Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. D... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la réduction des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales auxquels il a été assujetti au titre de l'année 2009, ensemble les majorations y afférentes.
Par un jugement n° 1611529 du 30 mai 2018, le Tribunal administratif de Paris a réduit le résultat imposable de la société civile Newpharm au titre de l'année 2009 de 213 574 euros et celui de la société civile Pharmatop de 111 073 euros et a accordé à M. B... la réduction correspondante des cotisations supplémentaires d'impôt sur les revenus et de contributions sociales mises à sa charge.
Procédure devant la Cour :
Par un recours enregistré le 25 septembre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour :
1°) d'annuler le jugement n° 1611529 du Tribunal administratif de Paris du 30 mai 2018 ;
2°) de rétablir M. B... au rôle de l'impôt sur le revenu et des contributions sociales au titre de l'année 2009, à raison des droits et pénalités dont la décharge a été prononcée par le Tribunal.
Le ministre de l'action et des comptes publics soutient que c'est à tort que les premiers juges ont prononcé la réduction des impositions en litige, dès lors que :
- les revenus des sociétés civiles soumises au régime fiscal des sociétés de personnes tirés de l'exploitation de brevets pharmaceutiques relèvent de la catégorie des bénéfices non commerciaux et sont soumis à l'impôt sur le revenu au nom de leurs associés au taux proportionnel des plus-values professionnelles à long terme ;
- s'ils relèvent de la contribution sociale généralisée (CSG) sur les revenus du patrimoine prévue à l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, ces revenus proviennent néanmoins d'une activité professionnelle et sont imposables sur le fondement du e) du I de cet article et non sur le fondement du f) ;
- en conséquence, en application du II de l'article 154 quinquies du code général des impôts, ces revenus sont exclus du champ de la déductibilité partielle de la CSG.
Par un mémoire en défense, enregistré le 24 février 2019, M. B..., représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête.
Il soutient que les moyens soulevés par le ministre de l'action et des comptes publics ne sont pas fondés.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de la sécurité sociale ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. A...,
- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. Les sociétés civiles Newpharm et Pharmatop, dont M. B... est associé, exploitent des brevets pharmaceutiques. A l'issue d'un contrôle sur pièces, le service a remis en cause la déduction partielle de la contribution sociale généralisée (CSG) qu'elles avaient l'une et l'autre opérée, au titre de l'année 2009, pour des montants respectifs de 213 574 euros et 111 073 euros.
Ces deux sociétés relevant de l'article 8 du code général des impôts, des suppléments d'impôt sur le revenu et de contributions sociales ont été mis à la charge de M. B... au titre de l'année 2009, à concurrence de sa quote-part de droits dans chacune des sociétés précitées. Le ministre de l'action et des comptes publics demande à la Cour d'annuler le jugement du 30 mai 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a réduit le résultat imposable de la société civile Newpharm au titre de l'année 2009 de 213 574 euros et celui de la société civile Pharmatop de 111 073 euros et a accordé à M. B... la réduction correspondante des cotisations supplémentaires d'impôt sur les revenus et de contributions sociales mises à sa charge.
Sur le bien-fondé des impositions :
2. D'une part, aux termes de l'article 92 du code général des impôts : " 1. Sont considérés comme provenant de l'exercice d'une profession non commerciale ou comme revenus assimilés aux bénéfices non commerciaux, les bénéfices des professions libérales, des charges et offices dont les titulaires n'ont pas la qualité de commerçants et de toutes occupations, exploitations lucratives et sources de profits ne se rattachant pas à une autre catégorie de bénéfices ou de revenus. 2. Ces bénéfices comprennent notamment : (...) 3° Les produits perçus par les inventeurs au titre soit de la concession de licences d'exploitation de leurs brevets, soit de la cession ou concession de marques de fabrique, procédés ou formules de fabrication (...) ".
Aux termes de l'article 93 quater dudit code : " I. Les plus-values réalisées sur des immobilisations sont soumises au régime des articles 39 duodecies à 39 quindecies. Ce régime est également applicable aux produits de la propriété industrielle définis à l'article 39 terdecies quelle que soit la qualité de leur bénéficiaire (...) ". Aux termes de l'article 39 terdecies du même code : " 1. Le régime des plus-values à long terme est applicable aux plus-values de cession de brevets (...) ainsi qu'au résultat net de la concession de licences d'exploitation des mêmes éléments (...) ". Aux termes de l'article 39 quindecies du même code : " I. 1 (...) le montant net des plus-values à long terme fait l'objet d'une imposition séparée au taux de 16 % (...) ".
3. Il résulte de ces dispositions que les profits tirés de l'exploitation de brevets d'invention constituent des revenus passibles de l'impôt sur le revenu au titre des bénéfices non commerciaux quelles que soient les modalités particulières de leur imposition.
4. D'autre part, aux termes de l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale : " Il est institué une contribution sociale sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement à laquelle sont assujettis : / 1° Les personnes physiques qui sont à la fois considérées comme domiciliées en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et à la charge, à quelque titre que ce soit, d'un régime obligatoire français d'assurance maladie (...) ". Aux termes de l'article L. 136-3 du même code, dans sa rédaction alors applicable, relatif à la contribution sociale sur les revenus d'activité et sur les revenus de remplacement : " Sont soumis à la contribution les revenus professionnels des employeurs et travailleurs indépendants au sens de l'article L. 242-11 (...) ". Aux termes de l'article L. 242-11 de ce code, dans sa rédaction
alors applicable : " Les cotisations d'allocations familiales des employeurs et travailleurs indépendants sont calculées conformément aux dispositions de l'article L. 131-6 (...) ".
Aux termes de l'article L. 131-6 de ce code, dans sa rédaction alors applicable : " Les cotisations d'assurance maladie et maternité et d'allocations familiales des travailleurs non salariés non agricoles et les cotisations d'assurance vieillesse des professions artisanales, industrielles ou commerciales sont assises sur le revenu professionnel non salarié ou, le cas échéant, sur des revenus forfaitaires. Le revenu d'activité pris en compte est déterminé par référence à celui retenu pour le calcul de l'impôt sur le revenu (...). Il n'est pas tenu compte (...) des plus-values et moins-values professionnelles à long terme (...) ". Aux termes des dispositions de l'article
L. 136-6 du code de la sécurité sociale : " I. - Les personnes physiques fiscalement domiciliées en France au sens de l'article 4 B du code général des impôts sont assujetties à une contribution sur les revenus du patrimoine assise sur le montant net retenu pour l'établissement de l'impôt sur le revenu (...) e) Des plus-values (...) soumis à l'impôt sur le revenu à un taux proportionnel (...) ; f) De tous revenus qui entrent dans la catégorie (...) des bénéfices non commerciaux (...) au sens du code général des impôts, à l'exception de ceux qui sont assujettis à la contribution sur les revenus d'activité et de remplacement définie aux articles L. 136-1 à L. 136-5. (...) ".
5. Il résulte des dispositions précitées que les travailleurs indépendants, considérés comme domiciliés en France pour l'établissement de l'impôt sur le revenu et à la charge, à quelque titre que ce soit, d'un régime obligatoire français d'assurance maladie, sont assujettis, sur les revenus tirés de leur activité, à la contribution sociale sur les revenus d'activité et de remplacement, dont l'assiette est, en ce qui les concerne, fixée à l'article L. 131-6 du code de la sécurité sociale. Il s'en déduit que ces mêmes revenus ne peuvent être inclus dans l'assiette de la contribution sur les revenus du patrimoine définie par les dispositions précitées de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale.
6. Il résulte de l'instruction que les revenus qui procèdent de l'exploitation de brevets pharmaceutiques par les sociétés civiles Newpharm et Pharmatop doivent être considérés, pour leur quote-part lui revenant, comme la rémunération d'une activité professionnelle non salariée exercée par M. B.... Dès lors, M. B... est assujetti à la contribution sociale sur les revenus d'activité et de remplacement, pour les revenus tirés de cette activité qui entrent dans le champ d'application de l'article L. 136-3 du code de la sécurité sociale, peu important leur régime fiscal. Si les plus-values professionnelles à long-terme sont, en application des dispositions des articles L. 242-11 et L. 131-6 auxquels renvoie l'article L. 136-3 dudit code, exclues de l'assiette de la contribution sociale sur les revenus d'activité et de remplacement, les revenus en cause constituent des bénéfices non commerciaux quand bien mêmes ils ont été imposés entre les mains de M. B... suivant le régime des plus-values à long terme en application des dispositions précitées des articles 92, 39 terdecies et 93 quater du code général des impôts, leurs modalités d'imposition étant sans incidence sur la nature des revenus en cause. Ainsi, ces revenus ne peuvent pas être inclus dans l'assiette de la contribution sur les revenus du patrimoine définie par les dispositions de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale, alors même qu'ils ont été imposés entre les mains de M. B... dans la catégorie des bénéfices non commerciaux à un taux forfaitaire suivant le régime des plus-values à long terme.
7. Aux termes de l'article 154 quinquies du code général des impôts, dans sa rédaction applicable à l'année en litige : " I. Pour la détermination des bases d'imposition à l'impôt sur le revenu, la contribution prévue à l'article L. 136-1 du code de la sécurité sociale au titre des revenus d'activité et de remplacement est, à hauteur de 5,1 points (...) admise en déduction du montant brut des sommes payées et des avantages en nature ou en argent accordés, ou du bénéfice imposable, au titre desquels la contribution a été acquittée. II. La contribution afférente aux revenus mentionnés aux a, b, c et f du premier alinéa du I de l'article L. 136-6 du code de la sécurité sociale (...) est admise en déduction du revenu imposable de l'année de son paiement, à hauteur de 5,8 points (...) ".
8. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les revenus tirés par M. B... de l'exploitation de brevets pharmaceutiques étaient assujettis à la contribution prévue à l'article
L. 136-1 du code de la sécurité sociale au titre des revenus d'activité et de remplacement, laquelle est, en application des dispositions précitées de l'article 154 quinquies du code général des impôts, déductible à hauteur de 5,1 points. Il suit de là que les sociétés civiles Newpharm et Pharmatop étaient fondées à déduire la contribution sociale généralisée par elles acquittée au titre de l'année 2009, à raison des revenus litigieux à hauteur des montants non contestés de 213 574 euros pour la société Newpharm et de 111 073 euros pour la société Pharmatop.
9. Dans ces conditions, le ministre de l'action et des comptes publics n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a réduit le résultat imposable de la société civile Newpharm au titre de l'année 2009 de 213 574 euros et celui de la société civile Pharmatop de 111 073 euros et a accordé à M. B... la réduction correspondante des cotisations supplémentaires d'impôt sur les revenus et de contributions sociales mises à sa charge.
10. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
DÉCIDE :
Article 1er : Le recours du ministre de l'action et des comptes publics est rejeté.
Article 2 : L'État versera à M. B... une somme de 1 500 euros en application de l'article
L. 761-1 du code de justice administrative.
Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'action et des comptes publics et à M. D... B....
Délibéré après l'audience du 16 janvier 2020, à laquelle siégeaient :
- M. Formery, président de chambre,
- Mme Lescaut, premier conseiller,
- M. A..., premier conseiller.
Lu en audience publique, le 30 janvier 2020.
Le rapporteur,
F. A...Le président,
S.-L. FORMERY
Le greffier,
F. DUBUY
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA03179