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09/06/2020 | FRANCE | N°19PA01360

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 09 juin 2020, 19PA01360


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société DSC a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de son obligation de payer résultant d'un avis à tiers détenteur émis le 7 juillet 2017 pour avoir paiement de rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de compléments d'impôt sur les sociétés pour un total de 194 389 euros.

Par un jugement n° 1713117/2-1 du 19 février 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enr

egistrés les 18 avril et 22 août 2019, la société DSC, représentée par Me B... A..., demande à la C...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société DSC a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de son obligation de payer résultant d'un avis à tiers détenteur émis le 7 juillet 2017 pour avoir paiement de rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de compléments d'impôt sur les sociétés pour un total de 194 389 euros.

Par un jugement n° 1713117/2-1 du 19 février 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 18 avril et 22 août 2019, la société DSC, représentée par Me B... A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 19 février 2019 ;

2°) de prononcer la décharge demandée ;

3°) de condamner l'Etat au paiement d'une somme de 2 000 euros au titre du préjudice causé par ledit avis à tiers détenteur ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 500 euros au titre de l'article

L. 761-1 du Code de justice administrative.

Elle soutient que :

- ses conclusions sont recevables dans le cadre des dispositions de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales ;

- la réclamation du 7 juin 2017 était motivée et par suite régulière ;

- le conseil de la société ne disposait pas des éléments pour développer son argumentation ;

- la réclamation contentieuse du 7 août a développé ces moyens et régularisé la réclamation précédente ;

- l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales permet la régularisation de la réclamation jusque devant le tribunal administratif ;

- le refus de l'administration d'accorder le sursis de paiement est une faute engageant sa responsabilité.

Par un mémoire en défense enregistré le 25 juillet 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les conclusions aux fins d'annulation de l'avis à tiers détenteur et d'indemnisation du préjudice subi sont irrecevables ;

- les moyens soulevés par la société DSC ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. C...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société DSC relève appel du jugement du 19 février 2019 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande en décharge de son obligation de payer résultant d'un avis à tiers détenteur émis le 7 juillet 2017 pour avoir paiement de rappels de taxe sur la valeur ajoutée et de compléments d'impôt sur les sociétés pour un total de 194 389 euros.

Sur les conclusions à fin d'annulation de l'avis à tiers détenteur :

2. La demande présentée par la société DSC devant les premiers juges concluait à l'annulation de l'avis à tiers détenteur émis le 7 juillet 2017. Si, en application des dispositions de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, le juge administratif est compétent, en sa qualité de juge de l'impôt, pour décider de la décharge de l'obligation de payer consécutive à des impositions relevant de sa compétence, seul le juge judiciaire peut prononcer l'annulation d'un avis à tiers détenteur. Toutefois, les premiers juges, afin de donner un effet utile à la demande portée devant eux compte tenu de l'argumentation de la société requérante, qui mettait clairement en cause l'exigibilité des impositions et pénalités dont l'administration lui réclamait le paiement, l'ont regardée comme tendant à la décharge de l'obligation de payer la somme de 194 389 euros. Si la société persiste en appel à reproduire les mêmes conclusions, il y a également lieu de regarder sa requête comme tendant à la décharge de l'obligation de payer cette somme, de sorte que la juridiction administrative est compétente pour en connaître.

3. D'une part, aux termes de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales : " Le contribuable qui conteste le bien-fondé ou le montant des impositions mises à sa charge est autorisé, s'il en a expressément formulé la demande dans sa réclamation et précisé le montant ou les bases de dégrèvement auquel il estime avoir droit, à différer le paiement de la partie contestée de ces impositions et des pénalités y afférentes. / L'exigibilité de la créance et la prescription de l'action en recouvrement sont suspendues jusqu'à ce qu'une décision définitive ait été prise sur la réclamation, soit par l'administration, soit par le tribunal compétent (...) ". L'article R. 197-3 du même livre dispose : " Toute réclamation doit, à peine d'irrecevabilité : a) mentionner l'imposition contestée ; b) contenir l'exposé sommaire des moyens et des conclusions de la partie (...) ". Il résulte de ces dispositions que les impositions contestées par un contribuable qui a formé une réclamation régulière et présenté une demande de sursis de paiement cessent d'être exigibles à compter de la date à laquelle cette réclamation et cette demande sont reçues par le service.

4. D'autre part, aux termes de l'article R. 2002 du même livre : " (...) / Le demandeur ne peut contester devant le tribunal administratif des impositions différentes de celles qu'il a visées dans sa réclamation à l'administration. / Les vices de forme prévus aux a, b, et d de l'article

R. 1973 peuvent, lorsqu'ils ont motivé le rejet d'une réclamation par l'administration, être utilement couverts dans la demande adressée au tribunal administratif. / (...) ".

5. Enfin, aux termes de l'article R. 277-3-1 de ce livre : " Lorsque le redevable fournit des garanties suffisantes, au sens de l'article R. 277-1, à l'appui d'une réclamation assortie d'une demande de sursis de paiement, celles-ci se substituent aux sommes ou biens appréhendés avant la réclamation pour le recouvrement des créances qui font l'objet de la contestation. Dans ce cas, le comptable restitue les biens ou sommes appréhendés, avant la réclamation mentionnée à l'article L. 277, pour le montant des créances effectivement garanties ".

6. Il résulte en premier lieu de l'instruction que la réclamation préalable en date du

7 juin 2017 formée à l'encontre des compléments d'impôt sur les sociétés et des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à la charge de la SARL DSC au titre des années 2013 à 2015, si elle mentionnait que le dégrèvement total des impositions était sollicité, se bornait à indiquer que les motifs de la contestation seraient développés après réception de la proposition de rectification adressée à la société et ajoutait que " d'ores et déjà il est observé que la procédure d'imposition est irrégulière ". Contrairement à ce que soutient la société requérante, une telle mention ne peut être regardée comme exposant un moyen à l'encontre des impositions contestées. Par suite, faute de comporter l'énoncé sommaire de moyens, ce courrier ne peut être regardé comme constituant une réclamation régulière au regard des dispositions précitées de l'article R. 197-3 du livre des procédures fiscales. Il n'a par suite pas pu suspendre l'exigibilité des impositions en cause. L'absence de notification régulière de pièces de procédure identifiées et prévues par les textes pouvant être invoquée à l'appui d'une réclamation contentieuse, la société DSC ne saurait valablement soutenir que ne disposant pas des informations nécessaires en raison de la carence du service, l'absence de motivation de sa réclamation ne peut lui être opposée sauf à méconnaitre les droits du contribuable.

7. En deuxième lieu, si la SARL DSC se prévaut des dispositions précitées de l'article R. 200-2 du livre des procédures fiscales qui permettent de régulariser devant le tribunal administratif une réclamation ne comportant pas l'exposé sommaire des moyens, elle ne fait en tout état de cause état d'aucune demande adressée au tribunal administratif suite à une décision de rejet pour un tel vice de forme de la réclamation du 7 juin 2017. Contrairement à ce qui est soutenu, la réclamation du 7 août 2017, d'ailleurs intervenue postérieurement à la notification le 27 juillet 2017 de la décision du 24 juillet 2017 rejetant pour défaut de motivation la réclamation du 7 juin 2017, n'a en tout état de cause pas pu régulariser cette dernière réclamation en application desdites dispositions.

8. En troisième lieu, il résulte des dispositions des articles L. 277 et R. 277-3-1 du livre des procédures fiscales que le contribuable qui en fait expressément la demande dans une réclamation régulière a droit au sursis de paiement sur la totalité des impôts qu'il conteste, à la seule condition qu'il réunisse les garanties appropriées. Lorsque l'administration fiscale a diligenté des mesures d'exécution avant que le contribuable ait demandé le sursis de paiement, la demande régulière de sursis de paiement ne prive pas d'effet l'avis à tiers détenteur émis antérieurement à la demande de sursis de paiement et ne remet dès lors pas en cause l'effet attributif de la mesure d'exécution pratiquée antérieurement, prévu par les dispositions précitées de l'article L. 263 du même livre. Toutefois, les sommes et les biens ainsi entrés dans le patrimoine de l'Etat doivent, nonobstant l'effet attributif des mesures d'exécution pratiquées, être restitués au contribuable au cas où les garanties proposées sont jugées suffisantes. Si la société requérante se prévaut de la réclamation, assortie de moyens, en date du 7 août 2017, cette réclamation est postérieure à l'avis à tiers détenteur litigieux en date du 7 juillet 2017. En l'absence de conclusions en remboursement des sommes attribuées à l'administration en exécution de cet avis à tiers détenteur et de précisions sur les garanties qui auraient été présentées à l'appui de la demande de sursis de paiement, le moyen tiré de l'existence de la réclamation du 7 août 2017 ne peut en tout état de cause qu'être écarté.

Sur les conclusions aux fins d'indemnisation du préjudice subi :

9. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée. /Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle ". La société requérante ne justifie d'aucune demande préalable adressée à l'administration à fin d'indemnisation d'un préjudice qu'elle aurait subi. Par suite, les conclusions présentées à cette fin sont irrecevables et doivent être rejetées.

10. Il résulte de tout ce qui précède que la société requérante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la société DSC est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société DSC et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris.

Délibéré après l'audience du 27 mai 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Appèche, président,

- M. C..., premier conseiller,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 9 juin 2020.

Le président de la formation de jugement,

S. APPECHE

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 19PA01360


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA01360
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme APPECHE
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : ADDA

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-09;19pa01360 ?
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