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17/12/2020 | FRANCE | N°20PA02777-20PA02778

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 17 décembre 2020, 20PA02777-20PA02778


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 16 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour et a fixé le pays à destination duquel il devait être éloigné et, à titre subsidiaire, d'annuler la décision fixant le pays à destination duquel il devait être éloigné, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et, à défaut, de réex

aminer sa situation en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire dans le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au tribunal administratif de Montreuil, à titre principal, d'annuler l'arrêté du 16 juin 2020 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis a rejeté sa demande de titre de séjour et a fixé le pays à destination duquel il devait être éloigné et, à titre subsidiaire, d'annuler la décision fixant le pays à destination duquel il devait être éloigné, d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " et, à défaut, de réexaminer sa situation en lui délivrant dans l'attente une autorisation provisoire dans le délai d'un mois suivant la notification du jugement à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de

1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par une ordonnance n°2006773 du 4 septembre 2020, le premier vice-président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

I- Par une requête, enregistrée sous le n° 20PA02777 le 24 septembre 2020, M. A..., représenté par Me D..., demande à la cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2006773 du premier vice-président du tribunal administratif de Montreuil du 4 septembre 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 16 juin 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ;

3°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " sous astreinte de cent euros par jour de retard, dans un délai d'un mois à compter de l'arrêt à intervenir, ou, a tout le moins, de le convoquer en vue de l'examen de sa situation administrative et de le munir durant l'instruction de sa situation d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'ordonnance attaquée est irrégulière au regard des dispositions de l'article R. 612-1 du code de justice administrative, faute pour la demande de régularisation qui lui a été adressée le 17 juillet 2020 de mentionner le délai imparti pour régulariser sa requête ;

- les décisions portant refus de titre de séjour et fixant le pays de destination ne sont pas suffisamment motivées et n'ont pas été précédées d'un examen particulier de sa situation ;

- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 26 novembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que la requête est irrecevable et que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

II - Par une requête, enregistrée sous le n° 20PA02778 le 24 septembre 2020, M. A..., représenté par Me D..., demande au juge des référés de la cour, statuant sur le fondement des dispositions de l'article L. 521-1 du code de justice administrative :

1°) de suspendre l'exécution de l'arrêté du 16 juin 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis ;

2°) d'enjoindre au préfet de la Seine-Saint-Denis de lui délivrer à titre provisoire une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " sous astreinte de 100 euros par jour de retard, dans un délai d'un mois à compter de l'ordonnance à intervenir, ou, à tout le moins, de le convoquer en vue de l'examen de sa situation administrative et de le munir, durant l'instruction de sa situation, d'une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler en application des dispositions de l'article L. 512-1, dernier alinéa, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

* l'urgence est caractérisée en raison de ses liens familiaux réels et anciens en France, de la présence sur le territoire national de son partenaire de Pacs de nationalité française avec lequel il a entamé une relation amoureuse en janvier 2017 et avec lequel il habite depuis décembre 2017 ; par ailleurs, il a été privé d'un degré de juridiction et du caractère suspensif du recours en annulation devant le tribunal administratif de Montreuil du fait du rejet de son recours, au fond, au motif qu'il n'avait pas régularisé sa requête alors qu'aucun délai n'était mentionné dans la demande de régularisation, en méconnaissance des disposition de l'article

L. 612-1 du code de justice administrative, en conséquence de quoi, sa situation est précaire ;

* il existe un doute sérieux quant à la légalité des décisions attaquées :

- les décisions portant refus de titre de séjour et fixant le pays de destination ne sont pas suffisamment motivées et n'ont pas été précédées d'un examen particulier de sa situation ;

- la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour méconnait les dispositions de l'article L. 313-11 7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination méconnait les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 novembre 2020, le préfet de la Seine-Saint-Denis conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la requête est irrecevable dès lors que la majorité des pièces qui l'accompagnent est floue ;

- la condition tenant à l'urgence n'est pas remplie ;

- aucun moyen n'est susceptible de créer un doute sérieux quant à la légalité de la décision attaquée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les observations de Me D..., représentant M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 8 avril 1985 et de nationalité malaise, est entré à plusieurs reprises en France à partir de janvier 2017 et pour la dernière fois, en décembre 2017. Sa demande de délivrance d'un titre de séjour " vie privée et familiale " a été rejetée par un arrêté du 16 juin 2020 du préfet de la Seine-Saint-Denis portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination. Le recours formé par M. A... contre cet arrêté a été rejeté par une ordonnance du premier vice-président du tribunal administratif de Montreuil du 4 septembre 2020, dont M. A... fait régulièrement appel.

Sur la régularité de l'ordonnance du 4 septembre 2020 :

2. D'une part, aux termes de l'article R. 222-1 du code de justice administrative : " (...) les présidents de formation de jugement des tribunaux (...) peuvent, par ordonnance (...) / 4° Rejeter les requêtes manifestement irrecevables, lorsque la juridiction n'est pas tenue d'inviter leur auteur à les régulariser ou qu'elles n'ont pas été régularisées à l'expiration du délai imparti par une demande en ce sens ". D'autre part, selon l'article R. 412-2 du même code, " lorsque les parties joignent des pièces à l'appui de leurs requêtes (...) elles en établissent simultanément un inventaire détaillé (...) " et selon l'article de l'article R. 414-3 dudit code : " (...). Les pièces jointes sont présentées conformément à l'inventaire qui en est dressé. Lorsque le requérant transmet, à l'appui de sa requête, un fichier unique comprenant plusieurs pièces, chacune d'entre elles doit être répertoriée par un signet la désignant conformément à l'inventaire mentionné ci-dessus. S'il transmet un fichier par pièce, l'intitulé de chacun d'entre eux doit être conforme à cet inventaire. Le respect de ces obligations est prescrit à peine d'irrecevabilité de la requête. /(...). ". Enfin, en vertu de l'article R. 612-1 du code de justice administrative :

" Lorsque des conclusions sont entachées d'une irrecevabilité susceptible d'être couverte après l'expiration du délai de recours, la juridiction ne peut les rejeter en relevant d'office cette irrecevabilité qu'après avoir invité leur auteur à les régulariser. (...) La demande de régularisation mentionne que, à défaut de régularisation, les conclusions pourront être rejetées comme irrecevables dès l'expiration du délai imparti qui, sauf urgence, ne peut être inférieur à quinze jours. La demande de régularisation tient lieu de l'information prévue à l'article

R. 611-7 ".

3. En l'espèce, la lettre du 17 juillet 2020 visée par l'ordonnance aux termes de laquelle le tribunal a invité le requérant à régulariser sa demande de première instance, se borne à l'inviter, en application des articles R. 412-2 et R. 414-3 du code de justice administrative, à lister les pièces jointes à sa requête dans un inventaire détaillé et à les présenter de manière exhaustive avec, pour chacune d'elles, un intitulé comprenant un numéro dans un ordre continu et croissant ainsi qu'un libellé suffisamment explicite selon mode d'emploi joint, soit par la transmission d'un fichier unique global comprenant plusieurs pièces, toutes répertoriées par un signet intégré au fichier, l'intitulé minimal de chaque signet devant impérativement reprendre exactement le numéro d'ordre affecté à la pièce par l'inventaire détaillé, soit par la transmission de fichiers comprenant chacun une pièce dont l'intitulé minimal doit impérativement reprendre exactement le numéro d'ordre affecté à la pièce par l'inventaire détaillé. Il ne ressort toutefois ni de ce courrier, ni des autres pièces du dossier, que l'intéressé ait été informé des conséquences susceptibles de s'attacher à l'absence de régularisation de la requête dans un délai imparti.

4. Par suite, le requérant est fondé à soutenir que sa demande ne pouvait être rejetée comme étant manifestement irrecevable par une ordonnance prise sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative et à demander l'annulation de l'ordonnance attaquée, comme irrégulière.

5. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de renvoyer l'affaire devant le tribunal administratif de Montreuil pour qu'il soit statué sur les conclusions en annulation du requérant.

Sur les conclusions à fin de suspension :

6. Le présent arrêt statuant sur la demande d'annulation de l'ordonnance n° 2006773 du 4 septembre 2020 du premier vice-président du tribunal administratif de Montreuil, annulant ladite ordonnance et renvoyant l'affaire devant le tribunal administratif de Montreuil pour qu'il soit statué sur les conclusions en annulation du requérant, la cour n'est plus compétente pour statuer sur les conclusions de la requête n° 20PA02778 qui ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2006773 du premier vice-président du tribunal administratif de Montreuil du 24 septembre 2020 est annulée.

Article 2 : L'affaire est renvoyée devant le tribunal administratif de Montreuil.

Article 3 : L'Etat versera à M. A... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions des requêtes de M. A... est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 1er décembre 2020 à laquelle siégeaient :

M. C..., premier vice-président,

Mme B..., premier conseiller,

Mme Mornet, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 17 décembre 2020.

Le rapporteur,

M-D. B...Le président,

M. C...

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 08PA04258

2

N° 20PA02777 et 20PA02778


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02777-20PA02778
Date de la décision : 17/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Procédure - Introduction de l'instance - Formes de la requête.

Procédure - Procédures de référé autres que celles instituées par la loi du 30 juin 2000.


Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : DE METZ

Origine de la décision
Date de l'import : 08/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-17;20pa02777.20pa02778 ?
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