Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. A... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 20 février 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être éloigné à l'issue de ce délai.
Par un jugement n° 1905505 du 18 juin 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 2 novembre 2019, M. A... E..., représenté par Me C... demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1905505 du 18 juin 2019 du tribunal administratif de Paris ;
2°) d'annuler les décisions de refus de séjour et d'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours figurant dans l'arrêté du préfet de police du 20 février 2019 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de deux mois à compter de l'arrêt à intervenir ;
4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 2 000 euros au titre des frais exposés et non compris dans les dépens sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sous réserve de renonciation par Me C... à la part contributive de l'État en application de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le refus de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " entrepreneur/profession libérale " a été pris en violation des dispositions du 3° de l'article L. 313-10 du CESEDA et est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;
- l'obligation de quitter le territoire français est illégale par la voie de l'exception d'illégalité du refus de titre de séjour ;
- l'obligation de quitter le territoire français méconnaît les dispositions de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;
Par un mémoire en défense, enregistré le 15 juillet 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... E... ne sont pas fondés.
M. A... E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 17 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;
- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;
- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme D... a été entendu au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. A... E..., ressortissant marocain, est entré en France le 9 septembre 2015 sous couvert d'un visa long séjour. Il a bénéficié d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " valable du 25 octobre 2016 au 24 octobre 2017. Le 11 octobre 2017, il a sollicité un titre de séjour portant la mention " entrepreneur/profession libérale " sur le fondement du 3° de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de police a pris à son encontre un arrêté du 20 février 2019 portant refus de séjour, obligation de quitter le territoire français dans le délai de 30 jours et fixant le pays de destination. Le Tribunal administratif de Paris a rejeté la requête présentée par M. A... E... à l'encontre de cet arrêté. M. A... E... fait appel du jugement du 18 juin 2019 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il rejette ses conclusions dirigées contre les décisions de refus de lui délivrer un titre de séjour et d'obligation de quitter le territoire français.
Sur la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour :
2. Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Une carte de séjour temporaire, d'une durée maximale d'un an, autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée à l'étranger : [...] 3° Pour l'exercice d'une activité non salariée, économiquement viable et dont il tire des moyens d'existence suffisants, dans le respect de la législation en vigueur. Elle porte la mention " entrepreneur/ profession libérale " ". Aux termes de l'article R. 313-16-1 du même code : " ... Pour l'application du 3° de l'article L. 313-10, l'étranger qui demande la carte de séjour temporaire portant la mention " entrepreneur/ profession libérale " doit présenter à l'appui de sa demande, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 313-1, les justificatifs permettant d'évaluer, en cas de création, la viabilité économique de son projet ".
3. Il résulte de ces dispositions que la délivrance d'une carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle à l'étranger qui vient exercer en France une profession commerciale, industrielle ou artisanale est subordonnée, notamment, à la viabilité économique de l'activité envisagée. Lorsque l'étranger est lui-même le créateur de l'activité qu'il vient exercer, il lui appartient de présenter à l'appui de sa demande les justificatifs permettant d'évaluer la viabilité économique de son activité ou entreprise, que celle-ci soit encore au stade de projet ou déjà créée.
4. M. A... E... soutient que le préfet de police a commis une erreur dans l'appréciation de la viabilité économique de son projet de création d'entreprise. Toutefois, le plan d'affaires du projet de création d'une entreprise de livraison de repas à domicile ou sur les lieux de travail par le biais d'une plateforme web présenté par M. A... E... ne dressait pas un état des lieux de la concurrence et des niveaux des prix pratiqués dans ce secteur ni davantage la stratégie commerciale retenue pour conclure des partenariats avec de nouveaux clients. En outre, la forte progression du chiffre d'affaires à court terme attendue par l'intéressé n'était pas justifiée par des éléments probants de nature à démontrer la viabilité économique et financière de son projet. Il y a lieu, en conséquence, d'écarter le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait mal apprécié la viabilité de l'activité économique envisagée par M. A... E... et ainsi méconnu les dispositions des articles L. 313-10 et R. 313-16-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
5. Le requérant n'établit pas que la décision de refus de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " entrepreneur/profession libérale " est illégale. Par conséquent, l'exception d'illégalité de cette décision soulevée à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision d'obligation de quitter le territoire français doit être écartée.
6. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de 1homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale... ".
7. M. A... E... est célibataire, sans enfant à charge, et ne justifie ni de l'existence ni de l'intensité de liens privés, familiaux, sociaux en France, alors qu'il n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Maroc où résident ses parents et où il a vécu jusqu'à l'âge de 24 ans. Dans ces conditions, le préfet de police n'a pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme. Il n'a pas, pour les mêmes motifs, commis d'erreur manifeste d'appréciation de la situation personnelle du requérant.
8. Il résulte de tout ce qui précède que M A... E... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction, ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... E... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... E... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- M. Platillero, président assesseur,
- Mme D..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 décembre 2020.
Le rapporteur,
I. D...Le président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
F. DUBUY-THIAM
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
N° 19PA03482 2