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10/11/2020 | FRANCE | N°19PA02728

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 10 novembre 2020, 19PA02728


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2019 par lequel la préfète de la Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n°1900786 du 15 février 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédu

re devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 août 2019, M. C..., représenté par Me ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2019 par lequel la préfète de la Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pour une durée de deux ans.

Par un jugement n°1900786 du 15 février 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 août 2019, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1900786 du 15 février 2019 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 janvier 2019 de la préfète de Seine-et-Marne ;

3°) d'enjoindre à la préfète de Seine-et-Marne, de supprimer son signalement du fichier Schengen et de lui délivrer une carte de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen sérieux et particulier de sa situation ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français porte une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale en violation des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation à quitter le territoire français ;

- la décision portant l'interdiction du territoire français pendant deux ans est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît l'article L. 511-1 III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il ne constitue pas une menace pour l'ordre public.

La requête a été communiquée à la préfète de Seine-et-Marne, qui n'a pas produit de mémoire en défense.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 15 juillet 2019.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., ressortissant béninois né le 19 décembre 1977, a été interpellé le 23 janvier 2019 pour une tentative de vol. Par arrêté du 24 janvier 2019, la préfète de la Seine-et-Marne l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui octroyer un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination et a décidé d'interdire son retour sur le territoire français pour une durée de deux ans. M. C... fait appel du jugement du 15 février 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur le moyen commun à toutes les décisions :

2. L'arrêté contesté vise les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'ensemble des articles du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatifs aux mesures d'éloignement. Il indique les conditions de l'entrée et du séjour de M. C... en France, ainsi que les circonstances de son interpellation, mentionne sa situation familiale et administrative qu'il constitue une menace à l'ordre public et n'a pas déféré à une précédente mesure d'éloignement du territoire. Dans ces conditions, cet arrêté, qui comporte les considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement, est suffisamment motivé. Pour les mêmes motifs le requérant n'est pas fondé à soutenir que la préfète de Seine-et-Marne n'aurait pas procédé à un examen complet et personnel de sa situation.

Sur l'obligation de quitter le territoire français :

3. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". L'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose que : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ; (...) ".

4. Si M. C... soutient que la décision portant obligation à quitter le territoire français porte une atteinte à sa vie privée et familiale et qu'il remplit les conditions pour bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions précitées, il ressort des pièces du dossier qu'à la date de cette décision il ne vivait plus avec son enfant, qui réside hors de France et dont il n'a pas revendiqué la garde. Il ne ressort pas plus des pièces du dossier que sa présence serait nécessaire auprès de son oncle, qui ne réside pas dans le même département, ni qu'il vivrait depuis 2015 en concubinage et participerait à l'éducation des enfants de sa concubine. Si M. C... a exercé une activité professionnelle entre 2014 et 2016, il était depuis lors et à la date de la décision attaquée sans emploi, a été interpellé la veille de la décision attaquée pour des faits de tentative de vol qu'il a reconnus et a fait l'objet d'une condamnation correctionnelle à six mois de prison le 16 décembre 2016 pour conduite d'un véhicule sans permis. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de la vie privée et familiale de M. C... une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise. Dans ces conditions, les moyens tirés de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés. Pour les mêmes motifs M. C... n'est pas plus fondé à soutenir que l'arrêté attaqué serait entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur l'interdiction de retour sur le territoire français :

5. Aux termes du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction en vigueur à la date de la décision contestée : " L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français d'une interdiction de retour sur le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de sa notification, lorsque aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger ou lorsque l'étranger n'a pas satisfait à cette obligation dans le délai imparti. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre public que représente sa présence sur le territoire français".

6. En premier lieu, compte tenu de ce qui a été développé précédemment, le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français invoqué à l'encontre de la décision portant interdiction de retour sur le territoire français doit être écarté.

7. En second lieu il ressort des pièces du dossier que M. C... n'a pas déféré à une précédente mesure d'obligation de quitter le territoire prise à son encontre le 9 février 2017, qu'à la date de la décision attaquée il n'était pas en possession de documents d'identité et de voyage en cours de validité et qu'il a fait l'objet d'une condamnation pénale ainsi que d'une interpellation pour des faits de vol qu'il ne conteste pas. Dans ces conditions M. C... n'est pas fondé à soutenir qu'en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français la préfète de Seine-et-Marne aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Sur la décision fixant le pays de destination :

8. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité de la décision portant obligation à quitter le territoire français invoqué à l'encontre de la décision fixant le pays de destination doit être écarté.

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... C... est rejetée.

Article 2 Le présent arrêt sera notifié à M. D... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme A..., président assesseur,

- M. Aggiouri, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 10 novembre 2020.

Le rapporteur,

P. A...Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C.MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA02728 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02728
Date de la décision : 10/11/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-01-02 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. Légalité externe. Motivation.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : SELARL IVAN NASIO AVOCAT

Origine de la décision
Date de l'import : 21/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-11-10;19pa02728 ?
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