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17/02/2021 | FRANCE | N°19PA02092

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 17 février 2021, 19PA02092


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Essor Healthcare a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 septembre 2014 et 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2015.

Par un jugement n° 1717567/2-2 du 2 mai 2019, le Tribunal administratif de Paris, après avoir

constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Essor Healthcare a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre des exercices clos les 30 septembre 2014 et 2015 et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée qui lui ont été réclamés pour la période du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2015.

Par un jugement n° 1717567/2-2 du 2 mai 2019, le Tribunal administratif de Paris, après avoir constaté qu'il n'y avait plus lieu de statuer à hauteur du dégrèvement prononcé en cours d'instance, a rejeté le surplus de cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er juillet 2019, la société Essor Healthcare représentée par Me B... A..., demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Paris du 2 mai 2019 ;

2°) de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des compléments d'impôt sur les sociétés en litige à hauteur de 28 080 euros ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure est irrégulière pour ce qui concerne les rehaussements notifiés selon la procédure contradictoire dès lors que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas été saisie alors qu'elle en avait fait la demande dans le délai imparti ;

- seules les rectifications afférentes au premier trimestre 2013 ont été notifiées selon la procédure de taxation d'office ;

- les factures produites attestent de la déductibilité de la taxe sur la valeur ajoutée même si elles sont antérieures aux années d'imposition, dès lors qu'elles sont relatives à des prestations de services et que la taxe est déductible lors de l'encaissement ;

- les sommes facturées sont en tout état de cause déductibles du résultat taxable à l'impôt sur les sociétés dès lors que la réalité des prestations n'est pas contestée ;

- elle a produit les factures établies par la société E3 HPN Impression ;

- la taxe afférente à la dépense de 38 272 euros TTC est déductible, dès lors qu'elle correspond à une dette de 58 339,79 vis-à-vis de la société NMP, " les deux factures de 11 272,30 euros émises par la société NMP ayant été réglées par compensation en septembre 2012 lors du règlement des sommes dues à la société Essor Healthcare par la société NMP et le surplus ayant été versé au cours de l'exercice précédent " ;

- les factures justifiant de la taxe déductible de 7 569,21 euros pour la période du

1er octobre 2013 au 30 septembre 2014 ont été produites ;

- les rappels effectués au titre du profit sur le trésor sont contestés par voie de conséquence ;

- les sommes facturées sont déductibles des résultats pour les mêmes motifs ;

- les factures correspondant aux charges déductibles des résultats de l'exercice clos le 30 septembre 2014 ont été produites ;

- le refus d'accorder des sommes sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative est inéquitable compte tenu du dégrèvement prononcé en cours d'instance.

Par un mémoire en défense enregistré le 17 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics la requête.

Il soutient que

- la requête est insuffisamment motivée et par suite irrecevable ;

- les moyens soulevés par la société Essor Healthcare sont pas fondés.

Par une ordonnance du 3 novembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au

18 novembre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Essor Healthcare, qui exerce une activité de conseil dans le secteur médical, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité au titre de la période courant du

1er octobre 2012 au 30 septembre 2015, étendue au 30 juin 2016 en matière de taxe sur la valeur ajoutée, à l'issue de laquelle des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des compléments d'impôt sur les sociétés lui ont été notifiés le 23 novembre 2016. Elle relève appel du jugement du 2 mai 2019 en tant que le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été en conséquence assujettie. Restent en litige à l'issue des dégrèvements accordés en cours de première instance des rappels de taxe sur la valeur ajoutée afférents à la période courant du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2014 et un complément d'impôt sur les sociétés au titre de l'exercice clos en 2015, ainsi que les pénalités dont ces impositions ont été assorties.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 59 du livre des procédures fiscales : " Lorsque le désaccord persiste sur les rectifications notifiées, l'administration, si le contribuable le demande, soumet le litige à l'avis (...) de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires prévue à l'article 1651 du code général des impôts (...) ". Aux termes de l'article L. 59 A du même livre, dans sa rédaction applicable : " I. - La commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires intervient lorsque le désaccord porte :1° Sur le montant du résultat industriel et commercial, non commercial, agricole ou du chiffre d'affaires, déterminé selon un mode réel d'imposition ; (...) II. - Dans les domaines mentionnés au I, la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires peut, sans trancher une question de droit, se prononcer sur les faits susceptibles d'être pris en compte pour l'examen de cette question de droit./Par dérogation aux dispositions du premier alinéa, la commission peut se prononcer sur le caractère anormal d'un acte de gestion, sur le principe et le montant des amortissements et des provisions ainsi que sur le caractère de charges déductibles des travaux immobilier ". Ces dispositions sont applicables aux seules impositions notifiées selon la procédure de redressement contradictoire.

3. La société requérante soutient que la procédure est irrégulière au motif que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires n'a pas été saisie alors qu'elle en avait fait la demande dans son courriel du 8 mars 2017. Toutefois, lors de sa réponse du 26 janvier 2017 à la proposition de rectification du 23 novembre 2016, la société n'a fait état d'aucun désaccord concernant les rappels de taxe sur la valeur ajoutée collectée ; la commission n'avait donc pas à être saisie sur ce point. S'agissant des rappels de taxe sur la valeur ajoutée déductible sur la période du 1er octobre 2012 au 30 septembre 2014, il résulte des dispositions de l'article L. 59 A que la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires était incompétente pour donner un avis à cet égard. Enfin s'agissant des rehaussements visant l'impôt sur les sociétés de l'exercice clos le 30 septembre 2015, il résulte de l'instruction que ne sont plus en litige que les rehaussements afférents au profit sur le Trésor notifiés en conséquence des rappels au titre de la taxe sur la valeur ajoutée collectée qui n'avaient en tout état de cause fait l'objet, ainsi qu'il a été dit ci-dessus, d'aucune contestation de la part de l'intéressée. Le moyen tiré de l'absence de saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur le chiffre d'affaires ne peut par suite qu'être écarté.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne l'impôt sur les sociétés :

4. Aucune imposition ne restant en litige en ce qui concerne l'impôt sur les sociétés afférent aux exercices clos en 2013 et 2014, les moyens développés à cet égard par la société requérante sont dépourvus d'objet. En l'absence de moyen portant sur le rehaussement d'impôt sur les sociétés notifié au titre de l'exercice clos en 2015 restant en litige, et relatif au profit sur le Trésor procédant d'un rehaussement de taxe sur la valeur ajoutée collectée qui n'a fait l'objet d'aucune contestation, les conclusions de la société requérante tendant à la décharge des compléments d'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre de cet exercice ne peuvent qu'être rejetées.

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée :

5. Aux termes du II de l'article 271 du code général des impôts : " 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; (...) ".

S'agissant de la période courant du 1er octobre 2012 au 31 décembre 2013 :

6. Aux termes de l'article L. 193 du livre des procédures fiscales : " Dans tous les cas où une imposition a été établie d'office la charge de la preuve incombe au contribuable qui demande la décharge ou la réduction de l'imposition ". Il résulte de ces dispositions que la société requérante, qui a fait l'objet d'une procédure de taxation d'office en matière de taxe sur la valeur ajoutée au titre du quatrième trimestre de l'année 2012 et au titre de l'année 2013, supporte la charge de la preuve en ce qui concerne ces périodes.

7. Il résulte de l'instruction que l'administration a remis en cause, faute de toute justification, le caractère déductible de la taxe sur la valeur ajoutée de 2 631 euros afférente à une charge comptabilisée pour un montant de 13 428 euros HT en octobre 2012. A l'appui de sa contestation de ce rehaussement, la société requérante produit trois factures de la société E3 HPN Impression pour un montant TTC de 5 494,42 euros. Ces factures ont été établies et réglées antérieurement à la période contrôlée. Elles ne correspondent en outre pas, par leurs montants, à l'écriture comptable du 5 octobre 2012 non admise en déduction et ayant donné lieu au rappel litigieux. Ces éléments ne permettent en conséquence pas de justifier du caractère déductible de la taxe sur la valeur ajoutée en cause.

8. La société Essor Healthcare soutient également que la taxe sur la valeur ajoutée d'un montant de 6 272 euros afférente à une charge de 32 000 euros HT comptabilisée le 31 octobre 2012 et engagée au bénéfice de la société New Média Plus (NMP) est déductible, dans la mesure où elle avait une dette de 58 339,79 euros vis-à-vis de la société NMP, le surplus ayant été réglé par compensation ou au cours de l'exercice précédent. En se bornant à produire des extraits du grand livre de la société NMP au titre de l'année 2011, un courrier du 24 novembre 2011 par lequel la société requérante se reconnait redevable d'une dette de 58 339,79 euros vis-à-vis de la société NMP, trois copies de factures NMP, pour un montant total TTC de 23 285,70 euros, dont deux factures de 11 272,30 euros, qui, aux dires-mêmes de l'intéressée, ont été réglées par compensation et sont étrangères au montant de 6 272 euros à justifier, ainsi que des copies de factures qui lui ont été adressés par des tiers, la société ne justifie pas du caractère déductible de la taxe sur la valeur ajoutée en litige.

S'agissant de la période correspondant à l'année 2014 :

9. Le service vérificateur a constaté que la société requérante avait comptabilisé le

30 septembre 2014 au compte 623800 " fournisseurs divers ", en une seule écriture, une charge pour un montant TTC de 46 187,60 euros soit 38 618,40 euros HT et 7 569,21 euros de taxe sur la valeur ajoutée. Les huit factures produites, pour un montant total de 24 434 euros HT, et émises entre le 31 octobre 2013 et le 30 juin 2014 ne sauraient être regardées, en l'absence de tout élément permettant d'en assurer le recoupement avec les sommes comptabilisées, comme des factures justificatives de la taxe sur la valeur ajoutée déductible de 7 569,21 euros en litige conformes aux exigences requises par les dispositions précitées du II de l'article 271 du code général des impôts.

Sur les frais irrépétibles exposés en première instance :

10. Si, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, et compte tenu du dégrèvement accordé en première instance, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne faisaient pas nécessairement obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat le versement de la somme que la société requérante demandait au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens, il n'y avait en tout état de cause pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement d'une somme sur le fondement de ces dispositions.

11. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête, que la société Essor Healthcare n'est pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus de sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle en appel et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société Essor Healthcare est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Essor Healthcare et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 3 février 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président,

- M. C..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 février 2021.

Le rapporteur,

F. C...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

2

N° 19PA02092


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02092
Date de la décision : 17/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : MOREU

Origine de la décision
Date de l'import : 26/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-17;19pa02092 ?
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