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16/03/2021 | FRANCE | N°19PA02013

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 16 mars 2021, 19PA02013


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française, par deux requêtes distinctes, d'une part d'annuler la décision du 18 juin 2018 par laquelle le vice-recteur de la Polynésie française l'a informée de l'avis défavorable émis par le jury académique le 15 juin 2018 à sa titularisation en qualité de professeur de lycée professionnel, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 14 août 2018 par lequel le ministre de l'éducation nationale a prononcé son licenciement à l'issue de sa

deuxième année de stage en tant que professeur de lycée professionnel, et, dans ch...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... C... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française, par deux requêtes distinctes, d'une part d'annuler la décision du 18 juin 2018 par laquelle le vice-recteur de la Polynésie française l'a informée de l'avis défavorable émis par le jury académique le 15 juin 2018 à sa titularisation en qualité de professeur de lycée professionnel, d'autre part, d'annuler l'arrêté du 14 août 2018 par lequel le ministre de l'éducation nationale a prononcé son licenciement à l'issue de sa deuxième année de stage en tant que professeur de lycée professionnel, et, dans chaque requête, d'ordonner sa titularisation en qualité de professeur de lycée professionnel.

Par un jugement nos 1800279, 1800328 du 26 mars 2019, le Tribunal administratif de la Polynésie française a joint les deux requêtes et les a rejetées.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 24 juin 2019 et le 19 mai 2020, Mme C..., représenté par la SELARL Cabinet Lau et Nougaro, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement nos 1800279, 1800328 du 26 mars 2019 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) d'annuler la délibération du jury académique du 15 juin 2018, la décision du 18 juin 2018 du vice-recteur de la Polynésie française et l'arrêté du 14 août 2018 du ministre de l'éducation nationale ;

3°) d'ordonner sa titularisation immédiate en qualité de professeur de lycée professionnel ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 400 000 francs CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision du 18 juin 2018 lui faisant grief et portant les voies et délais de recours, sa contestation est recevable ;

- son auteur est incompétent ;

- le Tribunal administratif a omis de répondre au moyen tiré de l'incompétence de l'auteur du courrier du 18 juin 2018 ;

- la contestation de la délibération du jury du 15 juin 2018 est recevable ;

- une insuffisance professionnelle ne saurait lui être reprochée pendant son stage de formation en CETAD dès lors qu'elle n'a pas été placée dans des conditions qui permettaient à l'administration de se prononcer sur son aptitude à exercer les fonctions d'enseignante du lycée professionnel.

Par un mémoire en défense, enregistré le 30 octobre 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions visant le courrier du 18 juin 2018 sont irrecevables, dès lors qu'il ne présente pas le caractère de décision faisant grief ;

- les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- le code de l'éducation ;

- le décret n° 92-1189 du 6 novembre 1992 ;

- l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., professeure stagiaire de lycée professionnel en mathématiques-sciences physiques, a été affectée au lycée professionnel de Mahina pour effectuer son stage en 2016-2017. N'ayant pas été titularisée à son issue, elle a été autorisée à effectuer une seconde année de stage par arrêté du vice-recteur de la Polynésie française et a été affectée à cet effet au centre d'éducation aux technologies appropriées au développement (CETAD) de Pao Pao, sur l'ile de Moorea. A la fin de cette seconde année de stage, le vice-recteur l'a informée par courrier du 18 juin 2018 que le jury académique, par une délibération du 15 juin 2018, avait émis un avis défavorable à sa titularisation. Par un arrêté du 14 août 2018, le ministre de l'éducation nationale a licencié Mme C.... Elle fait appel du jugement du 26 mars 2019 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses demandes tendant à l'annulation de la délibération du 15 juin 2018, du courrier du 18 juin 2018 et de l'arrêté du 14 août 2018.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article 8 de l'arrêté du 22 août 2014 fixant les modalités de stage, d'évaluation et de titularisation de certains personnels enseignants et d'éducation de l'enseignement du second degré stagiaires : " Après délibération, le jury établit la liste des fonctionnaires stagiaires qu'il estime aptes à être titularisés. " L'article 9 du même arrêté dispose : " Le recteur prononce la titularisation des stagiaires estimés aptes par le jury. (...) Il transmet au ministre les dossiers des stagiaires qui n'ont été ni titularisés ni autorisés à accomplir une seconde année de stage et qui sont, selon le cas, licenciés ou réintégrés dans leur corps, cadre d'emplois ou emploi d'origine. " Aux termes de l'article 2 du même arrêté : " Au cours de leur stage, les stagiaires bénéficient d'une formation, mentionnée dans les statuts particuliers susvisés, alternant des périodes de mise en situation professionnelle, pendant lesquelles ils exercent les missions dévolues aux membres du corps d'accueil, et des périodes de formation au sein d'un établissement d'enseignement supérieur. "

3. Il résulte de ces dispositions que le jury se prononce à l'issue d'une période de formation et de stage. S'agissant non d'un concours ou d'un examen mais d'une procédure tendant à l'appréciation de la manière de servir qui doit être faite en fin de stage, cette appréciation peut être censurée par le juge de l'excès de pouvoir en cas d'erreur manifeste. Elle ne peut toutefois être contestée qu'à l'occasion d'un recours dirigé contre la décision prononçant la titularisation, le licenciement ou la réintégration dans son corps, cadre d'emploi ou emploi d'origine du professeur stagiaire. Par suite, la demande de Mme C... tendant à l'annulation de la délibération du 15 juin 2018 était irrecevable. Par voie de conséquence, ses conclusions devant le Tribunal visant l'annulation du courrier du vice-recteur de la Polynésie française, du 18 juin 2018, l'informant de ce que le jury académique avait rendu un avis défavorable lors de sa délibération du 15 juin précédent, qui ne présentait au demeurant pas le caractère d'une décision faisant grief, étaient également irrecevables. Dès lors, le Tribunal administratif de la Polynésie française était fondé à rejeter comme irrecevable sa requête n° 1800279 et, en conséquence, à ne pas examiner le moyen tiré de l'incompétence du signataire du courrier du 18 juin 2018.

Sur le bien-fondé du jugement :

4. En premier lieu, il résulte de ce qui a été jugé au point 3 du présent arrêt que les conclusions de la requête d'appel tendant à l'annulation de la délibération du jury, du 15 juin 2018, et du courrier du 18 juin 2018 doivent, pour le même motif, être rejetées comme irrecevables.

5. En second lieu, aux termes de l'article 2 du décret n° 92-1189 du 6 novembre 1992 relatif au statut particulier des professeurs de lycée professionnel : " Les professeurs de lycée professionnel participent aux actions de formation, principalement en assurant un service d'enseignement dans leurs disciplines respectives. Ils exercent principalement dans les classes ou divisions conduisant à l'acquisition des certificats d'aptitude professionnelle, des brevets d'études professionnelles et des baccalauréats professionnels. Dans ce cadre, les professeurs de lycée professionnel assurent le suivi individuel et l'évaluation des élèves qu'ils contribuent à conseiller dans le choix de leur projet d'orientation (...) ". Selon l'article 3 de l'arrêté du 22 août 2014 : " Les stagiaires peuvent accomplir tout ou partie du stage dans un organisme ou un établissement d'éducation, d'enseignement ou de formation ou dans une administration compétente dans ces domaines d'un autre Etat membre de l'Union européenne ou d'un autre Etat partie à l'accord sur l'espace économique européen, sous réserve de leur accord et selon des modalités définies par convention conclue entre le recteur de l'académie d'affectation du stagiaire, l'autorité compétente de l'Etat d'accueil et les établissements d'enseignement supérieur concernés (...) ".

6. Il ressort des pièces du dossier, en particulier des évaluations dont elle a fait l'objet en mai 2018 à la suite de ses visites d'inspection, qu'il a été reproché à Mme C... d'importantes fragilités et insuffisances concernant la pratique et la maîtrise de la discipline, notamment l'organisation de l'enseignement, l'animation de la séance, la maîtrise de la langue, et l'évaluation des élèves. Il ressort également des pièces du dossier qu'au cours de l'année 2017-2018, elle a fait l'objet d'une procédure d'alerte, compte tenu des difficultés importantes qu'elle rencontrait dans son stage, et que sa tutrice estimait, en avril 2018, qu'elle ne maîtrisait pas les compétences liées à la maîtrise des contenus disciplinaires et à leur didactique, et qu'elle éprouvait des difficultés à prendre du recul et à porter une analyse réflexive sur son positionnement et ses activités. Il ressort enfin de l'avis du chef d'établissement où elle effectuait son stage, daté du 18 mai 2018, que malgré sa bonne volonté, elle n'a pas su prendre la mesure de son poste et qu'elle n'est pas arrivée à " avoir un positionnement permettant respect et écoute de la part de ses élèves et des familles ". La requérante ne conteste pas ses insuffisances professionnelles et se borne à soutenir que son affectation en CETAD pour sa seconde année de stage l'a placée dans une situation d'extrême difficulté ne permettant pas à l'administration de l'évaluer correctement. D'une part, l'affectation dans un CETAD, où elle enseignait sa discipline à des élèves préparant un certificat d'aptitude professionnelle au développement, n'est pas contraire aux dispositions précitées, qui n'imposent pas l'affectation d'un professeur stagiaire de lycée professionnel dans un lycée professionnel, ni, par ailleurs, contrairement à ce qui est soutenu, en métropole. Les circonstances invoquées, à les supposer établies, que l'équipe pédagogique se trouvait sur l'île de Tahiti alors que l'établissement dans lequel elle était affectée se situe sur l'île de Moorea, et qu'elle était la seule stagiaire affectée au sein d'un CETAD, sont sans incidence sur la légalité de la décision attaquée. Si la requérante invoque enfin une " directive " de l'école supérieure de professorat et de l'éducation de la Polynésie française, dont elle ne cite au demeurant pas les énonciations, ni les références précises, qui recommanderait de ne pas confier à un enseignant stagiaire des classes préparant des examens de fin d'année, une telle recommandation est, en tout état de cause, dépourvue de caractère contraignant. D'autre part, il ne ressort pas des pièces du dossier que les caractéristiques ainsi contestées de son affectation en stage n'ont pas été prises en compte lors de ses inspections ni, en tout état de cause, qu'elles seraient, même en partie, la cause des insuffisances qui lui ont été reprochées. Le ministre a dès lors pu à bon droit, à l'issue de ce stage, ne pas la titulariser et procéder à son licenciement par l'arrêté du 14 août 2018.

7. Il résulte de ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté ses demandes. Par voie de conséquence, les conclusions qu'elle a présentées à fin d'injonction et au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... C... et au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.

Délibéré après l'audience du 2 mars 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Soyez, président assesseur,

- M. B..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 16 mars 2021.

Le rapporteur,

A. B...Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA02013 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02013
Date de la décision : 16/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-03-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Entrée en service. Stage. Fin de stage.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Alexandre SEGRETAIN
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : NOUGARO

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-03-16;19pa02013 ?
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