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27/02/2020 | FRANCE | N°18PA03127

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 27 février 2020, 18PA03127


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Sporting Club Bastiais a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 12 juillet 2017 par laquelle la commission d'appel de la direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) de la Fédération française de football (FFF) a confirmé la décision du 22 juin 2017 par laquelle la commission de contrôle des clubs professionnels de la Ligue de football professionnel a prononcé la rétrogradation de l'équipe première du Sporting Club de Bastia en championnat de National 1

l'issue de la saison 2016/2017.

Par un jugement n° 1711832/6-1 du 27 juil...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

L'association Sporting Club Bastiais a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 12 juillet 2017 par laquelle la commission d'appel de la direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) de la Fédération française de football (FFF) a confirmé la décision du 22 juin 2017 par laquelle la commission de contrôle des clubs professionnels de la Ligue de football professionnel a prononcé la rétrogradation de l'équipe première du Sporting Club de Bastia en championnat de National 1 à l'issue de la saison 2016/2017.

Par un jugement n° 1711832/6-1 du 27 juillet 2018, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, un mémoire et des pièces, enregistrés les 18 septembre 2018, 14 mai 2019 et 19 novembre 2019, l'association Sporting Club Bastiais, représentée par son président, représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Paris n° 1711832/6-1 du 27 juillet 2018 ;

2°) d'annuler la décision du 12 juillet 2017 par laquelle la commission d'appel de la direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) de la Fédération française de football (FFF) a confirmé la décision du 22 juin 2017 par laquelle la commission de contrôle des clubs professionnels de la Ligue de football professionnel a prononcé la rétrogradation de l'équipe première du Sporting Club de Bastia en championnat de National 1 à l'issue de la saison 2016/2017 ;

3°) subsidiairement de constater l'inopposabilité à l'association Sporting Club Bastiais de la décision du Comité exécutif de la Fédération Française de Football du 12 juillet 2017 ;

4°) de mettre à la charge de la FFF une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision attaquée porte atteinte au principe d'autonomie des personnes morales dès lors que la FFF l'a adressée à la SASP Sporting Club de Bastia et à l'association Sporting Club Bastia en une seule correspondance ;

- elle méconnaît l'article L. 132-2 du code du sport et le principe constitutionnel de la responsabilité personnelle de la faute en matière civile dès lors que la FFF n'avait pas le pouvoir de rétrograder l'association du fait de la situation financière de la SASP Sporting Club de Bastia alors que l'association a besoin de conserver son statut professionnel pour trouver une nouvelle SASP capable d'assurer sa pérennité ;

- elle méconnaît le principe de proportionnalité des peines en raison du caractère automatique de la rétrogradation du club du fait de la liquidation judiciaire de la SASP ;

- les articles 2 des statuts de la FFF et 234 alinéa 3 des règlements généraux de la Fédération Française de Football méconnaissent le principe de l'autonomie des personnes morales ;

- l'article 234.3 des règlements généraux de la FFF méconnaît les dispositions de l'article L. 122-18 du code du sport ;

- l'article 2 des statuts de la FFF méconnaît l'article L. 122-1 du code du sport ;

- la décision attaquée, non justifiée, est contraire à la pérennité de l'association ainsi qu'à toute équité ;

- elle lui est inopposable.

Par un mémoire en défense et des pièces, enregistrés les 18 avril et 21 novembre 2019, la Fédération française de football (FFF), représentée par la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, conclut au rejet de la requête et demande qu'il soit mis à la charge de l'association Sporting Club Bastiais la somme de 5 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du sport ;

- les statuts de la Fédération française de football ;

- les règlements généraux de la Fédération française de football ;

- la convention passée entre la FFF et la LFP portant règlement de la direction nationale du contrôle de gestion ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- les observations de Me A... pour l'association Sporting Club Bastiais,

- et les observations de Me C... de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre pour la Fédération française de football et la ligue de football professionnel.

Considérant ce qui suit :

1. Au cours de la saison 2016 / 2017, l'équipe première du Sporting Club de Bastia qui était alors gérée pour son aspect financier par la SASP Sporting Club de Bastia et par l'association Sporting Club Bastia pour son aspect sportif a participé au championnat de France de football de Ligue 1. Elle a été classée dernière à l'issue de cette saison et a été reléguée sportivement en Ligue 2. Elle a ensuite fait l'objet d'une décision de rétrogradation en championnat de National 1 par une décision du 22 juin 2017 de la commission de contrôle des clubs professionnels de la direction nationale du contrôle de gestion (DNCG) de la Fédération française de football (FFF) confirmée le 12 juillet 2017 par la commission d'appel de la DNCG. Par la présente requête, l'association Sporting Club Bastiais relève appel du jugement n° 1711832/6-1 du 27 juillet 2018 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de la décision précitée de la commission d'appel de la DNCG du 12 juillet 2017.

Sur le bien-fondé du jugement :

2. Aux termes de l'article 2 des statuts de la FFF : " 1. La Fédération comprend des groupements sportifs, dénommés ci-après "Clubs", composés des associations déclarées selon la loi du 1er juillet 1901 ou du droit civil local dans les départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle ainsi que, le cas échéant, des sociétés constituées conformément aux dispositions du Code du Sport (...) ". En vertu de l'article L. 122-1 du code du sport : " Toute association sportive affiliée à une fédération sportive, qui participe habituellement à l'organisation de manifestations sportives payantes qui lui procurent des recettes d'un montant supérieur à un seuil fixé par décret en Conseil d'Etat ou qui emploie des sportifs dont le montant total des rémunérations excède un chiffre fixé par décret en Conseil d'Etat, constitue pour la gestion de ces activités une société commerciale soumise au code de commerce. Une association sportive dont le montant des recettes et le montant des rémunérations mentionnées au premier alinéa sont inférieurs aux seuils visés au même alinéa peut également constituer une société sportive pour la gestion de ses activités payantes, dans les conditions prévues à la présente section. " L'article L. 122-2 du code du sport prévoit que " La société sportive prend la forme (...) 3° (Soit) d'une société anonyme sportive professionnelle (...) ". Aux termes de l'article L. 122-14 du code du sport, dans sa rédaction applicable en l'espèce : " L'association sportive et la société qu'elle a constituée définissent leurs relations par une convention approuvée par leurs instances statutaires respectives ".

3. En premier lieu, il est constant que la décision attaquée a été notifiée par un courrier adressé aux présidents de " l'association et [de la] SASP Sporting Club de Bastia ". Par suite, l'association requérante, qui a d'ailleurs produit ladite décision à l'appui de ses écritures, ne peut utilement soutenir qu'elle ne lui serait pas opposable. Par ailleurs, la circonstance que cette décision ait été notifiée à deux destinataires en même temps est, en tout état de cause, insusceptible d'avoir une incidence sur sa légalité. Les moyens tirés de ce que les conditions de notification de la décision attaquée porteraient atteinte au principe d'autonomie des personnes morales et de l'absence de caractère opposable de cette décision ne peuvent donc qu'être écartés.

4. En deuxième lieu, d'une part, aux termes de l'article L. 132-2 du code du sport : " En vue d'assurer la pérennité des associations et sociétés sportives, de favoriser le respect de l'équité sportive et de contribuer à la régulation économique des compétitions, les fédérations qui ont constitué une ligue professionnelle créent en leur sein un organisme, doté d'un pouvoir d'appréciation indépendant, habilité à saisir les organes disciplinaires compétents et ayant pour missions : 1° D'assurer le contrôle administratif, juridique et financier des associations et sociétés sportives qui sont membres de la fédération ou de la ligue professionnelle ou sollicitent l'adhésion à la fédération ou à la ligue (...) ". Aux termes de l'article 2 des statuts de la Fédération : " 1. La Fédération comprend des groupements sportifs, dénommés ci-après " Clubs ", composés des associations déclarées selon la loi du 1er juillet 1901 (...) ainsi que, le cas échéant, des sociétés constituées conformément aux dispositions du Code du Sport. ".

5. D'autre part, aux termes de l'article 7 de la convention alors en vigueur passée entre la FFF et la Ligue de football professionnel (LFP), ces dernières " assurent le contrôle de la gestion financière des clubs professionnels au moyen de la direction nationale du contrôle de gestion, dont le règlement figure en annexe de la présente convention ". L'article 11 du règlement de la DNCG figurant à l'annexe de cette convention prévoit que les commissions constituées au sein de la DNCG ont notamment compétence pour " examiner la situation financière des clubs (...) examiner et apprécier la situation des clubs et le cas échéant, appliquer l'une ou plusieurs des mesures suivantes : / 1. Interdiction de recruter de nouveaux joueurs sous contrat. (...) / 2. Recrutement contrôlé dans le cadre d'un budget prévisionnel ou d'une masse salariale prévisionnelle limitée (les contrats et avenants sont soumis avant homologation à une décision de la DNCG) / 3. Les mesures décrites aux paragraphes 1 et 2 sus-énoncés sont applicables pour toute la durée de la saison sportive considérée. (...). / 4. Limitation du nombre de joueurs mutés. / 5. Rétrogradation sportive. / 6. Interdiction d'accession sportive. / 6. Exclusion des compétitions (...) ".

6. L'article 11 précité du règlement de la DNCG laisse aux autorités compétentes de la LFP et de la FFF une latitude pour retenir la ou les mesures qui leur paraissent, parmi celles qu'il énumère, les mieux à même de remédier, dans le but de garantir la continuité et l'équité des compétitions, à la situation financière dégradée d'un club sans porter une atteinte excessive au bon déroulement des compétitions. Les mesures prises sur le fondement de cet article ne sont, ainsi, pas destinées à sanctionner un comportement fautif mais à garantir la continuité et l'équité des compétitions et ne constituent donc pas, contrairement à ce que soutient l'association requérante, des sanctions disciplinaires, mais des mesures de gestion, lesquelles peuvent se fonder sur la situation financière du club, intervenant dans le cadre de la mission de régulation administrative et des prérogatives de puissance publique de la FFF. Il s'en suit que, dès lors que la décision attaquée ne saurait être regardée comme une sanction disciplinaire, l'association requérante ne peut utilement invoquer le moyen tiré de ce que la décision attaquée méconnaîtrait le principe de proportionnalité des peines en raison du caractère automatique de la rétrogradation du club du fait de la liquidation judiciaire de la SASP.

7. Il résulte des termes mêmes de l'article 11 précité du règlement de la DNCG que la mesure de rétrogradation sportive est bien au nombre de celles dont la DNCG peut faire application si la situation du club concerné l'exige et doit être regardée comme l'une des mesures dont le prononcé est permis en application de l'article L. 132-2 du code du sport pour favoriser le respect de l'équité sportive et contribuer à la régulation économique des compétitions. Or, contrairement à ce que soutient l'association requérante, cette mesure a été décidée par la DNCG non pas à l'encontre de l'association Sporting Club Bastiais mais du groupement sportif correspondant à l'équipe première du Sporting Club de Bastia géré comme il l'a été rappelé au point 1 du présent arrêt pour son aspect financier par la SASP Sporting Club de Bastia et pour son aspect sportif par l'association requérante. Par suite, le moyen selon lequel la décision attaquée méconnaîtrait l'article L. 132-2 du code du sport et le principe constitutionnel de la responsabilité personnelle de la faute en matière civile ne peut, en tout état de cause, qu'être écarté.

8. Enfin, si l'association requérante soutient que la décision attaquée n'est pas justifiée et est contraire à la pérennité de l'association ainsi qu'à toute équité, elle n'apporte à l'appui de son moyen aucun élément de nature à démontrer que la situation financière de la SASP Sporting Club de Bastia ne justifiait pas la rétrogradation de l'équipe première du Sporting Club de Bastia.

9. En troisième lieu, si l'association requérante soutient que les articles 2 des statuts de la FFF et 234 alinéa 3 des règlements généraux de la FFF méconnaissent le principe de l'autonomie des personnes morales et que l'article 234.3 des règlements généraux de la FFF méconnait les dispositions de l'article L. 122-18 du code du sport, elle n'assortit, en tout état de cause, pas ces moyens des précisions suffisantes permettant d'en apprécier le bien-fondé.

10. En dernier lieu, dès lors que l'association Sporting Club Bastiais dont l'existence est prévue par l'article L. 122-1 du code du sport et la SASP Sporting Club de Bastia sont les deux entités solidaires qui constituent le club au sens de l'article 2 des statuts de la FFF, le moyen selon lequel l'article 2 des statuts de la FFF méconnaîtrait l'article L. 122-1 du code du sport n'est, en tout état de cause, pas fondé.

11. Par suite, il résulte de ce qui précède que l'association Sporting Club Bastiais n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision attaquée en date du 16 août 2017 portant mesures de réaffectation des droits sportifs du club.

Sur les conclusions tendant à la constatation de l'inopposabilité à l'association Sporting Club Bastiais de la décision du Comité exécutif de la Fédération Française de Football du 12 juillet 2017 :

12. Dès lors qu'il n'appartient, en tout état de cause, pas à la Cour de constater l'inopposabilité à l'association Sporting Club Bastiais de la décision du Comité exécutif de la Fédération Française de Football du 12 juillet 2017, les conclusions en ce sens de l'association Sporting Club Bastiais ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de la FFF, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par l'association requérante au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'association Sporting Club Bastiais une somme de 1 500 euros à verser à la FFF au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de l'association Sporting Club Bastiais est rejetée.

Article 2 : L'association Sporting Club Bastiais versera à la Fédération française de football une somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Sporting Club Bastiais, à la Fédération française de football et à la ligue de football professionnel.

Copie en sera adressée pour information au comité national olympique et sportif français et à la Selarl BRMJ en qualité de liquidateur de la SASP Sporting Club de Bastia.

Délibéré après l'audience du 30 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme B..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 27 février 2020.

Le rapporteur,

A. B...Le président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

Y. HERBERLa République mande et ordonne à la ministre des sports en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 18PA03127


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03127
Date de la décision : 27/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

63-05-01 Sports et jeux. Sports. Fédérations sportives.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Aude COLLET
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : AKNIN

Origine de la décision
Date de l'import : 04/03/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-02-27;18pa03127 ?
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