Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 14 février 2018 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et a abrogé l'attestation de sa demande d'asile.
Par un jugement n° 1804017/6-3 du 14 septembre 2018, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté en tant qu'il fixe l'Afghanistan comme pays de destination, a enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation administrative de M. B... et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 19 octobre 2018, le préfet de police demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1804017/6-3 du 14 septembre 2018 du tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, celui-ci a annulé sa décision du 14 février 2018 fixant l'Afghanistan comme pays de destination, lui a enjoint de réexaminer la situation de M. B... et a mis à la charge de l'Etat une somme de 800 euros en application de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 ;
2°) de rejeter les conclusions de la demande présentée par M. B... devant le tribunal administratif de Paris dirigées contre la décision fixant le pays de destination.
Il soutient que :
- c'est à tort que le premier juge a estimé qu'il avait méconnu les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en fixant l'Afghanistan comme pays de destination alors que M. B... n'a produit aucun élément permettant d'établir qu'il serait personnellement exposé à des risques de traitements inhumains ou dégradants en cas de retour dans son pays d'origine ;
- les autres moyens soulevés par M. B... en première instance à l'encontre de la décision fixant le pays de destination ne sont pas fondés.
Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2019, M. B..., représenté par Me A..., conclut à titre principal au rejet de la requête et demande à la Cour:
1°) de lui accorder le bénéfice de l'aide juridictionnelle à titre provisoire et de désigner Me A... pour le représenter ;
Et à titre subsidiaire :
2°) d'annuler le jugement n° 1804017/6-3 du 14 septembre 2018 du tribunal administratif de Paris en tant que, par ce jugement, celui-ci a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision du 14 septembre 2018 portant obligation de quitter le territoire français ;
3°) d'annuler la décision du 14 septembre 2018 portant obligation de quitter le territoire français ;
4°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation ;
5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à Me A... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le moyen soulevé en appel par le préfet de police n'est pas fondé ;
à titre subsidiaire,
- il maintient l'intégralité des moyens soulevés en première instance ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire est insuffisamment motivée ;
- l'administration n'a pas procédé à un examen approfondi de sa situation personnelle ; en particulier, le préfet de police n'a pas examiné les éléments nouveaux qu'il avait présentés au soutien de sa demande de réexamen par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
- le préfet de police s'est borné à se référer à la décision du 26 décembre 2017 de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides ;
- la décision contestée a été prise à l'issue d'une procédure irrégulière en méconnaissance du principe du contradictoire ; les articles L. 121-1 du code des relations entre le public et l'administration et 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ont ainsi été méconnus ; il a été privé d'une garantie procédurale essentielle ce qui a eu des conséquences sur le sens de la décision contestée ;
- il appartient au préfet de police de rapporter la preuve de la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, qui lui aurait été notifiée le 5 janvier 2018, et de son caractère définitif ; le caractère suspensif du recours devant la Cour nationale du droit d'asile vaut jusqu'à la notification régulière de la décision à intervenir ;
- la décision de la Cour nationale du droit d'asile en date du 6 octobre 2016 ne mentionne pas qu'une traduction des mentions portant sur les délais et les voies de recours en langue pachto ait été jointe ; il en va de même pour les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides dont celle du 26 décembre 2017 ; le préfet de police a ainsi méconnu l'article 12 de la directive 2013/ 32/UE du Parlement européen et du Conseil du 26 juin 2013 ; dans ces conditions, aucune obligation de quitter le territoire français ne pouvait être prise à son encontre, le recours devant la Cour nationale du droit d'asile conservant son caractère suspensif ;
- sa demande de réexamen par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides n'avait pas pour but de faire échec à une mesure d'éloignement ; par suite, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne pouvait être légalement fondée sur le 4° de l'article L. 743-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; c'est à tort que le préfet de police a fait usage de la faculté prévue aux articles L. 723-11 et L. 742-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;
- il a méconnu les articles 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 47 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dès lors qu'il a contesté la décision d'irrecevabilité de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides devant la Cour nationale du droit d'asile et que cette procédure est actuellement pendante ; la mise en oeuvre de l'obligation de quitter le territoire français le privera de la possibilité d'être présent quand la Cour nationale du droit d'asile statuera sur son recours ou, à tout le moins, le priverait de tout effet utile.
Par un mémoire, enregistré le 29 octobre 2020, M. B... maintient ses conclusions tendant au rejet de la requête du préfet de police et, dans le cas où la Cour prononcerait un non-lieu à statuer, persiste dans ses conclusions présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il informe la Cour que, par une décision du 8 octobre 2020, la Cour nationale du droit d'asile a annulé la décision du directeur général de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides du 26 décembre 2017 et lui a accordé le bénéfice de la protection subsidiaire.
Par une décision du 22 février 2019, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris a décidé de maintenir sa décision du 27 juin 2018 accordant à M. B... l'aide juridictionnelle totale.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative ;
- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme C... a présenté son rapport au cours de l'audience publique.
Considérant ce qui suit :
1. M. B..., de nationalité afghane, entré en France le 10 septembre 2014 selon ses déclarations, a présenté une demande d'asile qui a été rejetée par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides en date du 30 septembre 2015, décision confirmée par une décision de la Cour nationale du droit d'asile du 6 octobre 2016. Par un arrêté en date du 28 février 2017, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné. M. B... a sollicité le réexamen de sa demande d'asile qui a été rejetée comme irrecevable par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 26 décembre 2017. Un recours a été enregistré le 25 janvier 2018 contre cette décision devant la Cour nationale du droit d'asile. Par un arrêté du 14 février 2018, le préfet de police a, à nouveau, fait obligation à M. B... de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé l'Afghanistan comme pays de destination. Le préfet de police relève appel du jugement du 14 septembre 2018 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a annulé sa décision fixant l'Afghanistan comme pays de destination au motif qu'elle méconnaissait l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Par la voie de l'appel incident, M. B... doit être regardé comme demandant l'annulation de ce jugement en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français.
Sur les conclusions aux fins d'admission à l'aide juridictionnelle provisoire :
2. Par une décision du 27 juin 2018, M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale qui a été maintenue par une décision du 22 février 2019 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris. Par suite, il n'y a plus lieu de statuer sur ses conclusions tendant à ce qu'il soit admis à l'aide juridictionnelle provisoire.
Sur les conclusions aux fins d'annulation :
3. Par une décision du 8 octobre 2020, postérieure à l'introduction de la requête du préfet de police, la Cour nationale du droit d'asile a accordé à M. B... le bénéfice de la protection subsidiaire. En conséquence, la requête du préfet de police et les conclusions incidentes présentées par M. B... sont devenues sans objet et il n'y a plus lieu d'y statuer.
Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
4. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme sollicitée par Me A... sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
DÉCIDE :
Article 1er : Il n'y a plus lieu de statuer sur la requête du préfet de police, sur les conclusions présentées par M. B... tendant à ce qu'il soit admis provisoirement à l'aide juridictionnelle et sur ses conclusions incidentes tendant à l'annulation, d'une part, du jugement n° 1804017/6-3 du 14 septembre 2018 du tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté ses conclusions à fin d'annulation de la décision du 14 février 2018 l'obligeant à quitter le territoire français et, d'autre part, de la décision du 14 février 2018 du préfet de police l'obligeant à quitter le territoire français et à ce qu'il soit enjoint au préfet de police de réexaminer sa situation.
Article 2 : Les conclusions présentées par M. B... tendant à l'application des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B..., au préfet de police et au ministre de l'intérieur.
Délibéré après l'audience du 12 novembre 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Luben, président,
- Mme Collet, premier conseiller,
- Mme C..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 décembre 2020.
Le président de la formation de jugement,
I. LUBEN
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03356