Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
Mme D... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 21 mai 2019 par lequel le préfet de police a décidé sa remise aux autorités italiennes, responsables de sa demande d'asile.
Par un jugement n° 1911825 du 31 juillet 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 20 février 2020, Mme A..., représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1911825 du 31 juillet 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 21 mai 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un récépissé de demande d'asile ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative.
Mme A... soutient que :
- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation ;
- le préfet de police a méconnu le deuxième alinéa de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le préfet de police a méconnu les dispositions de l'article 17 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 ;
- le préfet de police a méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.
Par un courrier du 18 juin 2020, les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, de ce que la décision de la Cour était susceptible d'être fondée sur un moyen d'ordre public tiré de l'existence d'un non-lieu à statuer dans la mesure où l'arrêté du 21 mai 2019 n'est plus susceptible d'exécution.
Par un mémoire enregistré le 25 juin 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Le préfet de police soutient que :
- il y a lieu de statuer, le délai de six mois durant lequel l'arrêté de transfert doit être exécuté ayant été porté à dix-huit mois en raison de l'état de fuite de l'intéressée ;
- les moyens invoqués par Mme A... ne sont pas fondés.
Par une décision du 21 janvier 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris a admis Mme A... à l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le règlement (UE) n° 604/2013 du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 établissant les critères et mécanismes de détermination de l'État membre responsable de l'examen d'une demande de protection internationale introduite dans l'un des États membres par un ressortissant de pays tiers ou un apatride ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;
- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. Mme A..., ressortissante ivoirienne, est entrée irrégulièrement sur le territoire français et a présenté une demande d'asile au guichet unique des demandeurs d'asile de Paris le 4 avril 2019. La consultation du système " Eurodac " a permis d'établir que ses empreintes digitales avaient été relevées par les autorités italiennes le 26 janvier 2017, lors du dépôt d'une demande d'asile. Le préfet de police a saisi ces autorités le 9 avril 2019 d'une demande de reprise en charge de l'intéressée, laquelle a été explicitement acceptée le 17 avril 2019. Le préfet de police a alors décidé, par l'arrêté contesté du 21 mai 2019, de remettre Mme A... aux autorités italiennes. L'intéressée fait appel du jugement du 31 juillet 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
2. Aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes du paragraphe 2 de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 : " Lorsqu'il est impossible de transférer un demandeur d'asile vers l'État membre initialement désigné comme responsable parce qu'il y a de sérieuses raisons de croire qu'il existe dans cet État membre des défaillances systémiques dans la procédure d'asile et les conditions d'accueil des demandeurs, qui entraînent un risque de traitement inhumain ou dégradant au sens de l'article 4 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, l'État membre procédant à la détermination de l'État membre responsable poursuit l'examen des critères énoncés au chapitre III afin d'établir si un autre État membre peut être désigné comme responsable. " Aux termes de l'article 17 de ce règlement : " Par dérogation à l'article 3, paragraphe 1, chaque État membre peut décider d'examiner une demande de protection internationale qui lui est présentée par un ressortissant de pays tiers ou un apatride, même si cet examen ne lui incombe par en vertu des critères fixés par le présent règlement ".
3. Mme A... soutient qu'en cas de transfert vers l'Italie, elle serait exposée au risque de renvoi vers la Côte d'Ivoire, où elle subirait des traitements inhumains et dégradants de la part des autorités de ce pays. Toutefois, l'arrêté contesté a seulement pour but de transférer Mme A... vers l'Italie et n'a ni pour objet, ni pour effet d'éloigner la requérante vers la Côte d'Ivoire. L'Italie, État membre de l'Union européenne, est partie tant à la convention de Genève du 28 juillet 1951 sur le statut des réfugiés, complétée par le protocole de New-York, qu'à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Mme A..., qui se borne à des allégations générales, ne produit aucun élément de nature à établir qu'il existerait des raisons sérieuses de croire à l'existence de défaillances systémiques en Italie dans la procédure d'asile ou que sa demande d'asile ne sera pas traitée dans des conditions conformes à l'ensemble des garanties exigées par le respect du droit d'asile. En outre, il ne ressort d'aucune pièce versée au dossier que les autorités italiennes, alors même que la demande de Mme A... ferait l'objet d'un refus, n'évalueront pas, avant de procéder à son éventuel éloignement, les risques auxquels elle serait exposée en cas de retour en Côte d'Ivoire. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions de l'article 3 du règlement (UE) n° 604/2013 du 26 juin 2013 et de ce que le préfet de police aurait entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation en s'abstenant de faire application des dispositions de l'article 17 ce règlement doivent être écartés.
4. Il résulte de ce qui précède que Mme A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête, y compris ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles 37 de la loi du 10 juillet 1991 et L. 761-1 du code de justice administrative, doit ainsi être rejetée.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 28 janvier 2021, à laquelle siégeaient :
- M. C..., président de la formation de jugement,
- Mme Marion, premier conseiller,
- M. Sibilli, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021.
Le président-rapporteur,
F. C...L'assesseur le plus ancien,
I. MARION
La greffière,
F. DUBUY-THIAM
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 20PA00666