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13/05/2020 | FRANCE | N°18PA01260

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 13 mai 2020, 18PA01260


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Domigestion Pacifique a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française de prononcer la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 juin 2013.

Par un jugement n° 1700216 du 13 février 2018, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 avril 2018, la SARL Domigestion Pacifique, repr

ésentée par Me C... A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1700216 du 13 février...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL Domigestion Pacifique a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française de prononcer la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 juin 2013.

Par un jugement n° 1700216 du 13 février 2018, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 13 avril 2018, la SARL Domigestion Pacifique, représentée par Me C... A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n° 1700216 du 13 février 2018 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) de prononcer la décharge sollicitée devant ce tribunal ;

3°) de mettre à la charge de la Polynésie française la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en considérant que le service de représentation fiscale était nécessairement utilisé en Polynésie française dès lors que le lieu d'exploitation du service de représentation fiscale est une condition d'accréditation du représentant fiscal en Polynésie française, le tribunal a dénaturé les faits de l'espèce et entaché son jugement d'erreur de droit ;

- la prestation réalisée par le représentant fiscal ne peut être utilisé qu'en métropole, pour permettre aux sociétés de défiscalisation, ayant leur siège en France métropolitaine, de remplir leur obligation déclarative en Polynésie française ; c'est l'existence d'un lien direct entre la prestation et le service qui en est retiré qui est déterminant pour apprécier si la prestation de service apporte une valeur ajoutée à la Polynésie française ; la prestation de service est donc bien utilisée en métropole puisqu'elle a pour conséquence directe de permettre aux associés de bénéficier de la réduction d'impôt accordée et financée par l'Etat ;

- le service de représentation fiscale ne peut être assujetti à la taxe sur la valeur ajoutée en Polynésie française dans la mesure où il n'y est pas utilisé par le client direct.

Par un mémoire en défense enregistré le 29 août 2018, la Polynésie française, représentée par Me B..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 2 000 euros soit mise à la charge de la SARL Domigestion Pacifique sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens invoqués par la SARL Domigestion Pacifique ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 20 janvier 2020, la clôture d'instruction a été fixée au 14 février 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des impôts de la Polynésie française ;

- l'arrêté n° 1132 CM du 21 juillet 2009 fixant les modalités de représentation fiscale en Polynésie française ;

- le code de justice administrative ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La SARL Domigestion Pacifique relève appel du jugement n° 1700216 du 13 février 2018 par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à la décharge des compléments de taxe sur la valeur ajoutée auxquels elle a été assujettie au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 juin 2013.

2. D'une part, aux termes de l'article 340-1 du code des impôts de la Polynésie française : " Sont soumises à la taxe sur la valeur ajoutée les livraisons de biens et les prestations de service effectuées à titre onéreux par un assujetti ". Aux termes du premier alinéa de l'article 340-4 du même code : " Sont assujetties à la taxe sur la valeur ajoutée les personnes qui effectuent de manière indépendante une activité économique, quels que soient le statut juridique de ces personnes, leur résidence, le lieu de leur siège social, leur situation au regard des autres impôts et la forme ou la nature de leur intervention ". Aux termes de l'article 340-8 de ce code : " Les prestations de services sont imposables lorsque le service est utilisé en Polynésie française ou lorsque le bénéficiaire a en Polynésie française le siège de son activité ou un établissement stable pour lequel le service est rendu, sa résidence ou son domicile. Le bénéficiaire de la prestation s'entend du client direct du prestataire, quelle que soit la personne qui, en définitive, pourrait recueillir le bénéfice du service rendu. Les prestations de services de toute nature se rapportant à un immeuble sis en Polynésie française sont imposables en Polynésie française ".

3. D'autre part, aux termes de l'article 344-2 du code des impôts de la Polynésie française : " Lorsqu'une personne établie hors de Polynésie française y est redevable de la taxe sur la valeur ajoutée ou doit y accomplir des obligations déclaratives ou encore y recevoir des remboursements de crédit de taxe non imputable, elle est tenue de faire accréditer auprès de la direction des impôts et des contributions publiques, un représentant assujetti établi en Polynésie française qui s'engage à remplir les formalités lui incombant et, en cas d'opérations imposables, à acquitter la taxe à sa place. Dans le cadre de cette accréditation, elle peut en outre déclarer ce même représentant habilité à percevoir en son nom tout remboursement de taxe. (...) ". Il résulte de ces dispositions que les personnes établies hors de Polynésie française qui y sont redevables de la taxe sur la valeur ajoutée ou doivent y accomplir des obligations déclaratives, doivent accréditer auprès de la direction des impôts et des contributions publiques un représentant assujetti établi en Polynésie française qui s'engage à remplir les formalités lui incombant et, en cas d'opérations imposables, à acquitter la taxe à leur place. Conformément à l'article 8 de l'arrêté n° 1132 CM du 21 juillet 2009 susvisé, le représentant fiscal s'engager à remplir les formalités incombant au représenté, tenir la comptabilité de l'ensemble des opérations réputées réalisées en Polynésie française par le représenté et déposer les déclarations au titre des impôts, droits ou taxes auxquels ces opérations sont soumises.

4. Il résulte de l'instruction que la SARL Domigestion Pacifique, qui est une filiale de la société Domigestion, domiciliée à Paris, a son siège à Papeete et est le représentant fiscal de diverses sociétés métropolitaines dans le cadre d'opérations de défiscalisation dites " Girardin ". Elle a fait l'objet d'une procédure de redressement contradictoire à l'issue de laquelle des droits de taxe sur la valeur ajoutée lui ont été réclamés au titre de la période du 1er janvier 2010 au 30 juin 2013, motif pris que les prestations de services qu'elle réalisent sont utilisées en Polynésie française au sens des dispositions susrappelées de l'article 340-8 du code des impôts de la Polynésie française. La SARL Domigestion Pacifique soutient qu'elle ne facture aux sociétés de défiscalisation qu'elle représente que des prestations de service administratif liées à la représentation fiscale et que, si le service est réalisé en Polynésie française, il n'est utilisé qu'en métropole, dès lors qu'il vise à permettre aux associés des sociétés de défiscalisation de bénéficier de la réduction d'impôt accordée et financée par l'Etat et à ces sociétés de réaliser leur objet social. Toutefois, outre le fait qu'il résulte de l'instruction que la SARL Domigestion Pacifique assure localement, pour le compte de ses clientes métropolitaines, le suivi des dossiers d'investissement, et notamment la signature des contrats d'investissement, voire la recherche d'exploitants locaux, la seule circonstance qu'elle effectue, pour leur compte, les formalités qu'elles sont tenues d'accomplir auprès des services fiscaux de la Polynésie Française, suffit à la rendre redevable de la taxe sur la valeur ajoutée, dès lors que le service ainsi rendu est utilisé par ses clients directs, à savoir les sociétés de défiscalisation, auprès des services fiscaux polynésiens, donc nécessairement en Polynésie française. Ainsi, les prestations réalisées par la société requérante et ayant notamment consisté à accomplir l'ensemble des obligations déclaratives de ses mandants auprès du service des contributions de la Polynésie française et à acquitter en leur nom la taxe sur la valeur ajoutée dont ils sont redevables, ont bien été utilisées sur le territoire de la Polynésie française au sens des dispositions précitées de l'article 340-8. C'est donc à bon droit que la Polynésie française a imposé la SARL Domigestion Pacifique à la taxe sur la valeur ajoutée au titre de ces prestations de services.

5. Il résulte de tout ce qui précède que la SARL Domigestion Pacifique n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande. Les conclusions à fin de décharge présentées par la SARL Domigestion Pacifique devant la Cour doivent être rejetées. Il en va de même, par voie de conséquence, de celles qu'elle présente au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. En revanche, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à sa charge une somme de 1 500 euros à verser à la Polynésie française sur le fondement des mêmes dispositions.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la SARL Domigestion Pacifique est rejetée.

Article 2 : La SARL Domigestion Pacifique versera à la Polynésie française une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SARL Domigestion Pacifique et au gouvernement de la Polynésie française.

Copie en sera adressée au ministre des Outre-mer.

Délibéré après l'audience du 11 mars 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- Mme D..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 13 mai 2020.

Le président de la 2ème chambre,

I. BROTONS

La République mande et ordonne au haut-commissaire de la République en Polynésie française en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA01260


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01260
Date de la décision : 13/05/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : SELARL PIRIOU QUINQUIS BAMBRIDGE-BABIN

Origine de la décision
Date de l'import : 02/06/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-05-13;18pa01260 ?
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