La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

20/12/2019 | FRANCE | N°18PA02430

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 20 décembre 2019, 18PA02430


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 15 juillet 2016 par lequel le recteur de l'académie de Paris lui a infligé la sanction disciplinaire du déplacement d'office.

Par un jugement n° 1611891/5-3 du 2 mai 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 18 juillet 2018, le 27 septembre 2018 et le 21 juin 2019, M. E... C..., représenté par Me A...

I..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1611891/5-3 du 2 mai 2018 du Tribunal ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. E... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 15 juillet 2016 par lequel le recteur de l'académie de Paris lui a infligé la sanction disciplinaire du déplacement d'office.

Par un jugement n° 1611891/5-3 du 2 mai 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 18 juillet 2018, le 27 septembre 2018 et le 21 juin 2019, M. E... C..., représenté par Me A... I..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1611891/5-3 du 2 mai 2018 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 15 juillet 2016 du recteur de l'académie de Paris ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- l'administration n'apporte pas la preuve à sa charge des faits qui lui sont reprochés ; la preuve de ces faits ne peut pas résulter de simples témoignages mais doit reposer sur des constatations matérielles ; les griefs ne résultent que d'allégations qui ne sont pas assorties des précisions permettant au juge d'en apprécier la matérialité, le degré de gravité, ni la proportionnalité de la sanction ;

- les témoignages produits ne sont pas probants, ni le procès-verbal du conseil de discipline ;

- les griefs retenus et la sanction de déplacement d'office sont les représailles à la révélation par ses soins de violations du code des marchés publics et des règles de mise en concurrence par d'autres services du S.I.E.C. ;

- la sanction disciplinaire de déplacement d'office est disproportionnée au regard des faits reprochés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 16 mai 2019, le ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens du requérant ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires ;

- la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G...,

- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.

1. M. E... C..., attaché principal de la fonction publique d'Etat, exerçait les fonctions de chef de service du département financier du service inter-académique des examens et concours (S.I.E.C.) à Créteil, où il est en poste depuis l'année 2006. Par un arrêté du 15 juillet 2016, le recteur de l'académie de Paris lui a infligé la sanction disciplinaire de déplacement d'office dans l'académie de Paris avec effet au 1er septembre 2016. Son recours gracieux du 21 juillet 2016 contre cette sanction a été rejeté par décision du 25 juillet 2016 du recteur de l'académie de Paris. En exécution de cette sanction, M. C... a été affecté sur le poste de gestionnaire comptable du lycée Paul Valéry à Paris. Il relève appel du jugement du 2 mai 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 15 juillet 2016 du recteur de l'académie de Paris.

2. Aux termes de l'article 29 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 : " Toute faute commise par un fonctionnaire dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions l'expose à une sanction disciplinaire (...) ". En vertu de l'article 66 de la loi du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, les sanctions disciplinaires susceptibles d'être infligées aux fonctionnaires de l'Etat sont réparties en quatre groupes : relèvent du premier groupe les sanctions de l'avertissement et du blâme, du deuxième groupe celles de la radiation du tableau d'avancement, de l'abaissement d'échelon, de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée maximale de quinze jours et du déplacement d'office, du troisième groupe celles de la rétrogradation et de l'exclusion temporaire de fonctions pour une durée de trois mois à deux ans et, enfin, du quatrième groupe celles de la mise à la retraite d'office et de la révocation.

3. En premier lieu, il appartient à l'autorité qui exerce le pouvoir disciplinaire d'établir la réalité des griefs qu'elle retient pour fonder la sanction qu'elle inflige à l'un de ses agents.

4. L'arrêté prononçant le déplacement d'office de M. C... est motivé par les circonstances que " M. C... a tenu des propos irrespectueux et agressifs ainsi que des critiques répétées mettant en cause de manière grave la direction du SIEC ainsi que plusieurs personnels d'encadrement du service ", qu'il a " refusé de participer dans les conditions validées par la direction du SIEC à l'audit de renouvellement de la certification qualité le 11 avril 2016, et a tenu au cours de cet audit des propos remettant en cause les choix de la direction s'analysant comme un manquement au devoir de réserve et de loyauté " et que " il ressort des témoignages de M. B..., Mme H..., Mme F... et Mme D... que M. C... agit de manière préjudiciable au bon fonctionnement du service ".

5. Il ressort des pièces du dossier, notamment du rapport disciplinaire en date du 22 avril 2016 élaboré par le directeur du S.I.E.C. à l'attention du recteur de l'académie de Paris et des témoignages précis, détaillés et concordants de personnels d'encadrement que M. C... avait, dans ses relations professionnelles avec ses supérieurs et ses collègues, pris l'habitude d'émettre de manière fréquente, y compris en public, des propos méprisants et diffamatoires à l'encontre d'autres agents, et qu'à partir des 7 et 8 avril, après avoir appris qu'il n'avait pas bénéficié d'un avancement espéré, il a adopté un comportement incorrect et agressif à l'encontre de sa hiérarchie et que son comportement a atteint une gravité suffisante pour nuire au fonctionnement normal du service, en raison des conséquences du comportement conflictuel de M. C... sur les conditions de travail de certains agents. Notamment, le directeur du S.I.E.C. a informé le recteur de l'académie de Paris que " le comportement violent de M. C..., notamment les 7 et 8 avril 2016, peut laisser craindre des actes violents de sa part " et " ses propos sont par ailleurs devenus menaçants, de sorte que je me vois contraint de protéger les personnes visées par ses attaques ". Par ailleurs, il résulte des termes du procès-verbal de la commission administrative paritaire académique compétente à l'égard des attachés d'administration siégeant en formation disciplinaire que M. C... n'a pas contesté sérieusement devant le conseil de discipline les propos et la violence verbale qui lui sont imputés aux dates des 7 et 8 avril 2016, se bornant à faire valoir ne pas se souvenir de ce qu'il avait dit et à opposer l'absence de preuve écrite, le procès-verbal mentionnant que : " M. C... indique qu'il se base sur des écrits et nie la matérialité des faits qui lui sont reprochés, ceux-ci n'ayant pas été formulés par écrit " et " M. C... dit ne plus se souvenir de la teneur des propos échangés les 7 et 8 avril 2016 et ajoute " si on reprend tout ce que les gens disent... ". Et s'il soutient que ses notations antérieures n'ont jamais mentionné les rapports conflictuels allégués, son compte rendu d'entretien professionnel de 2015 mentionne expressément " des difficultés relationnelles et à travailler en équipe ". Enfin, le fait que ses compétences professionnelles sont reconnues par ses notations et ne sont pas remises en cause est sans incidence. Il n'est en revanche pas établi par des éléments suffisamment précis et probants pour les tenir pour exacts que le requérant aurait manqué aux devoirs de réserve, de loyauté et d'obéissance dans le cadre de sa participation à l'audit de renouvellement de la certification ISO du service conduit du 11 au 13 avril 2016 par des intervenants extérieurs à l'administration.

6. En second lieu, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi de moyens en ce sens, de rechercher si les faits reprochés à un agent public ayant fait l'objet d'une sanction disciplinaire constituent des fautes de nature à justifier une sanction et si la sanction retenue est proportionnée à la gravité de ces fautes.

7. D'une part, en estimant que les faits reprochés au requérant quant à son comportement irrespectueux et agressif constituaient des fautes de nature à justifier une sanction, l'autorité investie du pouvoir disciplinaire ne les a pas inexactement qualifiés. D'autre part, il résulte de l'instruction, et notamment des craintes éprouvées par la hiérarchie du requérant du risque " d'actes violents " de M. C... à l'encontre de certains de ses collègues et de l'obligation de " protéger les personnes visées par ses attaques ", que l'administration aurait retenu la même sanction de déplacement d'office en se fondant sur les seuls motifs liés à ce comportement du requérant et au préjudice porté par ce comportement au bon fonctionnement du service. Enfin, eu égard à la nature et à la gravité du comportement irrespectueux et menaçant du requérant avec les autres agents du S.I.E.C. et sa hiérarchie, et aux conséquences de son comportement sur le bon fonctionnement du S.I.E.C et les conditions de travail des agents de celui-ci, qui ne permettent pas de maintenir cet agent dans ses fonctions au S.I.E.C., le recteur de l'académie de Paris n'a entaché d'aucune erreur d'appréciation sa décision en date du 15 juillet 2016 par laquelle il a infligé à M. C... la sanction de deuxième groupe de déplacement d'office.

8. Enfin, si M. C... soutient que l'administration aurait agi à son encontre pour masquer des infractions en matière de marchés publics, il n'assortit en tout état de cause pas ses allégations de précisions ou de justifications de nature à révéler un détournement de la procédure disciplinaire, la commission administrative paritaire académique compétente à l'égard des attachés d'administration siégeant en formation disciplinaire, dont l'impartialité n'est pas sérieusement mise en cause par le requérant, ayant au demeurant émis un avis favorable à la sanction à la majorité de " 7 voix pour et 1 abstention ".

9. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

D É C I D E :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... C... et au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse.

Copie en sera adressée au recteur de l'Académie de Paris.

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- Mme G..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 20 décembre 2019.

Le rapporteur,

L. G...

Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'éducation nationale et de la jeunesse en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA02430


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02430
Date de la décision : 20/12/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-03-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Motifs. Faits de nature à justifier une sanction.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Laurence NOTARIANNI
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : CABINET WANSANGA-ALLEGRET

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-12-20;18pa02430 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award