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22/06/2020 | FRANCE | N°19PA02021

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 22 juin 2020, 19PA02021


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 1er février 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné.

Par un jugement n° 1704058 du 4 décembre 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistr

ée le 24 juin 2019, M. D..., représenté par Me G... A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jug...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... D... a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 1er février 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné.

Par un jugement n° 1704058 du 4 décembre 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 24 juin 2019, M. D..., représenté par Me G... A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1704058 du 4 décembre 2018 du tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler l'arrêté du 1er février 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un certificat de résidence sur le fondement de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de réexaminer sa situation sous astreinte de 100 euros par jour de retard dans un délai de trois mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen, dès la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros à verser à Me G... A... sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant refus de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'un vice de procédure dès lors que le préfet du Val-de-Marne qui envisageait de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour de plein droit aurait dû préalablement saisir la commission du titre de séjour ;

- elle est entachée d'un vice de procédure au regard des dispositions de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 dès lors qu'il n'a pu présenter ses observations orales et écrites ;

- elle est entachée d'une erreur de droit au regard des stipulations de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dès lors que le préfet du Val-de-Marne, en se référant à l'ancienneté de son séjour sur le territoire français et de sa communauté de vie avec son épouse pour justifier le refus de délivrance du titre de séjour qui lui a été opposé, a ajouté une condition de délivrance non prévue par la loi ;

- le préfet du Val-de-Marne a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle compte tenu de l'ancienneté de sa présence sur le territoire français, de son intégration et de la durée de la communauté de vie avec son épouse ;

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale en raison de l'illégalité de la décision portant refus de séjour.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Par une décision du 30 avril 2019, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris a admis M. D... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 relatif à la circulation, à l'emploi et au séjour en France des ressortissants algériens et de leurs familles ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Mme C... a présenté son rapport au cours de l'audience.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté du 1er février 2017, le préfet du Val-de-Marne a refusé à M. D..., ressortissant algérien, né le 28 mai 1951 et entré en France le 3 août 1992 selon ses déclarations, la délivrance d'un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays à destination duquel il sera éloigné. M. D... relève appel du jugement du 4 décembre 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision de refus de séjour :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. La décision en litige vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, en particulier les articles 6-2°, 6-5° et 6-7° bis ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment les dispositions des articles L. 313-14 et L. 511-1. La décision mentionne que M. D... est entré en France le 3 août 1992 selon ses déclarations et qu'il s'est marié le 28 février 2015 avec une ressortissante française et qu'ils n'ont pas d'enfant. En outre, la décision précise que l'intéressé, qui ne justifie pas d'une entrée régulière sur le territoire français, condition nécessaire à l'obtention d'un certificat de résidence sur le fondement de l'article 6-2° de l'accord franco-algérien et qui ne justifie pas davantage de l'ancienneté de son séjour et de la communauté de vie avec son épouse permettant la délivrance d'un certificat de résidence sur le fondement de l'article 6-5° de l'accord précité, ne fait valoir aucune considération humanitaire ou motif exceptionnel qui justifierait la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour. Enfin, la décision précise que compte tenu des circonstances de l'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé à mener une vie privée et familiale dès lors qu'il n'est pas isolé en Algérie où résident ses huit enfants majeurs nés d'un précédent mariage et que rien ne s'oppose à ce qu'il retourne dans son pays d'origine solliciter un visa d'installation correspondant à sa situation. Dans ces conditions, la décision par laquelle le préfet du Val-de-Marne a refusé à M. D... la délivrance d'un titre de séjour comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement en application des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cette décision sera écarté comme manquant en fait.

4. En deuxième lieu, il y a lieu par adoption des motifs retenus par les premiers juges au point 2 de leur jugement d'écarter le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article 24 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les dispositions du présent article ainsi que celles des deux articles suivants, fixent les conditions de délivrance et de renouvellement du certificat de résidence aux ressortissants algériens établis en France ainsi qu'à ceux qui s'y établissent, sous réserve que leur situation matrimoniale soit conforme à la législation française. / Le certificat de résident d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) / 5) au ressortissant algérien, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus. ".

6. M. D... soutient qu'il réside en France depuis 1992 sans toutefois l'établir avant l'année 2000 et qu'il vit depuis 2010 avec une ressortissante française Mme E... B... qu'il a épousée en second mariage le 28 février 2015. Toutefois, les documents qu'il se borne à produire à savoir son passeport délivré en 2014 qui mentionne une adresse différente de celle de son épouse, l'attestation établie le 27 décembre 2018 par son épouse indiquant qu'elle l'héberge depuis mars 2010, les avis d'imposition au titre des années 2014 à 2018, les quittances de loyer du mois d'avril 2017 et du mois d'octobre 2018 ainsi que l'attestation EDF du 27 février 2017 ne permettent pas, à eux seuls, d'établir la réalité de la communauté de vie dont il se prévaut depuis l'année 2010. Par ailleurs, M. D... ne conteste pas être dépourvu de toutes attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 41 ans et où résident ses huit enfants majeurs. Dans ces conditions, le préfet du Val-de-Marne, qui pouvait sans entacher sa décision d'une erreur de droit contrairement à ce que soutient M. D... prendre en compte à la fois l'ancienneté de son séjour et de sa communauté de vie avec son épouse pour apprécier sa situation, n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels il a pris cette décision. Par suite, le moyen tiré de l'erreur de droit au regard des stipulations de l'article 6-5° de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 dont serait entachée la décision refusant la délivrance d'un titre de séjour au requérant ne peut qu'être écarté. Pour les mêmes motifs, M. D... n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Val-de-Marne aurait commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de cette décision sur sa situation personnelle.

7. En dernier lieu, aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 ". Il résulte de ces dispositions que le préfet n'est tenu, de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues pour l'obtention d'un titre de séjour de plein droit en application des dispositions de ce code, ou des stipulations équivalentes de l'accord-franco-algérien, auxquels il envisage de refuser la délivrance d'un titre de séjour.

8. Pour les motifs exposés au point 6, la situation de M. D... ne justifiant pas la délivrance de plein droit du titre de séjour sollicité, le préfet du Val-de-Marne n'était pas tenu de saisir la commission du titre de séjour. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sera écarté.

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. La décision portant refus de séjour n'étant entachée d'aucune des illégalités alléguées, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision, invoqué au soutien des conclusions en annulation dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. D... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre des frais liés au litige ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... D... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 8 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 22 juin 2020.

Le président de la formation de jugement,

J. LAPOUZADE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 19PA02021


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02021
Date de la décision : 22/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-02-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Autorisation de séjour. Refus de renouvellement.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : NGUYEN VAN HO

Origine de la décision
Date de l'import : 27/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-22;19pa02021 ?
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