Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... E... A... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 31 juillet 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé son pays de destination.
Par un jugement n° 1823827 du 23 avril 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 25 mai 2019, M. A..., représenté par Me B..., demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1823827 du Tribunal administratif de Paris en date du 23 avril 2019 ;
2°) d'annuler l'arrêté du préfet de police en date du 31 juillet 2018 ;
3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, ou de procéder dans le même délai et sous la même astreinte, à un nouvel examen de sa situation, et de lui délivrer, dans l'attente, une autorisation provisoire de séjour ;
4°) de mettre à la charge de l'État le versement à son conseil d'une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.
Il soutient que :
- l'arrêté contesté n'est pas suffisamment motivé ;
- le préfet de police n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle ;
- la décision de refus de titre de séjour a été prise en méconnaissance des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- elle a été prise en méconnaissance des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité dès lors que le préfet de police s'est estimé lié par l'avis du collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) ;
- la décision fixant le pays de destination est illégale en raison de l'illégalité des décisions de refus de titre de séjour et portant obligation de quitter le territoire français ;
- l'arrêté contesté est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.
Par un mémoire enregistré le 15 janvier 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par M. A... ne sont pas fondés.
M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 5 mars 2020 du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;
- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;
- la loi n° 2020-290 du 23 mars 2020 d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 ;
- la loi n° 2020-546 du 11 mai 2020 prorogeant l'état d'urgence sanitaire et complétant ses dispositions ;
- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif modifiée ;
- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;
- le code des relations entre le public et l'administration ;
- le code de justice administrative.
Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience.
Considérant ce qui suit :
1. M. A..., ressortissant égyptien, entré en France, selon ses déclarations, en janvier 2010, a sollicité un titre de séjour en qualité d'étranger malade sur le fondement du 11° de l'article
L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du
31 juillet 2018, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de 30 jours et a fixé son pays de destination. M. A... fait appel du jugement en date du 23 avril 2019, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.
Sur le moyen commun aux trois décisions :
2. Aux termes de son arrêté, le préfet de police a visé les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont M. A... s'était prévalu à l'appui de sa demande de titre de séjour, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il a également précisé l'identité, la date et le lieu de naissance de M. A..., ainsi que les conditions de son entrée en France, et exposé les raisons pour lesquelles, après avoir visé l'avis du collège de médecins de l'OFII en date du 12 mars 2018, dont il s'est approprié les motifs, il a considéré que M. A... ne remplissait pas les conditions pour obtenir le titre de séjour qu'il sollicitait. Il a enfin énoncé des éléments suffisants sur la situation familiale de l'intéressé en relevant que ce dernier était célibataire et sans charge de famille en France et qu'il n'attestait pas être démuni d'attaches familiales à l'étranger où résidaient ses parents et sa fratrie. Dans ces conditions, le préfet de police a suffisamment exposé les considérations de droit et de fait fondant sa décision de refus de titre de séjour. Il résulte des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, que la motivation de l'obligation de quitter le territoire français se confond avec celle du refus de titre de séjour dont elle découle nécessairement et n'implique pas, dès lors que ce refus est lui-même motivé et que les dispositions législatives qui permettent d'assortir le refus de séjour d'une obligation de quitter le territoire français ont été, comme en l'espèce, rappelées, de mention spécifique pour respecter les exigences de motivation des actes administratifs. Enfin, la décision fixant le pays de destination rappelle la nationalité de M. A... et mentionne que celui-ci n'établit pas être exposé dans son pays d'origine à des traitements prohibés par la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Ces trois décisions comportent ainsi l'énoncé des considérations de fait et de droit qui constituent leur fondement et sont dès lors suffisamment motivées. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de ces décisions ne peut qu'être écarté.
Sur la décision de refus de titre de séjour :
3. En premier lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier, et en particulier de la motivation de l'arrêté en litige, que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen particulier de la situation personnelle de M. A....
4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'État. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé. Chaque année, un rapport présente au Parlement l'activité réalisée au titre du présent 11° par le service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration ainsi que les données générales en matière de santé publique recueillies dans ce cadre. ".
5. M. A... fait valoir qu'il est atteint de la maladie de Parkinson et qu'il souffre également de diabète et d'hypertension artérielle, ces pathologies nécessitant un traitement et un suivi adaptés, qui ne peuvent être assurés qu'en France. Pour refuser le titre de séjour demandé par l'intéressé, le préfet de police s'est fondé sur l'avis émis le 12 mars 2018 par le collège de médecins de l'OFII, qui a estimé que l'état de santé de M. A... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il pouvait bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, que les soins présentaient un caractère de longue durée et qu'il pouvait voyager sans risque dans son pays d'origine.
Les ordonnances de prescription médicale, ainsi que les certificats médicaux que le requérant a produits pour contredire l'avis du collège de médecins, sont rédigés en des termes généraux et ne permettent pas, eu égard à leur teneur, d'établir qu'il ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié en Égypte. Par ailleurs, le préfet de police établit par les pièces qu'il a produites devant les premiers juges que sont commercialisés en Égypte les médicaments, ou des spécialités pharmaceutiques équivalentes, qui lui ont été prescrits en France et que ce pays dispose d'infrastructures adaptées et de médecins qualifiés pour assurer la prise en charge des différentes pathologies dont il est atteint. Par suite, le préfet de police n'a pas, par la décision de refus de titre de séjour en litige, méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'a pas non plus entaché cette décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A....
6. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ".
7. M. A..., qui déclare être entré en France au cours de l'année 2010, se prévaut de la durée de sa résidence et de l'ancienneté de ses attaches privées et familiales sur le territoire français. Toutefois, il ressort des pièces du dossier que le requérant était, à la date de la décision en litige, célibataire et sans charge de famille en France alors qu'il n'était pas dépourvu d'attaches familiales en Égypte, qu'il n'a quitté qu'à l'âge de 43 ans et où résidaient sa mère ainsi que ses frères et soeurs. Par ailleurs, il ne justifie pas de la réalité des liens personnels dont il se prévaut, ni d'une intégration particulière. Dans ces circonstances, eu égard notamment à l'absence d'attaches personnelles et familiales de M. A... en France, le préfet de police, en rejetant la demande de titre de séjour dont il était saisi, n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels cette décision a été prise. Il n'a ainsi, contrairement à ce que soutient le requérant, pas méconnu les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait entaché sa décision d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M. A... doit être écarté.
8. En quatrième et dernier lieu, M. A... ne peut utilement se prévaloir des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales à l'encontre de la décision portant refus de titre de séjour, qui n'a pas pour objet ni pour effet de le contraindre à retourner dans son pays d'origine.
Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :
9. Il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police se serait estimé lié par l'avis du collège de médecins du service médical de l'OFII en date du 12 mars 2018. Par suite, le moyen soulevé par M. A... tiré de ce que le préfet de police aurait méconnu l'étendue de sa propre compétence doit être écarté.
Sur la décision fixant le pays de destination :
10. Le requérant n'établissant pas que les décisions portant refus de titre de séjour et obligation de quitter le territoire français en litige seraient illégales, l'exception d'illégalité de ces décisions soulevée à l'appui de ses conclusions à fin d'annulation de la décision fixant le pays de destination, doit être écartée.
11. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fin d'injonction sous astreinte, tout comme celles présentées au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.
DÉCIDE :
Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E... A... et au ministre de l'intérieur.
Copie en sera adressée au préfet de police.
Délibéré après l'audience du 5 mars 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme C..., président assesseur,
- Mme Lescaut, premier conseiller.
Rendu public par mise à disposition au greffe, le 19 mai 2020.
Le président de la 5ème chambre,
S.-L. FORMERY
La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 19PA01737