Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Le Bastille a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler le titre exécutoire n° 148103 émis le 20 juin 2018 à son encontre par la Ville de Paris et de la décharger du paiement des sommes de 21 469,02 euros et 49 969 euros mises à sa charge par ce titre exécutoire au titre des droits de voirie additionnels concernant les dispositifs de chauffage et les écrans de protection de ses terrasses pour l'année 2018.
Par un jugement n° 1816731 du 29 mai 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires, enregistrés les 29 juillet 2019, 17 décembre 2019 et 22 janvier 2020, la société Le Bastille, représentée par Me D..., demande à la Cour, dans le dernier état de ses écritures :
1°) d'annuler le jugement n° 1816731 du 29 mai 2019 du tribunal administratif de Paris ;
2°) avant dire-droit, d'ordonner à la ville de Paris de produire les études auxquelles elle aurait fait procéder en 2011 pour l'établissement de droits de voirie additionnels, ou, le cas échéant, ordonner une expertise ou une enquête ;
3°) d'annuler le titre exécutoire du 20 juin 2018 et de la décharger du paiement de la somme de 21 469,02 euros réclamée par la Ville de Paris au titre des dispositifs de chauffage et de la somme de 49 969 euros mise à sa charge au titre des écrans de protection de ses terrasses pour l'année 2018 ;
4°) à titre subsidiaire, de la décharger de la somme de 47 260,48 euros correspondant à une erreur de taxation des écrans parallèles ;
5°) de mettre à la charge de la Ville de Paris une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que :
- le jugement attaqué est insuffisamment motivé, dès lors qu'il n'a répondu qu'à deux des trois branches du moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques et qu'il n'identifie pas qu'il s'agit d'écrans de protection " parallèles " et non perpendiculaires à sa terrasse ;
- le titre exécutoire attaqué est entaché d'une insuffisance de motivation pour défaut de mention précise des bases de liquidation ;
- la Ville de Paris n'a pas justifié que, conformément aux dispositions de l'article L. 212-1 du code des relations entre le public et l'administration et de l'article L. 1617-5 du code général de la propriété des personnes publiques, le titre de recettes individuel ou le bordereau y afférent a bien été signé par la personne mentionnée par l'avis des sommes à payer ;
- les droits additionnels réclamés n'ont pas été fixés, par la délibération 2011 DU 54 et l'arrêté du 28 décembre 2017, dans le respect des dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques ; la Ville de Paris, à qui cette preuve incombe, n'apporte aucun élément permettant de montrer que les droits demandés ont été déterminés en fonction de l'avantage spécifique offert par les dispositifs spéciaux que sont les chauffages et les écrans parallèles ; les tarifs auraient dû comporter une part fixe censée correspondre à la valeur locative, et une part variable ; de même il fallait nécessairement tenir compte de la période d'utilisation des dispositifs et donc d'occupation du domaine public, qui est restreinte ;
- la ville a commis une erreur de droit en voulant dissuader par des tarifs élevés le chauffage des terrasses ; le motif écologique ne peut légalement être pris en compte et il n'est pas prouvé que le chauffage des terrasses participe à la pollution atmosphérique ; en outre une terrasse chauffée et non protégée est moins taxée qu'une terrasse chauffée et protégée ;
- s'agissant des écrans parallèles rigides, les terrasses autorisées à en être équipées en permanence font l'objet de tarifs spécifiques, ce qui peut amener à une double taxation ; la Ville de Paris n'a pu sans erreur de droit prévoir la taxation des écrans au m² de terrasse équipée ;
- la comparaison de ces tarifs spécifiques et des droits de voirie supplémentaires exigés du fait de l'installation temporaire d'écrans parallèles démontre le caractère excessif de ces derniers ; de même la protection de la terrasse par une banne ou une marquise est bien plus faiblement taxée que sa protection par des écrans ;
- la comparaison des tarifs applicables aux terrasses équipées d'écrans et de chauffage avec la redevance due pour le loyer d'un local commercial au même emplacement, qui reste le critère le plus pertinent, démontre leur caractère excessif ; en l'espèce, le tarif au m² qui lui est appliqué excède le loyer qu'elle règle pour son bail commercial ;
- les droits de voirie additionnels ont un caractère discriminatoire puisqu'ils sont disproportionnés par rapport à la redevance demandée pour une terrasse ouverte non équipée ;
- les droits additionnels réclamés pour l'installation de chauffages, dont l'utilisation n'est que saisonnière, sont disproportionnés par rapport à la part de chiffres d'affaires qu'ils génèrent ; ils ont un caractère discriminatoire puisqu'ils sont disproportionnés par rapport à la redevance demandée pour une terrasse ouverte non équipée ;
- le titre exécutoire est entaché d'erreur de fait car les photographies produites par la Ville de Paris, sont dénuées de toute force probante et que la Ville ne peut se prévaloir de ce que les titres antérieurs n'auraient pas été contestés, ce qui est faux ; il n'est pas démontré par la Ville de Paris la présence d'écrans parallèles rigides parallèles de plus de 1,30 m de haut à sa devanture ; la surface de sa terrasse n'excède pas 50 m².
Par des mémoires en défense, enregistrés les 17 décembre 2019 et 20 janvier 2020, la Ville de Paris, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce que la somme de 2 500 euros soit mise à la charge de la société requérante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Elle soutient que les moyens de la requête sont infondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 ;
- la délibération 2011 DU 54 des 28, 29 et 30 mars 2011 du Conseil de Paris portant réforme des droits de voirie ;
- l'arrêté du maire de Paris du 6 mai 2011 portant règlement des étalages et terrasses applicable, à compter du 1er juin 2011, sur l'ensemble du territoire de la Ville de Paris ;
- l'arrêté du maire de Paris du 28 décembre 2017 portant nouveaux tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2018 ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. Legeai, premier conseiller,
- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,
- et les observations de Me D..., avocat de la société Le Bastille, et de Me A..., avocate de la Ville de Paris.
Considérant ce qui suit :
1. La société Le Bastille exploite un fonds de commerce de restauration traditionnelle 8 place de la Bastille dans le 11ème arrondissement de Paris. Elle dispose de titres d'occupation du domaine public viaire pour l'installation d'une terrasse fermée de 54 m² et de plusieurs terrasses ouvertes sur la voie publique au droit de ce commerce. La mairie de Paris a émis le 20 juin 2018 un titre exécutoire correspondant aux droits de voirie dus pour l'année 2018, d'un montant total de 121 498,05 euros dont la somme de 21 469,02 euros au titre de l'installation de dispositifs de chauffage et la somme de 49 969 euros au titre de l'installation d'écrans de protection de ses terrasses ouvertes. La société requérante demande l'annulation du jugement du tribunal administratif de Paris ayant rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce titre exécutoire et à la décharge de ces droits de voirie additionnels pour l'année 2018.
Sur la régularité du jugement :
2. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose : " Les jugements sont motivés ".
3. D'une part, les premiers juges ont considéré, au point 7 de leur jugement, que la Ville de Paris avait régulièrement fixé les droits de voirie additionnels en tenant compte de la superficie de la terrasse, plus rentable lorsqu'elle est chauffée et protégée, alors que la société requérante, qui ne produisait pas de pièce comptable, n'apportait aucun élément de nature à démontrer que ces droits de voirie excèderaient les avantages de toute nature que lui procurent les installations en cause. Ils ont suffisamment répondu aux arguments soulevés à l'appui du moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques, la question de la charge de la preuve ne constituant notamment pas un moyen autonome devant le juge du fond.
4. D'autre part, si le jugement ne précise pas que les " écrans de protection " pour lesquels la Ville de Paris réclame à la société requérante un droit de voirie additionnel sont des écrans parallèles à la façade de son commerce et non des écrans perpendiculaires à celle-ci, une telle absence de précision est sans incidence sur le caractère suffisant de la motivation du jugement, qui ne comportait, pas plus que l'argumentation des parties, aucune ambiguïté à cet égard.
Sur le bien-fondé du jugement :
En ce qui concerne la légalité externe de l'acte attaqué :
5. En premier lieu, le 4° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales dispose : " Quelle que soit sa forme, une ampliation du titre de recettes individuel ou de l'extrait du titre de recettes collectif est adressé aux redevables (...) / En application de l'article L. 111-2 du code des relations entre le public et l'administration, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation ". Il résulte de ces dispositions, d'une part, que le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif adressé au redevable doit mentionner les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis et, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative, en cas de contestation, de justifier que le bordereau de titre de recettes comporte la signature de l'émetteur. En l'espèce, d'une part, l'avis des sommes à payer adressé à la requérante mentionne que le titre a été émis par M. E... C..., adjoint chef du service de l'expertise comptable, et, d'autre part, le bordereau dématérialisé de titres de recettes comporte la signature électronique de M. C..., ainsi qu'il ressort d'une attestation en date du 29 novembre 2018 de la société Docapost Fast, prestataire de la Ville, produite par celle-ci.
6. En deuxième lieu, l'article 24 du décret du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique dispose : " (...) Toute créance liquidée faisant l'objet d'une déclaration ou d'un ordre de recouvrement indique les bases de la liquidation (...) ". Pour satisfaire à ces dispositions, un état exécutoire doit indiquer les bases de la liquidation de la créance pour le recouvrement de laquelle il est émis et les éléments de calcul sur lesquels il se fonde, soit dans le titre lui-même, soit par référence précise à un document joint à l'état exécutoire ou précédemment adressé au débiteur. En l'espèce, l'avis des sommes à payer, valant ampliation du titre exécutoire, comporte un tableau récapitulatif qui vise l'article L. 2213-6 du code général des collectivités territoriales et l'arrêté municipal du 28 décembre 2017, précise l'adresse de la terrasse considérée ainsi que la catégorie de la rue dans laquelle elle se situe et calcule, par référence aux différentes rubriques de l'arrêté municipal du 28 décembre 2017 fixant les droits de voirie, chacun des droits à percevoir pour la période " 01/01/2018-31/12/2018 ", en détaillant le prix au mètre carré et le nombre de mètres carrés pour lesquels le droit est dû, en distinguant les différentes installations taxées et si elle sont situées dans le tiers du trottoir ou " hors tiers ". Cet avis permet ainsi au redevable de connaitre précisément le mode d'établissement des redevances mises à sa charge et le met notamment à même de contester une éventuelle erreur dans la mesure de la superficie de sa ou ses terrasses et de la partie de celles-ci situées " hors tiers " du trottoir. Le moyen tiré de ce que l'avis des sommes à payer ne mentionne pas de façon suffisamment précise les bases de liquidation manque en fait et doit être écarté.
En ce qui concerne la légalité interne de l'acte attaqué :
S'agissant de la légalité des tarifs appliqués :
7. L'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques dispose : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement d'une redevance (...) ". Aux termes de l'article L. 2125-3 du même code : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation ".
8. Par délibération 2011 DU 54 des 28, 29 et 30 mars 2011 portant réforme des droits de voirie, le Conseil de Paris, siégeant en formation de conseil municipal, a pris acte de nouveaux modes d'occupation du domaine public et notamment de l'installation sur les terrasses exploitées commercialement de divers équipements destinés à atténuer les aléas climatiques, qui prolongent et facilitent ainsi l'usage privé du domaine public. Il a décidé de soumettre ces installations à des droits de voirie additionnels, fixés selon la catégorie de la voie et calculés de façon annuelle et forfaitaire proportionnellement à la surface de la terrasse exploitée, et de taxer plus fortement les installations de chauffage situées sur une terrasse non protégée. L'annexe de l'arrêté du 28 décembre 2017 du maire de Paris portant nouveaux tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2018 prévoit ainsi, s'agissant des " prescriptions applicables aux étalages et terrasses " : " Selon les cas, un droit de voirie additionnel, s'ajoutant à celui prévu pour diverses emprises (étalage, terrasse ouverte, terrasse fermée, prolongement intermittent de terrasse ou d'étalage, contre-étalage ou contre-terrasse, contre-terrasse sur chaussée) est perçu pour : / (...) - l'installation de tout type de protection, notamment sous forme d'écrans parallèles, sur tout type de terrasse ouverte (...) / - l'installation de tout mode de chauffage (...) sur tout type de terrasse ouverte (bâchée ou non, dotée ou non de tout type de protection, notamment sous forme d'écrans parallèles). Ces droits de voirie additionnels sont appréciés annuellement, de façon forfaitaire et indivisible. Ils s'appliquent quelles que soient les dates de pose ou dépose de ces dispositifs et leur temps de présence effectif au cours de l'exercice considéré. Il n'est procédé à aucun abattement mensuel ou calcul au " prorata temporis " lors de la première année d'installation ou dans les cas de cessation d'activité ou de démontage (...) / Le cas échéant, les droits de voirie additionnels précités se cumulent en fonction de la présence de différentes installations sur un même emplacement. Les étalages et terrasses sont taxés au mètre carré et pour l'exercice en cours (...) ". S'agissant de tout mode de chauffage ou de climatisation dans tout type de terrasse ouverte, cet arrêté précise que " (...) le droit de voirie additionnel s'apprécie exclusivement sur la totalité de la surface occupée par la terrasse de tout type et non en fonction des surfaces des dispositifs à usage de chauffage ou de climatisation. ".
9. En premier lieu, la requérante, tout en admettant que la protection d'une terrasse par des écrans et son chauffage sont de nature à en améliorer l'attractivité, soutient que la Ville de Paris n'a pas indiqué comment elle avait fixé le montant des droits additionnels réclamés et qu'il n'est pas possible de déterminer comptablement le gain spécifique procuré par chacune des installations. Toutefois, en l'absence précisément d'individualisation comptable permettant de soumettre l'occupation du domaine public à une redevance proportionnelle au chiffre d'affaires ou au bénéfice généré par chaque installation, la Ville de Paris pouvait légalement fixer un tarif au mètre carré, variable en fonction de la nature du dispositif et de son association ou non avec d'autres dispositifs, ainsi que de l'attractivité de la voie publique sur laquelle il est installé et du positionnement de la terrasse hors tiers ou dans le tiers du trottoir, critères qui ne sont pas étrangers aux " avantages de toute nature " procurés à l'occupant privatif du domaine public par chaque installation. La circonstance que les dispositifs litigieux ne sont utilisés ou maintenus en place qu'une partie de l'année ne fait pas en soi obstacle à ce que la redevance soit calculée au titre d'une année entière.
10. En deuxième lieu, s'il est soutenu que la Ville de Paris aurait fixé un tarif élevé pour les chauffages afin de dissuader, pour des motifs écologiques, les exploitants d'en installer, cette motivation ne résulte pas de l'instruction ni des textes fixant les tarifs, et notamment de la délibération 2011 DU 54. Le moyen tiré de l'erreur de droit ne peut en tout état de cause qu'être écarté. La circonstance qu'une terrasse chauffée non protégée est moins taxée qu'une terrasse chauffée et protégée, laquelle est plus attractive pour le public, n'est pas de nature à démontrer que les tarifs n'auraient pas été fixés en considération des avantages procurés aux commerçants.
11. En troisième lieu, la société requérante fait valoir que l'arrêté du 28 décembre 2017 retient pour l'installation d'écrans parallèles et de chauffages en terrasse des tarifs additionnels élevés, nettement supérieurs à ceux appliqués à la terrasse elle-même. Toutefois, si les droits de voirie doivent tenir compte des avantages de toute nature que procure l'occupation privative du domaine public, il n'est pas interdit à la collectivité d'orienter, par des tarifs différenciés, les modes d'occupation du domaine public qu'elle souhaite favoriser. La circonstance qu'une terrasse ouverte non chauffée serait, proportionnellement au chiffre d'affaires susceptible d'être généré par son installation, nettement moins taxée qu'une terrasse chauffée et protégée, ne crée pas de discrimination illégale et ne saurait en soi démontrer que la redevance exigée pour une terrasse chauffée et protégée est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.
12. En quatrième lieu, la délibération 2011 DU 54 et l'arrêté du 28 décembre 2017 prévoient un tarif spécifique (codes 440, 441 et 443) pour les terrasses ouvertes " délimitées par des écrans parallèles de hauteur inférieure à 1,30 m " que les commerçants peuvent être autorisés à installer dans le respect des spécifications du point 3.3.3 du titre II du règlement des terrasses de la ville de Paris. Ces tarifs ne se confondent pas avec ceux, codés 580, 581 et 582, intitulés " supplément pour l'installation d'écrans parallèles rigides protégeant une terrasse ouverte " mis à la charge, comme en l'espèce, des commerçants qui installent, sans autorisation préalable, de tels dispositifs, quelle qu'en soit la hauteur. D'une part, il ne résulte pas de l'instruction que les écrans parallèles ici en cause auraient fait l'objet d'une double taxation. D'autre part, la Ville de Paris n'a commis aucune erreur de droit en calculant le droit de voirie supplémentaire en proportion de la surface de la terrasse que les écrans protègent. Enfin, la circonstance que le tarif applicable aux écrans installés sans autorisation préalable, dont la hauteur n'est pas limitée, est nettement supérieur à celui prévu pour une terrasse dont la délimitation par des écrans d'une hauteur inférieure à 1,30 m et répondant à certaines spécifications et a été autorisée n'est pas de nature à démontrer que le " supplément " demandé pour l'installation, même temporaire, d'écrans parallèles à la façade n'aurait pas été fixé en fonction de l'avantage que retire le commerçant de la pose de ceux-ci ou serait manifestement excessif par rapport aux avantages procurés par cette protection de la terrasse.
13. Enfin, la société requérante fait valoir que la somme qu'elle acquitte pour les 87 m² de terrasses ouvertes dont elle dispose, qui sont chauffées et pour partie protégées, excède, proportionnellement à leur surface, le loyer qu'elle acquitte pour son local commercial lui-même, d'une superficie de 623 m². Toutefois cette circonstance n'est pas de nature à démontrer que la somme demandée pour l'occupation privative du domaine public excède les avantages ainsi attribués à l'exploitant, dès lors que le domaine public, en particulier au-delà du tiers du trottoir, n'est pas en principe destiné à une occupation commerciale.
14. Il résulte de ce qui précède, sans qu'il soit besoin de procéder aux mesures d'instruction demandées, que la société appelante n'est pas fondée à soutenir que le maire de Paris aurait méconnu les dispositions de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques en lui faisant application des tarifs adoptés par la délibération 2011 DU 54 du 28, 29 et 30 mars 2011 et fixés pour l'année 2018 par l'arrêté du 28 décembre 2017.
S'agissant du moyen tiré des erreurs de fait :
15. La société requérante soutient que les photographies produites en première instance par la Ville de Paris sont insuffisantes pour démontrer l'installation de chauffages sur les terrasses ouvertes qu'elle exploite. Toutefois, ces photographies prises lors d'une visite de récolement du 23 octobre 2018 font bien apparaitre des chauffages sous la banne de couverture des terrasses et la société, qui se borne à faire valoir que les photographies ne sont pas signées et que le nom de l'agent les ayant prises est inconnu, n'apporte aucun élément de nature à démontrer que les terrasses n'étaient pas chauffées en 2018. Le moyen tiré de l'erreur de fait doit être écarté.
16. La société Le Bastille soutient en outre dans son mémoire complémentaire que si elle a bien installé en 2018 des écrans parallèles dans l'emprise de la terrasse ouverte autorisée 8 place de la Bastille, ceux-ci ne délimitent pas cette terrasse. Il est constant cependant que la Ville de Paris n'a appliqué le droit additionnel au titre des écrans de protection rigides que sur une surface de 50 m², alors que la terrasse en cause, située devant la terrasse fermée, a une superficie de 61 m². En outre, il ressort suffisamment des photographies produites que les écrans, rigides, ont une hauteur supérieure à 1,30 m, ce qui justifie l'application du tarif codé 581 et non de celui codé 441 qui, comme dit au point 12, ne s'applique qu'aux terrasses ouvertes " délimitées par des écrans parallèles de hauteur inférieure à 1,30 m ". Si la société invoque une autorisation du 19 janvier 2006 qui l'autorise à fermer par des bâches une partie (46 m²) de la terrasse ouverte de 61 m² située devant la terrasse fermée, et produit dans son dernier mémoire un titre émis pour l'année 2017 lui faisant application du tarif 434, correspondant à la protection de 47 m² de sa terrasse par des bâches protectrices, il ne résulte pas de l'instruction que ce tarif aurait dû lui être appliqué en 2018, dès lors que la terrasse était alors protégée par des écrans parallèles rigides. La société requérante n'est donc pas fondée à soutenir que la Ville de Paris aurait commis une erreur de fait concernant la protection de cette terrasse, justifiant la décharge totale ou même partielle de la somme qui lui est demandée au titre des écrans rigides.
17. Il résulte de tout ce qui précède que la société Le Bastille n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement contesté, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.
Sur les frais liés au litige :
18. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la Ville de Paris, qui n'est pas partie perdante, verse à la société requérante la somme qu'elle demande au titre des frais de procédure qu'elle a exposés. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge de la société Le Bastille une somme de 1 500 euros à verser à la Ville de Paris sur le fondement des mêmes dispositions.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de la société Le Bastille est rejetée.
Article 2 : La société Le Bastille versera à la Ville de Paris une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Le Bastille, à la Ville de Paris et au directeur général des finances publiques de Paris.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme F..., présidente de chambre,
- M. Legeai, premier conseiller,
- M. Platillero, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 7 juillet 2020.
La présidente de la 1ère chambre,
S. F...
La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA02500