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22/10/2020 | FRANCE | N°18PA03209

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 22 octobre 2020, 18PA03209


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... D... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision en date du 9 mai 2016 par laquelle le directeur des ressources humaines de la direction Orange Ile-de-France de la société Orange a prononcé à son encontre une exclusion temporaire de fonction de deux ans et de condamner la société Orange à lui verser la somme d'un euro en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi.

Par un jugement n° 1605738 du 31 juillet 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa dem

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Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er octobre 201...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. H... D... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler la décision en date du 9 mai 2016 par laquelle le directeur des ressources humaines de la direction Orange Ile-de-France de la société Orange a prononcé à son encontre une exclusion temporaire de fonction de deux ans et de condamner la société Orange à lui verser la somme d'un euro en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi.

Par un jugement n° 1605738 du 31 juillet 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er octobre 2018, M. D..., représenté par Me I..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun n° 1605738 du 31 juillet 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 9 mai 2016 par laquelle le directeur des ressources humaines de la direction Orange Ile-de-France a prononcé à son encontre une sanction disciplinaire portant exclusion temporaire de fonctions pour une durée de deux ans ;

3°) de mettre à la charge de la société anonyme Orange la somme de 2 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement est entaché d'une contrariété de motifs et d'une erreur de droit quant à la qualification d'altercation retenue pour les faits qui lui sont reprochés ;

- le tribunal a commis une erreur d'appréciation concernant la proportionnalité entre la faute et la sanction ;

- les procès-verbaux de la commission de discipline n'étant pas versés aux débats, il n'est pas possible de s'assurer de la régularité de la procédure disciplinaire ;

- la décision contestée est entachée d'incompétence ;

- la décision contestée est insuffisamment motivée en droit et en fait ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de fait et d'une inexacte qualification juridique des faits.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 avril 2019, la société Orange, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête présentée par M. D... et à ce qu'il soit mis à sa charge la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens de légalité externe soulevés à l'encontre de la décision du 9 mai 2016 sont irrecevables, dès lors que l'appelant n'est pas recevable à soulever pour la première fois en appel, un moyen relevant d'une cause juridique distincte de celle qui fondait sa demande de première instance ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

M. D... a produit, le 29 mai 2019, un mémoire présenté sans ministère d'avocat et qui n'a pas été communiqué.

Par ordonnance du 25 avril 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au 21 juin 2019 à midi.

Un mémoire a été produit pour M. D... le 28 septembre 2020, soit après la clôture de l'instruction.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ;

- la loi n°84-16 du 11 janvier 1984 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus, au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Doré, rapporteur,

- et les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Par une décision en date du 9 mai 2016, le directeur des ressources humaines de la direction Orange Ile-de-France a pris à l'encontre de M. H... D..., fonctionnaire exerçant les fonctions de conseiller client back office au service clients Orange Ile-de-France, une sanction disciplinaire portant exclusion temporaire de ses fonctions pour une durée de deux ans, à la suite d'une altercation avec violences à l'encontre d'une de ses collègues de travail. Le requérant relève appel du jugement du 31 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision et à la condamnation de la société Orange à lui verser une somme d'un euro en réparation du préjudice qu'il estime avoir subi.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si M. D... soutient que les premiers juges ont commis des erreurs de droit et d'appréciation et entaché leur jugement d'une contradiction de motifs, ces moyens, qui se rattachent au bien-fondé du raisonnement suivi par le tribunal administratif, sont sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. En premier lieu, il ressort des pièces du dossier que la décision contestée du 9 mai 2016 est signée de Mme A... directrice des ressources humaines à la direction Orange Ile-de-France, laquelle disposait d'une délégation de pouvoirs et de signature consentie le 14 avril 2016 par M. B... F..., directeur Orange Ile-de-France, lequel disposait d'une délégation de signature du 1er mars 2016 accordée par Mme G... C..., directrice des services partagés France, elle-même compétente en vertu d'une délégation de pouvoir accordée par M. Stéphane Richard, président-directeur général d'Orange le 1er juillet 2013. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée doit être écarté.

4. En deuxième lieu, devant le tribunal administratif de Melun, M. D... n'avait soulevé que des moyens tirés de l'illégalité interne de la décision attaquée. Dès lors, il n'est pas recevable, en appel, à soutenir que cette décision serait entachée d'un vice de procédure et d'un défaut de motivation, ces moyens n'étant pas d'ordre public et reposant sur une cause juridique différente de celle qui fondait ses moyens de première instance.

5. En troisième lieu, aux termes des dispositions de l'article 29 de la loi du 13 juillet 1983 relative aux droits et obligations des fonctionnaires : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire sans préjudice, le cas échéant, des peines prévues par la loi pénale ". Aux termes des dispositions de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 relative à la fonction publique de l'Etat : " Les sanctions disciplinaires sont réparties en quatre groupes. / Premier groupe : l'avertissement ; le blâme /Deuxième groupe : la radiation du tableau d'avancement ; l'abaissement d'échelon ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours ; le déplacement d'office /Troisième groupe : la rétrogradation ; l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans /Quatrième groupe : la mise à la retraite d'office ; la révocation ".

6. Il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

7. Il ressort tout d'abord des pièces du dossier, notamment des témoignages des personnes présentes, qu'une dispute a eu lieu le 13 janvier 2016 entre M. D... et une collègue au cours de laquelle le requérant a saisi sa collègue aux poignets, l'a repoussée sur quelques mètres et l'a plaquée contre un bureau. Les déclarations recueillies par la société Orange, qui sont circonstanciées et concordantes, établissent que M. D... a adopté un comportement menaçant et fait preuve de violence physique. Par suite, alors même que les actes de M. D... n'auraient pas eu de conséquences sur l'intégrité physique et psychique de la victime qui n'aurait bénéficié d'aucun arrêt de travail, la société Orange a pu, sans entacher sa décision d'une erreur de fait, estimer que M. D... avait commis des violences envers une collègue.

8. Ces faits présentent un caractère fautif et sont de nature à justifier le prononcé d'une sanction.

9. Enfin, s'agissant de la proportionnalité de la sanction, si M. D... fait valoir qu'il a été victime de provocations et d'invectives, ces allégations sont contredites par les témoignages des trois autres personnes présentes. Il ressort en outre des pièces du dossier, que le requérant avait déjà fait l'objet de plusieurs sanctions en raison de son comportement agressif, dont une prononcée le 17 décembre 2009 portant exclusion temporaire de fonctions pour une durée de 2 ans en raison d'une agression physique sur un collègue, de faits d'insubordination, d'attitude désinvolte et insolente vis à vis de sa hiérarchie et de ses collègues. Il ressort également du rapport managérial concernant M. D..., établi le 26 janvier 2016 ainsi que des témoignages susmentionnés, que ses collègues craignaient son agressivité. Dans ces conditions, compte tenu de la nature et de la gravité des faits commis par M. D..., de leur répercussion sur le fonctionnement du service et de ses antécédents disciplinaires, la sanction d'exclusion temporaire de fonction de deux ans qui lui a été infligée n'est pas disproportionnée.

10. Il résulte de ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement du 31 juillet 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

11. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la société anonyme Orange, qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que demande M. D... au titre des frais qu'il a exposés. En revanche, dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de M. D... le versement à la société anonyme Orange de la somme de 1 000 euros au titre de ces dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : M. D... versera la somme de 1 000 euros à la société Orange en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. H... D... et à la société anonyme Orange.

Délibéré après l'audience du 1er octobre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diemert, président-assesseur,

- M. Doré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 22 octobre 2020.

Le rapporteur,

F. DORÉLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

A. LOUNIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

18PA03209


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03209
Date de la décision : 22/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-04 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Sanctions.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : ROCHER-THOMAS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/11/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-10-22;18pa03209 ?
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