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03/12/2020 | FRANCE | N°20PA01363

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 03 décembre 2020, 20PA01363


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cofinfo a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la mise en demeure, tenant lieu de commandement, émise le 15 mai 2018 par la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris pour le paiement d'une somme de 238 853,96 euros, correspondant au reste à payer du titre de perception n° 1518/2008 du 5 août 2008.

Par une ordonnance n° 1813504/3-2 du 13 mai 2020, la vice-présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris a rejet

sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mai...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Cofinfo a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la mise en demeure, tenant lieu de commandement, émise le 15 mai 2018 par la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris pour le paiement d'une somme de 238 853,96 euros, correspondant au reste à payer du titre de perception n° 1518/2008 du 5 août 2008.

Par une ordonnance n° 1813504/3-2 du 13 mai 2020, la vice-présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 27 mai 2020, et un mémoire en réplique, enregistré le 20 octobre 2020, la société Cofinfo, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance du 13 mai 2020 de la vice-présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la mise en demeure, tenant lieu de commandement, émise le 15 mai 2018 par la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris pour le paiement d'une somme de 238 853,96 euros, correspondant au reste à payer du titre de perception n° 1518/2008 du 5 août 2008 ;

3°) de la décharger du paiement de cette somme de 238 853,96 euros ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la mise en demeure litigieuse n'a pas été signée par le préfet de Paris, en application de l'article 85 du règlement général sur la comptabilité publique, mais par l'inspecteur des finances publiques au nom du comptable public d'Île-de-France et du département de Paris, qui était incompétent ;

- la mise en demeure est entachée de nombreuses irrégularités formelles, dont notamment l'absence de référence du texte sur lequel est fondée la créance et de mention du comptable assignataire ;

- la mise en demeure querellée est fondée sur des titres de perceptions illégaux, en ce que la combinaison des refus illégaux de concours de la force publique suivie d'une procédure d'expropriation ainsi réalisée à moindre coût sont constitutifs d'un détournement de procédure ; la procédure d'expropriation a été annulée du fait de ce détournement de procédure ;

- les stipulations de l'article 6 - 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ont été méconnues, en ce que l'Etat a refusé d'exécuter une décision de justice définitive ayant autorité de la chose jugée et en refusant de l'indemniser pour les travaux réalisés d'office par le préfet de Paris qui sont la conséquence exclusive du refus de l'Etat d'exécuter cette décision de justice, l'Etat ayant été en l'espèce juge et partie ;

- les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme ont été méconnues, en ce que la déclaration d'utilité publique et l'arrêté de cessibilité de l'immeuble ont été annulés par un arrêt de la Cour du 4 novembre 2011, et que la mise en demeure contestée n'aurait pas été émise si son droit de propriété avait été respecté.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 septembre 2020, le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris déclare qu'il n'est pas compétent pour défendre.

Il soutient que les moyens soulevés par la société Cofinfo ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et des libertés fondamentales, et son premier protocole additionnel ;

- le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 ;

- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012, en particulier ses articles 112 et 113 ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me A..., avocat de la société Cofinfo.

Considérant ce qui suit :

1. La société Kentucky, aux droits de laquelle est venue la société Cofinfo, a acquis en 1997 un immeuble sis 3-5, rue Godefroy Cavaignac à Paris (75011) afin de le rénover et de le donner en location. Par une ordonnance de référé du 22 mars 2000, le président du tribunal de grande instance de Paris a ordonné l'expulsion des squatters qui occupaient les locaux, si besoin avec le concours de la force publique. En dépit de plusieurs demandes formulées entre 2000 et 2005, le préfet de police n'a pas accordé le concours de la force publique à la société Kentucky. Par un jugement du 14 mars 2006, le tribunal administratif de Paris a condamné l'Etat à verser à la société Cofinfo la somme de 1 645 358,75 euros en réparation des préjudices subis du fait du refus de concours de la force publique. Par un arrêt du 5 juin 2007 devenu définitif, la Cour a réformé ce jugement et ramené le montant de l'indemnité due à la société Cofinfo à la somme de 689 424 euros. A la suite de cet arrêt, le ministre de l'intérieur a réclamé à la société Cofinfo, par un titre de perception émis le 4 août 2008, la différence entre la somme versée par l'Etat en exécution du jugement du 14 mars 2006 et la somme fixée par le juge d'appel. Par un jugement du 11 décembre 2009, confirmé par un arrêt de la Cour du 20 janvier 2011, le tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Cofinfo tendant à l'annulation de ce titre de perception. La somme due n'ayant été que partiellement recouvrée, une mise en demeure de payer le reliquat, soit la somme de 238 853,96 euros, a été émise le 15 mai 2018 par la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris. La société Cofinfo a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de cette mise en demeure ainsi que la décharge de l'obligation de payer la somme de 238 853,96 euros. Par l'ordonnance attaquée du 13 mai 2020, la vice-présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de la société Cofinfo.

2. Aux termes de l'article 23 du décret du 7 novembre 2012, applicable à l'Etat en vertu de son article 2 : " Les recettes comprennent les produits des impositions de toute nature, les produits résultant de conventions ou de décisions de justice et les autres produits autorisés pour chaque catégorie de personne morale mentionnée à l'article 1er par les lois et règlements en vigueur. Les impositions de toute nature et produits mentionnés ci-dessus sont liquidés et recouvrés dans les conditions prévues par le code général des impôts, le livre des procédures fiscales, le code des douanes et, le cas échéant, par les autres lois et règlements ". Aux termes de l'article 112 de ce décret : " Les ordres de recouvrer relatifs aux autres recettes comprennent : " 1° Les titres de perception mentionnés à l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales ; (...) ". Aux termes de l'article 117 du même décret : " Les titres de perception émis en application de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales peuvent faire l'objet de la part des redevables : 1° Soit d'une contestation portant sur l'existence de la créance, son montant ou son exigibilité ; 2° Soit d'une contestation portant sur la régularité du titre de perception. Les contestations du titre de perception ont pour effet de suspendre le recouvrement de la créance. ". Aux termes de l'article 119 du même décret : " Les actes de poursuites, délivrés pour le recouvrement des titres de perception émis dans le cadre de l'article L. 252 A du livre des procédures fiscales peuvent faire l'objet de la part des redevables d'une contestation conformément aux articles L. 281 et R. 281-1 et suivants du même livre. Les demandes en revendication d'objets saisis formées par des tiers sont effectuées conformément aux modalités prévues aux articles L. 283 et R. 283-1 du livre des procédures fiscales. ".

3. L'article L. 252 A du livre des procédures fiscales dispose que : " Constituent des titres exécutoires les arrêtés, états, rôles, avis de mise en recouvrement, titres de perception ou de recettes que l'Etat, les collectivités territoriales ou les établissements publics dotés d'un comptable public délivrent pour le recouvrement des recettes de toute nature qu'ils sont habilités à recevoir ". Aux termes du I de l'article L. 273 A du même livre : " Les créances de l'Etat ou celles qu'il est chargé de recouvrer pour le compte de tiers sur la base d'un titre de perception délivré par lui en application de l'article L. 252 A peuvent être recouvrées par voie de saisie à tiers détenteur. / (...) / Les contestations relatives à la saisie doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui a exercé cette poursuite avant tout recours juridictionnel ". Aux termes du I de l'article L. 281 du même livre : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. / Les contestations ne peuvent porter que : / 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; / 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. / Les recours contre les décisions prises par l'administration sur ces contestations sont portés, dans le premier cas, devant le juge de l'exécution, dans le second cas, devant le juge de l'impôt tel qu'il est prévu à l'article L. 199 ".

4. En premier lieu, la société Cofinfo reprend en appel les moyens, qu'elle avait invoqués en première instance, tirés de ce que la mise en demeure litigieuse n'aurait pas été signée par le préfet de Paris, en application de l'article 85 du règlement général sur la comptabilité publique, mais par l'inspecteur des finances publiques au nom du comptable public d'Île-de-France et du département de Paris, qui était incompétent, et qu'elle serait entachée de nombreuses irrégularités formelles, dont notamment l'absence de référence du texte sur lequel est fondée la créance et de mention du comptable assignataire. Il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Paris.

5. En second lieu, la société Cofinfo reprend en appel les moyens, qu'elle avait invoqués en première instance, tirés de ce que la mise en demeure querellée est fondée sur des titres de perceptions illégaux du fait d'un détournement de procédure et qu'elle méconnaît les stipulations de l'article 6 - 1 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme et les stipulations de l'article 1er du premier protocole additionnel à la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'Homme. Il y a lieu de rejeter ces moyens par adoption des motifs retenus par le tribunal administratif de Paris.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Cofinfo n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée du 13 mai 2020, la vice-présidente de la 3ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Cofinfo est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Cofinfo et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris.

Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. B..., président,

- Mme Collet, premier conseiller,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 3 décembre 2020.

Le rapporteur, président de la formation de jugement,

I. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 20PA01363


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01363
Date de la décision : 03/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01 Contributions et taxes. Généralités.


Composition du Tribunal
Président : M. LUBEN
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : DOUEB

Origine de la décision
Date de l'import : 16/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-03;20pa01363 ?
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