Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Les Phares a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre exécutoire n° 97502 émis le 15 mai 2018 à son encontre par la Ville de Paris et de la décharger du paiement des sommes de 17 903,42 euros et 1 669,55 euros mises à sa charge par ce titre exécutoire au titre des droits de voirie additionnels concernant les dispositifs de chauffage et les écrans de protection de ses terrasses pour l'année 2018.
Par un jugement n° 1816707 du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 30 juillet 2019, 17 décembre 2019 et 22 janvier 2020, la société Les Phares, représentée par Me C..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement n° 1816707 du 29 mai 2019 du tribunal administratif de Paris ;
2°) avant dire-droit, d'ordonner à la ville de Paris de produire les études auxquelles elle aurait fait procéder en 2011 pour l'établissement de droits de voirie additionnels, ou, le cas échéant, ordonner une expertise ou une enquête ;
3°) d'annuler le titre exécutoire du 15 mai 2018 et de la décharger du paiement de la somme de 17 903,42 euros réclamée par la Ville de Paris au titre des dispositifs de chauffage et de la somme de 1 669,55 euros mise à sa charge au titre des écrans de protection de ses terrasses pour l'année 2018 ;
4°) de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, dès lors qu'il n'a répondu qu'à deux des trois branches du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques et qu'il n'identifie pas qu'il s'agit d'écrans de protection " parallèles " et non perpendiculaires à sa terrasse ;
- le titre exécutoire attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation pour défaut de mention précise des bases de liquidation ;
- la Ville de Paris n'a pas justifié que, conformément aux dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration et de l'article L. 1617-5 du code général de la propriété des personnes publiques, le titre de recettes individuel ou le bordereau y afférent a bien été signé par la personne mentionnée par l'avis des sommes à payer ;
- les droits additionnels réclamés n'ont pas été fixés, par la délibération 2011 DU 54 et l'arrêté du 28 décembre 2017, dans le respect des dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques ; la Ville de Paris, à qui cette preuve incombe, n'apporte aucun élément permettant de montrer que les droits demandés ont été déterminés en fonction de l'avantage spécifique offert par les dispositifs spéciaux que sont les chauffages et les écrans parallèles ; les tarifs auraient dû comporter une part fixe censée correspondre à la valeur locative, et une part variable ; de même il fallait nécessairement tenir compte de la période d'utilisation des dispositifs et donc d'occupation du domaine public, qui est restreinte ;
- la ville a commis une erreur de droit en voulant dissuader par des tarifs élevés le chauffage des terrasses ; le motif écologique ne peut légalement être pris en compte et il n'est pas prouvé que le chauffage des terrasses participe à la pollution atmosphérique ; en outre une terrasse chauffée et non protégée est moins taxée qu'une terrasse chauffée et protégée ;
- s'agissant des écrans parallèles rigides, les terrasses autorisées à en être équipées en permanence font l'objet de tarifs spécifiques, ce qui peut amener à une double taxation ; la Ville de Paris n'a pu sans erreur de droit prévoir la taxation des écrans au m² de terrasse équipée ;
- la comparaison de ces tarifs spécifiques et des droits de voirie supplémentaires exigés du fait de l'installation temporaire d'écrans parallèles démontre le caractère excessif de ces derniers ; de même la protection de la terrasse par une banne ou une marquise est bien plus faiblement taxée que sa protection par des écrans ;
- la comparaison des tarifs applicables aux terrasses équipées d'écrans et de chauffage avec la redevance due pour le loyer d'un local commercial au même emplacement, qui reste le critère le plus pertinent, démontre leur caractère excessif ; en l'espèce, le tarif au m² qui lui est appliqué excède le loyer qu'elle règle pour son bail commercial ;
- les droits de voirie additionnels ont un caractère discriminatoire puisqu'ils sont disproportionnés par rapport à la redevance demandée pour une terrasse ouverte non équipée ;
- les droits additionnels réclamés pour l'installation de chauffages, dont l'utilisation n'est que saisonnière, sont disproportionnés par rapport à la part de chiffres d'affaires qu'ils génèrent ; ils ont un caractère discriminatoire puisqu'ils sont disproportionnés par rapport à la redevance demandée pour une terrasse ouverte non équipée ;
- le titre exécutoire est entaché d'erreur de fait ; les photographies produites par la Ville de Paris sont dénuées de toute force probante et ne montrent pas l'installation d'écrans parallèles, particulièrement de plus de 1,30 m de haut.
Par des mémoires en défense enregistrés les 17 décembre 2019 et 20 janvier 2020, la Ville de Paris, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- la délibération 2011 DU 54 des 28, 29 et 30 mars 2011 du Conseil de Paris portant réforme des droits de voirie ;
- l'arrêté du maire de Paris du 6 mai 2011 portant règlement des étalages et terrasses applicable, à compter du 1er juin 2011, sur l'ensemble du territoire de la Ville de Paris ;
- l'arrêté du maire de Paris du 28 décembre 2017 portant nouveaux tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2018 ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Legeai, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., avocat de la société Les Phares, et de Me A..., avocate de la Ville de Paris.
Considérant ce qui suit :
1. La société Les Phares exploite un fonds de commerce " vin-café-liqueurs " 7 place de la Bastille dans le 4ème arrondissement de Paris. Elle dispose de titres d'occupation du domaine public viaire pour l'installation d'une terrasse fermée de 27 m² et d'une terrasse ouverte de 49 m² devant cette terrasse fermée, se prolongeant au nord par une terrasse ouverte de 15 m², non adossée à l'immeuble. La mairie de Paris a émis le 15 mai 2018 un titre exécutoire correspondant aux droits de voirie dus pour l'année 2018, d'un montant total de 39 364,52 euros dont la somme de 17 903,42 euros au titre de l'installation de dispositifs de chauffage et la somme de 1 669,55 euros au titre de l'installation d'écrans de protection d'une des terrasses ouvertes. La société requérante demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce titre exécutoire et à la décharge de ces droits de voirie additionnels pour l'année 2018.
Sur la régularité du jugement :
2. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose : " Les jugements sont motivés ".
3. D'une part, les premiers juges ont considéré, au point 7 de leur jugement, que la Ville de Paris avait régulièrement fixé les droits de voirie additionnels en tenant compte de la superficie de la terrasse, plus rentable lorsqu'elle est chauffée et protégée, alors que la société requérante, qui ne produisait pas de pièce comptable, n'apportait aucun élément de nature à démontrer que ces droits de voirie excèderaient les avantages de toute nature que lui procurent les installations en cause. Ils ont suffisamment répondu aux arguments soulevés à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques, la question de la charge de la preuve ne constituant notamment pas un moyen autonome devant le juge du fond.
4. D'autre part, si le jugement ne précise pas que les " écrans de protection " pour lesquels la Ville de Paris réclame à la société requérante un droit de voirie additionnel sont des écrans parallèles à la façade de son commerce et non des écrans perpendiculaires à celle-ci, une telle absence de précision est sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation du jugement, qui ne comportait, pas plus que l'argumentation des parties, aucune ambiguïté à cet égard.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la légalité externe de l'acte attaqué :
5. En premier lieu, le 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales dispose : " Quelle que soit sa forme, une ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif est adressé aux redevables (...) / En application de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation ". Il résulte de ces dispositions, d'une part, que le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif adressé au redevable doit mentionner les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis et, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative, en cas de contestation, de justifier que le bordereau de titre de recettes comporte la signature de l'émetteur. En l'espèce, d'une part, l'avis des sommes à payer adressé à la requérante mentionne que le titre a été émis par Mme F... D..., chef du service de l'expertise comptable, et, d'autre part, le bordereau dématérialisé de titres de recettes comporte la signature électronique de Mme D..., ainsi qu'il ressort d'une attestation en date du 19 octobre 2018 de la société Docapost Fast, prestataire de la Ville, produite par celle-ci.
6. En deuxième lieu, l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique dispose : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrement indique les bases de la liquidation (...) ". Pour satisfaire à ces dispositions, un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur. En l'espèce, l'avis des sommes à payer, valant ampliation du titre exécutoire, comporte un tableau récapitulatif qui vise l'article L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales et l'arrêté municipal du 28 décembre 2017, précise l'adresse des terrasses considérées ainsi que la catégorie des rues dans lesquelles elles se situent et calcule, par référence aux différentes rubriques de l'arrêté municipal du 28 décembre 2017 fixant les droits de voirie, chacun des droits à percevoir pour la période " 01/01/2018-31/12/2018 ", en détaillant le prix au mètre carré et le nombre de mètres carrés pour lesquels le droit est dû, en distinguant les différentes installations taxées et leur situation dans le premier tiers du trottoir ou " hors tiers ". Cet avis permet ainsi au redevable de connaitre précisément le mode d'établissement des redevances mises à sa charge et le met notamment à même de contester une éventuelle erreur dans la mesure de la superficie de sa ou ses terrasses et de la partie de celles-ci situées " hors tiers " du trottoir. En outre, dès lors que le titre litigieux se réfère au tarif 580 que les textes réglementaires auquel il renvoie identifient comme le " supplément pour l'installation d'écrans parallèles rigides protégeant une terrasse ouverte dans le tiers du trottoir ", il n'y a aucune ambigüité sur le fait que les " écrans rigides tiers trottoir " qui donnent lieu à perception d'une redevance sont des écrans parallèles à la façade du commerce. Le moyen tiré de ce que l'avis des sommes à payer ne mentionne pas de façon suffisamment précise les bases de liquidation manque en fait et doit être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne de l'acte attaqué :
S'agissant de la légalité des tarifs appliqués :
7. L'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques dispose : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement d'une redevance (...) ". Aux termes de l'article L. 2125-3 du même code : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation ".
8. Par délibération 2011 DU 54 des 28, 29 et 30 mars 2011 portant réforme des droits de voirie, le Conseil de Paris, siégeant en formation de conseil municipal, a pris acte de nouveaux modes d'occupation du domaine public et notamment de l'installation sur les terrasses exploitées commercialement de divers équipements destinés à atténuer les aléas climatiques, qui prolongent et facilitent ainsi l'usage privé du domaine public. Il a décidé de soumettre ces installations à des droits de voirie additionnels, fixés selon la catégorie de la voie et calculés de façon annuelle et forfaitaire proportionnellement à la surface de la terrasse exploitée, et de taxer plus fortement les installations de chauffage situées sur une terrasse non protégée. L'annexe de l'arrêté du 28 décembre 2017 du maire de Paris portant nouveaux tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2018 prévoit ainsi, s'agissant des " prescriptions applicables aux étalages et terrasses " : " Selon les cas, un droit de voirie additionnel, s'ajoutant à celui prévu pour diverses emprises (étalage, terrasse ouverte, terrasse fermée, prolongement intermittent de terrasse ou d'étalage, contre-étalage ou contre-terrasse, contre-terrasse sur chaussée) est perçu pour : / (...) - l'installation de tout type de protection, notamment sous forme d'écrans parallèles, sur tout type de terrasse ouverte (...) / - l'installation de tout mode de chauffage (...) sur tout type de terrasse ouverte (bâchée ou non, dotée ou non de tout type de protection, notamment sous forme d'écrans parallèles). Ces droits de voirie additionnels sont appréciés annuellement, de façon forfaitaire et indivisible. Ils s'appliquent quelles que soient les dates de pose ou dépose de ces dispositifs et leur temps de présence effectif au cours de l'exercice considéré. Il n'est procédé à aucun abattement mensuel ou calcul au " prorata temporis " lors de la première année d'installation ou dans les cas de cessation d'activité ou de démontage (...) / Le cas échéant, les droits de voirie additionnels précités se cumulent en fonction de la présence de différentes installations sur un même emplacement. Les étalages et terrasses sont taxés au mètre carré et pour l'exercice en cours (...) ". S'agissant de tout mode de chauffage ou de climatisation dans tout type de terrasse ouverte, cet arrêté précise que " (...) le droit de voirie additionnel s'apprécie exclusivement sur la totalité de la surface occupée par la terrasse de tout type et non en fonction des surfaces des dispositifs à usage de chauffage ou de climatisation ".
9. En premier lieu, la requérante, tout en admettant que la protection d'une terrasse par des écrans et son chauffage sont de nature à en améliorer l'attractivité, soutient que la Ville de Paris n'a pas indiqué comment elle avait fixé le montant des droits additionnels réclamés et qu'il n'est pas possible de déterminer comptablement le gain spécifique procuré par chacune des installations. Toutefois, en l'absence précisément d'individualisation comptable permettant de soumettre l'occupation du domaine public à une redevance proportionnelle au chiffre d'affaires ou au bénéfice généré par chaque installation, la Ville de Paris pouvait légalement fixer un tarif au mètre carré, variable en fonction de la nature du dispositif et de son association ou non avec d'autres dispositifs, ainsi que de l'attractivité de la voie publique sur laquelle il est installé et du positionnement de la terrasse, dans le premier tiers du trottoir ou hors tiers, critères qui ne sont pas étrangers aux " avantages de toute nature " procurés à l'occupant privatif du domaine public par chaque installation. La circonstance que les dispositifs litigieux ne sont utilisés ou maintenus en place qu'une partie de l'année ne fait pas en soi obstacle à ce que la redevance soit calculée au titre d'une année entière.
10. En deuxième lieu, s'il est soutenu que la Ville de Paris aurait fixé un tarif élevé pour les chauffages afin de dissuader, pour des motifs écologiques, les exploitants d'en installer, cette motivation ne résulte pas de l'instruction ni des textes fixant les tarifs, et notamment de la délibération 2011 DU 54. Le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut en tout état de cause qu'être écarté. La circonstance qu'une terrasse chauffée non protégée est moins taxée qu'une terrasse chauffée et protégée, laquelle est plus attractive pour le public, n'est pas de nature à démontrer que les tarifs n'auraient pas été fixés en considération des avantages procurés aux commerçants.
11. En troisième lieu, la société requérante fait valoir que l'arrêté du 28 décembre 2017 retient pour l'installation d'écrans parallèles et de chauffages en terrasse des tarifs additionnels élevés, nettement supérieurs à ceux appliqués à la terrasse elle-même. Toutefois, si les droits de voirie doivent tenir compte des avantages de toute nature que procure l'occupation privative du domaine public, il n'est pas interdit à la collectivité d'orienter, par des tarifs différenciés, les modes d'occupation du domaine public qu'elle souhaite favoriser. La circonstance qu'une terrasse ouverte non chauffée serait, proportionnellement au chiffre d'affaires susceptible d'être généré par son installation, nettement moins taxée qu'une terrasse chauffée et protégée, ne crée pas de discrimination illégale et ne saurait en soi démontrer que la redevance exigée pour une terrasse chauffée et protégée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
12. En quatrième lieu, la délibération 2011 DU 54 et l'arrêté du 28 décembre 2017 prévoient un tarif spécifique (codes 440, 441 et 443) pour les terrasses ouvertes " délimitées par des écrans parallèles de hauteur inférieure à 1,30 m " que les commerçants peuvent être autorisés à installer dans le respect des spécifications du point 3.3.3 du titre II du règlement des terrasses de la Ville de Paris. Ces tarifs ne se confondent pas avec ceux, codés 580, 581 et 582, intitulés " supplément pour l'installation d'écrans parallèles rigides protégeant une terrasse ouverte " mis à la charge des commerçants qui installent, sans autorisation préalable, de tels dispositifs, quelle qu'en soit la hauteur. D'une part, il ne résulte pas de l'instruction que les écrans parallèles ici en cause auraient fait l'objet d'une double taxation. D'autre part, la Ville de Paris n'a commis aucune erreur de droit en calculant le droit de voirie supplémentaire en proportion de la surface de la terrasse que les écrans protègent. Enfin, la circonstance que le tarif applicable aux écrans installés sans autorisation préalable, dont la hauteur n'est pas limitée, est nettement supérieur à celui prévu pour une terrasse dont la délimitation par des écrans d'une hauteur inférieure à 1,30 m et répondant à certaines spécifications a été autorisée n'est pas de nature à démontrer que le " supplément " demandé pour l'installation, même temporaire, d'écrans parallèles à la façade n'aurait pas été fixé en fonction de l'avantage que retire le commerçant de la pose de ceux-ci ou serait manifestement excessif par rapport aux avantages procurés par cette protection de la terrasse.
13. Enfin, la société requérante fait valoir que la somme qu'elle acquitte pour la partie chauffée et protégée de la prolongation de sa terrasse située dans le tiers du trottoir, soit 5 m², excède très légèrement, proportionnellement à la surface occupée, le loyer qu'elle acquitte pour son local commercial lui-même, d'une superficie de 138 m², alors que la partie de cette même terrasse située au-delà du tiers du trottoir, chauffée et non protégée et d'une surface de 7 m², est soumise à un cumul de redevances qui atteint, au m², environ deux fois et demi le loyer de son local commercial. Toutefois cette circonstance n'est pas de nature à démontrer que la somme demandée pour l'occupation privative du domaine public excède les avantages ainsi attribués à l'exploitant, dès lors que le domaine public, en particulier au-delà du premier tiers du trottoir, n'est pas en principe destiné à une occupation commerciale.
14. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de procéder aux mesures d'instruction demandées, que la société appelante n'est pas fondée à soutenir que le maire de Paris aurait méconnu les dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques en lui faisant application des tarifs adoptés par la délibération 2011 DU 54 du 28, 29 et 30 mars 2011 et fixés pour l'année 2018 par l'arrêté du 28 décembre 2017.
S'agissant du moyen tiré des erreurs de fait :
15. La société requérante soutient que les photographies produites en première instance par la Ville de Paris sont insuffisantes pour démontrer l'installation de chauffages et d'écrans parallèles sur les terrasses ouvertes qu'elle exploite. Toutefois, ces photographies prises lors de visites de récolement du 26 janvier 2018 et 16 octobre 2018 font bien apparaitre des chauffages sous la couverture de la terrasse ouverte, ainsi que, pour la partie de cette terrasse qui se prolonge parallèlement à la façade de l'immeuble au-delà de la terrasse fermée, des écrans parallèles montés sur une structure rigide joignant cette couverture, à plus de 1,30 m de haut, destinés à isoler les occupants de cette terrasse de l'entrée de l'immeuble. Seul la partie de la prolongation de terrasse adossée à ces écrans, 5 m² dans le tiers du trottoir, soit une profondeur d'un mètre sur une longueur de cinq mètres, a fait l'objet d'une redevance au titre des écrans parallèles, alors que l'autre partie de cette prolongation de terrasse, hors du premier tiers du trottoir, n'a pas été considérée comme protégée par des écrans. Dans ces conditions, aucune erreur dans le calcul des redevances dues ne ressort des pièces du dossier, alors même que la société requérante a produit dans son dernier mémoire une attestation non circonstanciée d'une société présentée comme son fournisseur qui certifie qu'en 2018 le café les Phares " ne possède que des écrans perpendiculaires et non des écrans parallèles ", ce qui est démenti par les photographies produites par la Ville qui ne sont pas utilement contestées par l'affirmation que leur auteur est inconnu. La société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que la Ville de Paris aurait commis une erreur de fait concernant le chauffage ou la protection de ses terrasses, justifiant la décharge totale ou même partielle de la somme qui lui est demandée.
16. Il résulte de tout ce qui précède que la société Les Phares n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.
Sur les frais liés au litige :
17. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Ville de Paris, qui n'est pas partie perdante, verse à la société requérante la somme qu'elle demande au titre des frais de procédure qu'elle a exposés. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Les Phares une somme de 1 500 euros à verser à la Ville de Paris sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Les Phares est rejetée.
Article 2 : La société Les Phares versera à la Ville de Paris une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Les Phares, à la Ville de Paris et au directeur général des finances publiques de Paris.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme E..., présidente de chambre,
- M. Legeai, premier conseiller,
- M. Platillero, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2020.
La présidente de la 1ère chambre,
S. E...
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02507