au juge administratif, le cas échéant d'office et par la voie de l'exception d'illégalité, d'écarter l'application à un litige de toute disposition de nature réglementaire méconnaissant ce principe.

23. D'autre part, une habilitation accordée par le Parlement sur le fondement de l'article 38 de la Constitution élargit de façon temporaire le pouvoir réglementaire dont le Gouvernement dispose, en l'autorisant à adopter des mesures qui relèvent du domaine normalement réservé à la loi, que ce soit en vertu de l'article 34 de la Constitution ou d'autres dispositions de celle-ci. Alors même que les mesures ainsi adoptées ont la même portée que si elles avaient été prises par la loi, les ordonnances prises en vertu de l'article 38 de la Constitution conservent le caractère d'actes administratifs, aussi longtemps qu'elles n'ont pas fait l'objet d'une ratification, qui ne peut être qu'expresse, par le Parlement. À ce titre, elles doivent respecter, outre les règles de compétence, de forme et de procédure qui leur sont applicables, les règles et principes de valeur constitutionnelle et les engagements internationaux de la France. Elles ne peuvent intervenir dans le domaine de la loi, abroger ou modifier des lois ou y déroger que dans la limite de l'habilitation conférée par le législateur et, sauf à ce que cette habilitation ait permis d'y déroger, elles sont soumises au respect des principes généraux du droit s'imposant à toute autorité administrative. Leur légalité peut notamment être contestée par la voie de l'exception, à l'occasion de la contestation d'un acte ultérieur pris sur leur fondement, devant toute juridiction, qui peut en écarter l'application, sous réserve, le cas échéant, d'une question préjudicielle. Lorsque le délai d'habilitation est expiré, la contestation, au regard des droits et libertés que la Constitution garantit, des dispositions d'une ordonnance relevant du domaine de la loi n'est recevable qu'au travers d'une question prioritaire de constitutionnalité. Toutefois, la circonstance qu'une question prioritaire de constitutionnalité puisse, dans une telle hypothèse, être soulevée, ne saurait cependant faire obstacle à ce que le juge écarte son application au litige dont il est saisi, si elle est illégale pour d'autres motifs, y compris du fait de sa contrariété avec d'autres règles de valeur constitutionnelle que les droits et libertés que la Constitution garantit.

24. En l'espèce, il est constant que l'ordonnance n° 2019-1034 du 9 octobre 2019 n'a jamais été expressément ratifiée dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution : le projet de loi nº 2626 ratifiant l'ordonnance n° 2019-1034 du 9 octobre 2019 relative au système d'échange de quotas d'émissions de gaz à effet de serre, enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale le 29 janvier 2020, n'a jamais été mis en discussion, et l'ordonnance n'a en outre, depuis lors, fait l'objet d'aucune ratification expresse par une quelconque disposition législative.

25. Par ailleurs, aux termes de l'article 216 de la loi n° 2019-486 du 22 mai 2019 relative à la croissance et la transformation des entreprises : " I. - Dans les conditions prévues à l'article 38 de la Constitution, le Gouvernement est autorisé à prendre par voie d'ordonnance, dans un délai de douze mois à compter de la promulgation de la présente loi, toute mesure relevant du domaine de la loi : / 1° Nécessaire à la transposition de la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 établissant un système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre dans la Communauté et modifiant la directive 96/61/CE du Conseil, modifiée en dernier lieu par la directive (UE) 2018/410 du Parlement européen et du Conseil du 14 mars 2018 modifiant la directive 2003/87/CE afin de renforcer le rapport coût-efficacité des réductions d'émissions et de favoriser les investissements à faible intensité de carbone, et la décision (UE) 2015/1814 et, le cas échéant, à la mise en oeuvre des actes délégués et des actes d'exécution prévus par cette directive ;/

2° Complétant et adaptant les dispositions du code de l'environnement, du code de l'énergie et du code des douanes pour assurer leur mise en conformité avec la directive 2003/87/CE du Parlement européen et du Conseil du 13 octobre 2003 précitée et avec les actes délégués, actes d'exécution et autres textes pris en application de cette directive ; / 3° Modifiant les dispositions du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement afin d'harmoniser l'état du droit, d'assurer la cohérence des textes, d'améliorer le dispositif et de remédier aux éventuelles erreurs. / II. - Un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de six mois à compter de la publication de l'ordonnance. " Il ne ressort pas des termes exprès des dispositions législatives précitées, non plus que des travaux préparatoires ayant conduit à leur adoption, que le Gouvernement aurait été habilité à modifier par ordonnance l'état du droit en vigueur aux fins notamment de priver les exploitants des installations soumises à l'autorisation mentionnée au premier alinéa de l'article L. 229-6, du bénéfice attendu, dans le cadre des dispositions législatives antérieurement applicables, de l'attribution gratuite de quotas d'émission de gaz à effet de serre au titre de la période allant du 1er janvier 2013 au 31 décembre 2020. Par suite, les dispositions combinées du III de l'article 32 de l'ordonnance n° 2019-1034 du 9 octobre 2019 et de l'article L. 229-15 du code de l'environnement issu de ladite ordonnance sont illégales en tant que, s'appliquant à des situations passées, elles méconnaissent ainsi le principe général du droit de non-rétroactivité des actes réglementaires. Il y a donc lieu d'en écarter l'application au présent litige. Dès lors, les dispositions de la sous-section 1 de la section 2 du chapitre IX du titre II du livre II du code de l'environnement, issues de l'ordonnance n° 2012-827 du 28 juin 2012 relative au système d'échange de quotas d'émission de gaz à effet de serre (période 2013-2020) et telles qu'en vigueur antérieurement à la publication ordonnance du 9 octobre 2019, suffisent à fonder légalement l'injonction prononcée par l'article 2 du jugement attaqué. Dès lors, c'est à bon droit que les premiers juges, lorsqu'ils ont prononcé l'injonction contestée, se sont fondés sur l'état du droit résultant des dispositions du code de l'environnement telles qu'en vigueur à la date des décisions litigieuses, et non pas sur celles issues de l'ordonnance du 9 octobre 2019.

26. Il résulte de ce qui précède que le ministre de la transition écologique et solidaire n'est pas fondé à se plaindre de ce que le tribunal administratif de Paris lui a enjoint d'inscrire les deux data centers de la société Orange à l'annexe II de son arrêté du 24 janvier 2014 dans un délai de deux mois à compter de la notification de son jugement.

27. Il résulte de tout ce qui précède que le recours du ministre de la transition écologique doit être rejeté.

Sur les frais du litige :

28. Il y a lieu de mettre à la charge de l'État, qui succombe dans la présente instance, le versement à la société Orange d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : Le recours du ministre de la transition écologique et solidaire est rejeté.

Article 2 : L'État (ministère de la transition écologique) versera à la société Orange une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de la transition écologique et à la société Orange.

Délibéré après l'audience du 11 février 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. B..., président-assesseur,

- M. Doré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 18 mars 2021.

Le président,

J. LAPOUZADE

La République mande et ordonne au ministre de la transition écologique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20PA00241


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