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11/02/2021 | FRANCE | N°20PA00419

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 11 février 2021, 20PA00419


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Jean-Pierre Jourdain a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel négatif du 13 octobre 2017 par lequel le maire de la commune de Boulancourt (Seine-et-Marne) a déclaré irréalisable la construction d'une maison individuelle sur les parcelles AD 105 et AD 108.

Par un jugement n° 17088999 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Melun, a annulé le certificat d'urbanisme.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et u

n mémoire enregistrés les 4 février 2020 et 11 juin 2020, la commune de Boulancourt, représe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Jean-Pierre Jourdain a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler le certificat d'urbanisme opérationnel négatif du 13 octobre 2017 par lequel le maire de la commune de Boulancourt (Seine-et-Marne) a déclaré irréalisable la construction d'une maison individuelle sur les parcelles AD 105 et AD 108.

Par un jugement n° 17088999 du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Melun, a annulé le certificat d'urbanisme.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 4 février 2020 et 11 juin 2020, la commune de Boulancourt, représentée par Me B..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 17088999 du 7 novembre 2019 du tribunal administratif de Melun ;

2°) de condamner la société Jourdain au paiement des entiers dépens de première instance et d'appel ;

3°) de mettre à la charge de la société Jourdain la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son appel est recevable dès lors que le certificat d'urbanisme opérationnel délivré le 2 janvier 2020 ne l'a été qu'en exécution du jugement et à titre provisoire dans l'attente de l'arrêt de la Cour administrative d'appel ;

- elle s'est fondée sur de nombreux éléments concordants pour démontrer le caractère inondable des parcelles en cause ;

- aucune prescription n'était envisageable sans apporter au projet des modifications substantielles nécessitant la présentation d'une nouvelle demande de sorte qu'elle ne pouvait que délivrer un certificat d'urbanisme opérationnel négatif ;

- le tribunal n'a pas tenu compte de son manque de capacités techniques et financières.

Par un mémoire en défense enregistré le 2 mars 2020, et un mémoire enregistré le 13 août 2020, la société Jean-Pierre Jourdain, représentée par Me D..., conclut :

1°) à titre principal, au rejet de la requête ;

2°) à titre subsidiaire, au non-lieu à statuer ;

3°) à ce qu'il soit enjoint à la commune de Boulancourt d'exécuter l'article 3 du jugement sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

4°) à ce qu'il soit mis à la charge de la commune de Boulancourt une somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- dès lors que le 2 janvier 2020, la commune de Boulancourt a rapporté l'arrêté du 13 octobre 2017 et procédé à l'octroi d'un certificat opérationnel positif, acte qu'elle seule peut rapporter, la Cour jugera l'appel irrecevable ou prononcera, à titre subsidiaire, un non-lieu à statuer ;

- aucun des moyens n'est fondé.

Par une ordonnance du 12 octobre 2020, la clôture de l'instruction a été prononcée le 29 octobre 2020 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,

- les observations de Me A..., représentant de la commune de Boulancourt,

- et les observations de Me E..., représentant la société Jean-Pierre Jourdain.

Considérant ce qui suit :

1. La société de géomètres experts Verdier a, pour le compte de la société Jourdain, présenté auprès de la commune de Boulancourt une demande de certificat d'urbanisme opérationnel en date du 14 septembre 2017 pour la construction d'une maison d'habitation sur un terrain cadastré AD n°105 et 108 et situé 30 rue des Rochers. Par un certificat d'urbanisme négatif du 13 octobre 2017, le maire de Boulancourt l'a informée qu'en application du plan de prévention du risque inondation et de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, le terrain d'assiette du projet ne pouvait être utilisé pour la réalisation de l'opération envisagée. La société Jourdain a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler cette décision. Par un jugement du 7 novembre 2019, dont la commune de Boulancourt relève appel devant la Cour, le tribunal administratif de Melun a annulé le certificat d'urbanisme négatif du 13 octobre 2017. Le 2 janvier 2020, le maire de la commune de Boulancourt a délivré au pétitionnaire un certificat d'urbanisme assorti de prescriptions.

Sur les conclusions à fin d'irrecevabilité :

2. Si la société Jean-Pierre Jourdain soutient que les conclusions dirigées contre le certificat d'urbanisme délivré le 2 janvier 2020 sont irrecevables, il est constant cependant que dans ses dernières écritures, la commune de Boulancourt ne conclut plus à son annulation.

Sur les conclusions à fin de non-lieu à statuer :

3. Lorsque l'autorité administrative, en exécution d'un jugement d'annulation, prend une nouvelle décision qui n'est motivée que par le souci de se conformer à ce jugement d'annulation, cette circonstance ne prive pas d'objet l'appel dirigé contre ce jugement.

4. Par le jugement contesté, notifié à la commune de Boulancourt le 6 décembre 2019, le tribunal administratif de Melun a annulé le certificat d'urbanisme négatif du 13 octobre 2017 et enjoint au maire de la commune de Boulancourt de réexaminer la demande de la société Jourdain dans le délai d'un mois.

5. Par une décision du 2 janvier 2020, qui mentionne le jugement du 7 novembre 2019, le maire de la commune de Boulancourt a réexaminé la demande de la société Jourdain en lui délivrant un certificat d'urbanisme. Une telle décision n'étant motivée que par le souci de se conformer au jugement précité, elle ne prive pas d'objet l'appel dirigé contre lui. Il s'ensuit que les conclusions de la société Jourdain tendant à ce que soit prononcé un non-lieu à statuer dans la présente instance ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'exécution du jugement :

6. Aux termes de l'article R. 921-2 du code de justice administrative : " La demande d'exécution d'un jugement frappé d'appel, même partiellement, est adressée à la juridiction d'appel. ".

7. Si l'article 3 du jugement contesté a mis à la charge de la commune de Boulancourt le paiement d'une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, il est constant que le maire a émis, le 28 octobre 2020, un mandat de paiement à cette fin. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a dès lors pas lieu à statuer sur ces conclusions.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sur le motif d'annulation retenu :

8. Aux termes de l'article R. 211-2 du code de l'urbanisme : " Le projet peut être refusé ou n'être accepté que sous réserve de l'observation de prescriptions spéciales s'il est de nature à porter atteinte à la salubrité ou à la sécurité publique du fait de sa situation, de ses caractéristiques, de son importance ou de son implantation à proximité d'autres installations. ".

9. Il résulte de ces dispositions que, lorsqu'elle est saisie d'une demande de certificat d'urbanisme, ce n'est que dans le cas où l'autorité compétente estime, au vu d'une appréciation concrète de l'ensemble des caractéristiques de la situation d'espèce qui lui est soumise et du projet en cause, qu'il n'est pas légalement possible d'accorder un certificat d'urbanisme positif en l'assortissant de prescriptions permettant d'assurer la conformité du projet aux dispositions de l'article R. 111-2 du code de l'urbanisme, qu'elle peut, pour ce motif, délivrer un certificat d'urbanisme négatif.

10. Pour prononcer l'annulation du certificat d'urbanisme négatif du 13 octobre 2017, au visa de l'article R. 211-2 du code de l'urbanisme, les premiers juges ont relevé que l'autorité administrative, qui s'était bornée à constater que les parcelles du terrain d'assiette avaient été inondées par la crue de juin 2016, que le fond de parcelles était situé en zone bleu ciel et saumon du plan de prévention du risque inondation et que toute nouvelle construction à usage d'habitation pourrait augmenter le nombre de personnes soumises au risque d'inondation, n'avait pas recherché au préalable si des prescriptions, telles que celles établies par le règlement de la zone bleu clair du plan de prévention du risque inondation, étaient de nature à endiguer ce risque.

11. La commune de Boulancourt soutient, en produisant notamment des photographies, que le risque d'inondation justifiait qu'un certificat d'urbanisme négatif fût délivré, aucune prescription ne pouvant être effectuée compte tenu notamment de l'ampleur de ce risque et de son manque de capacités techniques pour les émettre.

12. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de la demande de certificat d'urbanisme ainsi que du plan qui y est annexé, que le projet de construction concerné est situé dans une partie de la parcelle qui n'est pas couverte par le plan de prévention du risque inondations et dont il n'est pas démontré, par les quelques photographies produites, qu'elle serait exposée à un risque d'inondation de nature à porter atteinte à la sécurité publique, alors qu'au demeurant, le certificat d'urbanisme délivré au pétitionnaire le 2 janvier 2020 est précisément assorti de prescriptions prévoyant notamment que la future construction devra être édifiée sur la partie hors PPRI afin de limiter la vulnérabilité des biens et des personnes soumis au risque d'inondation et que l'accès au terrain se fera directement sur la rue des Rochers. Le maire de la commune de Boulancourt ne pouvait dès lors, comme il l'a fait, délivrer un certificat d'urbanisme négatif le 13 octobre 2017 sans rechercher au préalable si des prescriptions étaient de nature à endiguer le risque d'inondation.

13. Il résulte de ce qui précède que la commune de Boulancourt n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 7 novembre 2019, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

En ce qui concerne les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

14. La société Jean-Pierre Jourdain n'étant pas la partie perdante dans la présente instance, les conclusions de la commune de Boulancourt tendant à ce qu'une somme soit mise à sa charge au titre des dispositions précitées doivent être rejetées.

15. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la commune de Boulancourt, le versement à la société Jean-Pierre Jourdain, d'une somme de 1 500 euros au titre des frais liés à l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu à statuer sur les conclusions de la société Jean-Pierre Jourdain relatives à l'exécution de l'article 3 du jugement n° 17088999 du 7 novembre 2019.

Article 2 : La requête de la commune de Boulancourt est rejetée.

Article 3 : La commune de Boulancourt versera une somme de 1 500 euros à la société Jean-Pierre Jourdain.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Boulancourt et à la société Jean-Pierre Jourdain.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative ;

- M. C..., premier conseiller,

- M. Doré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021.

Le Président,

S. DIÉMERT

La République mande et ordonne au préfet de la Seine-et-Marne, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution du présent jugement.

2

N° 20PA00419


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00419
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

68-025-03 Urbanisme et aménagement du territoire. Certificat d'urbanisme. Contenu.


Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : DBCJ AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-11;20pa00419 ?
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