La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

11/06/2020 | FRANCE | N°19PA02084

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 11 juin 2020, 19PA02084


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 17 octobre 2018 par laquelle le préfet de police a refusé de délivrer un document de circulation pour étranger mineur à leur fils B... D....

Par un jugement n° 1823217 du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 juin 2019, M. et Mme D..., représentés par Me A..., demandent à la Cour :

1°) d'annu

ler le jugement n° 1823217 du 30 avril 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la déc...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme D... ont demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 17 octobre 2018 par laquelle le préfet de police a refusé de délivrer un document de circulation pour étranger mineur à leur fils B... D....

Par un jugement n° 1823217 du 30 avril 2019, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 30 juin 2019, M. et Mme D..., représentés par Me A..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1823217 du 30 avril 2019 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision du préfet de police du 17 octobre 2018 ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de police de délivrer un document de circulation pour étranger mineur à leur fils B... D..., dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation dans les mêmes conditions ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- les premiers juges ont fait une mauvaise appréciation des faits et du droit en ne prenant pas en compte les difficultés que rencontrera l'intéressé pour obtenir un visa pour retourner en France ;

- la décision du préfet de police est insuffisamment motivée et révèle un défaut d'examen de la situation de B... D... ;

- elle méconnait l'article L. 321-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont les conditions étaient remplies, M. D... étant titulaire d'une carte de résident ; le préfet de police a commis une erreur d'interprétation de la règle de droit ;

- le préfet n'était pas en situation de compétence liée et devait prendre en considération l'intérêt supérieur de l'enfant protégé par l'article 3 paragraphe 1 de la convention internationale des droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 18 février 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- M. et Mme D... ne font valoir, concernant l'ensemble des moyens communs aux deux instances, aucun argument de nature à remettre en cause le bien-fondé du jugement attaqué ;

- il n'est pas porté une atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant au sens des dispositions de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- les conclusions de Mme Guilloteau, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme D..., de nationalité marocaine, ont demandé le 26 septembre 2018 au préfet de police de délivrer un document de circulation pour étranger mineur à leur fils B... né en mars 2005 et entré en France avec sa mère, sous couvert d'un visa touristique, en juillet 2018 et s'y étant maintenu depuis lors. Le préfet de police a refusé de délivrer ce titre par décision du 17 octobre 2018 contenue dans un courrier adressé à l'avocat des demandeurs. M. et Mme D... font appel du jugement par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. En premier lieu, l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration dispose : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent (...) ". L'article L. 211-5 du même code dispose : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ".

3. La décision contestée mentionne l'article L. 321-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et rappelle que peut notamment bénéficier de plein droit du document de circulation l'étranger mineur qui justifie par tout moyen avoir résidé habituellement en France avec au moins un de ses parents depuis qu'il a atteint au plus l'âge de treize ans. Pour rejeter la demande présentée pour B... D..., le préfet indique qu'il ressort de l'examen du dossier et des déclarations des parents que celui-ci, né en mars 2005, a été scolarisé en France en 2015 mais est reparti au Maroc entre 2016 et 2018 et ne justifie de sa scolarité sur le territoire français que depuis septembre 2018. La décision contestée énonce ainsi les considérations de droit et de fait qui la fondent. Si les requérants soutiennent que le préfet de police aurait également dû se prononcer sur les droits qui pouvaient naître de la circonstance que le père de B... était titulaire d'une carte de résident, ils ne produisent pas leur demande et ne démontrent donc pas que la décision qu'ils contestent serait insuffisamment motivée au regard des éléments invoqués ou révèlerait un défaut d'examen complet de leur situation.

4. En deuxième lieu, l'article L. 321-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dispose, dans sa rédaction applicable au litige : " Sous réserve des conventions internationales, les étrangers mineurs de dix-huit ans dont au moins l'un des parents appartient aux catégories mentionnées à l'article L. 313-11, au 1° de l'article L. 314-9, aux 8° et 9° de l'article L. 314-11, à l'article L. 313-20 ou qui relèvent, en dehors de la condition de majorité, des prévisions des 2° et 2° bis de l'article L. 313-11, ainsi que les mineurs entrés en France pour y suivre des études sous couvert d'un visa de séjour d'une durée supérieure à trois mois reçoivent, sur leur demande, un document de circulation qui est délivré dans des conditions fixées par voie réglementaire ".

5. M. et Mme D... ne contestent pas que B..., qui ne résidait pas habituellement en France lorsqu'il a atteint l'âge de treize ans, ne relève pas des prévisions des 2° et 2° bis de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Ils soutiennent qu'il a cependant droit au document de circulation dès lors qu'à la date de la décision litigieuse son père était titulaire d'une carte de résident de longue durée, valable jusqu'en 2027 et délivrée selon eux après plusieurs cartes de séjour temporaires " vie privée et familiale ". Cependant, il est constant qu'à la date de la décision contestée, la détention par un étranger d'une telle carte de résident ne créait pour ses enfants aucun droit à la délivrance d'un document de circulation et il n'est pas démontré que M. D... pouvait être considéré comme entrant toujours, à cette même date, dans l'une des " catégories " d'étrangers " mentionnées à l'article L. 313-11 " dont la situation justifie la délivrance de plein droit d'une carte de séjour " vie privée et familiale " Dès lors, les requérants ne sont pas fondés à soutenir que le préfet de police a fait une inexacte application des dispositions précitées de l'article L. 321-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en rejetant la demande présentée pour leur fils.

6. En dernier lieu, il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de délivrance d'un document de circulation au bénéfice d'un étranger mineur qui n'appartient pas à l'une des catégories mentionnées par l'article L. 321-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, de s'assurer, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, qu'un refus de délivrance d'un tel document ne méconnaît pas les stipulations de l'article 3-1 de la convention relative aux droits de l'enfant du 26 janvier 1990 selon lesquelles : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale ". L'intérêt supérieur d'un étranger mineur qui ne remplit pas les conditions légales pour bénéficier du document de circulation, lequel ne constitue pas un titre de séjour mais est destiné à faciliter le retour sur le territoire national après un déplacement hors de France, s'apprécie au regard de son intérêt à se rendre hors de France et à pouvoir y revenir sans être soumis à l'obligation de présenter un visa.

7. M. et Mme D... font valoir que leur fils doit pouvoir se rendre au Maroc pendant les vacances scolaires afin de maintenir des liens avec ses grands-parents et cousins et revenir en France pour poursuivre sa scolarité sans être soumis à l'obligation de présenter un visa. Toutefois, les requérants ne justifient d'aucune circonstance particulière qui rendrait nécessaires des voyages réguliers de l'enfant, résidant en France avec ses deux parents, entre la France et son pays d'origine. Par ailleurs, l'absence de délivrance d'un document de circulation ne fait pas obstacle à ce que B... D... puisse effectuer des voyages en sollicitant un visa et les requérants, qui ne soutiennent pas avoir effectué une demande de visa qui leur aurait été refusée, n'établissent pas que la procédure de délivrance par les autorités consulaires françaises au Maroc d'un visa de retour en France serait particulièrement difficile, nonobstant la circonstance que B... D..., âgé de treize ans, s'est à l'été 2018 maintenu sur le territoire français au-delà de la date d'expiration de son visa. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait méconnu l'intérêt supérieur de B... D... en refusant de lui délivrer un document de circulation doit être écarté.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme D... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Leurs conclusions d'appel, y compris celles à fin d'injonction et, l'Etat n'étant pas partie perdante, celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme D... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme D... et au ministre de l'intérieur.

Copie sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 28 mai 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme E..., présidente de chambre,

- M. C..., premier conseiller,

- M. Platillero, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 11 juin 2020.

La présidente de la 1ère chambre,

S. E...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA02084


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02084
Date de la décision : 11/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-005 Étrangers. Entrée en France.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : SFEZ

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-11;19pa02084 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award