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11/02/2020 | FRANCE | N°18PA02457

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 11 février 2020, 18PA02457


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL LTF a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1505096 du 25 mai 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2018, la SARL LTF, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1505096 du 25

mai 2018 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge de cette imposition ;

3°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SARL LTF a demandé au Tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge de la cotisation supplémentaire d'impôt sur les sociétés auxquelles elle a été assujettie au titre de l'année 2011.

Par un jugement n° 1505096 du 25 mai 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 juillet 2018, la SARL LTF, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1505096 du 25 mai 2018 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge de cette imposition ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- elle exerce à titre principal une activité de vente au sein du territoire de la zone franche urbaine ;

- son unique salarié exerce l'essentiel de son activité au sein de cette zone franche ;

- l'acquisition en crédit-bail de véhicules constitue une charge déductible, y compris si elle est qualifiée d'avantages en nature ;

- le service n'établit pas que les primes et gratifications ainsi que les charges sociales correspondantes ne sont pas déductibles ;

- les pénalités et intérêts de retard ne sont pas motivés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 7 janvier 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par la SARL LTF ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société LTF, qui exerce une activité de commercialisation et de pose de portes, fenêtres, châssis métalliques et autres huisseries, a situé son siège social, depuis le 7 janvier 2009, au 7, rue de la Maison Garnier à Montereau-Fault-Yonne, dans le périmètre d'une zone franche urbaine. A la suite d'une vérification de comptabilité au titre de la période du 1er janvier 2010 au 31 décembre 2011, par une proposition de rectification du 19 juin 2013, le service vérificateur lui a notifié trois chefs de rectifications concernant l'exonération d'impôt sur les sociétés pour les bénéfices réalisés par les sociétés implantées en zone franche urbaine, prévue par l'article 44 octies A du code général des impôts, remise en cause à hauteur de 89 359 euros, des charges non engagées dans l'intérêt de la société à hauteur de 38 154 euros et des charges de personnel non justifiées à hauteur de 21 300 euros. Elle fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à la décharge, en droits et pénalités, de la cotisation supplémentaire à l'impôt sur les sociétés procédant de ces rectifications.

Sur le bien fondé de l'imposition :

En ce qui concerne le bénéfice de l'exonération pour exercice en zone franche urbaine :

2. Aux termes de l'article 44 octies A du code général des impôts dans sa version applicable : " I.- Les contribuables qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2011, créent des activités dans les zones franches urbaines définies au B du 3 de l'article 42 de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, ainsi que ceux qui, entre le 1er janvier 2006 et le 31 décembre 2011, exercent des activités dans les zones franches urbaines définies au deuxième alinéa du B du 3 de l'article 42 de la même loi sont exonérés d'impôt sur le revenu ou d'impôt sur les sociétés à raison des bénéfices provenant des activités implantées dans la zone jusqu'au 31 décembre 2010 pour les contribuables qui y exercent déjà une activité au 1er janvier 2006 ou, dans le cas contraire, jusqu'au terme du cinquante-neuvième mois suivant celui du début de leur activité dans l'une de ces zones. Ces bénéfices sont soumis à l'impôt sur le revenu ou à l'impôt sur les sociétés à concurrence de 40 %, 60 % ou 80 % de leur montant selon qu'ils sont réalisés respectivement au cours des cinq premières, de la sixième et septième ou de la huitième et neuvième périodes de douze mois suivant cette période d'exonération. (...) Lorsque l'activité non sédentaire d'un contribuable est implantée dans une zone franche urbaine mais est exercée en tout ou partie en dehors d'une telle zone, l'exonération s'applique si ce contribuable emploie au moins un salarié sédentaire à temps plein ou équivalent, exerçant ses fonctions dans les locaux affectés à l'activité, ou si ce contribuable réalise au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines. (...) ".

3. Sous réserve des cas où la loi attribue la charge de la preuve au contribuable, il appartient au juge de l'impôt, au vu de l'instruction et compte tenu, le cas échéant, de l'abstention d'une des parties à produire les éléments qu'elle est seule en mesure d'apporter et qui ne sauraient être réclamés qu'à elle-même, d'apprécier, pour chacune des périodes au titre desquelles un contribuable revendique le bénéfice d'une exonération, s'il remplit les conditions légales pour bénéficier de cette exonération ou s'il doit être, au contraire, assujetti à l'impôt sur les sociétés.

4. En premier lieu il résulte de l'instruction, et notamment des contrats et factures présentés par la société LTF lors de la vérification de comptabilité, qu'au cours de la période en cause elle a réalisé 88 % de son chiffre d'affaires, dans le cadre de contrats de sous-traitance, sur deux chantiers situés dans les départements du Val-de-Marne et des Hauts-de-Seine, hors de toute zone franche urbaine. En se bornant à faire valoir que son activité principale est constituée par la vente, réalisée en zone franche urbaine, et non la pose d'huisseries, sans l'établir dès lors que ses factures ne distinguent pas entre ces deux prestations, la société LTF, qui exerce une activité non sédentaire au sens des dispositions citées au point 2, n'établit pas qu'elle remplirait la condition d'exonération tenant à la réalisation d'au moins 25 % de son chiffre d'affaires auprès de clients situés dans les zones franches urbaines.

5. En second lieu la société LTF, qui seule peut en rapporter la preuve, n'établit pas par ses seules affirmations qu'au cours de l'exercice 2011, où comme il a été dit elle a réalisé la majorité de son chiffre d'affaires en dehors de la zone franche urbaine, son unique employé, exerçant les fonctions de directeur technique et bénéficiant de trois véhicules mis à disposition, aurait exercé à temps plein des fonctions sédentaires dans les locaux situés en zone franche urbaine.

6. Il résulte de ce qui précède que la société LTF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que le Tribunal administratif de Melun a considéré qu'elle ne remplissait, au titre de l'année 2011, aucune des deux conditions alternatives pour bénéficier de l'exonération prévue par l'article 44 octies A du code général des impôts au profit des entreprises exerçant une activité non sédentaire.

En ce qui concerne les charges déductibles :

7. Aux termes du 2 de l'article 38 du code général des impôts : " Le bénéfice net est constitué par la différence entre les valeurs de l'actif net à la clôture et à l'ouverture de la période dont les résultats doivent servir de base à l'impôt diminuée des suppléments d'apport et augmentée des prélèvements effectués au cours de cette période par l'exploitant ou par les associés. L'actif net s'entend de l'excédent des valeurs d'actif sur le total formé au passif par les créances des tiers, les amortissements et les provisions justifiés ". Aux termes de l'article 39 du même code : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : / 1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'oeuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. / Toutefois les rémunérations ne sont admises en déduction des résultats que dans la mesure où elles correspondent à un travail effectif et ne sont pas excessives eu égard à l'importance du service rendu. Cette disposition s'applique à toutes les rémunérations directes ou indirectes, y compris les indemnités, allocations, avantages en nature et remboursements de frais. (...) ".

8. En vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, s'il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable de justifier tant du montant des charges qu'il entend, en application du I de l'article 39 du code général des impôts précité, déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du même code que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

9. Pour contester le rejet, par l'administration, de la déductibilité de charges correspondant, d'une part, aux loyers versés pour le crédit-bail de deux véhicules de tourisme et, d'autre part, aux primes et gratifications ainsi que les cotisations sociales afférentes, versées à son personnel, la société LTF se borne en appel comme en première instance à soutenir que ces sommes ont bien été à sa charge et que l'administration n'indique pas en quoi elles pourraient être remises en cause. Dans ces conditions il y a lieu, par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges, d'écarter ces moyens.

Sur les pénalités et les intérêts :

10. Aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 relative à la motivation des actes administratifs et à l'amélioration des relations entre l'administration et le public, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable. (...) ".

11. La proposition de rectification du 19 juin 2013 indique que les cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquelles la requérante a été assujettie au titre de l'année 2011 ont été assorties de la majoration de 40 % prévue à l'article 1729 a du code général des impôts. Dès lors qu'elle a repris les termes de cet article et précisé le taux de la majoration appliquée, son assiette, ainsi que son fondement juridique, cette pièce de procédure doit être regardée comme ayant répondu aux exigences posées par l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales. Le moyen tiré de ce qu'elle serait insuffisamment motivée doit dès lors être écarté.

12. Aux termes du I de l'article 1727 du code général des impôts : " Toute somme, dont l'établissement ou le recouvrement incombe à la direction générale des impôts, qui n'a pas été acquittée dans le délai légal donne lieu au versement d'un intérêt de retard ". La mise à la charge d'un contribuable d'intérêts de retard, qui ne constitue pas une sanction, n'est pas au nombre des décisions qui doivent être motivées. Par suite le moyen tiré de ce que l'application des intérêts de retard n'a pas été motivée ne peut qu'être écarté.

13. Il résulte de ce qui précède que la société LTF n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la SARL LTF est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société à responsabilité limitée LTF et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle fiscal parisien 1).

Délibéré après l'audience du 28 janvier 2020, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme A..., président assesseur,

- Mme Oriol, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 11 février 2020.

Le rapporteur,

P. A...

Le président,

C. JARDINLe greffier,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA02457


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02457
Date de la décision : 11/02/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-01-04-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Règles générales. Impôt sur les bénéfices des sociétés et autres personnes morales. Exonérations.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : FELDMAN

Origine de la décision
Date de l'import : 18/02/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-02-11;18pa02457 ?
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