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24/11/2020 | FRANCE | N°19PA00770

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 24 novembre 2020, 19PA00770


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiées unipersonnelle (SASU) Aerium France a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1700833/1-1 du 27 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 février 2019 et le 10 septembre 2019, la SASU Aerium France, rep

résentée par Me Gaudron puis par Me Frovo, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 170...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par actions simplifiées unipersonnelle (SASU) Aerium France a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur les salaires auxquels elle a été assujettie au titre de l'année 2015.

Par un jugement n° 1700833/1-1 du 27 décembre 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 18 février 2019 et le 10 septembre 2019, la SASU Aerium France, représentée par Me Gaudron puis par Me Frovo, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1700833/1-1 du 27 décembre 2018 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses, en droits et pénalités ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 4 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement du Tribunal administratif est entaché d'une contradiction de motifs ;

- le directeur général et le directeur administratif et financier ne peuvent être présumés exercer leurs fonctions dans le domaine d'activité non passible de la taxe sur la valeur ajoutée et ne les y exercent pas dans les faits.

Par un mémoire en défense, enregistré le 31 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de commerce,

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Segretain,

- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SASU Aerium France exerce des activités de conseil, notamment dans le domaine de l'immobilier, et de gestion d'actifs, soumises à la taxe sur la valeur ajoutée, et perçoit en outre des dividendes et produits financiers, n'entrant pas dans le champ d'application de la taxe sur la valeur ajoutée, et représentant en 2014 plus de 10 % de son chiffre d'affaires. A la suite d'un contrôle sur pièces, conclu par une proposition de rectification du 15 juin 2016, elle a été assujettie à des rappels de taxe sur les salaires au titre de l'année 2015, selon la procédure contradictoire, assortis d'une majoration de 10 % sur le fondement de l'article 1728 du code général des impôts et d'intérêts de retard. La SASU Aerium France fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de ces impositions et pénalités.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. En premier lieu, si la société requérante soutient que le jugement attaqué est entaché d'une contradiction de motifs, un tel moyen porte sur le bien-fondé du jugement et non sur sa régularité.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

3. Aux termes de l'article 231 du code général des impôts dans sa version applicable, issue de la loi n°2012-1404 du 17 décembre 2012 : " 1. Les sommes payées à titre de rémunérations aux salariés, à l'exception de celles correspondant aux prestations de sécurité sociale versées par l'entremise de l'employeur, sont soumises à une taxe égale à 4,25 % de leur montant évalué selon les règles prévues à l'article L. 136-2 du code de la sécurité sociale, sans qu'il soit toutefois fait application du deuxième alinéa du I du même article. Cette taxe est à la charge des entreprises et organismes qui emploient ces salariés, (...) qui paient ces rémunérations lorsqu'ils ne sont pas assujettis à la taxe sur la valeur ajoutée ou ne l'ont pas été sur 90 % au moins de leur chiffre d'affaires au titre de l'année civile précédant celle du paiement desdites rémunérations. L'assiette de la taxe due par ces personnes ou organismes est constituée par une partie des rémunérations versées, déterminée en appliquant à l'ensemble de ces rémunérations le rapport existant, au titre de cette même année, entre le chiffre d'affaires qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires total (...). " Aux termes de l'article L. 227-6 du code de commerce, relatif aux sociétés par actions simplifiées : " La société est représentée à l'égard des tiers par un président désigné dans les conditions prévues par les statuts. Le président est investi des pouvoirs les plus étendus pour agir en toute circonstance au nom de la société dans la limite de l'objet social. (...) Les statuts peuvent prévoir les conditions dans lesquelles une ou plusieurs personnes autres que le président, portant le titre de directeur général ou de directeur général délégué, peuvent exercer les pouvoirs confiés à ce dernier par le présent article. "

4. L'administration a assigné à la SASU Aerium France des rappels de taxe sur les salaires au titre de l'année 2015 en incluant dans son assiette imposable les rémunérations du directeur général France de l'entreprise, M. A..., et de son directeur administratif et financier, M. H. Il résulte des dispositions de l'article 231 du code général des impôts que, lorsqu'une entreprise exerce son activité dans des domaines différents, dont certains n'entrent pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, les rémunérations des salariés ne sont passibles de la taxe sur les salaires qu'à la condition qu'ils exercent leur activité, en tout ou partie, dans le domaine n'entrant pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée. Par conséquent, la seule circonstance que M. G. et M. H. étaient des dirigeants de l'entreprise ne peut suffire à assujettir à la taxe litigieuse les sommes qui leur étaient payées par elle à titre de rémunérations, en l'absence de référence à leurs responsabilités effectives.

5. D'une part, il ne résulte pas de l'instruction que M. A... disposait, en 2015, de la qualité de mandataire social de la SASU Aerium France qui lui aurait été déléguée par son président en vertu de l'article L. 227-6 du code de commerce, lui conférant les pouvoirs les plus étendus dans la direction de la société, bien qu'il en fût le directeur général France. Il ne peut donc être présumé avoir exercé des attributions dans le domaine d'activité de la société Aerium France n'entrant pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée, consistant en la perception de produits financiers et de dividendes, dont la société fait valoir, sans être contestée, qu'elle est exclusivement passive et ne demande aucune diligence particulière. Il ne résulte pas plus de l'instruction, et notamment de l'examen de son contrat de travail, aux termes duquel il est chargé d'organiser et gérer les équipes de la société, il assume des missions stratégiques, commerciales, et la relation avec les investisseurs et actionnaires, qu'il aurait exercé de telles fonctions, même partiellement, la circonstance que ses attributions y soient présentées comme évolutives étant sans incidence. Sa rémunération ne pouvait, par suite, être soumise à la taxe sur les salaires au titre de 2015. D'autre part, il résulte de l'instruction, et en particulier de l'examen de son contrat de travail, que le directeur financier de la société, M. B..., avait notamment pour mission d'assurer l'encadrement de l'équipe comptable, de revoir et optimiser les procédures de suivi comptable, de mettre en place un outil de contrôle de gestion et de reporting financier, et de superviser les sujets fiscaux. La société requérante fait valoir que M. H. avait été engagé par elle, en tant que société tête de groupe, pour assister les entreprises du groupe dans leur gestion comptable, fiscale et financière et non pour gérer le patrimoine financier de la holding, et qu'il n'a aucun pouvoir sur l'opportunité de distribuer des dividendes et la fixation de leur montant. Il ne résulte toutefois pas de l'instruction que la supervision comptable, fiscale et financière du patrimoine financier de la société Aerium France à la source des dividendes et des produits financiers qu'elle perçoit aurait été exclue du périmètre des fonctions de M. B... telles qu'elles sont décrites dans son contrat de travail. Celui-ci doit donc être regardé comme ayant exercé ses fonctions dans le domaine d'activité de la société n'entrant pas dans le champ de la taxe sur la valeur ajoutée et ses rémunérations doivent être prises en compte dans le calcul de la taxe sur les salaires, selon le rapport existant entre le chiffre d'affaires du domaine d'activité qui n'a pas été passible de la taxe sur la valeur ajoutée et le chiffre d'affaires de la société en 2014.

6. Il résulte de tout ce qui précède que le jugement attaqué du Tribunal administratif de Paris doit être réformé en tant qu'il a rejeté les conclusions en décharge de la SASU Aerium France, s'agissant des rémunérations de son directeur général France, et que, s'agissant des rémunérations de son directeur administratif et financier, la société requérante n'est pas fondée à se plaindre que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les frais liés à l'instance :

7. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre des conclusions de la SASU Aerium France présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La SASU Aerium France est déchargée des rappels de taxe sur les salaires à laquelle elle a été assujettie au titre de l'année 2015 à raison des sommes payées à titre de rémunération à son directeur général France.

Article 2 : L'Etat versera à la SASU Aerium France la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le jugement n° 1700833/1-1 du 27 décembre 2018 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SASU Aerium France est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SASU Aerium France et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et de Paris (service du contentieux d'appel déconcentré).

Délibéré après l'audience du 10 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- M. Segretain, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 novembre 2020.

Le rapporteur,

A. SegretainLe président,

C. JARDINLe greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA00770 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00770
Date de la décision : 24/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-05-01 Contributions et taxes. Impôts assis sur les salaires ou les honoraires versés. Versement forfaitaire de 5 p. 100 sur les salaires et taxe sur les salaires.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Alexandre SEGRETAIN
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : GAUDRON

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-24;19pa00770 ?
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