Vu la procédure suivante :
Procédure contentieuse antérieure :
M. et Mme D... A... ont demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales, ainsi que des pénalités y afférentes, auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2011 et 2012.
Par un jugement n° 1708116/1-2 du 3 juillet 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.
Procédure devant la Cour :
Par une requête enregistrée le 3 septembre 2018, M. et Mme A..., représentés par
Me C..., demandent à la Cour :
1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 3 juillet 2018 ;
2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;
3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
Ils soutiennent que :
- le tribunal n'a pas répondu à leur principal argument ;
- la procédure de taxation d'office ne pouvait être mise en oeuvre dès lors qu'ils ont fourni les informations demandées par le service dans la mise en demeure du 5 août 2014 ;
- le deuxième alinéa de l'article L. 12 ne saurait avoir pour effet de permettre à l'administration d'interroger un contribuable sur l'origine de son patrimoine ;
- le vérificateur ne pouvait inclure dans la balance de trésorerie les sommes jouées au casino sans démontrer qu'il s'agissait de revenus acquis au cours des années d'imposition.
Par un mémoire en défense enregistré le 18 octobre 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.
Il soutient que :
- les moyens soulevés par M.et Mme A... ne sont pas fondés.
Par une ordonnance du 16 juillet 2019, la clôture de l'instruction a été fixée au
19 août 2019.
Vu les autres pièces du dossier.
Vu :
- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;
- le code de justice administrative.
Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.
Ont été entendus au cours de l'audience publique :
- le rapport de M. B...,
- et les conclusions de Mme Jimenez, rapporteur public.
Considérant ce qui suit :
1. A l'issue d'un examen contradictoire de leur situation fiscale personnelle, M. et
Mme A... ont été assujettis, au titre des années 2011 et 2012, à des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu et de contributions sociales. Ils relèvent appel du jugement du 3 juillet 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande en décharge de ces impositions.
2. Aux termes de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales : " En vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu, l'administration peut demander au contribuable des éclaircissements. Elle peut également lui demander des justifications lorsqu'elle a réuni des éléments permettant d'établir que le contribuable peut avoir des revenus plus importants que ceux qu'il a déclarés ". Aux termes du deuxième alinéa de l'article L. 16 A du même livre :
" Lorsque le contribuable a répondu de façon insuffisante aux demandes d'éclaircissements ou de justifications, l'administration lui adresse une mise en demeure d'avoir à compléter sa réponse dans un délai de trente jours en précisant les compléments de réponse qu'elle souhaite ". Aux termes de l'article L. 69 dudit livre : " sont taxés d'office à l'impôt sur le revenu les contribuables qui se sont abstenus de répondre aux demandes d'éclaircissements ou de justifications prévues à l'article L. 16 ".
3. En premier lieu, il appartient au juge de l'impôt de vérifier que les éléments invoqués par l'administration pour mettre en oeuvre les dispositions précitées constituaient des indices suffisants de dissimulation de revenus. Dans le cas où l'administration se fonde sur l'existence, dans la balance des espèces qu'elle dresse, d'un déséquilibre entre les ressources connues et les disponibilités employées, il incombe au juge de s'assurer que le solde ainsi établi présente un caractère significatif et ne résulte, ni d'une évaluation arbitraire des dépenses de train de vie, ni de l'inclusion dans les disponibilités engagées d'éléments de patrimoine dont rien ne permet de présumer l'acquisition au cours de la période vérifiée.
4. Il résulte de l'instruction que la balance d'espèces établie par le service présentait un solde créditeur de 220 673,50 et 28 627 euros respectivement au titre des années 2011 et 2012. Cette balance d'espèces prenait régulièrement en compte, au titre des disponibilités employées, et sur la base des extraits du registre des joueurs au nom du requérant communiqués au service vérificateur par le casino d'Enghien-les-Bains, les sommes engagées en espèces par M. A... au titre de l'acquisition de jetons. Les requérants ne peuvent utilement faire valoir que, de ce fait, le service les aurait, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales, interrogés sur l'origine de leur patrimoine, dès lors que le solde de leur balance espèces, régulièrement calculé ainsi qu'il vient d'être dit, constituait un indice sérieux de disposition de revenus non déclaré et pouvait en conséquence donner lieu à une demande de justifications. Dans ces conditions le moyen tiré de ce que les dispositions du deuxième alinéa de l'article L. 12 du même livre, aux termes desquelles : " A l'occasion de cet examen, l'administration peut contrôler la cohérence entre, d'une part les revenus déclarés et, d'autre part, la situation patrimoniale, la situation de trésorerie et les éléments du train de vie des membres du foyer fiscal " ne saurait autoriser le service à interroger un contribuable sur l'origine de son patrimoine ne peut qu'être écarté. Ainsi, les sommes litigieuses pouvaient être incluses dans les disponibilités employées de la balance des espèces, et le solde significatif de cette balance pouvait faire l'objet, de la part de l'administration, d'une demande de justifications sur le fondement de l'article L. 16 du livre des procédures fiscales.
5. En deuxième lieu, si les contribuables ont répondu le 22 juillet 2014 à la demande de justifications qui leur avait été adressée le 23 mai et s'ils ont, après mise en demeure à eux adressée le 5 août 2014, complété leur réponse par un courrier daté par erreur du 22 juillet 2014 puis par une lettre du 24 octobre 2014, il résulte de l'instruction qu'ils n'ont pas fourni d'éclaircissements suffisants sur l'origine des sommes constitutives du solde de la balance d'espèces établie par le service. En effet, s'ils ont invoqué, dans leur première réponse datée du
22 juillet 2014, l'existence d'une activité de prête-nom exercée par M. A... pour le compte de ressortissants chinois au casino d'Enghien, ils n'ont, pas plus dans cette réponse que dans celles qui ont suivi la mise en demeure du 5 août 2014, justifié de l'existence de cette activité ni du montant des sommes concernées par ladite activité. La circonstance qu'ils aient fournis, conformément à la demande qui leur avait été adressée le 5 août 2014, la copie d'une réponse du casino, qui ne fait d'ailleurs état d'aucune justification particulière, et des documents relatifs à l'existence d'une Association franco-chinoise d'import-export dont M. A... est le président, ne saurait suffire à faire regarder leurs réponses comme suffisantes au sens des dispositions précitées des articles L. 16 et L. 16 A du livre des procédures fiscales, dès lors que la mise en demeure susmentionnée ne concernait pas seulement la communication de ces documents, mais demandait également au contribuable les pièces justificatives permettant d'attester de la réalité de ses affirmations quant à l'origine des disponibilités utilisées par lui. C'est donc conformément aux dispositions précitées de l'article L. 69 du livre des procédures fiscales que l'administration a mis en oeuvre la procédure de taxation d'office.
6. Il résulte de ce qui précède que M. et Mme A... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, qui est suffisamment motivé, le Tribunal administratif de Paris a rejeté leur demande. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'Etat, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que les requérants demandent au titre des frais exposés par eux et non compris dans les dépens.
DECIDE :
Article 1er : La requête de M. et Mme A... est rejetée.
Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme A... D... et au ministre de l'action et des comptes publics.
Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.
Délibéré après l'audience du 11 décembre 2019, à laquelle siégeaient :
Mme Brotons, président de chambre,
Mme Appeche, président-assesseur,
M. B..., premier conseiller,
Lu en audience publique le 20 décembre 2019.
Le rapporteur,
F. B...Le président,
I. BROTONS
Le greffier,
S. DALL'AVA
La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.
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N° 18PA02956