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18/11/2020 | FRANCE | N°18PA00431

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 18 novembre 2020, 18PA00431


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Gardioles Participations a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1607988/2-3 du 7 décembre 2017, le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un

mémoire enregistrés les 7 février 2018 et 17 janvier 2019, la SNC Gardioles Participations représ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société en nom collectif (SNC) Gardioles Participations a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 et des pénalités y afférentes.

Par un jugement n° 1607988/2-3 du 7 décembre 2017, le Tribunal administratif de Paris n'a que partiellement fait droit à cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 7 février 2018 et 17 janvier 2019, la SNC Gardioles Participations représentée par Me A... C..., demande à la Cour :

1°) de réformer le jugement du Tribunal administratif de Paris du 7 décembre 2017 en tant qu'il a rejeté le surplus de sa demande ;

2°) de prononcer la décharge des impositions restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du Code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la facture Protec du 10 avril 2012 a été produite ;

- la preuve de son paiement par la société Mulimmo le 24 mai et le 8 juin 2012 a été apportée ;

- elle avait auparavant avancé cette somme à la société Mulimmo le 21 mars 2012 ;

- la déduction est conditionnée par la présentation de la facture et par la preuve du paiement ;

- le manquement délibéré n'est pas établi.

Par un mémoire en défense enregistré le 13 juin 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société requérante ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 17 janvier 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 1er février 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SNC Gardioles Participations, qui exerce une activité de détention de logements meublés et de location de ceux-ci à des sociétés d'exploitation, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle des rappels de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été assignés pour les périodes du 1er janvier au 31 décembre 2011 et du 1er janvier au 31 décembre 2012, et d'un contrôle sur pièces, qui a conduit à des rappels de taxe sur la valeur ajoutée au titre de la période du 1er janvier au 31 décembre 2011. Elle relève appel du jugement n° 1607988/2-3 du Tribunal administratif de Paris, en date du 7 décembre 2017, en tant qu'il n'a pas fait intégralement droit à sa demande en décharge de ces rappels, en droits et pénalités.

Sur le bien-fondé de l'imposition :

2. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. Toutefois, les personnes qui effectuent des opérations occasionnelles soumises à la taxe sur la valeur ajoutée n'exercent le droit à déduction qu'au moment de la livraison. 3. La déduction de la taxe ayant grevé les biens et les services est opérée par imputation sur la taxe due par le redevable au titre du mois pendant lequel le droit à déduction a pris naissance. II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; (...) 2. La déduction ne peut pas être opérée si les redevables ne sont pas en possession soit desdites factures (...) ". Aux termes de l'article 269 du code général des impôts : " (...) 2. La taxe est exigible : (...) a bis) Pour les livraisons d'immeubles à construire, lors de chaque versement des sommes correspondant aux différentes échéances prévues par le contrat en fonction de l'avancement des travaux (...) ".

3. La société Gardioles Participations fait valoir que la facture Protec du 10 avril 2012 a notamment été payée, à hauteur de 100 000 euros, par deux virements successifs, pour des montants de 10 000 et de 90 000 euros, effectués respectivement les 24 mai et 8 juin 2012, par la société Mulimmo au profit de la société Protec, en remboursement d'une avance consentie par la société Gardioles Participations le 21 mars 2012. Par la production, dans ses écritures antérieures à la clôture de l'instruction, d'un extrait du compte de tiers ouvert à son nom dans les écritures de la société Mulimmo, qui fait apparaître un crédit de 100 000 euros ainsi que deux débits des 24 mai et 6 juin 2012, respectivement de 10 000 et 90 000 euros, intitulés " Protec pour Gardioles ", et d'un courriel émanant de la société Protec qui mentionne les deux paiements correspondants, la société requérante doit être regardée comme établissant le paiement partiel pour son compte de la facture à hauteur des sommes en cause, en l'absence de tout élément avancé par l'administration de nature à contredire le faisceau d'indices qui résulte de ces documents. L'exigibilité de la taxe comprise dans la somme de 100 000 euros étant établie au niveau du redevable, c'est à tort que le service a refusé d'admettre sa déductibilité, alors même qu'il ne serait pas établi que la somme en cause a été versée par la société Mulimmo en remboursement d'une avance qui lui aurait été consentie par la société Gardioles Participations.

Sur les pénalités :

4. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'Etat entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ". Aux termes de l'article L. 195 A du livre des procédures fiscales : " En cas de contestation des pénalités fiscales appliquées à un contribuable au titre des impôts directs (...), la preuve de la mauvaise foi et des manoeuvres frauduleuses incombe à l'administration ".

5. Pour justifier l'application des pénalités pour manquement délibéré prévues par l'article 1729 du code général des impôts, s'agissant de la taxe sur la valeur ajoutée collectée, l'administration, dans la proposition de rectification du 19 décembre 2013 afférente à l'année 2011, a relevé que les omissions de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée portaient sur un montant très important de 125 790 euros, correspondant à 85% de la taxe sur la valeur ajoutée collectée totale, et que cette omission était intentionnelle, dès lors que la société requérante avait expressément déclaré, devant notaire, qu'elle acquitterait auprès du service d'impôts des entreprises dont elle relève la taxe sur la valeur ajoutée qui lui a été payée par les consorts D. et B.. Par ailleurs, dans la proposition du 19 juin 2013, et s'agissant de l'année 2012, le service a relevé que si, sur les deux premiers appels de fonds aux consorts D. et B., la taxe sur la valeur ajoutée collectée a été régulièrement déclarée au titre du mois de juin 2012, elle ne l'a pas été sur les relevés CA3 des mois d'août et novembre 2012 pour les six appels de fonds suivants, alors que la taxe sur la valeur ajoutée a été effectivement encaissée et que la société requérante ne pouvait ignorer que ladite taxe, qui représentait un montant important, était exigible et devait être déclarée dans les délais légaux.

6. Les constatations de fait qui sont le support nécessaire d'un jugement définitif rendu par juge pénal s'imposent au juge de l'impôt. En revanche, l'autorité de la chose jugée par la juridiction pénale ne saurait s'attacher aux motifs d'une décision de relaxe tirés de ce que les faits reprochés au contribuable ne sont pas établis et de ce qu'un doute subsiste sur leur réalité et, notamment, sur la nature des opérations effectuées. Par suite, en présence d'un jugement définitif de relaxe rendu par le juge répressif, il appartient au juge de l'impôt, avant de porter lui-même une appréciation sur la matérialité et la qualification des faits au regard de la loi fiscale, de rechercher si cette relaxe était ou non fondée sur des constatations de fait qui s'imposent à lui. En relaxant, par un jugement du 4 juillet 2016, qui ne concernait d'ailleurs que l'année 2011, les associés de la société Gardioles Participations des poursuites de fraude fiscale dont ils faisaient l'objet, au motif que l'administration n'avait pas démontré, lors de l'audience correctionnelle, de manière formelle, que les prévenus avaient agi de manière délibéré et dans l'intention de commettre une fraude fiscale, le Tribunal correctionnel de Paris n'a procédé à aucune constatation de fait à laquelle s'attacherait l'autorité absolue de la chose jugée. La SNC Gardioles Participations ne saurait par suite invoquer ce jugement pour contester les pénalités pour manquement délibéré qui lui ont été appliquées à bon droit pour les motifs indiqués au point précédent.

7. Il résulte de tout ce qui précède que la SNC Gardioles Participations est seulement fondée à demander la décharge à hauteur de 16 388 euros du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 et des pénalités correspondantes et la réformation en ce sens du jugement attaqué. En revanche, elle n'est pas fondée, pour le surplus, à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La SNC Gardioles Participations est déchargée, à hauteur de 16 388 euros, du rappel de taxe sur la valeur ajoutée auquel elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2011 au 31 décembre 2012 et des pénalités correspondantes.

Article 2 : Le jugement n° 1607988/2-3 du 7 décembre 2017 du Tribunal administratif de Paris est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à la SNC Gardioles Participations une somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête de la SNC Gardioles Participations est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la SNC Gardioles Participations et au ministre l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 4 novembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. B..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique le 18 novembre 2020,

Le rapporteur,

F. B...Le président,

I. BROTONS

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 18PA00431


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00431
Date de la décision : 18/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : DGM et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-18;18pa00431 ?
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