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07/10/2020 | FRANCE | N°20PA01141

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 07 octobre 2020, 20PA01141


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris, à titre principal, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, du complément de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités correspondantes et, à titre subsidiaire, de prononcer la restitution des prélèvements s

ociaux d'un montant total de 1 026 073 euros qu'ils ont acquittés par voie de p...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... B... ont demandé au Tribunal administratif de Paris, à titre principal, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, du complément de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus auquel ils ont été assujettis au titre de l'année 2011, ainsi que des pénalités correspondantes et, à titre subsidiaire, de prononcer la restitution des prélèvements sociaux d'un montant total de 1 026 073 euros qu'ils ont acquittés par voie de prélèvement à la source au titre des années 2010, 2012 et 2013.

Par un jugement n° 1519840/1-1 du 3 mai 2017, ce tribunal a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'une somme totale de 408 553,83 euros ayant donné lieu à un dégrèvement en cours d'instance, accordé à M. et Mme B... la décharge d'une somme de

40 746 euros au titre des prélèvements sociaux et rejeté le surplus des conclusions de leur demande.

Par un arrêt n° 17PA02278 du 7 février 2019, la Cour administrative d'appel de Paris a, sur appel de M. et Mme B..., prononcé un non-lieu à statuer à concurrence des pénalités dont ont été assorties les cotisations supplémentaires de contributions sociales établies au titre des années 2009 et 2011, qui ont fait l'objet d'un dégrèvement en cours d'instance, et rejeté le surplus des conclusions de la requête.

Par une décision n° 429549 du 27 mars 2020, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la Cour administrative d'appel de Paris du 7 février 2019 en tant qu'il a statué sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, sur le complément de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus établi au titre de l'année 2011 ainsi que sur les pénalités correspondantes et renvoyé l'affaire dans cette mesure devant ladite Cour.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 6 juillet 2017, 14 mars 2018, 20 avril 2018 et 16 avril 2020, M. et Mme B..., représentés par Me F..., avocat, demandent à la Cour, dans le dernier état de leurs écritures :

1°) d'annuler le jugement n° 1519840/1-1 du 3 mai 2017 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge et le remboursement de la somme de 1 705 516 euros réglée par eux et non encore dégrevée ;

3°) de mettre une somme de 5 000 euros à la charge de l'Etat au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'irrégularité ponctuelle correspondant à l'inscription au plan d'épargne entreprise (PEE) le 30 juillet 2002 de 377 titres antérieurement acquis par M. B... n'est pas de nature à rendre le PEE caduc pour l'avenir dès lors qu'il a ensuite fonctionné conformément aux dispositions du code du travail ;

- les 102 titres vendus en 2011 ont été transférés régulièrement sur le PEE en 2004.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 15 janvier, 11 avril et 26 avril 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens des requérants sont infondés.

Par courrier enregistré le 5 juin 2020, le ministre de l'action et des comptes publics a informé la Cour qu'il n'entendait pas produire de nouvelles écritures.

Par ordonnance du 7 mai 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 8 juin 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D...,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public,

- et les observations de Me A... E..., substituant Me F..., représentant M. et Mme B....

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme B... ont fait l'objet d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle à l'issue duquel l'administration a remis en cause l'exonération d'impôt sur le revenu dont ils bénéficiaient sur le fondement du II de l'article 163 bis B du code général des impôts, à raison des dividendes perçus, et, sur le fondement des 3 et 4 du III de l'article 150-0 A du même code, à raison d'une plus-value réalisée par M. B..., dans le cadre du plan d'épargne d'entreprise (PEE) dont il était titulaire en sa qualité de salarié de la société DNCA Finance.

M. et Mme B... ont, en conséquence, été assujettis à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales au titre des années 2009, 2010 et 2011, ainsi qu'à un complément de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus au titre de l'année 2011. Par un jugement du 3 mai 2017, le Tribunal administratif de Paris a prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'une somme totale de 408 553,83 euros ayant donné lieu à un dégrèvement en cours d'instance, accordé à M. et Mme B... la décharge d'une somme de 40 746 euros et rejeté le surplus des conclusions de leur demande de décharge de ces impositions. Par un arrêt du

7 février 2019, la Cour administrative d'appel de Paris a, sur appel des intéressés, prononcé un non-lieu à statuer à concurrence d'une somme de 37 222 euros dégrevée en cours d'instance, correspondant aux pénalités ayant assorti le rappel de contributions sociales au titre des années 2009 et 2011, et rejeté le surplus des conclusions de la requête. Les conclusions de ce pourvoi ont fait l'objet d'une admission par une décision du Conseil d'Etat, statuant au contentieux du21 novembre 2019, en tant seulement qu'elles portent sur l'impôt sur le revenu et la contribution exceptionnelle sur les hauts revenus. Par une décision n° 429549 du 27 mars 2020, le Conseil d'Etat a annulé l'arrêt de la cour administrative d'appel de Paris du 7 février 2019 en tant qu'il a statué sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme B... ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, sur le complément de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus établi au titre de l'année 2011 ainsi que sur les pénalités correspondantes et renvoyé l'affaire dans cette mesure devant ladite Cour.

2. En vertu, d'une part, des dispositions du I de l'article 163 bis B du code général des impôts, les sommes versées par l'entreprise en application d'un plan d'épargne constitué conformément aux dispositions du titre III du livre III de la troisième partie du code du travail sont exonérées de l'impôt sur le revenu établi au nom du salarié. En vertu des dispositions du II du même article, les revenus des titres détenus dans un plan d'épargne mentionné au I sont également exonérés d'impôt sur le revenu s'ils sont réemployés dans ce plan et frappés de la même indisponibilité que les titres auxquels ils se rattachent et sont définitivement exonérés à l'expiration de la période d'indisponibilité correspondante. Aux termes du III de l'article 150-0 A du code général des impôts, relatif à l'imposition des gains nets retirés des cessions à titre onéreux des valeurs mobilières, droits sociaux et titres assimilés : " Les dispositions du I ne s'appliquent pas : / (...) 3. Aux titres cédés dans le cadre de leur gestion par les fonds communs de placement, constitués en application des législations sur la participation des salariés aux résultats des entreprises et les plans d'épargne d'entreprise ainsi qu'aux rachats de parts de tels fonds ; / 4. A la cession des titres acquis dans le cadre de la législation sur la participation des salariés aux résultats de l'entreprise et sur l'actionnariat des salariés, à la condition que ces titres revêtent la forme nominative et comportent la mention d'origine (...) ".

3. En vertu, d'autre part, des dispositions des articles L. 3332-1 et suivants du code du travail, le PEE constitue un système d'épargne collectif ouvrant aux salariés de l'entreprise la faculté de participer, avec l'aide de celle-ci, à la constitution d'un portefeuille de valeurs mobilières. L'article L. 3332-10 du même code prévoit que les versements annuels d'un salarié sur un PEE ne peuvent excéder un quart de sa rémunération annuelle. Enfin, l'article L. 3332-15 du même code prévoit que les sommes recueillies par un plan d'épargne d'entreprise sont affectées à l'acquisition de valeurs mobilières. Il résulte de ces dispositions, ainsi que de celles qui les ont précédées avant leur codification en 2007, que les plans d'épargne d'entreprise ont pour principal objet l'acquisition, par les salariés de l'entreprise, de valeurs mobilières. Dès lors, le transfert, sur un plan d'épargne d'entreprise, de titres acquis antérieurement à sa constitution ne relève pas d'un fonctionnement conforme à cet objet.

4. Il résulte de la combinaison des dispositions du code du travail et de celles du code général des impôts mentionnées ci-dessus que ne peuvent bénéficier des mesures de faveur prévues par ces dernières dispositions les revenus de titres détenus dans un PEE dont la constitution, d'une part, et le fonctionnement, d'autre part, ne sont pas conformes aux dispositions des articles L. 3332-1 et suivants du code du travail. Dans l'hypothèse où un PEE a été constitué régulièrement, les versements effectués conformément à ces dispositions et les revenus et gains de cession des titres correspondants ouvrent droit aux exonérations prévues respectivement par le I et le II de l'article 163 bis B et par les 3 et 4 du III de l'article 150-0 A du code général des impôts, sans qu'y fasse obstacle le caractère éventuellement irrégulier d'autres versements effectués sur ce plan, qui n'en bénéficient pas.

5. Il résulte de l'instruction, et notamment de l'examen des propositions de rectification en date des 21 décembre 2012 et du 25 septembre 2013, que le litige porte sur les modalités d'imposition des dividendes générés en 2009, 2010 et 2011 par 102 titres de la société DNCA détenus au 31 décembre 2008, 31 décembre 2009 et 31 décembre 2010 ainsi que la plus-value réalisée lors de la cession de ces titres au cours de l'année 2011. Le ministre ne conteste pas l'affirmation des requérants selon laquelle ces titres ont été régulièrement portés sur le PEE en 2004 et se borne, pour remettre en cause le bénéfice des mesures de faveur prévues par les dispositions précitées, à invoquer la circonstance que M. B... a transféré le 30 juillet 2002 sur le PEE dont il était titulaire 377 titres de la société DNCA Finance, acquis par lui antérieurement à la constitution de ce PEE et que, par suite, le PEE n'a pas été constitué et n'a pas fonctionné conformément aux dispositions applicables du code du travail. Or, il résulte de ce qui a été dit au point 4. qu'un tel motif n'est pas de nature à justifier de la remise en cause litigieuse, l'irrégularité du transfert des 377 titres sur le plan n'ayant pas d'incidence sur le bénéfice de l'exonération afférente aux revenus tirés des 102 titres en cause. Il suit de là que l'administration n'était pas fondée à remettre en cause les exonérations des dividendes et de la plus-value de cession dont les requérants avaient bénéficié au titre des années 2009, 2010 et 2011, à raison des 102 titres cédés.

6. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme B... sont fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande et à obtenir la décharge des impositions litigieuses. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : M. et Mme B... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2009, 2010 et 2011, du complément de contribution exceptionnelle sur les hauts revenus établi au titre de l'année 2011 ainsi que des pénalités correspondantes.

Article 2 : Le jugement n° 1519840/1-1 du 3 mai 2017 est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. et Mme B... la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction nationale des vérifications de situations fiscales.

Délibéré après l'audience du 23 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Soyez, président,

- M. D..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique le 7 octobre 2020.

Le rapporteur,

F. D...Le président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative,

J.-E. SOYEZ

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

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N° 20PA01141


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01141
Date de la décision : 07/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. SOYEZ
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : SELARL DELSOL AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 18/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-10-07;20pa01141 ?
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