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01/10/2020 | FRANCE | N°18PA02559

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 01 octobre 2020, 18PA02559


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Parcolog Gestion a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2016 par lequel le préfet de la région Ile-de-France a rejeté sa demande d'agrément à fin de construction d'un ensemble immobilier à usage principal d'entrepôt au sein de la zone d'aménagement concerté des Sources de l'Yerres.

Par un jugement n° 1610162 du 24 mai 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un

mémoire en réplique enregistrés les 26 juillet 2018 et 8 octobre 2019, la société Parcolog Gestio...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Parcolog Gestion a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2016 par lequel le préfet de la région Ile-de-France a rejeté sa demande d'agrément à fin de construction d'un ensemble immobilier à usage principal d'entrepôt au sein de la zone d'aménagement concerté des Sources de l'Yerres.

Par un jugement n° 1610162 du 24 mai 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés les 26 juillet 2018 et 8 octobre 2019, la société Parcolog Gestion, représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1610162 du 24 mai 2018 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 12 juillet 2016 par lequel le préfet de la région d'Ile-de-France a rejeté sa demande d'agrément à fin de construction d'un ensemble immobilier à usage principal d'entrepôt au sein de la zone d'aménagement concerté des Sources de l'Yerres ;

3°) d'enjoindre au préfet de la région d'Ile-de-France de lui délivrer l'agrément sollicité dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 500 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

La société Parcolog Gestion soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé et méconnait l'article R. 510-2 du code de l'urbanisme ;

- le projet ne serait pas isolé le long de la RN4 mais doit être situé au sein d'une zone d'aménagement concerté (ZAC), en continuité de l'urbanisation existante ;

- les zones logistiques alentour sont saturées ;

- le projet est compatible avec le schéma directeur de la région d'Ile-de-France (SDRIF) ;

- le caractère incomplet du dossier constitue un motif du refus et l'administration devait solliciter un complément d'information ;

- le projet est compatible avec les dispositions du SDRIF relatives à la logistique, dès lors qu'il n'interdit pas l'implantation d'activités logistiques en dehors des sites multimodaux qu'il identifie et que le projet se situe à un endroit stratégique, à proximité du site multimodal de Val Bréon et de l'intersection de la RN4 et de la RN36 ;

- le projet ne pouvait pas être implanté sur d'autres sites existants en Seine-et-Marne, en particulier sur le site de Châtres-Val Bréon qui est saturé ;

- l'absence de disponibilité foncière pour un projet de 69 000 m2 est établie ;

- des motifs économiques, de rationalisation des coûts pour le futur utilisateur de la plateforme nationale projetée, interdisent de l'implanter dans une autre armature logistique d'Ile-de-France ;

- les voies ferrées ne sont que peu utilisées en logistique ;

- la ZAC n'est pas isolée ; elle est destinée à accueillir des activités logistiques sur une surface de 70 000 m2 ; elle est située à proximité immédiate du centre de Rozay-en-Brie et de la RN4 ;

- les entreprises sont libres de s'installer où elles le souhaitent, en fonction des besoins qu'elles ont identifiés et du bassin d'emploi, l'agrément ne pouvant être refusé que si le Préfet démontre l'existence d'une incompatibilité avec les dispositions du SDRIF ;

- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le SDRIF permet d'implanter dans les espaces agricoles des constructions et installations autres que celles nécessaires à l'exploitation agricoles lorsque des capacités d'urbanisation ont été prévues dans ces espaces ;

- la zone dans laquelle se situe le projet est identifiée par le SDRIF comme " secteur d'urbanisation préférentielle " et comme " pôle de centralité à conforter " ; le préfet ne pouvait dès lors pas lui opposer l'orientation du SDRIF tenant à la préservation des espaces agricoles ;

- le projet répond à l'objectif de création d'emplois en Ile-de-France prévu par le SDRIF ;

- le projet n'aura qu'un faible impact sur le trafic routier ;

- le refus d'agrément est incompatible avec les orientations du SDRIF ;

- le refus d'agrément a pour conséquence de faire échec à une partie importante de la programmation de la ZAC, ce qui constitue un gâchis des deniers publics.

Par un mémoire en défense enregistré le 11 juillet 2019, la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales conclut au rejet de la requête.

Elle soutient que les moyens invoqués par la société requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'urbanisme ;

- le décret n° 2013-1241 du 27 décembre 2013 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- et les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Parcolog Gestion a sollicité un agrément pour la construction d'un ensemble immobilier à usage principal d'entrepôt logistique d'une surface de plancher totale de 69 000 m2 sur le territoire de la commune de Lumigny-Nesles-Ormeaux (77), au sein de la zone d'aménagement concerté des Sources de l'Yerres. Par un arrêté du 12 juillet 2016, le préfet de la région d'Ile-de-France a refusé de délivrer l'agrément sollicité aux motifs que le projet de la société Parcolog Gestion n'était pas compatible avec le schéma directeur de la région d'Ile-de-France (SDRIF). La société requérante fait appel du jugement du 24 mai 2018 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. Aux termes de l'article L. 510-1 du code de l'urbanisme : " I. - La construction (...) de locaux ou installations ou de leurs annexes servant à des activités industrielles, commerciales, professionnelles, administratives, techniques, scientifiques ou d'enseignement ne relevant pas de l'Etat ou de son contrôle peuvent être soumis à un agrément de l'autorité administrative. / La décision d'agrément prend en compte les orientations définies par la politique d'aménagement et de développement du territoire national et par la politique de la ville relatives notamment au développement du logement social et de la mixité sociale, ainsi que la nécessité d'un équilibre entre les constructions destinées à l'habitation et celles destinées aux activités mentionnées à l'alinéa précédent. (...) III. - Dans la région d'Ile-de-France, la construction (...) des locaux, installations et annexes mentionnées au premier alinéa du I sont, à compter du 1er janvier 1995, soumises à la procédure d'agrément, dans les conditions prévues aux I et II et dans le respect des directives territoriales d'aménagement applicables à cette région ainsi que de son schéma directeur ".

3. En premier lieu, aux termes de l'article R. 510-2 du code de l'urbanisme : " (...) Tout refus d'agrément (...) doit être motivé (...) ".

4. Il ressort de l'arrêté contesté que le préfet de la région d'Ile-de-France a visé le code de l'urbanisme et notamment ses articles L. 510-1 à L. 510-2 et R. 510-1 à R. 510-15 et l'avis défavorable de la commission départementale de protection des espaces naturels, agricoles et forestiers rendu le 23 juin 2016. Il a ensuite relevé qu'en application de l'article R. 510-7 de ce code, les agréments délivrés devaient être compatibles avec les orientations du schéma directeur de la région Ile-de-France, lesquelles visent à éviter l'étalement des activités logistiques le long des routes nationales et demandent la compacité des implantations pour réduire la consommation d'espace. Il a également mentionné que le projet de la société pétitionnaire était isolé le long de la route nationale n° 4 dans un secteur ne figurant pas dans les zones prioritaires pour l'installation des activités logistiques identifiées par le schéma directeur de la région Ile-de-France et qu'il s'inscrivait dans un projet d'aménagement entraînant une consommation de 33,4 hectares d'espaces agricoles. Il ressort ainsi de l'arrêté contesté que le préfet de la région d'Ile-de-France a exposé les considérations de droit et de fait qui fondent la décision de refus d'agrément en litige. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision de refus d'agrément ne serait pas suffisamment motivée doit être écarté, le préfet de la région d'Ile-de-France n'étant pas tenu de mentionner les arguments de la société pétitionnaire et le caractère suffisant de la motivation s'appréciant indépendamment du bien-fondé des motifs.

5. En deuxième lieu, si le préfet de la région d'Ile-de-France a mentionné, dans l'arrêté en litige, que " les compléments d'instruction n'ont pas permis de lever les interrogations posées par le projet ", il ressort de l'ensemble de la motivation de cet arrêté qu'il n'a pas entendu fonder le refus d'agrément sur l'incomplétude du dossier de demande de la société pétitionnaire, mais a simplement relevé que les compléments apportés à cette demande n'avaient pas été de nature à modifier l'appréciation qu'il portait sur la compatibilité du projet avec les orientations du schéma directeur de la région Ile-de-France. Ainsi, le moyen tiré de ce que le préfet se serait, à tort, fondé sur l'incomplétude de la demande de la société pétitionnaire, en particulier en matière d'évaluation de l'impact du projet sur le trafic routier, sans l'avoir invitée à transmettre des éléments complémentaires, manque en fait et doit être écarté.

6. En troisième lieu, aux termes de l'article R. 510-7 du code de l'urbanisme : " Le préfet de la région d'Île-de-France et les préfets de département veillent, chacun en ce qui le concerne, à ce que les opérations qui leur sont soumises et les agréments délivrés soient compatibles avec les orientations fixées par les directives territoriales d'aménagement et le schéma directeur de la région d'Île-de-France, avec les orientations de la politique d'aménagement et de développement du territoire, ainsi qu'avec celles de la politique de la ville et notamment celles qui ont été approuvées en comité interministériel d'aménagement et de développement du territoire et en comité interministériel de la ville ". Les orientations du schéma directeur de la région d'Île-de-France relatives à la logistique prévoient notamment que : " 1.3. L'armature logistique. Le transport de marchandises et la logistique répondent à la fois aux besoins industriels et d'échanges commerciaux et aux besoins de la vie quotidienne des habitants. En Île-de-France, l'ampleur de ces besoins et les flux d'import-export nationaux, locaux et de transit générés rendent nécessaire l'optimisation du fonctionnement logistique régional. Il s'agit donc d'organiser l'armature logistique francilienne en préservant et en développant le potentiel de fonctionnement multimodal du transport de marchandises et de la logistique. (...) Orientations. (...) Les sites multimodaux. L'aménagement de grands sites multimodaux permettant la massification des flux doit être prévu aux carrefours des grands axes routiers, ferroviaires et fluviaux. L'accessibilité routière, et le cas échéant ferroviaire, des sites bord à voie d'eau ou ferroviaires dédiés aux marchandises, aux matériaux de construction et aux déchets, qui sont soumis à de fortes pressions, devra être garantie. L'urbanisation dans leur environnement immédiat devra être compatible avec leur activité. (...) L'étalement de l'activité logistique le long des axes routiers doit être évité. Les implantations des activités logistiques doivent être compactes afin de limiter la consommation d'espace, dans le respect des orientations relatives aux espaces urbanisés et aux nouveaux espaces d'urbanisation (...) 2.1 Orientations communes (...) La priorité est donnée à la limitation de la consommation d'espaces agricoles, boisés et naturels, et donc au développement urbain par la densification des espaces déjà urbanisés. (...) La localisation de nouvelles zones d'activités, notamment logistiques, doit privilégier les sites bénéficiant d'une desserte multimodale (...) ".

7. D'une part, le projet de la société pétitionnaire tend à la création d'un entrepôt logistique de 69 000 m2 le long de la RN4 alors que les dispositions précitées du SDRIF prévoient de localiser les activités logistiques sur des sites bénéficiant d'une desserte multimodale, de densifier les zones dédiées aux installations logistiques et d'éviter un étalement le long des axes routiers. Si la société Parcolog Gestion fait valoir que le site est localisé à proximité de la RN36 et du site multimodal de Val Bréon, il ressort des pièces du dossier qu'il est à plus de 10 km de la RN36 et à environ 14 km de la zone d'activité du Val Bréon, site multimodal le plus proche identifié par le SDRIF. Par ailleurs, si le projet est situé au sein de la ZAC des sources d'Yerres qui a, selon le rapport de présentation de la zone, " pour vocation principale l'accueil de surface d'activités logistiques en complément du parc de Val Bréon situé à Châtres sur le même axe de transit Est/Ouest (RN4) ", il n'existait, à la date de la décision contestée, aucune activité logistique au sein de cette zone qui venait d'être créée et le projet était donc " isolé ", ainsi que l'a relevé le préfet de la Région d'Ile-de-France dans l'arrêté contesté. A cet égard, la circonstance que le refus d'agrément en litige ferait échec à une partie importante de la programmation de la ZAC des sources d'Yerres est sans incidence sur la légalité de la décision contestée, le préfet de la région d'Ile-de-France devant seulement, conformément aux dispositions précitées, veiller à la compatibilité du projet pour lequel un agrément est sollicité avec le schéma directeur de la région d'Île-de-France.

8. Par ailleurs, si la société Parcolog Gestion établit qu'aucun immeuble logistique de la dimension nécessaire n'était disponible au sein de la zone du Val Bréon et qu'elle a vainement sollicité auprès de l'EPAMARNE, de l'EPA Sénart et de Coeur d'Essonne Agglomération une solution foncière correspondant aux caractéristiques techniques et de calendrier du projet qu'elle porte, ces circonstances ne suffisent pas à justifier qu'une autre solution, plus compatible avec les orientations du SDRIF, n'était pas possible.

9. D'autre part, si la zone dans laquelle est située le projet de la société pétitionnaire est située à proximité d'un " pôle de centralité à conforter " et est identifiée dans le SDRIF comme un " secteur d'urbanisation préférentielle ", il résulte des dispositions précitées de l'orientation commune n° 2.1 que le SDRIF donne la priorité à la limitation de la consommation des espaces agricoles et à la densification des espaces déjà urbanisés. En outre, la décision de refus d'agrément contestée, fondée principalement sur la nature de l'activité projetée par la société pétitionnaire, n'a pas pour objet ou pour effet de faire obstacle à la constructibilité du secteur en cause.

10. Dans ces conditions, alors même que le projet devait s'accompagner de la création de 200 emplois et que les recommandations posées par le SDRIF n'ont, ainsi que le fait valoir la société requérante, pas pour effet d'interdire l'implantation des activités logistiques en dehors des sites multimodaux, en rejetant la demande d'agrément de la société Parcolog Gestion au motif que le projet n'était pas compatible avec les objectifs du schéma directeur de la région Ile-de-France, le préfet de la région d'Ile-de-France n'a pas entaché son arrêté d'illégalité.

11. Il résulte de tout ce qui précède que la société Parcolog Gestion n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions tendant au bénéfice de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société Parcolog Gestion est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Parcolog Gestion et à la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.

Copie en sera adressée au préfet de la région d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 10 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. D..., président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 1er octobre 2020.

Le rapporteur,

F. A...Le président,

J. D...Le greffier,

M. B...La République mande et ordonne la ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA02559


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02559
Date de la décision : 01/10/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

Urbanisme et aménagement du territoire - Plans d'aménagement et d'urbanisme - Schémas directeurs d'aménagement et d'urbanisme.

Urbanisme et aménagement du territoire - Autorisations d`utilisation des sols diverses.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. François DORE
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : CABINET ADEMA AVOCATS

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-10-01;18pa02559 ?
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