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10/12/2020 | FRANCE | N°20PA01115

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 10 décembre 2020, 20PA01115


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1915997 du 27 février 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mars 2020, M. C..., représen

té par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 1er juillet 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un certificat de résidence, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1915997 du 27 février 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mars 2020, M. C..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris du 27 février 2020 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police du 1er juillet 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer un certificat de résidence portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 5°) ou du 7°) de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans le délai d'un mois suivant la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

4°) de mettre la somme de 2 000 euros à la charge de l'État sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridictionnelle.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de certificat de résidence :

- l'arrêté a été pris à l'issue d'une procédure irrégulière en l'absence de consultation de la commission du titre de séjour en application de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet de police a méconnu l'article 6 7) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le préfet de police a méconnu l'article 6 5) de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié et l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet de police a méconnu l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

- la décision est insuffisamment motivée et n'a pas été pris à l'issue d'un examen de sa situation personnelle ;

- la décision est illégale par la voie de l'exception d'illégalité du refus de délivrance d'un certificat de résidence.

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

- la décision est insuffisamment motivée ;

- la décision est illégale par la voie de l'exception d'illégalité du refus de délivrance d'un certificat de résidence et de l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision n'a pas été prise en méconnaissance de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2020, le préfet de police a conclu au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.

Par une décision du 3 juin 2020, le président du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris a accordé l'aide juridictionnelle totale à M. C....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié en dernier lieu par l'avenant du 11 juillet 2001 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;

- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... est un ressortissant algérien, né le 21 juillet 1967 à Sidi M'A... en Algérie. Il est entré en France le 20 décembre 2017 sous couvert d'un visa de court séjour d'une durée de validité d'un mois. Le 12 décembre 2018, il a sollicité un certificat de résidence en qualité d'étranger malade sur le fondement de l'article 6-7 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par un arrêté du 1er juillet 2019, le préfet de police a refusé de délivrer un certificat de résidence à M. C... et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours en fixant l'Algérie comme pays de renvoi. Le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande présentée par M. C... tendant à l'annulation de cet arrêté par un jugement n° 1915997 du 27 février 2020. M. C... fait appel de ce jugement.

S'agissant de la décision de refus de certificat de résidence :

2. Aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus ; (...). 7) au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays.(...).

3. En premier lieu, il ressort de l'avis émis le 15 avril 2019 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) que si l'état de santé de M. C... nécessitait une prise en charge médicale, le défaut de cette prise en charge ne devrait pas entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié en Algérie et voyager sans risque vers ce pays. Pour contredire cet avis, le requérant produit des certificats médicaux attestant que l'état de santé de M. C... nécessite un suivi médical régulier à vie, car il présente une maladie vasculaire grave potentiellement évolutive ainsi qu'une cardiopathie ischémique sévère. Cependant, de tels éléments ne suffisent pas à remettre en cause l'appréciation portée par l'avis du collège précité sur les conséquences d'un défaut de prise en charge médicale sur son état de santé ni sur la possibilité pour M. C... de poursuivre ses traitements en Algérie alors que les certificats médicaux produits par l'intéressé ne permettent pas d'établir qu'en l'interruption de cette prise en charge médicale, son état de santé se dégraderait de telle sorte qu'il encourrait des conséquences d'une exceptionnelle gravité ni qu'il ne pourrait poursuivre ses traitements en Algérie. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7) de l'article 6 de l'accord franco-algérien doit être écarté.

4. En deuxième lieu, le requérant entré en France le 20 décembre 2017, à la faveur d'un visa de court séjour d'un mois, est hébergé par une tante et ne dispose d'aucune ressource en France. Jusqu'à l'âge de 50 ans, il a vécu en Algérie où résident son épouse et son enfant mineur ainsi que sa fratrie. Il ne justifie d'aucun lien particulier avec la France. Le préfet de police n'a donc pas méconnu les stipulations du 5) de l'article 6 de l'accord franco-algérien en estimant que M. C... ne pouvait pas bénéficier de plein droit d'un certificat de résidence. Pour les mêmes motifs, la décision attaquée ne porte pas davantage atteinte au droit au respect de la vie privée et familiale que le requérant tient des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

5. En troisième lieu, les stipulations de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régissent d'une manière complète les conditions dans lesquelles les Algériens peuvent être admis à séjourner en France et y exercer une activité professionnelle et les règles concernant la nature des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés. Il en résulte qu'un ressortissant algérien ne peut utilement invoquer les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à l'appui d'une demande d'admission au séjour sur le territoire national.

6. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 312-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Dans chaque département est instituée une commission du titre de séjour ". Aux termes de l'article L. 312-2 de ce même code : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ".

7. Si l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 régit d'une manière complète les conditions dans lesquelles les ressortissants algériens peuvent être admis à séjourner en France et à y exercer une activité professionnelle, ainsi que les règles concernant la nature et la durée de validité des titres de séjour qui peuvent leur être délivrés, il n'a toutefois pas entendu écarter, sauf stipulations incompatibles expresses, l'application des dispositions de procédure qui s'appliquent à tous les étrangers en ce qui concerne la délivrance, le renouvellement ou le refus de titres de séjour. M. C... soutient que le préfet de police était tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de rejeter sa demande présentée sur le fondement des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Il résulte des dispositions précitées de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions d'obtention du titre de séjour sollicité auxquels il envisage de refuser ce titre de séjour et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Compte tenu de ce qui a été dit au point 3, M. C... ne remplissait pas les conditions permettant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des stipulations du 7° de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968. Par suite, le préfet de police n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de prendre la décision contestée.

S'agissant de l'obligation de quitter le territoire français :

8. En premier lieu, il résulte des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que l'obligation faite à un étranger de quitter le territoire français n'a pas à comporter une motivation spécifique, distincte de celle du refus de titre de séjour qu'elle accompagne. L'obligation faite à M. C... de quitter le territoire français, qui fait suite à la décision de refus de certificat de résidence, fait référence aux dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et expose les éléments de fait propres à la situation de M. C... est donc suffisamment motivée. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit être écarté ainsi que celui tiré d'une absence d'examen par le préfet de la situation personnelle de M. C....

9. En second lieu, en l'absence d'illégalité du refus de délivrance d'un certificat de résidence, le moyen tiré de l'illégalité de l'obligation de quitter le territoire français par la voie de l'exception d'illégalité ne peut qu'être écarté.

S'agissant de la décision fixant le pays de renvoi :

10. En premier lieu, la décision fixant le pays de destination de M. C... vise les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et précise, dans ses motifs, que le requérant, dont elle rappelle la nationalité, n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à ces stipulations en cas de retour dans son pays d'origine. Cette décision, qui comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui la fondent, est ainsi, contrairement à ce que soutient M. C..., suffisamment motivée.

11. En second lieu, en l'absence d'illégalité des décisions de refus de délivrance d'un certificat de résidence et d'obligation de quitter le territoire français, le moyen tiré de l'illégalité de la décision fixant le pays de renvoi par voie d'exception d'illégalité ne peut qu'être écarté.

12. En dernier lieu, il résulte du point 3 ci-dessus qu'un défaut de prise en charge médicale du requérant ne sera pas de nature à entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination violerait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

13. Il résulte de tout ce qui précède que la requête présentée par M. C... doit être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte et celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 26 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme D..., premier conseiller,

- M. Sibilli, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 décembre 2020.

Le rapporteur,

I. D...Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA01115 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01115
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : TOGOLA

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-10;20pa01115 ?
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