Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. E... D... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 16 novembre 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination.
Par un jugement n° 1903980/3-1 du 6 mai 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête, enregistrée le 17 octobre 2019, M. D..., représenté par Me F..., demande à la Cour :
1°) d'ordonner avant dire droit la communication de l'ensemble des éléments relatifs à la procédure suivie devant l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), notamment les " éléments relatifs aux délibérations de l'OFII " et les éléments sur lesquels le collège de médecins de l'OFII s'est fondé pour estimer qu'il disposait d'un accès effectif au traitement médical adapté à son état de santé au Mali ;
2°) d'annuler le jugement n° 1903980/3-1 du 6 mai 2019 du tribunal administratif de Paris ;
3°) de lui adjuger le bénéfice de ses écritures de première instance ;
4°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 16 novembre 2018 du préfet de police ;
5°) d'enjoindre au préfet de police ou au préfet territorialement compétent de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans les mêmes conditions de délai et d'astreinte et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour dans un délai de huit jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;
6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 800 euros à verser à Me F... sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- le jugement attaqué est irrégulier dès lors que les premiers juges ont omis de répondre au moyen tiré de l'absence de caractère collégial de la délibération du collège des médecins de l'OFII ;
- il est insuffisamment motivé quant à la réponse apportée par les premiers juges au moyen tiré de ce que l'examen du collège de médecins de l'OFII était incomplet dès lors que ce collège de médecins ne disposait d'aucune information quant à sa situation personnelle qui ne lui permettait pas d'accéder effectivement à une prise en charge médicale adaptée à son état de santé au Mali et à la circonstance que le médicament Tahor était absent de la liste des médicaments disponibles dans ce pays ;
- le tribunal a méconnu le principe du contradictoire et les droits de la défense en se fondant sur une décision du directeur général de l'OFII du 8 août 2018 qui n'était pas versée aux débats ;
- en l'absence de tout élément relatif à la désignation par le directeur général de l'OFII des médecins composant le collège qui a examiné son dossier, il n'est pas établi que ces médecins étaient compétents pour rendre les avis médicaux prévus par les articles L. 313-11 11° et L. 511-4 10 ° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le caractère collégial de la délibération du collège des médecins de l'OFII n'est pas établi ; la seule mention présente sur l'avis : "après en avoir délibéré, le collège de médecins de l'OFII émet l'avis suivant", est insuffisante à établir les conditions dans lesquelles s'est déroulée la délibération ; il a été privé d'une garantie de procédure essentielle, de nature à entraîner l'illégalité de l'arrêté préfectoral litigieux pris à l'issue de cette procédure ;
- l'avis du collège de médecins de l'OFII est nécessairement entaché d'un défaut d'examen réel et sérieux quant à la possibilité d'accéder au traitement approprié à sa pathologie au Mali ; le collège de médecins ne dispose en effet d'aucune information quant à sa situation personnelle au Mali et à l'état des structures sanitaires de ce pays ;
- c'est à tort que le préfet de police s'est estimé en situation de compétence liée par l'avis du collège de médecins de l'OFII ;
- la décision de refus de séjour méconnaît le 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le défaut de prise en charge médicale de sa pathologie entraînera pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'il ne peut pas bénéficier effectivement d'un traitement adapté à sa pathologie au Mali ;
- la décision contestée méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et le 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, eu égard à la durée de sa présence en France et à au droit de bénéficier d'un traitement approprié à sa pathologie qui est une composante du droit de mener une vie privée et familiale normale ;
- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation ;
- s'agissant des autres points non repris dans la présente requête, il s'en rapporte à ses écritures de première instance dont il entend conserver l'entier bénéfice.
Par un mémoire en défense, enregistré le 16 juin 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le requérant ne sont pas fondés.
M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 17 septembre 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991 ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Mme H... a présenté son rapport au cours de l'audience.
Considérant ce qui suit :
1. M. D..., ressortissant malien, entré en France en 2011 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 16 novembre 2018, le préfet de police a refusé de lui délivrer le titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. D... relève appel du jugement du 6 mai 2019 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. Il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges n'ont pas répondu au moyen soulevé devant eux par M. D..., et qui n'était pas inopérant à l'encontre de la décision de refus de séjour, tiré de ce qu'il n'est pas établi que l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) du 1er septembre 2018 procède d'une délibération collégiale. Par suite, et sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens tirés de l'irrégularité du jugement, le requérant est fondé à soutenir que le jugement attaqué est, pour ce motif, irrégulier et qu'il doit être dans cette mesure annulé.
3. Ainsi, il y a lieu de statuer immédiatement, par la voie de l'évocation, sur les conclusions de la demande de M. D... tendant à l'annulation de la décision du préfet de police refusant de lui délivrer un titre de séjour et, par la voie de l'effet dévolutif, sur les autres conclusions de la requête de M. D....
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision de refus de séjour :
4. En premier lieu, par un arrêté du 23 octobre 2018, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial le 23 octobre 2018, le préfet de police a donné délégation à Mme C... A..., attachée d'administration de l'Etat, à l'effet de signer, en cas d'absence ou d'empêchement de ses supérieurs, tous les actes entrant dans ses attributions, au nombre desquelles figure la police des étrangers. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de l'acte attaqué manque en fait et doit être écarté. Le préfet de police, dont au surplus la décision attaquée du 16 novembre 2018 mentionne cet arrêté de délégation de signature, n'était pas légalement tenu de communiquer ce dernier arrêté pour permettre à l'intéressé de vérifier la compétence de l'auteur de la décision de refus de séjour en litige dès lors que, comme il vient d'être dit, cet arrêté avait été régulièrement publié.
5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. (...) ".
6. Aux termes de l'article R. 313-22 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé. Les orientations générales mentionnées à la quatrième phrase du 11° de l'article L. 313-11 sont fixées par arrêté du ministre chargé de la santé. ". Aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. Le médecin de l'office peut solliciter, le cas échéant, le médecin qui suit habituellement le demandeur ou le médecin praticien hospitalier. Il en informe le demandeur. Il peut également convoquer le demandeur pour l'examiner et faire procéder aux examens estimés nécessaires. (...) Il transmet son rapport médical au collège de médecins. (...) Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. (...) L'avis est transmis au préfet territorialement compétent, sous couvert du directeur général de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. ".
7. Aux termes de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des certificats médicaux, rapports médicaux et avis mentionnés aux articles R. 313-22, R. 313-23 et R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Le collège de médecins à compétence nationale de l'office comprend trois médecins instructeurs des demandes des étrangers malades, à l'exclusion de celui qui a établi le rapport. (...) ". Aux termes de l'article 6 de ce même arrêté : " Au vu du rapport médical mentionné à l'article 3, un collège de médecins désigné pour chaque dossier dans les conditions prévues à l'article 5 émet un avis, conformément au modèle figurant à l'annexe C du présent arrêté, précisant : a) si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; b) si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ; c) si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont le ressortissant étranger est originaire, il pourrait ou non y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ; d) la durée prévisible du traitement. Dans le cas où le ressortissant étranger pourrait bénéficier effectivement d'un traitement approprié, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, le collège indique, au vu des éléments du dossier du demandeur, si l'état de santé de ce dernier lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis mentionne les éléments de procédure. Le collège peut délibérer au moyen d'une conférence téléphonique ou audiovisuelle. L'avis émis à l'issue de la délibération est signé par chacun des trois médecins membres du collège. ".
8. Il ressort de la décision du 8 août 2018 du directeur général de l'OFII, et notamment de son annexe 1, que le docteur Berta, médecin instructeur de la demande de M. D... et les docteurs Ruggieri, Ortega et Quille, signataires de l'avis du 1er septembre 2018, figuraient sur la liste des médecins désignés pour participer au collège à compétence nationale. Cette décision est un acte réglementaire régulièrement publié au bulletin officiel du ministère de l'intérieur et sur le site internet de l'OFII, qui n'avait pas à être communiqué au requérant qui pouvait en prendre connaissance en consultant, notamment comme il vient d'être dit, le site internet de l'OFII. Par suite, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le rapport du médecin instructeur et l'avis du 1er septembre 2018 auraient été adoptés par des médecins qui n'ont pas été nommés conformément aux dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
9. Il ressort des pièces du dossier, notamment de l'attestation établie le 8 avril 2019 par Mme G... B..., directrice territoriale de Paris de l'OFII, que le collège de médecins de l'OFII a émis son avis le 1er septembre 2018 au vu du rapport médical établi le 28 février 2018 par le docteur Berta. Le requérant n'apporte aucun élément ni même aucun commencement de justification tendant à démontrer que le docteur Berta n'aurait pas été le médecin instructeur de son dossier. Il ressort de cet avis signé, comme il a déjà été dit, par les docteurs Ruggieri, Ortega et Quille, que le docteur Berta n'a pas siégé au sein de ce collège de médecins en application de l'article 5 de l'arrêté du 27 décembre 2016.
10. M. D... soutient que la convocation médicale qui lui a été adressée le 6 février 2018 pour un rendez-vous fixé le 28 février suivant auprès du service médical de la direction territoriale de l'OFII de Paris est irrégulière au motif qu'elle ne mentionne pas la possibilité d'être assisté d'un interprète et qu'en l'absence de la présence d'un interprète, il n'a pas pu présenter utilement ses observations. Il ne résulte d'aucune des dispositions, et en particulier de celles de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de celles de l'article 4 de l'arrêté du 27 décembre 2016, non plus que d'aucun principe que l'examen clinique effectué par le médecin rapporteur de l'OFII pouvait être effectué en présence d'un interprète ni que la convocation à cet examen devait comporter la mention d'une possible assistance d'un interprète. Cette assistance n'est prévue que dans l'hypothèse d'un examen de l'intéressé par le collège des médecins de l'OFII en vertu de l'article 7 de l'arrêté du 27 décembre 2016. En l'espèce, M. D... a été convoqué pour un examen clinique réalisé par le médecin rapporteur. Il s'ensuit que les moyens soulevés par le requérant ne peuvent qu'être écartés.
11. Si le requérant soutient que le rapport du médecin instructeur ne serait pas conforme à l'annexe B de l'arrêté du 27 décembre 2016, il ne justifie pas avoir sollicité du préfet de police ou de l'OFII la communication de ce document, étant précisé que l'administration, tenue par le secret médical, ne peut légalement décider de communiquer au tribunal le rapport médical préalable à l'avis du collège. Au surplus, le requérant n'apporte pas les précisions suffisantes à l'appui du moyen suivant lequel ce rapport serait entaché d'irrégularité.
12. Si M. D... soutient que les médecins composant le collège n'ont pas procédé à un examen complet de sa situation particulière dès lors qu'ils n'ont aucune connaissance de sa situation personnelle au Mali et de l'état des structures sanitaires de ce pays, il ressort des pièces du dossier que M. D... a été convoqué pour examen par le médecin rapporteur de son dossier et qu'il avait ainsi la possibilité de présenter tous les éléments d'information qu'il jugeait utiles de communiquer sur sa situation. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que le collège de médecins de l'OFII a procédé à un examen particulier de sa situation.
13. Si le requérant soutient que la mention " après en avoir délibéré " figurant dans l'avis du 1er septembre 2018 est insuffisante pour établir que cet avis aurait été pris à l'issue d'une délibération collégiale, il n'apporte toutefois aucun élément ni même aucun commencement de justification tendant à infirmer cette mention alors que l'avis en cause a été signé par les trois médecins qui composent le collège des médecins de l'OFII. Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose de mentionner dans l'avis rendu par le collège de médecins de l'OFII les modalités de la délibération de ce collège. Par suite, le moyen tiré du défaut du caractère collégial de la délibération du collège de médecins de l'OFII ne peut qu'être écarté.
14. Le préfet de police n'était, par ailleurs, nullement tenu de joindre à sa décision de refus de séjour l'avis rendu le 1er septembre 2018 par le collège de médecins de l'OFII qui au demeurant a été versé aux débats par le préfet de police et communiqué à l'intéressé par le tribunal.
15. Il résulte de ce qui a été dit aux points 8 à 14 du présent arrêt que M. D... n'est pas fondé à soutenir que l'avis du collège de médecins de l'OFII est entaché d'irrégularités de nature à entacher la légalité de la décision de refus de séjour.
16. Il ressort des pièces du dossier que pour rejeter la demande de titre de séjour de M. D..., le préfet de police s'est notamment fondé sur l'avis du 1er septembre 2018 du collège des médecins de l'OFII qui précisait que si l'état de santé de M. D... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, l'intéressé pouvait bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé de ce pays. Il ressort du certificat médical du 15 février 2019 du docteur Reiner de l'hôpital Lariboisière que M. D... a été victime en 2014 d'un accident ischémique cérébral favorisé par un déficit en protéine S et que son état de santé nécessite un traitement préventif et un suivi neurologique régulier. Ce document mentionne également, sans aucune autre précision ou explication, que la prise en charge médicale de M. D... n'est pas possible dans son pays d'origine. Le requérant soutient qu'il ne pourra pas bénéficier effectivement du traitement médicamenteux adapté à son état de santé au Mali dès lors que le médicament qui lui est prescrit, le Tahor, médicament commercialisé par le laboratoire Pfizer, dont le générique est l'Atorvastatine, n'est pas disponible au Mali. Toutefois, si ce médicament n'était pas commercialisé en 2012 au Mali, il ressort de la nomenclature nationale des médicaments à usage humain ayant une autorisation de mise sur le marché, éditée par le ministère de la santé et de l'hygiène publique malien en 2016, versé au dossier par le préfet de police, que l'Atorvastatine est désormais commercialisé au Mali. Dans ces conditions, et eu égard au caractère très généraux des termes du certificat médical du 15 février 2019 du docteur Reiner, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police, dont il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il se serait estimé lié par l'avis émis par le collège des médecins de l'OFII et qu'il n'aurait pas procédé à un examen particulier de sa situation, a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.
17. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
18. M. D... soutient qu'il est entré en France en 2011 et qu'il doit y demeurer pour bénéficier d'un suivi médical adapté à son état de santé. Toutefois, l'intéressé ne justifie pas avoir été présent sur le territoire français avant 2015 date à laquelle il a sollicité un premier titre de séjour. Il ressort des pièces du dossier que M. D... est célibataire et sans charge de famille en France. Il n'est pas dépourvu de toutes attaches dans son pays d'origine où vivent ses trois enfants nés en 2008, 2010 et 2011 et où lui-même a vécu jusqu'à l'âge de 28 ans. En tout état de cause, comme il a été dit, il n'établit pas ne pas pouvoir bénéficier effectivement d'un traitement médical adapté à son état de santé au Mali. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que la décision de refus de séjour porterait une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale. Les moyens tirés de la méconnaissance de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et, en tout état de cause, du 7° de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent, par conséquent, être écartés.
19. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission du titre de séjour " est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ". Il résulte de ces dispositions que le préfet est tenu de saisir la commission du titre de séjour du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions d'obtention du titre de séjour sollicité auxquels il envisage de refuser ce titre de séjour et non de celui de tous les étrangers qui se prévalent de ces dispositions. Compte tenu de ce qui a été dit au point 16 et au point 18 du présent arrêt, M. D... ne remplissait pas les conditions permettant la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° et en tout état de cause du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet de police n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour avant de prendre la décision de refus de séjour.
20. En cinquième et dernier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision de refus de séjour sur la situation personnelle de M. D....
21. Il résulte de ce qui précède et, sans qu'il soit besoin en tout état de cause d'ordonner la mesure d'instruction sollicitée, que les conclusions tendant à l'annulation de la décision de refus de séjour doivent être rejetées.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision portant obligation de quitter le territoire français :
22. En premier lieu, pour le même motif que celui précédemment énoncé au point 4 du présent arrêt, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée, qui reprend le moyen développé par le requérant à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision de refus de séjour, doit être écarté.
23. En deuxième lieu, les moyens dirigés contre le refus de titre de séjour ayant été écartés, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions de M. D... dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut qu'être écartée par voie de conséquence.
24. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié ". Aux termes de l'article R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'état de santé défini au 10° de l'article L. 511-4 est constaté dans les mêmes conditions que celles qui sont prévues aux deux premiers alinéas de l'article R. 313-22 ".
25. Comme il a déjà été dit, au vu du rapport médical établi le 28 février 2018 par le médecin rapporteur, le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a émis, le 1er septembre 2018, un avis sur l'état de santé du requérant avant que le préfet de police ne prenne sa décision de refus du titre de séjour sollicité. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article R. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté.
26. Eu égard à ce qui a été dit au point 16 du présent arrêt, le requérant n'est pas fondé à soutenir qu'il ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.
27. En quatrième lieu, que pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au point 18 du présent arrêt, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, qui font obstacle à l'éloignement d'un étranger qui remplit les conditions auxquelles est subordonnée la délivrance de plein droit du titre de séjour qu'il prévoit, et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent donc être écartés.
28. En cinquième lieu, eu égard à ce qui précède, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision portant obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle du requérant.
Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination :
29. En premier lieu, pour le même motif que celui précédemment énoncé au point 4 du présent arrêt, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision contestée, qui reprend le moyen développé par le requérant à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision de refus de séjour, doit être écarté.
30. En deuxième lieu, la décision contestée, qui vise le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, mentionne la nationalité du requérant et indique qu'il n'établit pas être exposé à des peines ou traitement contraires à cette convention en cas de retour dans son pays d'origine, comporte l'énoncé des considérations de fait et de droit qui constitue le fondement de la décision fixant le pays de destination. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation doit être écarté.
31. En troisième lieu, qu'aux termes de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1° Le droit de toute personne à la vie est protégé par la loi (...) ". Aux termes de l'article 3 de la même convention : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ". Aux termes de l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Un étranger ne peut être éloigné à destination d'un pays s'il établit que sa vie ou sa liberté y sont menacées ou qu'il y est exposé à des traitements contraires aux stipulations de l'article 3 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales du 4 novembre 1950 ".
32. Comme cela a été dit au point 16 du présent arrêt, il n'est pas démontré que M. D... ne pourra pas effectivement bénéficier d'une prise en charge médicale appropriée au Mali et qu'il serait ainsi exposé à des risques graves en cas de retour dans son pays d'origine. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations et des dispositions précitées doit être écarté.
33. En quatrième lieu, eu égard à ce qui précède, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision fixant le pays de destination sur la situation personnelle du requérant.
34. Il résulte des points 22 à 33, que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination.
Sur les conclusions à fin d'injonction :
35. Par le présent arrêt, la Cour rejette les conclusions de M. D... tendant à l'annulation de l'arrêté du préfet de police du 16 novembre 2018. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte ne peuvent qu'être rejetées.
Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :
36. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que l'avocat de M. D... demande au titre des frais liés à l'instance.
DÉCIDE :
Article 1er : Le jugement n° 1903980/3-1 du 6 mai 2019 du tribunal administratif de Paris est annulé en tant qu'il statue sur les conclusions de M. D... tendant à l'annulation de la décision du préfet de police du 16 novembre 2018 lui refusant un titre de séjour.
Article 2 : La demande de M. D... tendant à l'annulation de la décision de refus de séjour du 16 novembre 2018 présentée devant le tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetées.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... D... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 22 juin 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Lapouzade, président,
- M. Luben, président assesseur,
- Mme H..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 10 juillet 2020.
Le président de la formation de jugement,
J. LAPOUZADE
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
10
N° 19PA03248