Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
La société Tabac de la Sorbonne a demandé au tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler le titre exécutoire émis le 22 avril 2015 par la maire de Paris et de prononcer la décharge de l'obligation de payer la somme de 19 639,29 euros mise à sa charge au titre de l'installation de dispositifs de chauffage équipant sa contre-terrasse pour l'année 2015, et, d'autre part, d'annuler la décision implicite par laquelle la maire de Paris a rejeté sa demande de restitution de la somme de 19 254,18 euros mise à sa charge au titre de l'installation des mêmes dispositifs pour l'année 2014.
Par un jugement n° 1601601-1611339/4-1 du 8 février 2018, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire émis le 22 avril 2015 par la maire de Paris, en tant que ce titre porte sur la somme de 19 639,29 euros, déchargé la société Tabac de la Sorbonne de l'obligation de payer cette somme, mis à la charge de la Ville de Paris la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté la demande de restitution de la somme de 19 254,18 euros.
Procédure devant la Cour :
Par une requête et des mémoires enregistrés le 13 avril 2018, le 11 avril 2019 et le 5 juillet 2019, la Ville de Paris, représentée par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler les articles 1er, 2 et 3 du jugement n° 1601601-1611339/4-1 du 8 février 2018 du tribunal administratif de Paris ;
2°) de rejeter la demande de la société Tabac de la Sorbonne tendant à l'annulation du titre exécutoire émis le 22 avril 2015 par la maire de Paris, en tant que ce titre porte sur la somme de 19 639,29 euros, et à la décharge de cette somme ;
3°) de mettre à la charge de la société Tabac de la Sorbonne la somme de 2 000 euros, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La Ville de Paris soutient que :
- le jugement est insuffisamment motivé ;
- il ne résulte pas du règlement des étalages et terrasses de la Ville de Paris que les contre-terrasses ne sont autorisées que pour une période limitée ; dès lors que la contre-terrasse est exploitée comme une terrasse ouverte au-delà du tiers du trottoir toute l'année, la durée de l'exploitation ne justifie pas l'application de tarifs différents ;
- l'illégalité de l'utilisation du domaine public justifie un paiement ;
- le moyen tiré de l'illégalité de l'article DG.6 du règlement des étalages et terrasses est inopérant ;
- la fixation d'un montant similaire à celui applicable aux terrasses chauffées situées au-delà du tiers du trottoir n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation ; les avantages retirés d'une contre-terrasse ne sont pas inférieurs à ceux résultant de l'exploitation d'une terrasse située au-delà du tiers du trottoir ; la société Tabac de la Sorbonne n'a pas fourni d'éléments chiffrés permettant de connaitre la rentabilité de la contre-terrasse chauffée ;
- aucune erreur de fait n'a été commise.
Par des mémoires en défense enregistrés le 8 mars 2019, le 12 février 2020 et le 3 mars 2020, la société Tabac de la Sorbonne, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et à la mise à la charge de la Ville de Paris de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
La société Tabac de la Sorbonne soutient que :
- le jugement attaqué est suffisamment motivé ;
- les sommes réclamées n'ont pas fait l'objet d'une délibération du conseil de Paris ;
- elle ne peut être regardée comme occupante sans titre et illégale du domaine public, compte tenu de l'autorisation d'installer une contre-terrasse et de l'illégalité de l'article DG. 6 du règlement des étalages et terrasses ;
- la Ville de Paris ne justifie pas des avantages spécifiquement procurés par l'installation de dispositifs de chauffage sur une contre-terrasse ;
- le tarif de référence est illégal ;
- l'utilisation du domaine public résultant d'une installation de chauffage ne justifie pas un tarif trois fois supérieur à la redevance prévue pour l'emprise et au loyer du local commercial ;
- la Ville de Paris n'apporte pas la preuve de la présence des dispositifs taxés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des collectivités territoriales ;
- le code général de la propriété des personnes publiques ;
- l'arrêté du maire de Paris du 6 mai 2011 portant nouveau règlement des étalages et terrasses applicable, à compter du 1er juin 2011, sur l'ensemble du territoire de la Ville de Paris ;
- l'arrêté du maire de Paris du 23 décembre 2014 fixant les nouveaux tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2015 ;
- le code de justice administrative ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. E...,
- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public,
- et les observations de Me C..., avocat de la société Tabac de la Sorbonne, et de Me Gorse, avocat de la Ville de Paris.
Une note en délibéré présentée pour la société Tabac de la Sorbonne a été enregistrée le 8 juin 2020.
Considérant ce qui suit :
1. La société Tabac de la Sorbonne est propriétaire d'un fonds de commerce de café-bar-brasserie qu'elle exploite au 7 place de la Sorbonne à Paris, 5ème arrondissement. Le maire de Paris l'a autorisée à installer une terrasse fermée au droit de son établissement, ainsi qu'une contre-terrasse, d'une longueur de 5,05 mètres sur 6,40 mètres. Par un titre exécutoire émis le 22 avril 2015, la maire de Paris lui a demandé de verser la somme de 37 944,78 euros au titre des droits de voirie dus pour l'année 2015, incluant une somme de 19 639,29 euros correspondant au chauffage de la contre-terrasse non protégée de 33 m². La Ville de Paris fait appel des articles 1er, 2 et 3 du jugement du 8 février 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire du 22 avril 2015 en tant qu'il porte sur la somme de 19 639,29 euros, a déchargé la société Tabac de la Sorbonne de l'obligation de payer cette somme et a mis à la charge de la Ville de Paris la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Sur la régularité du jugement attaqué :
2. D'une part, aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative, " Les jugements sont motivés ".
3. Contrairement à ce que soutient la Ville de Paris, les premiers juges ont suffisamment motivé le jugement attaqué, compte tenu de l'argumentation en défense qui leur était présentée, en exposant au considérant 8 les motifs pour lesquels ils écartaient la fixation d'une indemnité par référence au tarif applicable aux terrasses, faute d'être calculée en tenant compte des avantages de toute nature procurés par l'installation de chauffages sur les contre-terrasses. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ce jugement doit ainsi être écarté.
4. D'autre part, dès lors qu'il appartient au juge d'appel de statuer sur les moyens invoqués par la Ville de Paris dans le cadre de l'effet dévolutif de l'appel, la circonstance que les premiers juges auraient commis des erreurs de droit et dénaturé les pièces du dossier n'entache pas le jugement attaqué d'irrégularité.
Sur le bien fondé du jugement attaqué :
5. Aux termes de l'article L. 2125-1 du code général de la propriété des personnes publiques : " Toute occupation ou utilisation du domaine public d'une personne publique mentionnée à l'article L. 1 donne lieu au paiement d'une redevance (...) ". Aux termes de l'article L. 2125-3 du même code : " La redevance due pour l'occupation ou l'utilisation du domaine public tient compte des avantages de toute nature procurés au titulaire de l'autorisation ".
6. Le gestionnaire du domaine public est fondé à réclamer à l'occupant qui utilise de manière irrégulière le domaine une indemnité compensant les revenus qu'il aurait pu percevoir d'un occupant régulier pendant cette période. A cette fin, il doit rechercher le montant des redevances qui auraient été appliquées si l'occupant avait été placé dans une situation régulière, soit par référence à un tarif existant, lequel doit tenir compte des avantages de toute nature procurés par l'occupation du domaine public, soit, à défaut de tarif applicable, par référence au revenu, tenant compte des mêmes avantages, qu'aurait pu produire l'occupation régulière de la partie concernée du domaine public. La circonstance que l'occupation en cause serait irrégulière soit du fait qu'elle serait interdite, soit du fait que l'utilisation constatée du domaine public contreviendrait aux termes de l'autorisation délivrée, n'empêche pas le gestionnaire du domaine de fixer le montant de l'indemnité due par l'occupant irrégulier par référence au montant de la redevance exigible, selon le cas, pour un emplacement similaire ou pour une utilisation procurant des avantages similaires.
7. Il résulte de l'instruction qu'est en litige l'installation de chauffages sur une contre-terrasse, prohibée par l'article DG.6 de l'arrêté du maire de Paris du 6 mai 2011 portant nouveau règlement des étalages et terrasses applicable sur l'ensemble du territoire de la Ville de Paris. Contrairement à ce que soutient l'intimée en se prévalant de sa seule autorisation d'installer une contre-terrasse sans chauffage, cette utilisation du domaine public, qui était irrégulière, permettait légalement à la maire de Paris de réclamer à la société Tabac de la Sorbonne une indemnité compensant les revenus que la Ville de Paris aurait pu percevoir d'un occupant régulier.
8. Par ailleurs, il résulte également de l'instruction que, eu égard aux caractéristiques respectives des terrasses ouvertes situées hors du tiers du trottoir et des contre-terrasses, qui permettent notamment toutes deux, lorsqu'elles sont munies de chauffages, d'exploiter un espace ouvert malgré les aléas climatiques et d'accueillir des clients désirant consommer à l'extérieur en ayant en outre une vue sur la ville, comme en l'espèce sur l'entrée de la Sorbonne, l'avantage procuré à l'occupant d'une contre-terrasse équipée de chauffages ne saurait être regardé comme inférieur à celui retiré de l'exploitation d'une terrasse située hors du tiers du trottoir. A cet égard, si la société Tabac de la Sorbonne soutient que les terrasses et les contre-terrasses n'auraient pas les mêmes caractéristiques commerciales, elle n'apporte aucun élément probant à l'appui de ses allégations, alors que, compte tenu de la nature de l'activité et de la localisation de ces équipements, il ne résulte pas de l'instruction que les chiffres d'affaires qu'ils sont susceptibles de générer seraient différents. De la même façon, elle ne critique pas utilement la comparabilité des deux types d'installations eu égard à l'avantage spécifiquement procuré par les dispositifs de chauffage en se bornant, d'une part, à constater que le règlement des étalages et terrasses autorise le chauffage et la mise en place d'écrans de protection pour les seules terrasses ouvertes, ce qui ne prive pas la Ville de Paris du droit de demander une indemnité compensant les revenus qu'elle aurait pu percevoir du fait de l'installation d'une contre-terrasse chauffée irrégulière, et, d'autre part, à se prévaloir d'autres dispositions de ce règlement, qui sont dépourvues de toute incidence sur l'appréciation de l'avantage spécifique procuré à l'exploitant par l'installation d'une contre-terrasse chauffée.
9. Il résulte de ce qui précède que, en fixant le montant de l'indemnité en litige au titre de l'occupation irrégulière du domaine public par référence au tarif prévu par l'arrêté du maire de Paris du 23 décembre 2014 fixant les nouveaux tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2015, soit au code tarifaire 538 de 595,13 euros par m² prévu pour l'installation de tout mode de chauffage dans les terrasses ouvertes non pourvues de protection au-delà du tiers du trottoir dans les voies de catégorie 2, la Ville de Paris n'a pas commis d'erreur de droit au regard des dispositions précitées de l'article L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques.
10. Par suite, la Ville de Paris est fondée à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris a jugé que la maire de Paris a commis une erreur de droit en se référant au tarif de la redevance due au titre des dispositifs de chauffage équipant les terrasses situées hors du tiers du trottoir et n'aurait pas tenu compte des avantages de toute nature procurés à la société Tabac de la Sorbonne par l'installation en litige.
11. Il y a lieu pour la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par la société Tabac de la Sorbonne devant le tribunal administratif et la Cour.
12. En premier lieu, la société Tabac de la Sorbonne soutient que si la maire de Paris pouvait se voir déléguer par le conseil municipal de la Ville de Paris la compétence de fixer le montant de l'indemnité en litige, aucune délibération n'a en l'espèce été prise par le conseil municipal.
13. Toutefois, la Ville de Paris s'est bornée à se référer à l'un des tarifs prévu par l'arrêté du 23 décembre 2014 fixant les nouveaux tarifs applicables aux droits de voirie à compter du 1er janvier 2015, qui est en rapport avec les avantages procurés à la société Tabac de la Sorbonne par son occupation irrégulière du domaine public, ainsi qu'il a été dit précédemment. La Ville de Paris a par ailleurs produit à l'appui de sa requête la délibération du 5 avril 2014 par laquelle le conseil municipal a délégué à la maire de Paris le pouvoir de fixer, dans les limites posées par le conseil, les tarifs des droits de voirie, conformément à ce que prévoit l'article L. 2122-22 du code général des collectivités territoriales. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'incompétence de la maire de Paris pour fixer le montant de l'indemnité en litige manque en fait.
14. En deuxième lieu, la société Tabac de la Sorbonne invoque, par voie d'exception, l'illégalité de l'article DG.6 du règlement des étalages et terrasses, qui prévoit que " (...) le chauffage des contre-terrasses, quel qu'en soit le mode, est interdit (...) ".
15. Toutefois, ainsi qu'il a été dit précédemment, la somme en litige correspond à une indemnité compensant les revenus que la Ville de Paris aurait pu percevoir d'un occupant régulier du domaine public, en application des articles L. 2125-1 et L. 2125-3 du code général de la propriété des personnes publiques, qui constituent la base légale du titre exécutoire contesté. Cette indemnité ne constitue pas une sanction visant à réprimer une méconnaissance de l'article DG.6 du règlement des étalages et terrasses, qui ne prévoit pas le principe et le montant d'une indemnisation en cas d'une telle méconnaissance. Ce dernier article ne constitue ainsi pas le fondement légal du titre contesté, qui n'a pas été pris pour son application. La société Tabac de la Sorbonne ne peut ainsi utilement invoquer, par voie d'exception, l'illégalité de l'article DG.6 du règlement des étalages et terrasses.
16. En troisième lieu, la société Tabac de la Sorbonne soutient que la maire de Paris s'est référée à un tarif illégal, dès lors qu'il ne comporte pas une part fixe correspondant à la valeur locative d'une propriété privée comparable et une part variable correspondant au chiffre d'affaires réalisé par l'occupant. Toutefois, outre que la société Tabac de la Sorbonne ne produit aucun élément susceptible de permettre de supposer que le tarif auquel s'est référée la Ville de Paris pour déterminer l'indemnité en litige ne tiendrait pas compte des avantages de toute nature accordés à l'occupant, il ne résulte d'aucun principe ni d'aucune disposition législative ou règlementaire qu'une redevance d'occupation du domaine public doive sous peine d'illégalité être fixée comme le prétend l'intimée. Le moyen invoqué doit ainsi être écarté.
17. En quatrième lieu, la société Tabac de la Sorbonne soutient que le montant de l'indemnité est disproportionné, par comparaison avec la redevance due au titre de l'emprise de la contre-terrasse et avec son loyer commercial. D'une part, en se bornant à comparer le montant de l'indemnité en litige relative à une contre-terrasse chauffée, fixé par référence à un tarif réglementaire instituant un droit additionnel lié au chauffage d'une terrasse située hors du tiers du trottoir, et celui de la redevance due au titre de la seule emprise de la contre-terrasse ou de l'installation d'une terrasse chauffée située dans le tiers du trottoir, la société Tabac de la Sorbonne, qui ne produit aucun élément notamment comptable, qu'elle seule est en mesure d'apporter, permettant d'apprécier la rentabilité de la contre-terrasse chauffée qu'elle exploite, n'apporte aucun élément pertinent susceptible de caractériser une disproportion de l'indemnité réclamée au regard des avantages que lui procure, en renforçant son occupation toute l'année, le chauffage de cette contre-terrasse D'autre part, le seul constat que la société Tabac de la Sorbonne acquitterait pour son local commercial un loyer au m² inférieur à l'indemnité au m² réclamée pour l'installation d'une contre-terrasse chauffée ne saurait pas plus caractériser une disproportion de l'indemnité, en l'absence de tout élément produit par cette société permettant d'apprécier la rentabilité de la contre-terrasse chauffée qu'elle exploite.
18. Dans ces conditions, et alors que la société Tabac de la Sorbonne a produit en première instance une attestation d'un expert-comptable du 20 janvier 2016 de laquelle il ressort que les droits de voirie réclamés au titre de l'année 2015 représentent seulement 9,47 % du chiffre d'affaires réalisé durant la période hivernale, le moyen tiré du caractère disproportionné de l'indemnité, ainsi que ceux tirés du caractère confiscatoire et discriminatoire de cette indemnité, doivent être écartés.
19. En cinquième lieu, la société Tabac de la Sorbonne soutient que la Ville de Paris n'apporte pas la preuve de la présence des chauffages. Toutefois, il est constant que, lors d'une visite de récolement du 11 septembre 2014, l'inspecteur assermenté de la Ville de Paris a constaté un dispositif de chauffage sur la contre-terrasse exploitée par la société. Alors que, par un courrier du 22 octobre 2014, la maire de Paris a demandé à la société Tabac de la Sorbonne de l'informer de la dépose des dispositifs irréguliers avant le 31 décembre, la société Tabac de la Sorbonne, qui a d'ailleurs réglé l'indemnité demandée au titre de l'année 2014, s'est bornée à adresser un courriel le 8 juillet 2015 informant le service compétent qu'elle ne disposait pas de dispositifs de chauffage. Face à ces éléments, la société Tabac de la Sorbonne, qui indique par ailleurs dans ses écritures que l'utilisation de chauffages ne peut être que saisonnière, se borne à se prévaloir de l'absence de procès-verbal dressé en application de l'article DG.20 du règlement des étalages et terrasses, qui ne constitue pas le seul élément de preuve recevable, sans préciser par des documents probants, qu'elle seule est en mesure de produire, la date à laquelle elle aurait effectivement retiré les dispositifs en litige. Dans ces conditions, il ne résulte pas de l'instruction que la maire de Paris aurait commis une erreur de fait en exigeant le paiement d'une indemnité pour occupation irrégulière du domaine public par la société Tabac de la Sorbonne au titre de l'année 2015.
20. En revanche, l'indemnisation d'une occupation irrégulière du domaine public doit être calculée en fonction de la durée de l'utilisation irrégulière. La société Tabac de la Sorbonne a informé le service compétent de la Ville de Paris le 8 juillet 2015 de ce qu'elle ne disposait pas de chauffages sur sa contre-terrasse et, par courrier du 30 novembre 2015, la maire de Paris a admis la dépose des équipements, sans remettre en cause la date du 8 juillet 2015, alors qu'il résulte de l'instruction que, pour le calcul de l'indemnité, la maire de Paris a estimé que l'occupation irrégulière du domaine public s'était poursuivie toute l'année. Dans ces conditions, la société Tabac de la Sorbonne était fondée à obtenir une décharge partielle de l'obligation de payer l'indemnité de 19 639,29 euros en litige, qui est calculée sur l'intégralité de l'année 2015, à proportion des 176 jours durant lesquels elle avait déposé les dispositifs de chauffage, soit à hauteur d'un montant de 9 469,90 euros.
21. Il résulte de tout ce qui précède que la Ville de Paris est seulement fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé le titre exécutoire émis le 22 avril 2015 par la maire de Paris, en tant que cette annulation concerne une somme supérieure à 9 469,90 euros, et déchargé la société Tabac de la Sorbonne de l'obligation de payer la somme de 19 639,29 euros et non celle de 9 469,90 euros. Les articles 1er et 2 de ce jugement doivent dès lors être annulés dans cette mesure et les demandes d'annulation et de décharge de première instance de la société Tabac de la Sorbonne rejetées en tant qu'elles portent sur une somme excédant 9 469,90 euros. Le surplus des conclusions de la requête d'appel de la Ville de Paris doit être rejeté.
Sur les frais liés au litige :
22. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".
23. La Ville de Paris restant perdante en première instance, il n'y a pas lieu d'annuler l'article 3 du jugement du tribunal administratif qui met à sa charge une somme de 1 500 euros au titre des frais de procédure exposés par la société Tabac de la Sorbonne. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées par la Ville de Paris et par la société Tabac de la Sorbonne tendant à l'application des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en appel.
DÉCIDE :
Article 1er : La somme de 19 639,29 euros mentionnée aux articles 1er et 2 du jugement n° 1601601-1611339/4-1 du 8 février 2018 du tribunal administratif de Paris est ramenée à 9 469,90 euros.
Article 2 : Les conclusions de la demande de la société Tabac de la Sorbonne devant le tribunal administratif de Paris tendant à l'annulation du titre exécutoire émis le 22 avril 2015 par la maire de Paris, en tant que ce titre porte sur la somme de 19 639,29 euros, et à la décharge de l'obligation de payer cette somme sont rejetées en tant qu'elles portent sur une somme excédant 9 469,90 euros.
Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête de la Ville de Paris et les conclusions de la société Tabac de la Sorbonne tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative en appel sont rejetés.
Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la Ville de Paris et à la société Tabac de la Sorbonne.
Délibéré après l'audience du 28 mai 2020, à laquelle siégeaient :
- Mme D..., présidente de chambre,
- M. Legeai, premier conseiller,
- M. E..., premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe le 30 juin 2020.
Le rapporteur,
F. E...La présidente,
S. D...
Le greffier,
M. A...La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA01257