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10/12/2020 | FRANCE | N°18PA02558

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 10 décembre 2020, 18PA02558


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 26 mai 2016 par laquelle la maire de Paris a rejeté sa demande de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge pour carrière incomplète et de condamner la ville de Paris à réparer à hauteur de 76 782 euros les préjudices qu'il estime avoir subis du fait de cette décision de refus.

Par un jugement n° 1618813 du 6 juillet 2018, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 26 mai 2016, mais re

jeté les conclusions indemnitaires présentées par M. A....

Procédure devant la Cour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 26 mai 2016 par laquelle la maire de Paris a rejeté sa demande de prolongation d'activité au-delà de la limite d'âge pour carrière incomplète et de condamner la ville de Paris à réparer à hauteur de 76 782 euros les préjudices qu'il estime avoir subis du fait de cette décision de refus.

Par un jugement n° 1618813 du 6 juillet 2018, le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 26 mai 2016, mais rejeté les conclusions indemnitaires présentées par M. A....

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 26 juillet 2018, la ville de Paris, représentée par la SCP Foussard-Froger, avocats aux conseils, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1618813 du 6 juillet 2018, en tant que le Tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 26 mai 2016 ;

2°) de rejeter les conclusions à fin d'annulation de la décision du 26 mai 2016 présentées par M. A... devant le Tribunal administratif de Paris ;

3°) de mettre à la charge de M. A... la somme de 1 500 euros à verser à la ville de Paris sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la minute du jugement ne comporte pas les signatures prévues par les dispositions de l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- les premiers juges ont commis une erreur de droit en jugeant que la maire de Paris avait pris une décision de retrait d'une décision implicite d'acceptation intervenue sur le fondement du III de l'article 4 du décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 ;

- les autres moyens soulevés par M. A... en première instance à l'encontre de la décision de refus de prolongation de son activité doivent être écartés par les motifs exposés dans son mémoire en défense régularisé par le greffe du Tribunal administratif de Paris le 2 juin 2017 ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 1er mai 2019, M. A..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la ville de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la minute du jugement est revêtue de toutes les signatures prévues par l'article R. 741-7 du code de justice administrative ;

- le décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 s'applique bien à sa demande de prolongation d'activité car le corps des inspecteurs de sécurité de la ville de Paris relève bien de la catégorie active au sens de l'article L. 24 du code des pensions civiles et militaires de l'Etat ;

- la circonstance qu'il ait présenté sa demande de prolongation d'activité sur le fondement de l'article 1-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 en qualité de fonctionnaire relevant de la catégorie sédentaire ne faisait pas obstacle à ce que le Tribunal opère une substitution de base légale ;

- la décision du 26 mai 2016 est insuffisamment motivée en fait et en droit ;

- la décision est entachée d'erreur de fait et d'erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 ;

- la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public ;

- la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;

- le décret n° 94-415 du 24 mai 1994 ;

- le décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public ;

- le décret n° 2011-2103 du 30 décembre 2011 portant relèvement des bornes d'âge de la retraite des fonctionnaires, des militaires et des ouvriers de l'État ;

- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- les délibérations de la ville de Paris des 12 et 13 juillet 1999 modifiées ;

- le code de justice administrative.

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Ont été entendus, au cours de l'audience publique du 12 novembre 2020 :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., représentant la ville de Paris.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... était un agent appartenant au corps des inspecteurs de sécurité de la ville de Paris et exerçait, en dernier lieu, les fonctions de chef de sécurité au sein de la mission accompagnement et protection des séniors de la ville de Paris. Atteint par la limite d'âge, à la date du 30 novembre 2016, il a présenté, le 28 janvier 2016, une demande de prolongation d'activité pour carrière incomplète. Par un courrier du 26 mai 2016, la ville de Paris a refusé de prolonger son activité. Le Tribunal administratif de Paris, par un jugement n° 1618813 du 6 juillet 2018, a annulé cette décision, mais rejeté les conclusions indemnitaires présentées par M. A.... La ville de Paris fait appel de ce jugement en tant qu'il annule la décision du 26 mai 2016.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 741-7 du code de justice administrative " Dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, la minute de la décision est signée par le président de la formation de jugement, le rapporteur et le greffier d'audience. "

3. La minute du jugement du 6 juillet 2018 du Tribunal administratif de Paris comporte la signature du rapporteur, du président de la formation de jugement et du greffier d'audience. Le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 741-7 du code de justice administrative doit être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien-fondé du jugement :

S'agissant de l'application à M. A... des dispositions du décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 :

4. Aux termes de l'article 1er de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public, modifié par l'article 29 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites : " Sous réserve des reculs de limite d'âge pouvant résulter des textes applicables à l'ensemble des agents de l'Etat, la limite d'âge des fonctionnaires civils de l'Etat est fixée à soixante-sept ans lorsqu'elle était, avant l'intervention de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites, fixée à soixante-cinq ans ". Aux termes de l'article 1-1 de la même loi : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge reconnus au titre des dispositions de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires dont la durée des services liquidables est inférieure à celle définie à l'article L. 13 du code des pensions civiles et militaires de retraite peuvent, lorsqu'ils atteignent les limites d'âge applicables aux corps auxquels ils appartiennent, sur leur demande, sous réserve de l'intérêt du service et de leur aptitude physique, être maintenus en activité. ...". Aux termes de l'article 1-3 de la même loi : " Sous réserve des droits au recul des limites d'âge prévus par l'article 4 de la loi du 18 août 1936 concernant les mises à la retraite par ancienneté, les fonctionnaires régis par la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires appartenant à des corps ou des cadres d'emplois dont la limite d'âge est inférieure à la limite d'âge prévue au premier alinéa de l'article 1er de la présente loi sont, sur leur demande, lorsqu'ils atteignent cette limite d'âge, maintenus en activité jusqu'à un âge égal à la limite d'âge prévue au même premier alinéa, dans les conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, sous réserve de leur aptitude physique ". Aux termes de l'article 28 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites : " I. _ Pour les fonctionnaires relevant de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 précitée dont la limite d'âge était de soixante-cinq ans en application des dispositions législatives et réglementaires antérieures à l'entrée en vigueur de la présente loi et nés à compter du 1er janvier 1955, la limite d'âge est fixée à soixante-sept ans. / II. _ Cette limite d'âge est fixée par décret dans la limite de l'âge mentionné au I pour les fonctionnaires atteignant avant le 1er janvier 2015 l'âge d'ouverture du droit à une pension de retraite applicable antérieurement à la présente loi et, pour ceux atteignant cet âge entre le 1er juillet 2011 et le 31 décembre 2014, de manière croissante à raison :1° De quatre mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le 1er juillet et le 31 décembre 2011 ;2° De cinq mois par génération pour les fonctionnaires atteignant cet âge entre le 1er janvier 2012 et le 31 décembre 2014... ". Aux termes de l'article 4 du décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 relative à la limite d'âge dans la fonction publique et le secteur public : " ... III. _ La décision de l'employeur public intervient au plus tard trois mois avant la survenance de la limite d'âge. Le silence gardé pendant plus de trois mois sur la demande de prolongation vaut décision implicite d'acceptation. L'employeur délivre à la demande de l'intéressé une attestation d'autorisation à la poursuite d'activité [...]. ".

5. Le statut du corps des inspecteurs de sécurité ne prévoit pas une limite d'âge de mise à la retraite par ancienneté inférieure à celle instituée pour l'ensemble des fonctionnaires par les dispositions précitées de l'article 1-1 de la loi n° 84-834 du 13 septembre 1984 et de l'article 28 de la loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2011. La demande de prolongation d'activité présentée par M. A... le 28 janvier 2016 ne pouvait, en conséquence, être formulée sur le fondement de

l'article 1-3 de la loi du 13 septembre 1984. Dans ces conditions, la décision du 26 mai 2016 de la maire de Paris refusant de prolonger l'activité de M. A... ne peut être regardée comme une décision de retrait d'une décision implicite d'acceptation intervenue en application de l'article 4 du décret n° 2009-1744 du 30 décembre 2009 pris pour l'application de l'article 1-3 de la loi du 13 septembre 1984. C'est donc à tort que le tribunal a qualifié la décision du 26 mai 2016 de la maire de Paris de décision de retrait d'une décision implicite d'acceptation de la demande de M. A....

6. Toutefois, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. /A cet effet, doivent être motivées les décisions qui (...) 3° Subordonnent l'octroi d'une autorisation à des conditions restrictives ou imposent des sujétions ;(...) "

7. La décision du 26 mai 2016 ne vise aucun texte et se réfère sans le joindre à un avis du directeur de la prévention et de la protection. En conséquence, elle ne comporte pas les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Elle est par suite insuffisamment motivée. La ville de Paris n'est donc pas fondée à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué le tribunal administratif de Paris a annulé la décision du 26 mai 2016.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de M. A..., qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la ville de Paris demande au titre des frais qu'elle a exposés et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de mettre à la charge de la ville de Paris une somme de 1 500 euros à verser à M. A... sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par la ville de Paris est rejetée.

Article 2 : La ville de Paris versera une somme de 1 500 euros à M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la ville de Paris et à M. E... A....

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- M. Platillero, président assesseur,

- Mme D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 décembre 2020.

Le rapporteur,

I. D...Le président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au préfet de la région Île-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA02558


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02558
Date de la décision : 10/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-13-01 Fonctionnaires et agents publics. Contentieux de la fonction publique. Contentieux de l'annulation.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Isabelle MARION
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : SCP ARVIS et KOMLY-NALLIER

Origine de la décision
Date de l'import : 22/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-10;18pa02558 ?
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