La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/11/2020 | FRANCE | N°20PA00353

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 12 novembre 2020, 20PA00353


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association MSA Tutelles 24, agissant au nom de M. A... D... sous tutelle, a demandé à la commission départementale d'aide sociale de la Dordogne d'annuler la décision du

30 janvier 2015 par laquelle le conseil départemental de la Dordogne a refusé l'admission de

M. A... D... au bénéfice de l'aide sociale à l'hébergement et des frais de dépendance à compter du 1er juin 2014.

Par une décision du 21 janvier 2016 comportant une erreur matérielle rectifiée par décision du 17 mar

s 2016, la commission départementale d'aide sociale de la Dordogne a admis la demande de prise e...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association MSA Tutelles 24, agissant au nom de M. A... D... sous tutelle, a demandé à la commission départementale d'aide sociale de la Dordogne d'annuler la décision du

30 janvier 2015 par laquelle le conseil départemental de la Dordogne a refusé l'admission de

M. A... D... au bénéfice de l'aide sociale à l'hébergement et des frais de dépendance à compter du 1er juin 2014.

Par une décision du 21 janvier 2016 comportant une erreur matérielle rectifiée par décision du 17 mars 2016, la commission départementale d'aide sociale de la Dordogne a admis la demande de prise en charge de M. D... pour la période du 1er juin 2014 au 21 avril 2015 sous réserve d'une participation de 70 euros par mois à la charge des obligés alimentaires.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 juin 2016, transmise à la cour d'appel de Bordeaux où elle a été enregistrée le 7 mars 2019, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la Cour d'annuler la décision du 21 janvier 2016 comportant une erreur matérielle rectifiée par décision du 17 mars 2016 de la commission départementale d'aide sociale de la Dordogne en tant qu'elle a admis la demande de prise en charge des frais d'hébergement et de dépendance de M. A... D... pour la période du 1er juin 2014 au 21 avril 2015 sous réserve d'une participation de

70 euros par mois à la charge des obligés alimentaires.

Elle soutient que le tribunal de grande instance de Bergerac ayant, par jugement du

8 octobre 2015, fixé la part contributive des obligés alimentaires à 70 euros par mois avec prise d'effet au 22 avril 2015, elle ne peut supporter aucune part contributive antérieurement à cette date.

Par une ordonnance du 3 décembre 2019 du président de la chambre sociale de la cour d'appel de Bordeaux, la procédure enregistrée au greffe de la chambre sociale, section B, de la cour d'appel de Bordeaux sous le n° RG 19/00946 a été transmise à la Cour administrative d'appel de Paris où elle a été enregistrée sous le n°20PA00353.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 décembre 2016, le département de la Dordogne, représenté par son président, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés ne sont pas fondés.

Par un courrier du 21 juillet 2020, les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que la composition de la commission départementale d'aide sociale de la Dordogne qui a rendu la décision du 21 janvier 2016 rectifiée le 17 mars 2016 était irrégulière en ce qu'elle était seulement composée du président, exerçant les fonctions de rapporteur et d'une secrétaire, en méconnaissance des dispositions de l'article L. 134-6 du code de l'action sociale et des familles en vigueur à la date de cette décision.

Par un courrier du 7 octobre 2020, les parties ont été informées de ce que la Cour était susceptible de soulever d'office le moyen d'ordre public tiré de ce que Mme D... ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour contester la décision de la commission départementale d'aide sociale du 21 janvier 2015 rectifiée le 17 mars 2016 en tant qu'elle a admis M. D... à l'aide sociale à l'hébergement du 1er juin 2014 au 21 avril 2015 sous réserve d'une participation de soixante-dix euros par mois à la charge de ses obligés alimentaires.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ;

- la décision du Conseil d'Etat n° 402111 du 20 octobre 2017 ;

- la décision du Conseil d'Etat n° 419964 du 7 décembre 2018 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... D... est hébergé depuis le 17 octobre 2013 au sein de l'EHPAD du centre hospitalier de Bergerac. La MSA Tutelles 24, sa tutrice, a demandé le 1er juillet 2014 au conseil départemental de la Dordogne de prendre en charge au titre de l'aide sociale à l'hébergement des frais de séjour et de dépendance de M. D... à compter du 1er juin 2014, qui a refusé par une décision du 30 janvier 2015 contre laquelle la MSA Tutelles 24 a formé un recours devant la commission départementale d'aide sociale de la Dordogne. Par une décision du 21 janvier 2016, rectifiée suite à une erreur matérielle par décision du 17 mars 2016, la commission départementale d'aide sociale de la Dordogne a notamment admis sa demande de prise en charge de M. D... pour la période du 1er juin 2014 au 21 avril 2015 sous réserve d'une participation de 70 euros par mois à la charge des obligés alimentaires. Mme E... D... demande à la Cour d'annuler cette décision en tant qu'elle a fixé à soixante-dix euros par mois la participation des obligés alimentaires de M. D... aux dépenses de son hébergement au titre de la période du 1er juin 2014 au 21 avril 2015.

2. Aux termes de l'article 205 du code civil : " Les enfants doivent des aliments à leurs père et mère ou autres ascendants qui sont dans le besoin ". Aux termes de l'article L. 132-6 du code de l'action sociale et des familles : " Les personnes tenues à l'obligation alimentaire instituée par les articles 205 et suivants du code civil sont, à l'occasion de toute demande d'aide sociale, invitées à indiquer l'aide qu'elles peuvent allouer aux postulants et à apporter, le cas échéant, la preuve de leur impossibilité de couvrir la totalité des frais. / (...) / La proportion de l'aide consentie par les collectivités publiques est fixée en tenant compte du montant de la participation éventuelle des personnes restant tenues à l'obligation alimentaire. La décision peut être révisée sur production par le bénéficiaire de l'aide sociale d'une décision judiciaire rejetant sa demande d'aliments ou limitant l'obligation alimentaire à une somme inférieure à celle qui avait été envisagée par l'organisme d'admission. La décision fait également l'objet d'une révision lorsque les débiteurs d'aliments ont été condamnés à verser des arrérages supérieurs à ceux qu'elle avait prévus ".

3. Il résulte de ces dispositions et de celles des articles L. 134-1 et L. 134-2 du code de l'action sociale et des familles, ainsi qu'il résulte de la jurisprudence issue de la décision du Conseil d'Etat n° 402111 du 20 octobre 2017, qu'il appartient au juge administratif, en sa qualité de juge de plein contentieux, de déterminer dans quelle mesure les frais d'hébergement des personnes âgées dans un établissement d'hébergement pour personnes âgées dépendantes sont pris en charge par les collectivités publiques au titre de l'aide sociale. Il a également compétence pour fixer, au préalable, le montant de la participation aux dépenses laissée à la charge du bénéficiaire de l'aide sociale et, le cas échéant, de ses débiteurs alimentaires. En revanche, il n'appartient qu'à l'autorité judiciaire d'assigner à chacune des personnes tenues à l'obligation alimentaire le montant et la date d'exigibilité de leur participation à ces dépenses. Et le créancier d'aliments ne peut, en principe, réclamer devant le juge civil le versement d'une participation des obligés alimentaires pour la période antérieure à la saisine du juge aux affaires familiales.

4. En l'espèce, il résulte des termes de la décision du 21 juin 2016 de la commission départementale d'aide sociale de la Dordogne que, conformément à la règle énoncée au point précédent, elle a pour objet non pas d'assigner à Mme D... une participation aux frais d'hébergement de M. D... du 1er juin 2014 au 21 avril 2015, mais seulement de limiter le montant de l'aide sociale devant être pris en charge par le département de la Dordogne, en déduisant du coût de l'hébergement le montant qui, selon la commission départementale d'aide sociale, peut être laissé à la charge de M. D... ou, le cas échéant, de ses débiteurs alimentaires. Dès lors, cette décision ne peut avoir eu pour effet de contraindre Mme D... à acquitter une somme quelconque au titre des frais d'hébergement de son père sur la période du 1er juin 2014 au 21 avril 2015 ni, d'ailleurs, sur une quelconque période.

5. De plus, en vertu de la règle rappelée par la décision du Conseil d'Etat n° 419964 du 7 décembre 2018, s'il advenait que le département de la Dordogne émette à l'encontre de Mme D... un titre exécutoire pour la contraindre à verser une contribution aux frais d'hébergement de son père sur la période du 1er juin 2014 au 21 avril 2015, il serait loisible à Mme D..., le cas échéant, de contester ce titre exécutoire devant le juge judiciaire.

6. Il suit de là que Mme D... ne justifie pas d'un intérêt lui donnant qualité pour contester la décision de la commission départementale d'aide sociale en litige en tant qu'elle a fixé à soixante-dix euros par mois la participation des obligés alimentaires de M. D... aux dépenses de son hébergement du 1er juin 2014 au 21 avril 2015. La requête de Mme D... doit, par suite, être rejetée comme étant irrecevable.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme E... D..., au département de la Dordogne et à l'association MSA Tutelles 24.

Délibéré après l'audience du 15 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, président de chambre,

- Mme B..., premier conseiller,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 novembre 2020.

Le rapporteur,

A. B...Le président,

H. VINOT

Le greffier,

C. POVSELa République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 20PA00353


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00353
Date de la décision : 12/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

04-02-04-02 Aide sociale. Différentes formes d'aide sociale. Aide sociale aux personnes handicapées. Accueil et hébergement.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : SALAUN

Origine de la décision
Date de l'import : 24/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-12;20pa00353 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award