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11/02/2021 | FRANCE | N°19PA03890

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 11 février 2021, 19PA03890


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 9 janvier 2018 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande de changement de nom.

Par un jugement n° 1802120/4-1 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 décembre 2019, M. E..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1802120 du 3 octo

bre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du garde des sceaux, minist...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 9 janvier 2018 par laquelle le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande de changement de nom.

Par un jugement n° 1802120/4-1 du 3 octobre 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2 décembre 2019, M. E..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1802120 du 3 octobre 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du garde des sceaux, ministre de la justice, du 9 janvier 2018 ;

3°) d'enjoindre au garde des sceaux, ministre de la justice, de procéder au réexamen de sa demande dans un délai de trois mois ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que la décision méconnait :

- les dispositions de l'article 61 du code civil ;

- les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 septembre 2020, le garde des sceaux, ministre de la justice, conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Par une ordonnance du 18 septembre 2020, la clôture de l'instruction a été fixée le 6 octobre 2020 à 12h00.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code civil ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif, notamment son article 5.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... E..., né de la relation entre Mme E... et M. B..., a sollicité auprès du garde des sceaux, ministre de la justice, le changement de son nom en " B... ". Par une décision du 9 janvier 2018, le garde des sceaux, ministre de la justice, a rejeté sa demande. M. E... a saisi le tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette décision. Par un jugement du 3 octobre 2019, dont il est fait appel, le tribunal a rejeté sa requête.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 61 du code civil : " Toute personne qui justifie d'un intérêt légitime peut demander à changer de nom (...) ".

3. Des motifs d'ordre affectif peuvent, dans des circonstances exceptionnelles, caractériser l'intérêt légitime requis par l'article 61 du code civil pour déroger aux principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi.

4. Il ressort des pièces du dossier que M. E... est né en 1978 de la relation de M. B..., décédé en 2012, et de Mme E... qui a souhaité le reconnaitre seule. S'il n'est pas contesté que, sur demande du requérant, le tribunal d'instance de Chartres lui a délivré un acte de notoriété afin de constater la possession d'état d'enfant naturel de M. B... et que ses relations avec ce dernier, qui a souhaité le reconnaitre et qui lui a consenti des dons au même niveau que pour ses trois autres enfants, étaient très fortes ainsi qu'en témoignent les attestations au dossier, ces seules circonstances, alors qu'au demeurant la demande de changement de nom était fondée sur le constat qu'il semblait important au requérant de transmettre le nom de B... à son propre fils né en 2012, ne revêtent pas un caractère exceptionnel et ne sauraient donc constituer l'intérêt légitime requis par les dispositions précitées de l'article 61 du code civil pour déroger aux principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi, pour un motif d'ordre affectif.

5. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sécurité publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

6. Il ne ressort pas des pièces du dossier, compte tenu de ce qui a été dit au point 4, que la décision refusant le changement de nom sollicité porterait au droit au respect de la vie privée et familiale de M. E..., garanti par les stipulations précitées, une atteinte excessive au regard de l'intérêt public qui s'attache au respect des principes de dévolution et de fixité du nom établis par la loi.

7. Il résulte de ce qui précède que M. E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées au titre des frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de E... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... et au garde des sceaux, ministre de la justice.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Diémert, président de la formation de jugement en application des articles L. 234-3 (1er alinéa) et R. 222-6 (1er alinéa) du code de justice administrative,

- M. C..., premier conseiller.

- M. Doré, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 11 février 2021.

Le Président,

S. DIÉMERT

La République mande et ordonne au garde des sceaux, ministre de la justice, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA03890


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA03890
Date de la décision : 11/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

26-01-03 Droits civils et individuels. État des personnes. Changement de nom patronymique.


Composition du Tribunal
Président : M. DIEMERT
Rapporteur ?: M. Jean-François GOBEILL
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : MERY

Origine de la décision
Date de l'import : 24/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-11;19pa03890 ?
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