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16/03/2021 | FRANCE | N°20PA00994

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 16 mars 2021, 20PA00994


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer l'annulation de l'arrêté du 6 mai 2019 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour.

Par un jugement n° 1912318/3-3 du 14 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 mars 2020 et le 23 novembre 2020, Mme C..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugem

ent n° 1912318/3-3 du 14 janvier 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer l'annulation de l'arrêté du 6 mai 2019 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour.

Par un jugement n° 1912318/3-3 du 14 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 16 mars 2020 et le 23 novembre 2020, Mme C..., représentée par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1912318/3-3 du 14 janvier 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 6 mai 2019 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative à verser à son conseil.

Elle soutient que :

- l'arrêté attaqué méconnaît les dispositions du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation ;

- il méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 24 novembre 2020 et le 7 décembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que ;

- aucun des moyens de la requête n'est fondé ;

- la requérante ne justifie pas que l'auteur de la reconnaissance de paternité contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant.

Par une ordonnance du 24 novembre 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 8 décembre 2020 à 12h.

Un mémoire, présenté pour Mme C..., a été enregistré le 28 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2018-778 du 10 septembre 2018 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. F... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B... C..., ressortissante marocaine née le 10 juin 1979, entrée en France en 2006 selon ses allégations, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 6° de l'article L. 313-11 et du L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par arrêté du 6 mai 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre sollicité. Mme C... fait appel du jugement du 14 janvier 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / (...) 6° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui est père ou mère d'un enfant français mineur résidant en France, à la condition qu'il établisse contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant dans les conditions prévues par l'article 371-2 du code civil depuis la naissance de celui-ci ou depuis au moins deux ans, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée ; / Lorsque la filiation est établie à l'égard d'un parent, en application de l'article 316 du code civil, le demandeur, s'il n'est pas l'auteur de la reconnaissance de paternité ou de maternité, justifie que ce dernier contribue effectivement à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, dans les conditions prévues à l'article 371-2 du même code, ou produit une décision de justice relative à la contribution à l'éducation et à l'entretien de l'enfant. Lorsque le lien de filiation est établi mais que la preuve de la contribution n'est pas rapportée ou qu'aucune décision de justice n'est intervenue, le droit au séjour du demandeur s'apprécie au regard du respect de sa vie privée et familiale et au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant (...) ". L'article 18 du code civil dispose : " Est français l'enfant dont l'un des parents au moins est français. "

3. La reconnaissance d'un enfant est opposable aux tiers, en tant qu'elle établit un lien de filiation et, le cas échéant, en tant qu'elle permet l'acquisition par l'enfant de la nationalité française, dès lors que cette reconnaissance a été effectuée conformément aux conditions prévues par le code civil. Elle s'impose en principe à l'administration tant qu'une action en contestation de filiation n'a pas abouti.

4. Pour refuser le titre de séjour sollicité en tant que mère d'un enfant français, le préfet de police a considéré que la nationalité française de l'enfant de Mme C... n'était pas prouvée, dès lors que M. A..., ressortissant français qui a reconnu le 25 août 2014 à la mairie du 16ème arrondissement de Paris l'enfant que portait Mme C..., a déclaré contester la paternité de celui-ci, né D... A... le 22 février 2015. La contestation de la paternité n'ayant pas abouti à la date de l'arrêté attaqué, ainsi qu'il est constant, la reconnaissance par M. A... de son enfant D... s'imposait à l'administration, en tant qu'elle permettait à cet enfant d'acquérir la nationalité française en vertu de l'article 18 du code civil précité. La requérante est, par suite, fondée à soutenir que c'est à tort que le préfet de police a fondé le refus de sa demande de titre de séjour présentée sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sur le motif qu'elle ne justifiait pas que son enfant D... avait la nationalité française.

5. Le préfet de police doit toutefois être regardé comme demandant, dans son mémoire du 7 décembre 2020, communiqué à Mme C..., une substitution de motifs, en soutenant que la requérante ne démontre pas que M. A... ait des liens avec son fils, avec lequel il n'a jamais vécu, dès lors qu'il n'a jamais contribué à son entretien et son éducation. D'une part, une telle absence de contribution est constante, et ressort également des écritures de Mme C... ainsi que du jugement du Tribunal de grande instance de Paris rendu le 17 septembre 2019 qu'elle a versé au dossier. D'autre part, le respect de la vie privée et familiale de Mme C... n'impose pas son droit au séjour, ainsi qu'il est jugé au point 9 du présent arrêt, pas plus que l'intérêt supérieur de l'enfant, au regard notamment de son jeune âge. Le préfet de police pouvait dès lors, pour ce seul motif, rejeter la demande de titre présentée sur le fondement du 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, dont le deuxième alinéa, issu de la loi du 18 septembre 2018 pour une immigration maîtrisée, un droit d'asile effectif et une intégration réussie, est applicable à la demande formée par Mme C... en avril 2019.

6. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. "

7. Si la requérante fait valoir qu'elle réside en France de manière continue depuis 2006, elle n'en justifie pas en produisant seulement, pour la première fois en appel, une ordonnance médicale de novembre 2007, une feuille de soins et deux ordonnances de décembre 2009, une ordonnance d'octobre 2010, un contrat de travail comme vendeuse de presse daté du 1er janvier 2011, trois avis d'impôt sur le revenu, et un avis de taxe d'habitation au titre de 2016. Les circonstances invoquées qu'elle serait bien intégrée en France et n'est pas connue des services de police ne sont, en tout état de cause, pas de nature à elles seules à caractériser des considérations humanitaires ou des motifs exceptionnels justifiant la délivrance d'un titre sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14.

8. Enfin, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

9. Si Mme C... fait valoir qu'elle vit en France de manière continue depuis 2006, sans l'établir ainsi qu'il résulte du point 5, que son enfant, dont le père présumé est français, y est né en février 2015, elle n'est pas dépourvue de toute attache au Maroc où résident ses parents et ses soeurs, et où elle a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-sept ans. Dans ces conditions, et eu égard au jeune âge de son enfant à la date de l'arrêté attaqué, ainsi qu'à la circonstance constante que le père présumé de celui-ci ne contribue pas à son entretien et son éducation, le préfet de police, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels cette décision a été prise, et n'a dès lors pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il n'a, pour les mêmes motifs, pas entaché son arrêté d'une erreur manifeste d'appréciation.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à se plaindre de ce que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elles a présentées à fin d'injonction et sur le fondement de l'article L. 761-1 doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er: La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Soyez, président assesseur,

- M. F..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2021.

Le rapporteur,

A. F...Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

20PA00994


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00994
Date de la décision : 16/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Alexandre SEGRETAIN
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : MFENJOU

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-03-16;20pa00994 ?
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