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11/03/2021 | FRANCE | N°20PA01584

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 11 mars 2021, 20PA01584


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé le renouvellement de son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1901541 du 2 juin 2020, le tribunal administratif de Melun a annulé cet arrêté, enjoint au préfet du Val-de-Marne ou à tout préfet territorialement compétent de réexaminer la situation de M. C... dans un délai de trois mois et de lui délivrer d

ans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler et mis à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 7 janvier 2019 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé le renouvellement de son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français.

Par un jugement n° 1901541 du 2 juin 2020, le tribunal administratif de Melun a annulé cet arrêté, enjoint au préfet du Val-de-Marne ou à tout préfet territorialement compétent de réexaminer la situation de M. C... dans un délai de trois mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

I - Par une requête n° 20PA01584 enregistrée le 1er juillet 2020 et un mémoire ampliatif enregistré le 21 août 2020, le préfet du Val-de-Marne demande à la Cour d'annuler le jugement n° 1901541 du 2 juin 2020.

Il soutient que :

- le jugement est irrégulier dès lors que le moyen retenu par le tribunal n'avait pas été soulevé par M. C... et n'était pas d'ordre public ;

- M. C..., qui ne remplissait pas les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne pouvait pas se prévaloir des dispositions de l'article L. 312-2 dudit code ;

- M. C..., qui n'avait pas demandé d'admission exceptionnelle au séjour, ne pouvait pas se prévaloir des dispositions de l'article L. 313-14 du code ;

- il ne justifie pas qu'il résidait en France depuis plus de 10 ans à la date de la décision contestée ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. C... ne sont pas fondés.

Par un mémoire enregistré le 3 décembre 2020, M. C..., représenté par Me D..., demande à la Cour de rejeter la requête du préfet du Val-de-Marne et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

II - Par une requête n° 20PA03422, enregistrée le 17 novembre 2020, le préfet du

Val-de-Marne demande à la Cour d'ordonner le sursis à exécution du jugement du tribunal administratif de Melun n° 1901541 du 2 juin 2020.

Il soutient que les moyens développés dans sa requête au fond sont sérieux et justifient l'annulation du jugement attaqué et le rejet de la requête de M. C....

Par un mémoire enregistré le 4 décembre 2020, M. C..., représenté par Me D..., demande à la Cour de rejeter la requête du préfet du Val-de-Marne et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces des dossiers.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 et le décret n° 2020-1406 du même jour portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant malien né en 1973, est entré en France, selon ses déclarations, le 11 février 2000. Il s'est vu délivrer le 5 février 2015, à raison de son état de santé, un titre de séjour régulièrement renouvelé jusqu'au 4 avril 2018 sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 7 janvier 2019, le préfet du Val-de-Marne a rejeté la demande de renouvellement de son titre de séjour présentée par M. C... et l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Le préfet du Val-de-Marne demande à la Cour d'annuler le jugement du 2 juin 2020 par lequel le tribunal administratif de Melun a annulé cet arrêté, lui a enjoint de réexaminer la situation de M. C... dans un délai de trois mois et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Sur la jonction :

2. L'appel et la demande de sursis à exécution du préfet du Val-de-Marne étant formés contre un même jugement, présentant à juger des mêmes questions et ayant fait l'objet d'une instruction commune, il y a lieu de les joindre pour qu'ils fassent l'objet d'un même arrêt.

Sur le moyen d'annulation retenu par le tribunal :

3. D'une part, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...)/ 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée (...) ".

4. D'autre part, aux termes de l'article L. 312-2 de ce code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3. (...) ". Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du CESEDA auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité.

5. Enfin, aux termes de l'article L. 313-14 du même code : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ".

6. Il ressort des pièces du dossier que M. C... a sollicité le renouvellement de son titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. M. C... n'ayant pas sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il ne pouvait pas utilement se prévaloir des dispositions de cet article à l'appui de sa demande. Il s'ensuit que le préfet du Val-de-Marne est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Melun s'est, pour annuler son arrêté du 7 janvier 2019, fondé sur le motif tiré de ce que M. C... résidait en France depuis plus de 10 ans à la date de la décision contestée pour en déduire que la commission du titre de séjour aurait dû être saisie.

7. Il y a lieu pour la Cour, saisie par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par M. C... devant le tribunal administratif de Melun.

Sur les autres moyens invoqués à l'encontre de la décision contestée :

8. Si M. C... fait valoir qu'il réside en France de façon ininterrompue depuis le 11 février 2000, il ne l'établit, par les pièces qu'il produit, que depuis l'année 2008. Par ailleurs, s'il justifie réaliser des missions intérimaires depuis 2015, il ne s'était vu délivrer un titre de séjour en sa qualité d'étranger malade qu'afin de se faire soigner de son hépatite B et ce titre ne lui donnait pas vocation à s'installer durablement sur le territoire français. Il résulte également des pièces du dossier que M. C... est célibataire, sans enfant, qu'il ne justifie pas d'une intégration particulière dans la société française et qu'il ne justifie pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de l'arrêté du 7 janvier 2019 sur la situation personnelle de M. C... ne peut qu'être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que le préfet du Val-de-Marne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a annulé son arrêté du 7 janvier 2019. Dès lors, il y a lieu d'annuler ce jugement et de rejeter la demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Melun.

Sur la demande de sursis à exécution :

10. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation du jugement n° 1901541 du tribunal administratif de Melun, les conclusions de la requête n° 20PA03422 tendant au sursis à exécution de ce jugement sont devenues sans objet.

Sur les frais liés à l'instance :

11. L'Etat n'étant pas la partie perdante à l'instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soient mises à sa charge les sommes demandées par M. C... au titre de ces dispositions.

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1901541 du 2 juin 2020 du tribunal administratif de Melun est annulé.

Article 2 : La demande présentée par M. C... devant le tribunal administratif de Melun est rejetée.

Article 3 : Il n'y a pas lieu de statuer sur la requête n° 20PA03422 du préfet du Val-de-Marne.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. C... au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à M. B... C....

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 11 février 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 mars 2021.

Le président,

J. LAPOUZADE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

Nos 20PA01584, 20PA03422


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01584
Date de la décision : 11/03/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

095-02-03


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : LEVILDIER

Origine de la décision
Date de l'import : 30/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-03-11;20pa01584 ?
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