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24/09/2020 | FRANCE | N°19PA00297

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 24 septembre 2020, 19PA00297


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A..., assisté de l'association Solincité en sa qualité de curateur, a demandé à la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne d'annuler la décision du 28 mars 2018 du président du conseil départemental du Lot-et-Garonne en tant qu'il a refusé son admission à l'aide sociale pour personnes handicapées au titre de son hébergement de jour au sein du foyer de vie La Poussonnie pour la période du 19 septembre 2017 au 31 janvier 2018.

Par une décision du 20 novembre 2018, la

commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne a annulé la décision du ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A..., assisté de l'association Solincité en sa qualité de curateur, a demandé à la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne d'annuler la décision du 28 mars 2018 du président du conseil départemental du Lot-et-Garonne en tant qu'il a refusé son admission à l'aide sociale pour personnes handicapées au titre de son hébergement de jour au sein du foyer de vie La Poussonnie pour la période du 19 septembre 2017 au 31 janvier 2018.

Par une décision du 20 novembre 2018, la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne a annulé la décision du 28 mars 2018 du président du conseil départemental du Lot-et-Garonne en tant qu'il a refusé d'accorder à M. A... l'aide sociale pour la période du 19 septembre 2017 au 31 janvier 2018 et a accordé la prise en charge des frais d'hébergement de M. A... pour cette période.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 17 janvier 2019 et 11 août 2020, le président du conseil départemental du Lot-et-Garonne demande à la Cour :

1°) d'annuler la décision du 20 novembre 2018 de la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A..., assisté de l'association Solincité en sa qualité de curateur, devant la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne.

Il soutient que la demande d'aide sociale de M. A... s'apparente à une première demande et que cette demande n'ayant pas été déposée dans le délai de deux mois à compter de la date d'entrée de M. A... au sein du foyer de vie La Poussonnie, les frais d'hébergement de l'intéressé ne peuvent être pris en charge au titre de l'aide sociale qu'à compter du premier jour de la quinzaine qui a suivi la présentation de sa demande d'aide sociale en application des dispositions de l'article R. 131-2 du code de l'action sociale et des familles.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 mars 2019 et 4 août 2020, M. A..., assisté de l'association Solincité en sa qualité de curateur, et représenté par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que le versement de la somme de 1 500 euros soit mis à la charge du département du Lot-et-Garonne au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que c'est à juste titre que la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne a appliqué en opportunité, eu égard à la complexité de la situation de M. A... et aux difficultés pour obtenir une place disponible dans une structure adaptée, les dispositions de l'article R. 131-2 du code de l'action sociale et des familles prévoyant la possibilité de prolonger de deux mois le délai initial de deux mois pendant lequel la demande d'aide sociale doit être déposée.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'action sociale et des familles ;

- la loi n° 2016-1547 du 18 novembre 2016 ;

- le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018 ;

- le règlement départemental d'aide sociale de Lot-et-Garonne ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me B..., avocat de M. A... et de l'association Solincité.

Considérant ce qui suit :

1. M. C... A..., né en 1984, est placé depuis 2002 sous curatelle renforcée assurée par l'association Solincité. Il s'est vu reconnaître un taux d'incapacité de 80 % depuis le 1er janvier 2009. Il a séjourné en foyer de vie du 11 juillet 2004 au 31 mars 2015 puis en famille d'accueil agréée entre le 1er avril 2015 et le 7 août 2016, date à laquelle M. A... a été pris en charge au centre hospitalier spécialisé de la Candélie. Le 19 septembre 2017, il a intégré en accueil de jour le foyer de vie La Poussonnie de Frespech. Le 29 janvier 2018, M. A..., assisté de l'association Solincité, a présenté une demande d'admission à l'aide sociale à l'hébergement pour personnes handicapées à compter du 19 septembre 2017. Par une décision du 28 mars 2018, le président du conseil départemental du Lot-et-Garonne a en partie fait droit à sa demande en lui accordant l'aide sociale pour la période comprise entre le 1er février 2018 et le 30 avril 2019. Par une décision du 20 novembre 2018, la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne a annulé cette décision en tant que le président du conseil départemental du Lot-et-Garonne a refusé d'accorder à M. A... l'aide sociale pour la période du 19 septembre 2017 au 31 janvier 2018 et a accordé la prise en charge des frais d'hébergement de M. A... pour cette période. Par la présente requête, le président du conseil départemental du Lot-et-Garonne relève appel de cette décision.

Sur l'admission de M. A... à l'aide sociale à l'hébergement en foyer pour la période allant du 19 septembre 2017 au 31 janvier 2018 :

2. L'article L. 241-1 du code de l'action sociale et des familles dispose que : " Toute personne handicapée dont l'incapacité permanente est au moins égale au pourcentage fixé par le décret prévu au premier alinéa de l'article L. 821-1 du code de la sécurité sociale ou qui est, compte tenu de son handicap, dans l'impossibilité de se procurer un emploi, peut bénéficier des prestations prévues au chapitre Ier du titre III du présent livre, à l'exception de l'allocation simple à domicile. Il n'est pas tenu compte, le cas échéant, dans les ressources du postulant, et dès lors que l'objet de la demande est en rapport direct avec le handicap, des arrérages des rentes viagères constituées en faveur de la personne handicapée et mentionnées à l'article 199 septies du code général des impôts. ".

3. Aux termes de l'article L. 131-1 du même code : " Sous réserve de l'article L. 252-1, les demandes d'admission au bénéfice de l'aide sociale, à l'exception de celles concernant l'aide sociale à l'enfance, sont déposées au centre communal ou intercommunal d'action sociale ou, à défaut, à la mairie de résidence de l'intéressé. Les demandes donnent lieu à l'établissement d'un dossier par les soins du centre communal ou intercommunal d'action sociale. (...) Les demandes sont ensuite transmises, dans le mois de leur dépôt, au représentant de l'Etat ou au président du conseil départemental qui les instruit avec l'avis du centre communal ou intercommunal d'action sociale ou, à défaut, du maire et celui du conseil municipal, lorsque le maire ou le centre communal ou intercommunal d'action sociale a demandé la consultation de cette assemblée. ". Aux termes de l'article L. 131-4 de ce code : " Les décisions attribuant une aide sous la forme d'une prise en charge de frais d'hébergement peuvent prendre effet à compter de la date d'entrée dans l'établissement à condition que l'aide ait été demandée dans un délai fixé par voie réglementaire. ". Aux termes de l'article R. 131-2 du même code : " Sauf dispositions contraires, les demandes tendant à obtenir le bénéfice de l'aide sociale prévue aux titres III et IV du livre II prennent effet au premier jour de la quinzaine suivant la date à laquelle elles ont été présentées. Toutefois, pour la prise en charge des frais d'hébergement des personnes accueillies dans un établissement social ou médico-social, habilité à recevoir des bénéficiaires de l'aide sociale ou dans un établissement de santé dispensant des soins de longue durée, la décision d'attribution de l'aide sociale peut prendre effet à compter du jour d'entrée dans l'établissement si la demande a été déposée dans les deux mois qui suivent ce jour. Ce délai peut être prolongé une fois, dans la limite de deux mois, par le président du conseil départemental ou le préfet. Le jour d'entrée mentionné au deuxième alinéa s'entend, pour les pensionnaires payants, du jour où l'intéressé, faute de ressources suffisantes, n'est plus en mesure de s'acquitter de ses frais de séjour. ".

4. Le règlement départemental d'aide sociale du Lot-et-Garonne, dans sa fiche 12 intitulée aide sociale à l'hébergement pour les personnes handicapées, dispose que : " (...) La demande doit être présentée dans un délai qui ne peut excéder deux mois à compter du jour d'entrée dans l'établissement. Ce délai peut être prolongé une fois par le Président du Conseil départemental. (...) La notification d'admission à l'aide sociale mentionne : La date de début de prise en charge et la durée. La durée d'admission à l'aide sociale prend pour point de départ le jour d'entrée en établissement, sous condition de dépôt du dossier dans les deux mois suivant l'entrée, délai qui peut être renouvelé une fois sur demande expresse au Président du Conseil départemental. A défaut du respect de ce délai de présentation, le bénéfice de l'admission prend effet au premier jour de la quinzaine suivant la date de présentation de la demande (article R. 131-2 du code de l'action sociale et des familles). La date de fin de validité est calquée sur celle de la durée d'orientation de la CDAPH. (...) ".

5. Comme il a été dit au point 1, après avoir été accueilli au sein d'une famille d'accueil agréée entre le 1er avril 2015 et le 7 août 2016, période pendant laquelle il a bénéficié de l'aide sociale à l'hébergement en famille d'accueil, M. A... a été pris en charge au centre hospitalier spécialisé de la Candélie et a, le 19 septembre 2017, intégré en accueil de jour le foyer de vie La Poussonnie de Frespech. En application des dispositions de l'article R. 131-2 du code de l'action sociale et des familles, reprises par les dispositions précitées du règlement départemental d'aide sociale du Lot-et-Garonne, pour bénéficier d'une prise en charge à compter de sa date d'entrée au foyer de vie La Poussonnie, le dossier de demande d'aide sociale à l'hébergement en foyer de M. A... aurait dû être déposé en mairie ou auprès du centre communal d'action sociale au plus tard le 20 novembre 2017, ou le 20 janvier 2018 si le président du conseil départemental avait usé de la faculté de proroger le délai de dépôt. Or il résulte de l'instruction que le dossier de demande d'admission à l'aide sociale à l'hébergement pour personnes handicapées de M. A... en date du 26 janvier 2018 a été directement reçu par le président du conseil départemental du Lot-et-Garonne le 29 janvier 2018. Ainsi, et même si la complexité de la situation de M. A... et les difficultés pour trouver un placement adapté à sa pathologie après l'échec de son placement en famille d'accueil ne sont pas contestées, les dispositions de l'article R. 131-2 du code de l'action sociale et des familles faisaient obstacle à ce que la décision d'attribution de l'aide sociale à l'hébergement puisse prendre effet à compter du 19 septembre 2017. Par suite, le président du conseil départemental du Lot-et-Garonne était fondé à rejeter la demande d'admission de M. A... à l'aide sociale à l'hébergement pour la période allant du 19 septembre 2017 au 31 janvier 2018 au motif que le délai de deux mois à compter de la date d'entrée dans le foyer la Poussonnie n'était pas respecté s'agissant de cette période.

6. Il résulte de ce qui précède que le président du conseil départemental du Lot-et-Garonne est fondé à soutenir que c'est à tort que, par la décision attaquée, la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne a, d'une part, annulé sa décision du 28 mars 2018 en tant qu'il a refusé d'accorder à M. A... l'aide sociale pour la période du 19 septembre 2017 au 31 janvier 2018 et, d'autre part, accordé la prise en charge des frais d'hébergement de M. A... pour cette période.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du département du Lot-et-Garonne, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que M. A..., assisté de l'association Solincité en sa qualité de curateur, demande au titre des frais liés à l'instance.

DÉCIDE :

Article 1er : La décision du 20 novembre 2018 de la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne est annulée.

Article 2 : La demande présentée par M. A..., assisté de l'association Solincité en sa qualité de curateur, devant la commission départementale d'aide sociale du Lot-et-Garonne et ses conclusions d'appel sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au président du conseil départemental du Lot-et-Garonne, à M. C... A... et au service des mandataires judiciaires de l'association Solincité.

Délibéré après l'audience du 3 septembre 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme D..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 septembre 2020.

Le rapporteur,

V. D...Le président,

H. VINOT

Le greffier,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

N° 19PA00297


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00297
Date de la décision : 24/09/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

04-04-01 Aide sociale. Contentieux de l'aide sociale et de la tarification. Contentieux de l'admission à l'aide sociale.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : CHOUKI

Origine de la décision
Date de l'import : 09/10/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-09-24;19pa00297 ?
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