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25/06/2020 | FRANCE | N°19PA01774

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 25 juin 2020, 19PA01774


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée (SAS) SPGE a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur les véhicules des sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1619155 du 2 avril 2019, le Tribunal administratif de Paris a constaté un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement a

ccordé par l'administration en cours d'instance et a rejeté le surplus des conclusions de ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société par action simplifiée (SAS) SPGE a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur les véhicules des sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013, ainsi que des pénalités correspondantes.

Par un jugement n° 1619155 du 2 avril 2019, le Tribunal administratif de Paris a constaté un non-lieu à statuer à concurrence du dégrèvement accordé par l'administration en cours d'instance et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29 mai 2019, et un mémoire enregistré le 25 novembre 2019, la société SPGE, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1619155 du Tribunal administratif de Paris en date du 2 avril 2019 en tant qu'il lui est défavorable ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur les véhicules des sociétés auxquels elle a été assujettie au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013 demeurant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'a pas été donné suite à sa demande d'entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur portant sur l'ensemble des exercices vérifiés alors que, par un courrier du 30 mars 2015, le service lui a indiqué qu'il fixerait un rendez-vous pour cet entretien ; les termes de ce courrier établissent qu'elle souhaitait évoquer devant le supérieur hiérarchique du vérificateur les rectifications afférentes à l'ensemble de la période contrôlée et pas seulement de l'exercice clos en 2011 ; compte tenu de la réponse du service, elle n'a pas jugé utile de réitérer sa demande et a ainsi été induite en erreur ; elle a été privée d'une des garanties prévues par la charte du contribuable vérifié, qui est opposable à l'administration, laquelle a méconnu le principe de confiance légitime ;

- le moyen n'est pas devenu sans objet du fait des dégrèvements prononcés par l'administration, ceux-ci reposant uniquement sur la prise en compte de déficits non imputés d'une filiale ;

- l'administration s'est fondée sur les dispositions des articles 39-1 et 238 bis du code général des impôts pour rejeter sa réclamation alors que ces dispositions ne sont pas applicables à la rectification en litige ; les premiers juges n'ont pas relevé ce point ; elle justifie d'un intérêt qui lui est propre à ne pas facturer d'intérêts aux avances qu'elle a consenties à ses filiales, dès lors que la société Ginouviers était fortement déficitaire, ainsi que l'a d'ailleurs admis l'administration en accueillant sa demande de compensation et qu'elle a vocation à facturer des prestations à ses filiales ;

- elle se réserve la possibilité de produire des pièces complémentaires en ce qui concerne les charges et les dons.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 28 octobre 2019 et 18 mars 2020, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la société SPGE ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de

covid-19 ;

- la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société SPGE, qui exerce l'activité de holding et de conseil aux sociétés, notamment à ses filiales auxquelles elle facture des prestations de tenue de comptabilité et de secrétariat, a fait l'objet d'une vérification de comptabilité à l'issue de laquelle elle a été assujettie à des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés au titre des exercices clos en 2011, 2012 et 2013 et des cotisations de taxe sur les véhicules des sociétés au titre des exercices clos en 2012 et 2013, assorties des intérêts de retard, et pour ces dernières impositions, de la majoration de 10 % pour non dépôt de déclaration prévue par le a) du 1 de l'article 1728 du code général des impôts. Après avoir vainement contesté ces impositions et pénalités devant l'administration, elle a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à leur décharge. Par une décision en date du 12 mars 2019, l'administration a prononcé le dégrèvement des suppléments d'impôt sur les sociétés mis à la charge de la société SPGE au titre des exercices clos en 2011 et 2012 et réduit le montant total de celui réclamé au titre de l'exercice clos en 2013 à la somme de 5 663 euros. La société fait appel du jugement en date du 2 avril 2019, par lequel le tribunal, après avoir constaté un non-lieu à statuer à concurrence des dégrèvements accordés, a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

2. Aux termes de l'article L. 10 du livre des procédures fiscales : " (...) Avant l'engagement d'une des vérifications prévues aux articles L. 12 et L. 13, l'administration des impôts remet au contribuable la charte des droits et obligations du contribuable vérifié ; les dispositions contenues dans la charte sont opposables à l'administration ". Le paragraphe 5 du chapitre III de cette charte, dans sa rédaction applicable au litige, précise : " Si le vérificateur a maintenu totalement ou partiellement les redressements envisagés, des éclaircissements supplémentaires peuvent vous être fournis si nécessaire par l'inspecteur principal (...) ".

3. La société SPGE soutient que les impositions mises à sa charge ont été établies au terme d'une procédure irrégulière dès lors qu'en dépit de sa demande elle n'a pu bénéficier d'un entretien avec le supérieur hiérarchique du vérificateur avant la mise en recouvrement de ces impositions.

4. Toutefois, dans le courrier dont elle se prévaut qu'elle a adressé au service le 30 mars 2015, la contribuable a indiqué faire suite à la réponse apportée par le vérificateur par lettre du 2 mars 2015 aux observations qu'elle avait présentées consécutivement à la notification de la proposition de rectification du 12 décembre 2014, laquelle ne portait que sur l'exercice clos en 2011. La demande d'entretien avec le supérieur hiérarchique que contenait ce courrier du 30 mars 2015 ne concernait dès lors que les rectifications afférentes à l'exercice 2011. Or, ainsi qu'il a été dit au point 1, le supplément d'impôt réclamé à la société SPGE au titre de cet exercice a été dégrevé par une décision de l'administration du 12 mars 2019. Les conclusions tendant à la décharge de cette cotisation d'impôt sont ainsi devenues sans objet, peu important à cet égard les motifs du dégrèvement accordé par l'administration, et la société requérante ne peut, dès lors, utilement se prévaloir de l'absence du bénéfice des recours hiérarchiques prévus par la charte précitée.

5. Par ailleurs, il ne résulte pas de l'instruction que la société SPGE aurait présenté une demande similaire à raison des rectifications envisagées par l'administration au titre des exercices clos en 2012 et 2013. Aucune disposition du livre des procédures fiscales ne faisait obligation au service de saisir le supérieur hiérarchique du vérificateur en l'absence de demande de la contribuable. Par suite, le moyen doit être écarté.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'acte anormal de gestion :

6. En vertu des dispositions combinées des articles 38 et 209 du code général des impôts, le bénéfice imposable à l'impôt sur les sociétés est celui qui provient des opérations de toute nature faites par l'entreprise, à l'exception de celles qui, en raison de leur objet ou de leurs modalités, sont étrangères à une gestion commerciale normale. Les prêts à terme ou les avances à vue accordés sans intérêts par une entreprise au profit de tiers ne relèvent pas, en règle générale, d'une gestion commerciale normale, alors même que les sommes ainsi avancées seraient remboursables à tout moment, sauf s'il apparaît qu'en consentant de tels avantages l'entreprise a agi dans son propre intérêt. S'il appartient à l'administration d'apporter la preuve des faits sur lesquels elle se fonde pour estimer que l'avantage accordé à un tiers sous la forme de la renonciation à la perception d'intérêts constitue un acte anormal de gestion, elle est réputée apporter cette preuve dès lors qu'elle établit l'existence d'avances sans intérêts consenties par l'entreprise à des tiers et que cette entreprise n'est pas en mesure de justifier en retour de contreparties, notamment commerciales ou financières.

7. Il est constant qu'au cours de l'exercices clos en 2013, seul en litige, la société SPGE a accordé à ses filiales des avances en comptes courants non rémunérées. Le vérificateur a considéré que l'absence de perception d'intérêts sur les avances ainsi consenties ne procédait pas d'une gestion commerciale normale et a réintégré au résultat de l'exercice 2013 le montant des intérêts que la société SPGE aurait dû percevoir. La société requérante n'établit pas que l'avantage résultant de l'absence de facturation d'intérêts auraient eu pour elle des contreparties ou présentaient un intérêt en se bornant à faire valoir qu'elle a vocation à facturer des prestations à ses filiales dont l'une d'entre elle était fortement déficitaire, sans produire aucun élément susceptible de justifier des difficultés financières de cette société. Ainsi l'administration doit être regardée comme établissant que l'octroi de ces avances sans intérêts était constitutif d'un acte anormal de gestion.

8. Si la société requérante fait valoir que le fondement légal des impositions retenu par l'administration dans la décision statuant sur sa réclamation préalable serait erroné, les vices entachant cette décision sont sans incidence sur la régularité et le bien-fondé de la cotisation d'impôt mise à la charge de l'intéressée. Par ailleurs, il ne ressort pas des mentions de la proposition de rectification du 29 avril 2015 que le vérificateur aurait fondé la rectification en litige, procédant de la constatation d'un acte anormal de gestion, sur les dispositions du 3 du 1° de l'article 39 et de l'article 238 bis du code général des impôts. Elle n'est dès lors pas fondée à soutenir que le tribunal aurait dû relever d'office le moyen tiré de l'erreur de fondement légal.

En ce qui concerne les charges et dons comptabilisés par la société :

9. En se bornant à faire valoir qu'elle se réserve la possibilité de produire des pièces complémentaires en ce qui concerne les charges et les dons qu'elle a enregistrés en comptabilité, la société SPGE n'apporte pas la preuve qui lui incombe que les rectifications relatives à ces charges et dons ne sont pas fondées.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société SPGE n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté le surplus des conclusions de sa demande. Par suite, ses conclusions présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la société SPGE est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société par action simplifiée SPGE et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur général des finances publiques (Direction de contrôle fiscale d'Île-de-France).

Délibéré après l'audience du 11 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme B..., président,

- Mme Lescaut, premier conseiller,

- M. Doré, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 25 juin 2020.

Le président,

V. B...

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 19PA01774 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA01774
Date de la décision : 25/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales.


Composition du Tribunal
Président : Mme POUPINEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie POUPINEAU
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : ALBERT

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-25;19pa01774 ?
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